Sources :
Pour Jean-Claude Pilayrou, Louvel serait Louis XVII
Le 17 août 1833
Âgée de soixante-dix ans, Madame Agathe Mottet Rambaud, fait la déposition suivante :
« Dans le cas où je viendrais à mourir avant la reconnaissance du Prince, fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, je crois devoir affirmer ici par serment, devant Dieu et devant les hommes, que j’ai retrouvé, le 17 août 1833, Monseigneur duc de Normandie, auquel j’eus l’honneur d’être attachée depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792, et comme il était de mon devoir d’en donner connaissance à S. A. R. Madame la duchesse d’Angoulême, je lui écrivis dans le courant de la même année. Je joins ici la copie de ma lettre. Les remarques que j’avais faites dans son enfance sur sa personne ne pouvaient me laisser aucun doute sur son identité partout où je l’eusse retrouvé. Le Prince avait, dans son enfance, le col court et ridé d’une manière extraordinaire. J’avais toujours dit que si jamais je le retrouvais, ce serait un indice irrécusable pour moi. D’après son embonpoint, son col ayant pris une forte dimension est resté tel qu’il était, aussi flexible. Sa tête était forte, son front large et découvert, ses yeux bleus, ses sourcils arqués, ses cheveux d’un blond cendré, bouclant naturellement. Il avait la même bouche que la Reine et portait une petite fossette au menton. Sa poitrine était élevée; j’y ai reconnu plusieurs signes alors très-peu saillants, et un particulièrement au sein droit. La taille d’alors était très cambrée et sa démarche remarquable. C’est enfin identiquement le même personnage que j’ai revu, à l’âge près. Le prince fut inoculé au château de Saint-Cloud, à l’âge de deux ans et quatre mois, en présence de la Reine, par le docteur Joubertou, inoculateur des Enfants de France; et de la Faculté, les docteurs Brunier et Loustonneau. L’inoculation eut lieu pendant son sommeil, entre dix et onze heures du soir, pour prévenir une irritation qui aurait pu donner à l’enfant des convulsions, ce qu’on craignait tous que ce sont les mêmes marques que j’ai retrouvées, auxquelles on donna là forme d’un triangle. Enfin j’avais conservé, comme une chose d’un grand prix pour moi, un habit bleu que le Prince n’avait porté qu’une fois. Je le lui présentai en lui disant, pour voir s’il se tromperait, qu’il l’avait porté à Paris. «Non, Madame; je ne l’ai porté qu’à Versailles, à telle époque. » Nous avons fait ensemble des échanges de souvenirs qui, seuls, auraient été pour moi une preuve irrécusable que le Prince actuel est véritablement ce qu’il dit être : l’orphelin du Temple. »
Agathe Mottet – Veuve de Rambaud, attachée au service du Dauphin, duc de Normandie, depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792.
En 1837
« Je déclare ici et sur mon honneur et devant Dieu que le fils de Louis XVI est mort dans mes bras dans la tour du Temple. … Toute ma vie j’ai dit la vérité, ce n’est pas quand j’atteindrai [la fin] que je la trahirai.»
Etienne de Lasne, dans une lettre à A. Beauchesne
Au début de 1841
Sous la signature de Gozzoli, rédacteur-gérant de La Voix d’un proscrit, Laprade (qui avait été affublé du titre de « président du conseil de l’Eglise catholique évangélique« ) et cinq autres compères, publièrent un désaveu cinglant de leur adhésion à la cause naundorffiste. (Nous savons par l’abbé Laprade que Morel de Saint-Didier lui-même, sans signer le document, en partageait l’esprit.) Ils y rapportent comment, ayant enquêté sur le passé du bonhomme, ils ont été contraint de conclure à la supercherie. Ils mettent en cause la réalité des apparitions, la moralité personnelle de leur ancien «roi», soulignent les contradictions de la doctrine – bref, ils sapent l’édifice qui les a portés pendant tant d’années.
Le 22 juin 1841
L’abbé Laprade écrivait une lettre sévère, à la mesure de sa tristesse et de ses remords :
« Pauvre sire de Normandie qu’as-tu fait de ta baguette, que sont devenus tes talismans imaginaires?(…) quand je songe à mes dispositions d’autrefois et à mes sentiments d’aujourd’hui, je suis si honteux et humilié de mon passé que je voudrais être trois fois taupe pour ne plus le voir et trois mille fois lièvre pour ne plus le rappeler. Quoi! des hommes généreux et intelligents avaient pu planter un drapeau près de l’hôtel de Camberwell? Ils avaient pu faire à cet homme l’honneur de le regarder comme pouvant être de quelque poids dans la balance des destinées humaines…ma foi, ma foi; convenons-en, nous étions en démence. Aussi, dès que j’ai eu aperçu le bout des oreilles de notre Guillot je l’ai fui à toutes jambes et je cours encore..»
Le 10 août 1845
« Nous soussignés, docteurs-médecins en fonctions à Delft, Jean Soutendam et Jean-Gérard Kloppert, autrefois Officier de Santé, et comme tel adjoint comme médecin consultant par feu Son Excellence le ministre List, déclarons avoir traité en 1845 celui qui se nommait Charles-Louis de Bourbon duc de Normandie.
« Beaucoup d’intérêt fut témoigné à l’auguste malade. Des bulletins furent envoyés journellement sur l’état de sa santé au ministre susdit, qui de temps en temps vint en personne prendre des informations. […] Les pensées du malade s’arrêtaient principalement sur feu son malheureux père, Louis XVI, sur le spectacle effroyable de la guillotine ; ou il joignait les mains pour prier et demander, avec des paroles entrecoupées, de bientôt rejoindre au ciel son royal père. Presque jusqu’au dernier soupir ce fut ainsi. Et Charles-Louis de Bourbon mourut en notre présence le 10 août 1845. »
On a retrouvé sur le corps du dénommé Naundorff les sept spécificités corporelles qu’auraient eues Louis XVII et qui étaient connues et témoignées selon certains, et également archivées dans les rapports médicaux (Archives de Versailles), sans que les naundorffistes ne montrent cette pièce en question.
Cette pièce importante se trouve à Deft : Archives Notariales de Deft et copie conforme au Archives Bourgmestrales – volume 46, folio 35, verso 3 à 7.
