
Toulan est interprété par Jean Vinci
dans Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy
En 1761
Naissance de François Adrien Toulan (1761-1794) à Toulouse.
La place du Capitole Toulouse
Toits de Toulouse
En 1779
François Toulan exerce le métier de libraire à Toulouse.

Toulouse
La librairie de Pieter Meijer Warnars (1820) de Johannes Jelgerhuis Rienksz
En 1780
François Toulan, Méridional au cœur chaud, est marchand de musique à Paris.
On sait qu’il se marie mais on ne connaît ni la date de son mariage ni même le nom de son épouse qui sera mentionnée à la Restauration comme bénéficiaire d’une pension pour l’aide de François à la famille royale au Temple.
Le 5 octobre 1789
Des femmes du peuple venues de Paris marchent sur Versailles pour demander du pain.

La famille royale se replie dans le château…
Le 6 octobre 1789
Vers cinq heures du matin, les appartements privés sont envahis. La Reine s’échappe en jupon par une porte dérobée. Plus tard, Sa présence est réclamée par la foule. Elle va au-devant du peuple, courageuse, au mépris de Sa vie.

La famille royale est ramenée de force à Paris.
Elle s’installe aux Tuileries et un semblant de vie de Cour se met en place.

Les Tuileries
Le 20 juin 1791
Le Roi et sa famille fuient la Révolution. …

Le 21 juin 1791
Le Roi et la Reine sont arrêtés à Varennes.

Chez l’épicier Sauce à Varennes, par Prieur
Le 25 juin 1791
La famille royale rentre à Paris sous escorte.
Le Roi est suspendu.
En 1792
Toulan est chef de bureau dans l’administration des biens des émigrés.
Caricature raillant le roi de Prusse et les émigrés
Image de Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy
Le film de Jean Delannoy avec Michèle Morgan, Marie-Antoinette, Reine de France (1956), fait de François Toulan un garde des Tuileries qui est sensible au bien-être de la Reine.
En 1792
François Toulan est interprété par Jean Vinci dans Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy
Images de Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy
Le 20 juin 1792

Escalier monumental des Tuileries (avant sa destruction)
La foule envahit les Tuileries pour faire lever le veto.

Le dévouement de Madame Élisabeth, prise par la foule pour la Reine,
elle ne les détrompe pas pour donner à sa belle-sœur la possibilité de se réfugier et de sauver Sa vie.
Le Roi refuse.
Le 10 août 1792
Les Tuileries sont envahies par la foule. Toulan prend part à cet assaut. On craint pour la vie de la Reine. Le Roi décide de gagner l’Assemblée nationale. Il est accompagné par sa famille, Madame Élisabeth, la princesse de Lamballe, la marquise de Tourzel, ainsi que des ministres, dont Étienne de Joly, et quelques nobles restés fidèles.

Images du film Un peuple et son Roi
Le 10 août 1792, le dernier acte de Louis XVI, Roi des Français, est l’ordre donné aux Suisses « de déposer à l’instant leurs armes« .

La position de la Garde devient de plus en plus difficile à tenir, leurs munitions diminuant tandis que les pertes augmentent. La note du Roi est alors exécutée et l’on ordonne aux défenseurs de se désengager. Le Roi sacrifie les Suisses en leur ordonnant de rendre les armes en plein combat.

Image du film Un peuple et son Roi
Des 950 Gardes suisses présents aux Tuileries, environ 300 sont tués au combat ou massacrés en tentant de se rendre aux attaquants après avoir reçu l’ordre du Roi de rendre les armes en plein combat.

Image du film Un peuple et son Roi

Le Roi est suspendu de ses fonctions.
Le 13 août 1792
La famille royale est transférée au Temple après avoir été logée temporairement aux Feuillants dans des conditions difficiles. Quatre pièces du couvent leur avaient été assignées pendant trois jours.



La Tour du Temple
Mi août 1792
François Toulan est nommé membre de la Commune et il acquiert du galon auprès des institutions de la République. Au bout de plusieurs tours de garde au Temple, il est conquis par la simplicité de la famille royale. Prenant son courage à deux mains, il leur révèle ses sentiments par des murmures et des signes.
Toulan se fait remarquer en dénonçant certains commissaires qui font bombance à l’œil. Parmi eux, se trouve Jean Verdier (1735-1820), venu mettre ses comptes au clair avant de quitter définitivement la prison royale, qui est traité de pique-assiette et de parasite par ses anciens collègues. L’imprimeur et Journaliste Antoine Gorsas, un autre ex-élu, est lui aussi accusé de «se remplir la bedaine» aux frais de la République.
Cet entrisme «crypto-royaliste» est aussi facilité par l’attitude des commissaires de la Commune qui continuent pour la plupart à exercer leurs métiers respectifs en plus de leurs fonctions publiques. Fatigués, ils refusent d’aller au Temple «le vendredi ou samedi soir pour y passer le dimanche ; ce jour paraît trop précieux à des hommes occupés toute la semaine pour vouloir sacrifier le plaisir et le repos qu’il leur procure au soin de garder la famille royale».
Lepître, Toulan et Moelle sont au contraire toujours volontaires pour prendre un tour de garde supplémentaire, ce qui leur laissera le champ libre pour agir.
Le 3 septembre 1792
Massacre de la princesse de Lamballe.
Massacre de la princesse de Lamballe
Massacres dans les prisons…
Le 21 septembre 1792
Abolition de la royauté.
Repas de la Famille Royale au Temple dans le film de Jean Delannoy

Et en 1976 dans la série de Guy-André Lefranc

Reconstitution d’une chambre du Temple avec du mobilier provenant de chacune, au musée Carnavalet. Paris

Peu à peu la Famille Royale adopte un rythme de vie régulier :
6 h : lever du Roi. Prière. Le reste de la famille se lève un peu plus tard.
9 h : petit-déjeuner, assez copieux, du moins au début puis instruction des enfants
12 h : promenade sur le chemin de ronde
13 h : retour dans les appartements
14 h : déjeuner puis jeux du type échecs et broderie
16 h : sieste du Roi puis, de nouveau, instruction des enfants
20 h : dîner et coucher des enfants
21 h : dîner des adultes
Vers minuit : coucher

Image de Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy
![Louis XVI and his family in the Temple, after a painting by Edward Ward. 19th century.
[credit: AKG Images]](https://66.media.tumblr.com/5bfc6e6321ff2b11917c47e955dbac39/tumblr_nknwn76unx1qatfdco1_500.jpg)
Louis XVI et sa famille à la prison du Temple par Edward Ward
Commissaire au Temple, Toulan, qui est fervent républicain, devient même un partisan des souverains déchus. Cléry a du mal, dans un premier temps, à le croire dévoué à la monarchie.

Jean-Baptiste Cant Hanet dit Cléry par le peintre Henri-Pierre Danloux
« Mon père demanda qu’il (Cléry) revînt, les municipaux l’assurèrent qu’il ne reviendrait pas : cependant il fut de retour à minuit. Il demanda au Roi pardon de sa conduite passée, dont les manières de mon père, les exhortations de ma tante et les souffrances de mes parents le firent changer; il fut depuis très fidèle .»
Madame Royale

« Un jeune homme, nommé Toulan, que je croyais, à ses propos, un des plus grands ennemis de la famille royale, vint un jour près de moi, et me serrant la main :
« Je ne peux, me dit-il avec mystère, parler aujourd’hui à la Reine, à cause de mes camarades ; prévenez-la que la commission dont elle m’a chargé est faite; que, dans quelques jours, je serai de service, et qu’alors je lui apporterai la réponse.»
Etonné de l’entendre parler ainsi, et craignant qu’il ne me tendît un piège.
«Monsieur, lui dis-je, vous vous trompez, en vous adressant à moi pour de pareilles commissions.»
— « Non, je me trompe pas », répliqua-t-il, en me serrant la main avec plus de force, et il se retira.Je rendis compte à la Reine de cette conversation.
—Vous pouvez vous fier à Toulan, me répondit la Reine.»
Marie-Antoinette à Cléry
Véritable agent double, Toulan gagne le surnom de «Fidèle» , choisi par Madame Elisabeth, et œuvre pour la libération de la famille royale. Le valet de chambre Hüe, qui n’a pas renoncé à aider ses maîtres depuis son expulsion du Temple en septembre, a pour sa part celui de «Constant». Les deux hommes peuvent échanger quelques courts billets avec les captifs grâce à Turgy.