Voici le procès verbal :
« Aujourd’hui 12 août 1845, le soir à 6 heures et à la requête de Charles Edmond de Bourbon, aussi connu sous le nom de Naundorff, demeurant à Deft en la rue dite de Voostrat, section 5, n° 85, accompagné de M. Cornélis Théodorus Van Meurs, major d l’Artillerie, chevalier du Lion néerlandais, du Maître Jacobus Van Buren, avocat et juge demeurant à…et connu de moi, notaire.. »
« Moi, notaire, Simon Adrianus Sholten, notaire de l’arrondissement de la Haye, résidant à Deft, assisté de Messieurs Carel Heyne den Back, employé au secrétariat de la Vielle et de Adriaan Mardus Schagen Van Leewen, employé à mon étude, connus de moi, notaire, je me suis rendu à une maison située à l’Oude-Deft, section2, n°62 à Deft où le requérant m’a montré dans une des chambres un cadavre qu’il déclara à moi, notaire, être celui de Charles Louis, Duc de Normandie ( Louis dix-sept), ayant été connu sous le nom de Charles Guillaume Naundoff, né au Château de Versailles en France, le 27 mars 1785 … »« Le requérant, Charles Edmond de Bourbon, fait cette déclaration en présence des ci-dessus nommés Van Meurs et Van Buren qui déclarent par ceci reconnaître le cadavre montré pour celui du père du requérant. »« Ainsi furent présents : M. Jean Sontendam, docteur-médecin, demeurant à Deft, Louis Snabilié, docteur-médecin, premier officier de Santé de la 2ème classe, chevalier de l’Ordre Militaire de Guillaume, Joannes Gerdus Kloppert, docteur médecin et accoucheur, officier de santé de 2ème classe, demeurant à Deft, connus de moi, notaire lesquels Messieurs déclarèrent reconnaître le cadavre montré pour celui de la personne qu’ils on traitée médicalement en sa dernière maladie. »
« Et le requérant a prié les médecins susnommés d’expliquer leurs expériences des signes extérieurs qui caractérisaient le cadavre et après avoir examiné à cette fin le cadavre prescrit, les nommés médecins ont noté les signes suivants :.. »
Sont énumérées les sept spécificités corporelles qu’avaient Louis XVII :
1. Le naevius maternus à la cuise ;
2. L’excroissance du sein droit ;
3. Le cou très ridé ;
4. Disposition des deux incisives sortantes « en lièvre » au milieu de la denture inférieure ;
5. Forme du front large et fort, fuyant et s’évasant ;
6. Disposition des yeux bleus avec leurs arcades sourcilières arquées avec un écartement si précis « qu’il comportait entre eux une distance égale à la longueur d’un œil » ;
7. Anomalie de la forme du lobe des oreilles, notamment de l’oreille droite (nettement visible sur la photo représentant Naundorff su son lit de mort et identique à celle d’un portrait de Louis XVII enfant).
Ce constat se termine ainsi :
« Le requérant m’a prié, moi, notaire, de donner acte en minute de tout ce qui précède et qui est ci-dessus mentionné et, après lecture faite au requérant, aux témoins assistants, aux médecins sus-nommés et aux témoins ici-présents : Carel Heyne Van Back et Adriaan Marius Schagen Van Leeuwen, tous deux ci-dessus nommés, toutes ces personnes ont signé. »
Signé :Charles Edmond de Bourbon, Van Meurs, Van Buren, Jean Soutendam, Dr Snabilié, Dr Kloppert, C. Heyne den Back, A.M. Scagen Van Leewen, S.A ?. Scholten, notaire. »
Le receveur : signé : V.D. Mandèle « Pour signé conforme : signé SA Scholten, notaire »
Le cas Richemond
Claude Perrin naquit à Lagnieu (Ain) le 7 septembre 1786. Il est bossu, ayant une épaule plus haute que l’autre. C’est d’ailleurs lui-même qui le précise lorsqu’il doit se défendre devant la Justice de ses supercheries. Il est cependant soldat et ceci lui donne le goût de la tenue militaire qu’il arbore fièrement. Il parle de lui à la troisième personne, ce qui démontre un dédoublement de la personnalité ou une haute opinion de soi, les deux possibilités ne s’excluant l’une l’autre.
On ne sait d’où lui vient l’idée du nom qu’il adopte (« Richemond »), du titre qu’il s’accorde (« baron ») ni, enfin, de l’idée de jouer le rôle d’un faux Dauphin. Il est vrai que la rumeur de l’évasion de Louis XVII battait son plein dans les campagnes de France et Claude Perrin, presque du même âge que Louis XVII, à un an près, doté de cheveux châtain clair, entrevoit peut-être un autre rôle à tenir sur la scène de la vie que celui auquel le destin le prédispose. En 1831, il écrit et publie lui-même un livre : « Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI », puis en 1846 il publie «Mémoires d’un contemporain », livre qui contredit le premier.
Dans le premier récit (« Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI »), le faux Dauphin Richemond n’indique ni date, ni nom, ni désignation précise d’aucun lieu susceptible de décrire les situations vécues par le vrai Roi ; il ne sait même pas quand, à quelle date et comment eut lieu l’évasion du Temple ; ses propos sont contradictoires mais, apparemment, cela et ne le gênait pas pour persévérer dans ses mensonges. Ainsi désavoua-t-il son premier livre : par exemple, il supprime l’épisode dans lequel il vécut chez « les Sauvages ». ; il avait dit qu’il avait passé « plus de six ans, tout seul, nu comme eux, le corps peint, etc. Ces Sauvages s’appelaient les Mamelucks. ». Il prétend, de plus, avoir eu la petite vérole dans la Tour du Temple ; or Louis XVII avait été inoculé et n’eut jamais cette maladie.
« Richemond » fut reconnu par des personnes qualifiées : madame Bequet, qui avait été au service de Marie-Antoinette jusqu’au 10 août 1792; madame Fillette, qui avait été fille de garde-robe du Dauphin ; madame de Rambaud, berceuse du Dauphin… Ce sont là, à l’évidence, les déclarations de Perrin qui, en réalité, ne reçut jamais un témoignage de reconnaissance réelle, écrit, daté et signé sous serment et déposé devant une Instance officielle quelconque (Tribunal, Police, Notaire..).
Il raconte dans « Mémoires d’un contemporain » que trois ans auparavant, en 1843, il rencontra madame de Rambaud, que celle-ci le reconnut bien évidemment en tant que Louis XVII mais comme elle avait auparavant reconnu aussi en Naundorff le Roi, qu’elle aurait décidé de « s’en remettre au Ciel pour faire un choix » (ibidem – page 370). Il est patent que ces propos sortirent du cerveau déséquilibré de Perrin et non de la bouche de Madame de Rambaud. Il précise qu’il « n’a pas revu cette dame depuis ce jour », ce qui est étrange car cette reconnaissance était très importante pour Madame de Rambaud ; aurait-elle évité de revoir celui qu’elle avait chéri ?