Madame Elisabeth
Le 21 septembre 1792
Abolition de la royauté.
Le 3 décembre 1792
Pétion (1756-1794) renforce la décision de faire juger Louis XVI par la Convention.
Le 6 décembre 1792
La Convention commence à se mêler de la garde de la famille royale et prend plusieurs décisions qui ont de lourdes conséquences pour le quotidien du Temple. Les députés se méfient des municipaux et exigent qu’ils passent un examen civique avant de prendre pour la première fois leur fonction. La Commune propose la séparation du Roi et de sa famille. La section des Gardes françaises vote même une motion incitant la Garde nationale à «tripler et même quadrupler tous les postes et la garde du Temple».
Le 9 décembre 1792
Le maître de pension, Jacques-François Lepître, proche de Manuel, en apparence furieusement révolutionnaire, est désigné pour son premier tour de garde. En 1814 il révélera avoir franchi les portes du Temple avec l’idée bien arrêtée de porter secours à «cette famille auguste, victimes des complots les plus affreux, privée de la liberté, exposée à tous les outrages.» Décrit comme «gros, petit, boiteux et laid», Lepître exagère en se mettant en scène comme un fidèle constamment à l’écoute du couple royal… mais à l’heure de la Restauration ce sera monnaie courante.
Le 10 décembre 1792
Au conseil général de la Commune, les débats font rage , on suggère de «réduire le ci-devant [roi] à un pot-au-feu et à une côtelette», et même de «le mettre au pain et à l’eau et de le renfermer dans un cachot». Toulan intervient pour calmer ses collègues et lui épargner pareil sort.
Le 11 décembre 1792
Louis XVI comparaît devant la Convention pour la première fois. Il est autorisé à choisir un avocat. Il demandera l’aide de Tronchet, de Monsieur de Sèze et de Target. Celui-ci refuse. Monsieur de Malesherbes (1721-1794) se porte volontaire.
Le 26 décembre 1792
Seconde comparution de Louis XVI devant la Convention.

Le 31 décembre 1792
Toulan transmet à Louis XVI les vœux de nouvel an du reste de la famille dont il est toujours séparé. Il continue à informer Marie-Antoinette de ce qui se dit dans Paris sur le procès, il paie des crieurs publics pour circuler autour du Temple et Lui transmet quelques journaux.
Malgré Son chagrin, la Reine refuse de désespérer :
« Elle ne croyait pas que les Français, que les rois étrangers puissent voir un attentat aussi atroce sans chercher à s’y opposer.»
Jacques-François Lepître, Quelques Souvenirs
En 1793
François Toulan devient membre de la Commune de Paris.
Le Temple dans Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy
Le 20 janvier 1793 au soir
Louis XVI dit adieu à sa famille. Il promet à la Reine de La revoir le lendemain matin mais il ne le fera pas.

François Dyrek et Geneviève Casile (1976)

Le 21 janvier 1793
Louis XVI est exécuté place de la Révolution.

Toulan transmet à Jarjayes ce message de la Reine :
«Votre billet m’a fait bien du bien. Je n avais aucun doute sur le Nivernais (il s’agit de Goguelat) mais j’étais au désespoir qu’on pût seulement en penser du mal. Ecoutez bien les idées qu’on vous proposera; examinez-les bien dans votre prudence. Pour nous, nous livrons avec une confiance entière. Mon dieu, que je serais heureuse et surtout de pouvoir vous compter au nombre de ceux qui peuvent nous être utiles! Vous verrez le nouveau personnage : son extérieur ne prévient pas , mais il est absolument nécessaire et il faut l’avoir. T… (Toulan) vous dira ce qu’il faut faire pour cela. Tâchez de vous le procurer et de finir avec lui avant qu’il revienne ici. Si vous ne le pouvez pas voyez M. de la Borde de ma part, si vous n’y trouvez pas de l’inconvénient. Vous savez qu’il a de l’argent à moi.»