La petite fille de de madame de Rambaud, dans une lettre datée du 26 janvier 1884 et adressée l’Abbé Laurent (curé de la paroisse de Sainte Marguerite sur Duclair), écrivit :
« Je m’empresse de satisfaire votre demande. Madame de Rambaud, ma grand-mère, a, en effet, reconnu Louis XVII dans la personne du prétendant Naundorff et n’en a reconnu d’autres. Richemont, il est vrai, s’est fait présenter à elle ; mais à ma connaissance il n’en est rien résulté pour ce personnage de cette entrevue….son frère (le frère – Charles- de son beau-père, Casimir Verger) a connu M. de Joly, que j’ai vu moi-même chez ma grand-mère et qui, comme elle, a attesté ses convictions…Signé L. Verger, née de Rambaud »
Madame de Rambaud vivra encore dix années après la supposée rencontre avec « Richemond » ; elle meurt le 18 octobre 1843 en n’ayant jamais renié la reconnaissance en Naundorff le Roi qu’elle avait élevé pendant sept années. La petite-fille de Madame de Rambaud, Ernestine de Rambaud, dans une lettre qu’elle écrivit en juin 1849 affirma la fidélité de sa grand-mère à cette reconnaissance capitale : « Encore aujourd’hui elle (Madame de Rambaud) ne doute pas de son identité (Louis XVII=Naundorff)».
Comme Hergavault, Richemond sait séduire et comme de très nombreuses personnes espéraient retrouver Louis XVII, elles acceptèrent de le rencontrer mais jamais elles ne le reconnurent vraiment ; une seule rencontre et aucune reconnaissance. Lors du procès de Perrin, la Cour ne retint que les dépositions écrites de Mesdames Bequet et Fillette (respectivement le 20 décembre 1842 et le 15 juillet 1844) dans lesquelles elles déclarent seulement avoir rencontré « Richemond » une seule fois, sans préciser une reconnaissance quelconque.
Claude Perrin meurt à Gleize (Rhône) le 10 août 1853, huit ans jour pour jour après Naundorff…
Perrin/Richemond, Hergavault, Bruneau, Williams, Mévès… tous ces « faux Dauphins » avaient des yeux marrons et seul, un « faux Dauphin » avait les yeux bleus : « Naundorff ». Louis XVII avait les yeux bleus…
En 1943
André Castelot soumet au Docteur Locard, directeur du laboratoire de Police Technique de Lyon, une boucle des cheveux du «Dauphin», propriété de l’abbé Ruiz, jointe à une mèche de Naundorff, qui lui avait été remise par le baron de Genièbre. Le but était de chercher si les cheveux correspondent ou non. Selon les naundorffistes, la confrontation, pratiquée d’après des microphotographies, donnerait des résultats époustouflants : les deux échantillons comporterait la même excentration du canal médullaire, un caractère jugé très rare par l’expert lyonnais. L’identité d’origine des deux mèches de cheveux semble irrécusable : pour les partisans de Naundorff, comment croire que cette excentration, si exceptionnelle, est due à la seule intervention du hasard?
En 1947
Alain Decaux (1925-2016) publie son premier livre, Louis XVII retrouvé, et soutient la thèse survivantiste _ ou naundorffiste_ qui perd par la suite tout crédit chez les historiens. Le futur ministre se ravisera d’ailleurs de cette conclusion de jeunesse.
En septembre 1950
Le cercueil de Naundorff est ouvert à Delft, sous la conduite du Docteur Hulst, médecin expert près les tribunaux hollandais. Castelot, pour s’assurer des conclusions de la première analyse, prie ce dernier d’envoyer à Locard une mèche provenant directement du squelette. Il fait bien. On procède à une seconde expertise.
Le 4 mai 1951
La sentence de la trichoscopie tombe, terrible pour le camp survivantiste. Locard écrit dans son rapport :
« Ces cheveux, d’origine indiscutée, ne présentent pas l’excentrement caractéristique. Ainsi donc les cheveux de Naundorff (…) ne sont pas identiques à ceux de Louis XVII». Le Dr Locard, qui avait entre-temps reçu, par le biais du marquis de Tinguy, d’autres cheveux provenant de Louis XVII qu’il a également analysés, ajoute qu’il semblait établi «que le Dauphin présentait une anomalie capillaire caractéristique» non retrouvée chez Naundorff. Les cheveux n’appartenaient pas à la même personne. La «preuve scientifique», qui, c’est le cas de le dire, n’avait tenu qu’à un cheveu, tombait à l’eau.»
Le spécialiste lyonnais confiera plus tard à Castelot que les deux premières mèches étaient si semblables, qu’il était fort possible que toutes deux aient été prises sur le crâne de Louis XVII.
En 1975
La relique du cœur Pelletan, récupérée par de la famille lointaine de Louis XVII, finit par être donnée à la basilique de Saint-Denis par la princesse Massimo.
En 1996
Après cinq ans d’enquêtes, Paul-Éric Blanrue a conclu à l’imposture du dénommé Naundorff (Le mystère du Temple, la vraie mort de Louis XVII, Claire Vigne éditrice, 1996, p. 229-287) et à la réalité de la mort du petit Roi à la date mentionnée par l’état civil. Il a repris cette thèse dans la préface des Souvenirs de la duchesse d’Angoulême (Communication et Tradition, 1997) dont il a établi l’édition critique, ainsi que dans une dizaine d’articles. Ni Alain Decaux, ni André Castelot, ni personne, n’y a répondu.
En 1998
Des analyses sont menées par l’Université de Louvain et le CHU de Nantes à partir de cheveux et de fragments d’humérus de Naundorff et de cheveux des descendants des sœurs de Marie-Antoinette. Conclusion : les restes de Naundorff ne sont pas ceux du dauphin Louis XVII.
En 1999-2000
L’historien – journaliste Philippe Delorme contacte la noblesse française afin que le cœur du petit décédé le 8 juin 1795 soit analysé avec la méthode ADN. Le résultat est que le cœur examiné était celui d’un parent de Marie-Antoinette, donc en principe de Louis XVII.
Monsieur Delorme a officiellement mis un terme à cette énigme; mais certains avancent que le cœur est celui du frère de Louis XVII, décédé en 1789. Le cœur embaumé de cet enfant a disparu sous la Restauration. Une bataille acharnée se déroule depuis entre Mr Delorme et les partisans de l’autre thèse. Mais une médecin-légiste a affirmé au cours d’une émission diffusée en janvier 2007 qu’elle serait bien en peine de faire la différence entre un cœur embaumé (frère de Louis XVII) et un cœur non embaumé (cœur du décédé le 8 juin 1795).
Monsieur Delorme devait rechercher le cœur du frère ainé de Louis XVII. Il n’y a pas eu de suite : la tombe de Louis-Joseph a, en effet, été ouverte et vidée le 16 octobre 1793 !
En 2004
De nouveaux prélèvements sont effectués sur le squelette de Naundorff. On procède à des analyses en Hollande et en Autriche, mais la famille dite de Bourbon n’a pas fait connaître les résultats.
Ce semble éloquent …
Le 8 juin 2004
Pour le professeur Jean Tulard, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, appelé par le ministre de la Culture à donner son avis sur le dépôt du cœur de Louis « XVII », l’analyse de l’ADN du cœur, conjuguée avec l’enquête menée sur son origine et les péripéties de son histoire, est suffisante pour attester de la mort du prince au Temple.
Sources :
Interrogatoire de Louis-Charles en vue d’obtenir des pièces à charge contre sa mère. Sa sœur, qui ne le voit plus, est confrontée à lui et dit :
« Il a grossi sans prendre de croissance».