Le 9 mars 1793
Toulan a l’audace de s’introduire dans la chambre du Roi qui a été mise sous scellés, il y dérobe son anneau de mariage et son cachet et parvient à les faire passer à Marie-Antoinette.
C’est grâce à Toulan que la Reine récupère les objets de Son mari confisqués avant son exécution.

Le 20 mars 1793
Après l’exécution du Roi, Marie-Antoinette demeure au Temple avec ses deux enfants et sa belle-sœur Élisabeth. Quelques fidèles tentent de les faire évader.

François-Augustin de Jarjayes (1745-1822)
Toulan aide monsieur de Jarjayes à entrer au Temple. C’est lui , avec Louis-François Turgy (1763-1823), garçon servant au Temple, qui apprend un code imaginé par Madame Elisabeth pour transmettre aux prisonniers les nouvelle de l’extérieur. Pour récompense de ses services, Marie-Antoinette lui offre une petite boîte en or qui sera utilisée contre lui.

Jane Seymour et Anne Letourneau dans Les Années Terribles (1989) de Richard Heffron

Toulan, muni d’un billet de la Reine, entre en rapport avec Jarjayes et lui soumet un plan hasardeux. Des habits d’officiers municipaux seront cachés dans la Tour, la Reine et Madame Élisabeth les revêtiront le jour où Toulan sera de garde avec son collègue Lepître, comme lui royaliste de cœur.
Un faux lampiste viendra allumer les réverbères, les enfants déguisés lui seront remis, ils passeront pour les siens.
La tentative est orchestrée par le comte de Jarjayes mais Jean Delannoy le remplace par … Fersen !
Tout paraît d’abord succéder.

Adroit, Toulan fait pénétrer au Temple Jarjayes qui, ayant parlé à la Reine, fournit les fonds nécessaires. On se procure des voitures et des passeports ; les fugitifs doivent gagner la Normandie puis l’Angleterre.
Toulan est interprété par Jean Vinci dans Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy
Les plans de Toulan et Jarjayes suscitent l’espoir de la Reine :
«T… m’a dit ce matin que vous aviez fini avec le comm… Combien un ami tel que vous m’est précieux !».

«Je serais bien aise que vous pussiez aussi faire quelque chose pour T… ; il se conduit trop bien avec nous pour ne pas le reconnaître.»

Une fois hors du Temple, Toulan préconisait la fuite vers la côte, pour cela une vaste berline dans laquelle prendraient place Marie-Antoinette et les siens ainsi que Jarjayes et Lepître tandis que Toulan à cheval les précéderait afin de préparer l’embarcation qui devait les conduire outre Manche. Mais Marie-Antoinette leur rappelle Varennes et il est préféré l’emploi de trois cabriolets.
Jacques-François Lepître (1764-1821) nous a laissé son témoignage où l’on peut lire ceci :
« Nos dispositions étaient telles qu’on ne pouvait se mettre à notre poursuite que cinq heures après notre départ. Nous avions tout calculé, d’abord on ne montait à la tour qu’à neuf heures du soir pour mettre le couvert et servir le souper. La reine eut demandé qu’on ne servit qu’à neuf heures et demie. Frapper à plusieurs reprises, s’étonner de ne pas voir la porte s’ouvrir ; interroger la sentinelle, qui relevée à neuf heures ignorait ce qui s’était passé ; descendre à la salle du Conseil, faire part aux autres membres de la surprise qu’on éprouve, remonter avec eux, frapper de nouveau, appeler les sentinelles précédentes, ne recueillir que des notions vagues ; envoyer chercher un serrurier pour ouvrir les portes, dont nous eussions laissé les clefs en dedans ; ne réussir qu’avec beaucoup de peine et de temps, l’une de ces portes étant de bois de chêne et couverte de gros clous, la seconde de fer et toutes deux ayant des serrures telles qu’il fallait les jeter en dedans ou faire au gros mur une entaille considérable ; visiter les appartements, les tourelles, secouer violemment Tison et sa femme sans réussir à les réveiller ; redescendre à la salle du Conseil ; dresser un procès verbal, le porter au Conseil de la Commune, qui s’il n’eut pas été séparé, aurait perdu encore du temps en discussions inutiles ; envoyer à la police et chez le maire, aux comités de la convention, pour les mesures à prendre ; tout ce retard nous donnait les moyens de hâter notre fuite. Nos passeports bien en règle, puisque, alors président du Comité, je les eusse arrangés moi-même, ne nous laissaient aucune inquiétude pour la route, tant que nous conservions la supériorité de notre marche ».
Lepître raconte ceci en 1817, sous la restauration. En 1793, il est infiniment plus indécis. Il a déjà touché de Jarjayes une avance de 200 000 francs, il met une telle lenteur à faire établir les passeports que l’on atteint la date du 13 mars. En effet après la trahison de Dumouriez un demi-état de siège est proclamé et la commission des passeports reçoit l’ordre de ne plus délivrer de laissez-passer ! Ces événements rendent désormais impossible l’entière évasion des princesses et principalement celle de Louis-Charles sur lequel on exerce plus de surveillance. La même impossibilité n’existe pas encore de faire évader Marie-Antoinette seule, c’est ce qui détermine Jarjayes à supplier celle-ci, dont les jours sont plus particulièrement menacés, de profiter des ressources qui lui restent encore pour échapper à Ses bourreaux. Toulan, dont le zèle et le courage sont au dessus de tout éloge est chargé par Jarjayes de mettre sous les yeux de la Reine tous les détails relatifs au nouveau projet. Pour cette fois, Toulan se chargerait seul de La faire sortir et de La conduire dans un lieu où elle aurait retrouvé Monsieur de Jarjayes, qui avait fait de son côté des dispositions telles que le salut de la souveraine paraissait assuré.(L’exposé de ces plans d’évasion est établi sur des pièces et des rapports authentiques dans lesquels se trouve également consignée la part qu’a eue Lepître au premier projet et dont il parle dans ses souvenirs).
Mais Marie-Antoinette refuse de laisser Ses enfants !
Toulan remet à Jarjayes le legs que Cléry a caché après la mort du Roi : son anneau de mariage, son cachet ainsi que des cheveux de la Reine et des enfants devront être transmis à Monsieur, qui est à Hamm, en Westphalie.
Ayant un être fidèle, sur lequel nous pouvons compter, j’en profite pour envoyer à mon frère et ami ce dépôt qui ne peut être confié qu’entre ses mains. Le porteur vous dira par quel miracle nous avons pu avoir ces précieux gages. Je me réserve de vous dire moi-même un jour, le nom de celui qui nous est si utile. L’impossibilité où nous avons été jusqu’à présent de pouvoir vous donner de nos nouvelles, et l’excès de nos malheurs nous fait sentir encore plus vivement, notre cruelle séparation puisse-t-elle n’être pas longue, je vous embrasse en attendant comme je vous aime, et vous savez que c’est de tout mon cœur. -M.A.
Marie-Antoinette

Norma Shearer (1938) est Marie-Antoinette dans le film de Van Dyke
Toulan est dénoncé a la Commune et le projet avorte. Marie-Antoinette pourrait s’enfuir seule, elle refuse, veut partager le sort de ses enfants :« Nous avons fait un beau rêve, voilà tout… »

Madame Élisabeth et la Reine dans la série, Marie-Antoinette (1976), de Guy-André Lefranc
Fin mars 1973
Toulan et Lepître sont convoqués pour un autre tour de garde et songe à mettre leur plan d’évasion à exécution. Mais leur collègue, le graveur Bodson, les accuse publiquement de se montrer trop froids avec les autres commissaires et de faire preuve de courtisanerie vis à vis de la Reine.
Les deux conspirateurs sont immédiatement «épurés» par le conseil général. Toulan n’est pas réélu après les nouvelles élections du printemps, tandis que Lepître est désormais considéré avec méfiance par ses collègues.
Le 20 avril 1793
Toulan est arrêté en même temps que plusieurs élus de la Commune, suite à une dénonciation de la femme Tison, qui désigne les authentiques conspirateurs, Toulan et Lepître, mais aussi Quelques messagers occasionnels comme Moelle, Bruneau et Vincent, et même le médecin Brunyer qui a soigné Marie-Thérèse.
Hébert et plusieurs collègues perquisitionnent le Temple jusqu’à quatre heures du matin.
Toulan parvient à s’enfuir à Toulouse, puis à Bordeaux où il exerce sous un faux nom la profession d’écrivain public.
Toulouse
Bordeaux