« Le quinzième jour du premier mois de l’an second de la République française une et indivisible, Nous, maire, procureur syndic et membres de la commune de Paris nommés par le conseil général de ladite commune pour prendre des renseignements sur différents faits qui se sont passés au Temple, et recevoir les déclarations à cet égard, nous sommes rendus au Temple et arrivés dans ladite Tour, et nous étant présentés au Conseil du Temple, sommes montés à l’appartement du premier occupé par Louis Charles Capet pour entendre ses déclarations au sujet des propos et des événements dont il peut avoir connaissance. Il nous a déclaré que l’hiver dernier pendant qu’il habitait l’appartement de ses mère, tante et sœur, un particulier, nommé Dangé, était de garde auprès d’eux en qualité de commissaire du conseil ; un jour qu’il l’accompagnait à la promenade sur la plate-forme de la Tour, il le prit dans ses bras, l’embrassa et lui dit : « Je voudrais bien vous voir à la place de votre père. »
Nous a déclaré pareillement qu’un autre particulier nommé Toulan, étant aussi de garde à la Tour à la même époque, lesdites femmes l’enfermèrent, lui déclarant, avec sa sœur dans une des tourelles pendant une heure et demie, un peu avant qu’on allumât la chandelle, et que pendant ce temps il s’est entretenu avec lesdites femmes, et qu’il n’entendit pas le sujet de leur conversation.
Que dans une autre circonstance il entendit dire par ledit Toulan à sa mère et à sa tante que tous les soirs il enverrait aux environs du Temple un
colporteur à dix heures et demie du soir pour lui faire crier toutes les nouvelles qui pourraient les intéresser; que par suite de cette promesse il s’aperçut que lesdites femmes un soir, ne se couchèrent qu’à onze heures passées et montrèrent de l’humeur de n’avoir point entendu les cris accoutumés dudit colporteur.
Il a déclaré encore que quatre particuliers nommés Lepitre, Bruneau, Toulan et Vincent, pendant la durée de leur service dans les appartements
avaient coutume d’approcher desdites femmes et de tenir des conversations avec elles à voix basse.
Déclare en outre qu’ayant été surpris plusieurs fois dans son lit par Simon et sa femme, chargés de veiller sur lui par la Commune, à commettre sur
lui des indécences nuisibles à sa santé, il leur avoua qu’il avait été instruit dans ces habitudes pernicieuses par sa mère et sa tante, et que différentes fois elles s’étaient amusées à lui voir répéter ces pratiques devant elles, et que bien souvent cela avait lieu lorsqu’elles le faisaient coucher entre elles.
Que de la manière que l’enfant s’en explique, il nous a fait entendre qu’une fois sa mère le fit approcher d’elle, qu’il en résultat une copulation et que il en résulta un gonflement à un de ses testicules, connu de la citoyenne Simon, pour lequel il porte encore un bandage et que sa mère lui a recommandé de n’en jamais en parler, que cet acte a été répété plusieurs fois depuis.
Il a ajouté que cinq autres particuliers nommés Moelle, Lebœuf, Beugnot, Michonis et Jobert, conversaient avec plus de familiarité que les autres commissaires du Conseil avec sa mère et sa tante ; que Pétion, Manuel, Bailly et Lafayette s’étant comportés très mystérieusement aux Tuileries avec les femmes, il estimait qu’il existait une correspondance directe avec les quatre hommes et les commissaires du Temple depuis la détention de ces femmes au Temple, que dans l’intervalle de ces conférences on l’éloignait.
Il nous a déclaré qu’il n’avait rien de plus à nous faire connaître.
Le citoyen et la citoyenne Simon nous déclare avoir appris ces faits de la bouche de l’enfant qui les leur a répété plusieurs fois et qu’il les pressait
souvent de le mettre à portée de nous en faire la déclaration.
Après avoir reçu la présente déclaration, y avons posé notre signature conjointement avec le citoyen Hébert, substitut du procureur-syndic de la Commune qui est survenu.
A Paris, dans la Tour du Temple les jour et an que dessus.»
LOUIS-CHARLES CAPET.
PACHE, maire; CHAUMETTE, procureur-syndic ; HÉBERT, substitut;
FRIRY, commissaire du conseil général; SEGUY, commissaire de service au Temple ; HEUSSÉE, administrateur de police ; SIMON ; D. E. LAURENT, commissaire du conseil général.
CAMPARDON, Emile, Marie-Antoinette à la Conciergerie (du 1er août au 16 octobre 1793) : pièces originales conservées aux Archives de l’Empire, suivies de notes historiques et du procès imprimé de la reine, Paris, 1863, p.66-71.
Le 14 octobre 1793
Hébert lance l’accusation d’inceste qui vaut à la Reine une réplique mémorable :
« J’en appelle à toutes les mères.»
Et l’ombre pâle dit à Dieu dans le ciel :
« Je suis orphelin et pas roi du tout ;
Hier, j’étais un prisonnier fatigué,
Les meurtriers de mon père ont nourri mon âme de fiel.
Pas moi, Seigneur, le nom royal convient.
La nuit dernière, je me suis endormi dans le dungeon dear
Mais ensuite j’ai vu ma mère dans mes rêves,
Dis, dois-je la trouver ici ?
extrait de Le Roi Louis XVII, une ode de Victor Hugo
Le 16 octobre 1793
Marie-Antoinette est exécutée.
Simon ne doute pas, quant à lui, que le roi ne soit infecté du mal vénérien, quoique, depuis la mort de la reine, on ne lui ait plus présenté de prostituées. Mais il croit que ce que l’on fit à cette époque pour le faire déposer contre sa mère, et prouver par l’état de santé la vérité des dépositions, a suffi pour le corrompre et le gangrener. Il prétend donc très décidément qu’il a du mal et qu’on ne fait rien pour l’en guérir.
Ces derniers propos laissent supposer qu’il y a eu, de la part des géôliers de l’enfant, la volonté de «s’en défaire», mot expressif que l’on retrouve souvent dans la bouche des représentants de l’autorité, à la Commune, dans les comités et même à la Convention, dont la signification est non pas «tuer», mais «faire mourir ou tuer en secret». Le mot «s’en défaire» apparaît encore dans une autre dépêche concernant le Dauphin (FM, II, p.358) ou dans celle dans laquelle, prémices de la loi des suspects, il est question des «gens à argent» que l’on veut «expolier» (spolier) pour financer des «intelligences à l’étranger», et que l’on enfermera dans un local du château de Chantilly ou de l’Isle Adam où il sera plus facile de «s’en défaire» (FM, II, 48).
Les époux Simon sont surveillés par la Commune de Paris et son procureur, Louis-Gaspard Chaumette (1763-1794) quant à leur comportement envers le petit Roi. Il ne faut pas se montrer trop tendre au risque de perdre la vie. C’est dans ce jeu, entre ombres et lumière, qu’ils doivent organiser leur comportement quotidien envers l’enfant : dureté affichée lorsque les municipaux sont présents, et bonté, surtout celle de Marie-Jeanne Simon, lorsqu’ils sont absents. La « femme Simon » aime, en réalité « son petit Charles » ; elle n’a pas eu d’enfant et elle reporte sur lui toute sa tendresse maternelle frustrée.