Au début de l’été 1793
Les prisonniers du Temple assistent à la déchéance de l’épouse Tison qui sombre peu à peu dans la démence. Marie-Thérèse la croit victime du remords d’avoir dénoncé Toulan et tant nui à ses souverains légitimes. Femme simple, séparée de sa fille et tout aussi prisonnière que ses détenus, elle souffre comme eux de l’enfermement. Elle comprend aussi que dénoncer les commissaires du Temple à tort et à travers ne peut que lui nuire : ceux-ci, le plus souvent rapidement innocentés, reviennent prendre leur service et la foudroient du regard. En revanche, elle doit se reprocher la mort de ceux qui ne reviennent pas …
Elle se met bientôt à parler toute seule, mais dans sa folie, elle exprime à voix haute certaines craintes secrètes de Marie-Antoinette et Madame Elisabeth : «Elle ne parlait que de ses fautes et de la ruine de sa famille, de prison et d’échafauds.» rapportera Marie-Thérèse. Madame Tison finit par se traîner aux pieds de la Reine et Lui demandant pardon : pour les commissaires de la Commune, on ne peut imaginer pire preuve de folie !
Dans la nuit du 1er au 2 août 1793
Marie-Antoinette est transférée de nuit à la Conciergerie. Elle y est traitée avec une certaine bienveillance par une partie du personnel de la prison, dont surtout Rosalie Lamorlière (1768-1848).


La Veuve Capet par Jean-Louis Prieur

Le 4 octobre 1793
Marie-Antoinette est entendue par Fouquier-Tinville et les représentants du tribunal révolutionnaire en vue de Son prochain procès …
« Le quinzième jour du premier mois de l’an second de la République française une et indivisible, Nous, maire, procureur syndic et membres de la commune de Paris nommés par le conseil général de ladite commune pour prendre des renseignements sur différents faits qui se sont passés au Temple, et recevoir les déclarations à cet égard, nous sommes rendus au Temple et arrivés dans ladite Tour, et nous étant présentés au Conseil du Temple, sommes montés à l’appartement du premier occupé par Louis Charles Capet pour entendre ses déclarations au sujet des propos et des événements dont il peut avoir connaissance. Il nous a déclaré que l’hiver dernier pendant qu’il habitait l’appartement de ses mère, tante et sœur, un particulier, nommé Dangé, était de garde auprès d’eux en qualité de commissaire du conseil ; un jour qu’il l’accompagnait à la promenade sur la plate-forme de la Tour, il le prit dans ses bras, l’embrassa et lui dit : « Je voudrais bien vous voir à la place de votre père. »
Nous a déclaré pareillement qu’un autre particulier nommé Toulan, étant aussi de garde à la Tour à la même époque, lesdites femmes l’enfermèrent, lui déclarant, avec sa sœur dans une des tourelles pendant une heure et demie, un peu avant qu’on allumât la chandelle, et que pendant ce temps il s’est entretenu avec lesdites femmes, et qu’il n’entendit pas le sujet de leur conversation.Que dans une autre circonstance il entendit dire par ledit Toulan à sa mère et à sa tante que tous les soirs il enverrait aux environs du Temple un colporteur à dix heures et demie du soir pour lui faire crier toutes les nouvelles qui pourraient les intéresser; que par suite de cette promesse il s’aperçut que lesdites femmes un soir, ne se couchèrent qu’à onze heures passées et montrèrent de l’humeur de n’avoir point entendu les cris accoutumés dudit colporteur.
Il a déclaré encore que quatre particuliers nommés Lepitre, Bruneau, Toulan et Vincent, pendant la durée de leur service dans les appartements
avaient coutume d’approcher desdites femmes et de tenir des conversations avec elles à voix basse.Déclare en outre qu’ayant été surpris plusieurs fois dans son lit par Simon et sa femme, chargés de veiller sur lui par la Commune, à commettre sur
lui des indécences nuisibles à sa santé, il leur avoua qu’il avait été instruit dans ces habitudes pernicieuses par sa mère et sa tante, et que différentes fois elles s’étaient amusées à lui voir répéter ces pratiques devant elles, et que bien souvent cela avait lieu lorsqu’elles le faisaient coucher entre elles.Que de la manière que l’enfant s’en explique, il nous a fait entendre qu’une fois sa mère le fit approcher d’elle, qu’il en résultat une copulation et que il en résulta un gonflement à un de ses testicules, connu de la citoyenne Simon, pour lequel il porte encore un bandage et que sa mère lui a recommandé de n’en jamais en parler, que cet acte a été répété plusieurs fois depuis.
Il a ajouté que cinq autres particuliers nommés Moelle, Lebœuf, Beugnot, Michonis et Jobert, conversaient avec plus de familiarité que les autres commissaires du Conseil avec sa mère et sa tante ; que Pétion, Manuel, Bailly et Lafayette s’étant comportés très mystérieusement aux Tuileries avec les femmes, il estimait qu’il existait une correspondance directe avec les quatre hommes et les commissaires du Temple depuis la détention de ces femmes au Temple, que dans l’intervalle de ces conférences on l’éloignait.
Il nous a déclaré qu’il n’avait rien de plus à nous faire connaître.
Le citoyen et la citoyenne Simon nous déclare avoir appris ces faits de la bouche de l’enfant qui les leur a répété plusieurs fois et qu’il les pressait
souvent de le mettre à portée de nous en faire la déclaration.Après avoir reçu la présente déclaration, y avons posé notre signature conjointement avec le citoyen Hébert, substitut du procureur-syndic de la Commune qui est survenu.
A Paris, dans la Tour du Temple les jour et an que dessus.
LOUIS-CHARLES CAPET.
PACHE, maire; CHAUMETTE, procureur-syndic ; HÉBERT, substitut;
CAMPARDON, Emile, Marie-Antoinette à la Conciergerie (du 1er août au 16 octobre 1793) : pièces originales conservées aux Archives de l’Empire, suivies de notes historiques et du procès imprimé de la reine, Paris, 1863, p.66-71.
FRIRY, commissaire du conseil général; SEGUY, commissaire de service au Temple ; HEUSSÉE, administrateur de police ; SIMON ; D. E. LAURENT, commissaire du conseil général.
Les 14 et 15 octobre 1793
La Reine comparaît devant le tribunal révolutionnaire.
Le 16 octobre 1793
Exécution de Marie-Antoinette.