Il est certain que Louis XVII adopte les manières des sans-culottes que Simon lui inculque (chants révolutionnaires, port du bonnet phrygien, vocabulaire grossier). On sait avec quelle peine horrifiée sa tante et sa sœur, du deuxième étage de la Tour où elles sont enfermées, entendent les chants de l’enfant, pendant qu’il joue dans la cour.
Le 13 novembre 1793
Une dépêche adressée au gouvernement britannique à la date donne les renseignements suivants:
« Après avoir appris au roi toutes les impuretés imaginables, Hébert lui apprend maintenant toutes sortes de blasphèmes. Sa santé cependant s’affaiblit chaque jour, et il a presque un dévoiement (intestinal) continuel. Hébert commence à devenir en horreur à la populace; il a été personnellement insulté à la Halle. Il n’est pas douteux que le Comité de sûreté générale n’ait pratiqué cette manœuvre.»
Le 19 novembre 1793
Un bulletin de la santé de Louis-Charles, portant le cachet de la Commune de Paris, et signé par le cordonnier-tuteur Antoine Simon. Ce bulletin est ainsi conçu :
« Louis a passé la nuit assez tranquillement, ayant moins toussé que la précédente, de l’avis du citoyen Monier, médecin. Il a pris ce matin du petit lait et le continuera pendant quelques jours. Ensuite il prendra quelques légers purgatifs, ce qui n’annonce qu’une légère indisposition.»
Le 15 décembre 1793
A ces témoignage font écho les dépêches conservées à Dropmore par le baron de Fortecue (Fortescue Ms.) cités par G Bord (royaliste) qui les interprète différemment de Mathiez (communiste) : « Le roi est très malade.»
Le 28 décembre 1793
« Le roi est malade toujours d’une espèce dévoiement»
(FM, II, 488)
Depuis que sa maladie a empiré fin décembre l’enfant a logiquement reçu des soins (à base d’opium ou autre substance dangereuse ?) des médecins de l’Hôtel Dieu qui savent donc à quoi s’en tenir sur son état. Tout au moins le docteur le Monnier mais aussi peut-être le médecin Naudin qui, alors, soigne madame Simon (visite le 7 nivôse an II), et a certainement dû examiner l’enfant qui, malade lui aussi, vit chez elle.
Le 10 janvier 1794
«Il est très amaigri. »
Le 19 janvier 1794
Simon, rappelé à ses fonctions municipales, quitte le Temple : Simon a dû choisir entre sa place au Temple et son mandat de municipal à la Commune de Paris car on lui refuse le cumul … ; il choisit la Commune. Sa femme le suit peu après. En réalité, on le soupçonne de « royalisme » – bien camouflé sous des jurons révolutionnaires – ce qui était vrai. Il périra avec Robespierre le 8 thermidor an II. On ne prévoit pas de remplaçant pour Louis XVII. Sa femme, malade, quitte donc également la prison.
Si l’enfant royal est mort ou enlevé à l’époque du départ des Simon, le secret en aurait donc été soigneusement maintenu, au cours de l’hiver 1793-94, par la Commune de Paris encore dirigée par Pache et Chaumette et jusqu’en ventôse An II lorsque le maire Pache, envoyé en prison avec sa famille, est remplacé par Payan puis Lescot de Fleuriot, et que Chaumette, Ronsin, Hébert, Chaumette, Deschamps des Tournelles, Vallet de Villeneuve, Proly, Brichet, Péreyra, Guzman, le ci-devant comte Scipion du Roure et autres maratistes de circonstance et/ou piliers de la Commune de Paris sont arrêtés.
L’informateur du gouvernement britannique, qui entrevoit Simon à sa sortie du Temple, ajoute d’autres précisions au sujet du petit prisonnier :
« On ne lui donne, pour l’amuser, que les livres les plus infâmes, et enfin, depuis la mort du roi (Louis XVI, il n’est rien qu’on ne fasse pour le corrompre.»
Drake à Lord Grenville
« (Simon) prétend que, de temps en temps, il sent sa position et se désespère, alors les commissaires (de la Commune) l’étourdissent avec de l’eau de vie et en le faisant jour au billard. Il prétend aussi que plusieurs fois, Hébert l’a menacé de la guillotine, et que cette menace l’effraye si horriblement qu’il a vu souvent cet enfant s’évanouir à cette menace. Les deux gardes nationaux qui ont monté la garde au temple ont appris à peu près des détails semblables, mais ont ajouté que les princesses étaient obligées à laisser leur porte toujours ouvertes et qu’elles étaient persécutées. »
Compte tenu de la situation faite à l’enfant au Temple depuis l’été 1793, sa consommation forcée et régulière d’alcool, son exposition à l’humidité des lieux à la fin de l’automne on peut admettre que sa santé s’est détériorée comme le révèle le bulletin de santé de novembre. Il tousse et il semble atteint de coliques persistantes.
L’hypothèse de son décès prématuré est donc légitime de même que la question de sa substitution éventuelle, même si les dépêches ultérieures adressées par Drake à Lord Grenville laissent penser que à en lire certains documents officiels, l’enfant était encore vivant en février 1794.
Eh pourtant, à la fin de janvier 1794, Louis XVII semble bien portant, si l’on en croit les autorités :
1 – Le procès-verbal de « décharge » de la garde du petit prisonnier, confié aux époux Simon, effectué par le quatre municipaux Legrand, Lasnier, Cocherfer et Lorinet qui précisent que les Simon « leur ont exhibé la personne dudit Capet en bonne santé ».
2 – La déclaration de Lasnier, gardien de Louis XVII, précisant également que les Simon « ont remis cet enfant en bonne santé », déclaration qui parut dans le Moniteur Universel du 3 pluviôse an II (22 janvier 1794).
Après le départ des Simon, Louis XVII déménage et est enfermé au deuxième étage de la Tour.
Mais est-ce le même enfant ? toute la question est là. Si il était mort pour une raison ou une autre, les membres de la Commune avaient tout à redouter la grande colère des comités de gouvernement, et notamment le comité de salut public qui n’a aucun intérêt à perdre son otage précieux. Dans ce cas, de leur propre chef, les meneurs de la Commune de Paris auraient-ils procédé au remplacement du cadavre (enterré anonymement) par un enfant, peut être un orphelin qui mourut lui même un an et demi plus tard (8 juin 1795) ?
Les conclusions des médecins qui l’autopsièrent sont, paraît-il, contradictoires et jettent un doute sur l’identification du corps, notamment le docteur Desault qui ne l’a pas reconnu, témoignage relayé inlassablement son épouse et son entourage après son décès..
A partir de là, commence un état de solitude, de réel abandon.
Louis-Charles est cloîtré dans une chambre du Temple. Il reçoit sa nourriture par un petit guichet et vit dans la pénombre. Les commissaires qui se succèdent chaque jour pour le garder ne peuvent le voir. Pas de visite de médecin.
Le 12 février 1794
Après une longue interruption, nouvelle dépêche relative à l’enfant. Elle est troublante par ce qu’elle suggère :
« Simon devenu si effrayé par le danger qu’il courait (l’enfant ou lui même ?), qu’il se prêtait à tout ce que voulaient les scélérats, ne rendait compte de rien et ne travaillait qu’à la sortie de cette place».
(FM, II, 528)
Dans quelque sens qu’on lit cette phrase on en retient que l’état de l’enfant du Temple est sérieux voire critique et que les autorités de la Commune (les «scélérats») ont demandé à Simon de se montrer discret sur ce qu’il a vu.
Le 10 mars 1794
Une Dénonciation du 20 ventôse an II «relative à des faits qui se sont passé à la garde de la tour du temple et à une consigne qui empêchait les officiers d’Etat major de pénétrer dans cette maison» (AN, W 88, dos. 11, 2 pièces.) laisse penser que la Commune aux abois (ses membres sont arrêtés ces mêmes jours) ne tient pas à ce que des officiers viennent constater ou surprennent des faits relatifs à ce qui s’est passé au Temple.
Le 16 mars 1794
Une Importante déclaration de Georges Couthon, le 26 ventôse an II, à la veille de la chute de la Commune, alors que Ronsin, Vincent, Hébert sont arrêtés, laisse penser qu’il y a eu «conspiration»:
« Les preuves de la conspiration que nous avons dévoilée s’accumulent au Comité de sûreté générale. Je suis chargé de vous faire part d’un fait qu’il n’y a plus d’inconvénients à révéler puisque que les coupables sont en lieu de sûreté, le voici. On a tenté de faire parvenir au Temple, aux enfants Capet, une lettre, un paquet et cinquante louis en or. Le but de cet envoi était de faciliter l’évasion du fils de Capet; car les conjurés ayant formé le projet d’établir un conseil de régence, la présence de l’enfant était nécessaire à l’installation du régent.»
Georges Couthon
La veuve Simon déclare à la Police au début de la Restauration qu’elle a vu des choses lors du déménagement de janvier 1794. Voiture, panier de linge… Elle dit que le Dauphin est sorti du Temple. Elle prétend qu’il est venu la voir à l’hospice sous l’Empire. Puis elle change plus tard de version et dit que c’est le second de cuisine Meunier (en poste à Versailles, aux Tuileries, au Temple) qui lui a dit que l’enfant avait quitté la prison.
Le 24 mars 1794
Jacques-René Hébert est guillotiné : lors de son trajet de la conciergerie à la place de la Révolution, il est hué par le peuple. Quand vient son tour de « jouer à la main chaude » (« être guillotiné »), Hébert doit être traîné à l’échafaud : sa tête montrée par le bourreau est saluée par des quolibets.
Il est vraisemblable que le Comité de salut public, au moment ou la tête de Hébert roule sur l’échafaud, est fixé sur la situation réelle au Temple. Après la mort des hébertistes le Comité de sûreté générale regarde comme inutile la surveillance particulière réduite à deux gardes nationaux pour la famille royale (trois personnes).
Si l’enfant est mort avant la chute de la Commune hébertiste, les mêmes autorités – la Commune de Pache et Chaumette puis le Comité de salut public -, en admettant que tous soient au courant, feraient en logique tout pour cacher ce décès au public. Mais cela ne prouve pas qu’il y ait eu substitution.
Les 27 et 29 mars 1794
Les 7-9 germinal An II une séance de la Commune de Paris :
«On nomme les membres qui doivent aller au Temple y maintenir l’ordre et la tranquillité; le citoyen Cressant est proposé: plusieurs s’opposent à son admission et lui reprochent d’avoir plaint le sort du jeune Capet (sic), d’avoir même recueilli les noms de ceux qui montent journellement au Temple ». Après délibération le conseil arrête l’exclusion de Cressant du conseil, renvoyé à l’administration de police et scellés sur ses papiers (il ne sortira de prison que plus tard). »
Moniteur XX, 69 et 154
On effectue des travaux d’isolation et de confinement strict de l’enfant pour prévenir tout enlèvement. Quatre commissaires sont nommés à cet effet (Moniteur XIX, 239). Depuis cette date sept membres du conseil général de la Commune forment la nouvelle commission spéciale de la surveillance du Temple.
Le Roi semble mieux traité. voir Ng p 564
Le 8 mai 1794
On vient chercher Madame Elisabeth au Temple pour la conduire à la Conciergerie.
En mai 1794
Déposition de Barelle
D’après une dépêche conservée dans les Dropmore papers, Robespierre aurait sorti Louis-Charles (peut-être un autre enfant) de la prison du Temple et l’aurait conduit à la forteresse de Meudon en mai 1794, répétition d’une opération qui pourrait avoir lieu au cas où les armées ennemies encercleraient Paris. On sait que le vieux château de Meudon est alors devenu un arsenal et une réserve de poudre. Si l’information donnée par l’informateur du gouvernement anglais est exacte, on trouve une logique immédiate qui tient à l’inquiétude de Robespierre. Celui ci avait de bonnes raisons de penser que tôt ou tard les armées coalisées encercleraient la capitale. Cette hypothèse n’est pas à rejeter absolument. Pour négocier une porte de sortie pour lui et les membres des comités on peut penser qu’ils avaient l’intention de mettre dans la balance la vie même de l’enfant du Temple qu’on transporterait hâtivement du Temple à Meudon, avec la menace dissuasive d’une explosion des réserves de poudre et le sacrifice de l’otage (cette hypothèse a davantage de sens qu’un nébuleux projet d’exfiltration de cet enfant dont Robespierre se serait rendu complice… mais l’information est peut-être simplement inexacte. Quoi qu’il en soit de ce pont particulier qui a donné lieu à de nombreuses spéculations fantaisistes, les dépêches, issues des Dropmore papers (Public Record office à Londres), sont utilisées et discutées par MM. de Beaucourt et Gustave Bord, historiens «royalistes» qui contrairement à MM. Alphonse Aulard et Albert Mathiez (dont les théories y sont parfois mises à mal), pensent qu’elles contiennent des vérités. Comme souvent, la «vérité», justement, est entre deux. Les informateurs des cabinets étrangers se trompent ou sont mal renseignés sûrement plus qu’ils ne cherchent à tromper (comme cela a parfois été exagérément soutenu par Jacques Godechot).
Le 10 mai 1794
Exécution de Madame Élisabeth.