Le 18 novembre 1793
Le tribunal révolutionnaire passe en jugement les protagonistes de l’affaire de l’Œillet. Devant Fouquier-Tinville, comparaissent Lepître, Jobert et Dangé qui redoutent de voir paraître Tison à la barre. Le servile dénonciateur est écarté comme témoin et l’accusation ne peut fournir aucune pièce décisive. Après deux jours de procès, tous les prévenus sont acquittés, à l’exception de Jean-Baptiste Michonis (1735-1794) qui a succédé à Toulan dans le projet de sauver la famille royale avec le chevalier de Rougeville. Michonis est alors jeté en prison.
Image de L’Autrichienne (1990) de Pierre Granier-Deferre
Le 10 mai 1794
Madame Elisabeth est guillotinée à son tour.

Ayant été découvert, malgré sa clandestinité, Toulan est reconduit à Paris.
On l’emprisonne à la Conciergerie .

Il est jugé et convaincu de trahison, il est condamné à mort par le tribunal révolutionnaire.
Fouquier-Tinville est interprété par Daniel Mesguich dans L’Autrichienne (1990)
Le 17 juin 1794
François Toulan est guillotiné en même temps que Michonis, barrière du Trône.
Il est inhumé au cimetière de Picpus.
Sous la Restauration
La duchesse d’Angoulême accorde une pension à la veuve de François Toulan.

La Charité sous les traits de Marie-Thérèse d’Angoulême
Sources :
- Jean Delannoy, Marie-Antoinette, Reine de France (1956), film avec Michèle Morgan
- Catriona Seth Marie-Antoinette Anthologie (2006) ; chez Robert Laffont
- Charles-Eloi Vial, La Famille Royale au Temple – Le remords de la Révolution 1792-1795 (2018) ; chez Perrin