Madame Royale reste seule au Temple, au dessus de chez son petit frère…
On sait que la Commune de Paris et la haute administration du ministère de la guerre, à savoir Bouchotte, Ronsin, Vincent, Turreau, Quétineau, Hanriot, Santerre etc. sont, en ce même hiver 1794, au moment de tenter un coup d’état militaire contre la Convention et ses comités tout puissants qu’ils critiqueent. Ils désirent imposer à la France entière le gouvernement de Paris et de ses sections, appuyés sur un conseil de régence dont Jean-Nicolas Pache (1746-1823) serait Grand Juge. On sait aussi que le général Henriot à la veille de la révélation du complot «pachiste» par (selon la tradition) le sieur Souberbielle, lui même médecin de Robespierre qui lui a fait part de ses craintes, est pardonné par Robespierre. Celui-ci demande aussitôt à Saint-Just et aux comités de gouvernement de reprendre la Commune et sa force armée en main, de décapiter sans délai le mouvement popularisé par Hébert et d’épurer la Commune «gangrenée par l’étranger» (Pache est arrêté et remplacé par Lescot de Fleuriot).
En mai, l’enfant du Temple semble se bien porter, ce qui n’est pas le cas de sa sœur qui doit être accablée de chagrin depuis le départ de sa tante Elisabeth dont elle ignore le sort :
Ceux qui ont eu l’occasion de voir Louis XVII dans le lieu où les tyrans le retiennent en captivité s’accordent à dire qu’il est de la plus belle figure. On le coëffe d’un bonnet rouge, on l’occupe à faire des souliers, on lui paye son travail avec des sous de fonte des cloches, et on le laisse jouer avec des polissons. Quant à madame, sa sœur, elle a dépéri d’une manière effrayante, on la fait travailler à des chemises pour la nation.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 12 juin 1794, p.1340
Le 11 juin 1794
Le citoyen Desault chirurgien major du grand hospice de l’humanité de Paris (est) arrêté au moment où il donn(e) sa leçon et conduit à la Maison d’arrêt du Luxembourg. Le citoyen Manoury (est) nommé pour le remplacer provisoirement.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 11 juin, p.1402)
Le 27 juillet 1794
Chute de Maximilien de Robespierre ( né le 6 mai 1758), il est guillotiné le lendemain.
… Antoine Simon fait partie du convoi de la guillotine.
Marie Jeanne Aladame (1745-1819) la veuve Simon, ancienne domestique entrée aux Incurables en 1796, assurera toujours que l’enfant mort en janvier 1794 fut remplacé, et cela jusque sous la Restauration où, pressée par Decazes elle soutiendra une version contraire. Jusqu’à sa mort, le 10 juin 1819) elle assure néanmoins aux religieuses qui s’occupent d’elle que l’enfant du Temple a été substitué (remplacé), alimentant une rumeur qui a marqué l’historiographie légitimiste.
Jusqu’au 28 juillet 1794
Louis-Charles est enfermé au secret dans une chambre obscure, sans hygiène ni secours, pendant six mois. Son état de santé se dégrade, il est rongé par la gale et surtout la tuberculose. Il vit accroupi. Sa nourriture lui est servie à travers un guichet et peu de personnes lui parlent ou lui rendent visite. Ces conditions de vie entraînent une rapide dégradation de son état de santé. L’isolement total dans lequel il est placé laisse planer un certain mystère et donne l’occasion à l’imagination populaire de soulever l’hypothèse de substitution de l’enfant et de son exfiltration, donnant naissance au « mythe évasionniste et survivantiste ».
Le 28 juillet 1794
Le député Barras découvre ainsi un enfant mutique, brisé psychologiquement. Les comités de salut public et de sûreté générale nomment Laurent, membre du comité révolutionnaire de la section du Temple, pour le garder, lui et sa sœur.
Son sort s’améliore relativement, mais le prisonnier de la tour du Temple est rongé par la tuberculose, ce qu’omet de signaler Laurent lorsqu’il écrit, sur le bulletin de la tour du Temple, que les prisonniers « se portent bien ».
Après le 27 juillet 1794
Après le 9 thermidor, Barras fait désigner comme garde le citoyen Laurent, ancien président de la section du Temple, avec ordre d’améliorer les conditions de détention de l’enfant.
Le 9 novembre 1794
Jean-Baptiste Gomin (1757-1841), fils d’un tapissier de l’île Saint-Louis, est nommé adjoint de Laurent et devient gardien des enfants de France à la prison du Temple. L’enfant est décrit en bonne santé mais il doit certainement y avoir des signes avant coureur de sa maladie qu’ils ne perçoivent pas.
Le 19 décembre 1794
C’est seulement lors de la visite, le 19 décembre 1794 (et non en mars 1795), des citoyens représentants du Comité de sûreté générale Harmand, Mathieu et Reverchon qu’on constaterait, prétendra beaucoup plus tard Harmand, des anomalies physiques (tumeurs au genou droit et au poignet gauche) et psychologiques (mutisme).
Entre décembre 1794 et mai 1795
Aucune disposition sur la santé de Louis Charles n’est prise par l’exécutif. L’indifférence semble prédominer.
Cette indifférence à soigner l’enfant pourrait bien avoir un rapport avec les négociations de paix en cours avec l’Espagne qui réclame, entre autres, les deux enfants de Louis XVI. La République craint, elle, d’abandonner son otage qui permettrait à ses ennemis de relancer la coalition et de réactiver la guerre pour organiser une restauration de leur choix. La mort de l’enfant arrangerait la haute politique française.
Retrouver les portraits authentiques du petit Roi relèverait, si l’on en croit tout ce qui a été dit, écrit et publié, de l’enquête policière. Eh pourtant, c’est bien le peintre Greuze de Tournus qui est la piste la plus intéressante. En 1791, avant l’incarcération de la famille royale, il a fait un premier portrait de l’enfant alors qu’il n’avait que six ans (en dessous, à gauche). Il n’est pas besoin d’être un grand spécialiste pour constater une ressemblance probable avec le portrait oublié que j’ai replacé au milieu, compte tenu, bien entendu, qu’en quatre ans, un visage d’enfant s’allonge mais que certains détails ne changent pas (la bouche avec sa lèvre inférieure déjà bourbonienne, la chevelure, le nez, les yeux). L’enfant a pourtant bien changé. Les épaules sont tombantes, la poitrine étroite et rentrée, le visage émacié. Les joues se sont creusées, la bouche ne sourit pas et le regard n’est plus le même.
Ce tableau oublié tout à fait inconnu s’est vendu dans une salle des ventes parisienne, le 11 octobre 1981. La description était la suivante : «Portrait présumé du dauphin Louis XVII, attribué à Greuze» L’inscription collée au dos donnait les précisions suivantes : «Portrait du dauphin Louis XVII à l’âge de dix ans. Huile sur toile attribuée à Greuze, non signée, portant en haut et à droite les armes de la famille royale de France.»
Le tableau est merveilleusement peint. Les cheveux blonds sont d’une grande finesse. L’expression du visage est d’une étrange délicatesse mais révèle un état maladif. Madame Vigée Le Brun, amie de Marie-Antoinette qui fit plusieurs portraits de la famille royale ayant émigré dès 1789, ne peut en être l’auteure. En revanche, plusieurs artistes ont pu peindre l’héritier de la couronne. Tout d’abord Ducreux qui a dessiné Louis XVI au Temple, Prieur qui peignit Marie-Antoinette à la Conciergerie, et tous ceux qui firent les portraits des héros de la Révolution… mais c’est bien le tournusien Greuze qui est la piste la plus crédible. Il était alors à Paris. C’est d’ailleurs l’hypothèse retenue dans le catalogue «Chrysanthemum» qui fait par ailleurs remonter l’origine du tableau jusqu’au baron Mayer de Rothschild.
Il s’agit de Louis XVII dans sa triste authenticité et non dans une posture académique d’enfant royal.
Le 31 mars 1795
Laurent démissionne. Il est remplacé par Etienne Lasne (1757-1841), ancien peintre en bâtiment, de la section Des droits de l’homme.
Les citoyens Lasne et Gomin traitent l’enfant avec douceur mais son état les inquiète.
Le 13 avril 1795
« Un enfant vivant est au Temple : il est incommodé selon un rapport de Sevestre sur le caractère et les signes extérieurs de la maladie.»
(source ? Moniteur XXIV, 650)
Le 3 mai 1795 (14 Floréal an III)
Les gardiens Gomin et Lasne inscrivent sur les registres du Temple « Le petit Capet est indisposé ».
Le 6 mai 1795 (17 Floréal an III)
La tuberculose prend un tour critique, caractérisé par l’apparition d’une péritonite.
Dans les derniers jours de mai 1795
Les gardiens signalent au comité de Sûreté générale que l’enfant Capet manifeste « une indisposition et des infirmités qui paraissent prendre un caractère grave ».
Cette fois le gouvernement réagit. Le docteur Desault médecin chef de l’Hôtel Dieu, examine l’enfant et prétend, dit-on, ne pas le reconnaître (ce que confirme son épouse), confirme la gravité de l’état du malade mais … meurt les jours suivants. On le remplace par ses collègues Pelletan, chirurgien, qui observe certains symptômes caractéristiques révélant un stade avancé d’une maladie infectieuse mortelle, et demande confirmation de diagnostique à son collègue Dumangin qui l’approuve. Il s’agit pour eux d’un «vice scrofuleux» qui signifie tuberculose osseuse. Cette maladie a frappé son frère aîné, décédé le 4 juin 1789. Il est possible que les carences en vitamines C et D, le confinement et le manque d’exercice prolongé après le départ des Simon, ou encore l’humidité aient favorisé l’apparition de cette maladie chez Louis-Charles. Il est possible enfin que Marie-Antoinette ait été porteuse saine de cette maladie et l’ait transmise à ses deux fils, mais il n’y a aucune évidence à cela.
Le Comité « arrête que le premier officier de santé de l’hospice de l’Humanité visiterait le malade en présence de ses gardiens et administrerait des remèdes ». Le docteur Desault passe à cette époque pour être le premier praticien de Paris.
Pendant tout ce temps, l’état du petit Roi s’est tellement aggravé qu’enfin, à la demande pressante des geôliers, on fait venir un médecin. M. Desault le soigne et lui prescrit quelques remèdes, bien qu’il fait comprendre dès le début à Gomin qu’il a peu d’espoir de guérison pour l’enfant. Ils le déplacent dans une pièce plus claire et ensoleillée, mais il est très faible et le changement ne freine guère la progression de la maladie. Bien que son bon ami le conduise souvent jusqu’à la plate-forme de la Tour, le léger mieux apporté par la respiration de l’air frais compense à peine la fatigue que lui coûte l’effort.
Le 29 mai 1795
Desault fait sa dernière visite au malade car il meurt le 1er juin, à l’âge de cinquante-sept ans.
Madame de Tourzel parvient à s’assurer des contacts avec Gomin et Lasne, anciens commissaires de la Commune de Paris, en charge de la surveillance du petit Roi au Temple. Elle prend connaissance des interventions de Desault et Pelletan, les derniers médecins qui tentent d’adoucir les souffrances de l’enfant … Le témoignage du docteur Jeanroy, « un vieillard de plus de quatre-vingts ans, d’une probité peu commune et profondément attaché à la famille royale. Il (a) été choisi pour assister à l’ouverture du jeune roi ; et pouvant compter sur son témoignage comme le mien propre, (elle) le f(ait) passer chez (elle)».
De réputation fiable et solide, qui l’a fait choisir par les membres de la Convention pour fortifier de sa signature la preuve que le jeune roi n’a pas été empoisonné.« Ils n'(ont) pas eu besoin d’employer le poison : la barbarie de leur conduite vis-à-vis d’un enfant de cet âge d(oit) immanquablement le conduire au tombeau. Sa bonne constitution prolongea so n supplice ; la malpropreté dans laquelle on le laissait volontairement et le défaut d’air et d’exercices, lui avaient dissous le sang et vicié toutes les humeurs.»
Madame de Tourzel
Pour la marquise, le jeune prince est bien mort au Temple.
Les trois médecins de Louis XVII au Temple meurent presque en même temps
Le 1er juin 1795
Mort de Pierre Joseph Desault, né à Vouhenans (Haute-Saône) le 6 février 1738 d’une famille rurale de sept enfants et mort à Paris , il était chirurgien et anatomiste.
Le 5 juin 1795
François Doublet, né le 30 juillet 1751, était médecin de la faculté de médecine de Paris et membre de la société royale de médecine.
Le 6 juin 1795
Le docteur Pelletan, quarante-huit ans, chirurgien en chef de l’Hospice de l’Humanité, succède au docteur Desault.
Ne voulant pas prendre seul la responsabilité de soigner l’enfant, le Comité de sûreté général lui adjoint le docteur Dumangin, cinquante-et-un ans, médecin chef de l’hospice de l’Unité (Hôpital de la Charité de Paris). Ils n’ont aucun espoir. Ils lui font prendre des médicaments qu’il avale avec difficulté. Heureusement, sa maladie ne le fait pas beaucoup souffrir ; c’est une débilité et un dépérissement total plutôt qu’une douleur aiguë. Il a plusieurs crises pénibles ; la fièvre le saisit, ses forces diminuent de jour en jour, et il expire sans lutte.
Dans la nuit du 7 au 8 juin 1795
Gomin et Lasne alarmés par l’état de santé de l’enfant ont envoyé cherché en urgence le docteur Pelletan. Il répond qu’il viendra demain matin avec le docteur Dumangin.
Le lundi 8 juin 1795 (20 prairial an III)
Les docteurs Dumangin et Pelletan arrivent ensemble à onze heures du matin au Temple, l’état de l’enfant s’est aggravé.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
« Le sieur Lasne gardien et moi, nous prêtions nos soins au petit dauphin, et enfin à trois heures (de l’après-midi) lorsque le sieur Gomin fut revenu, l’enfant venait de mourir ». Pelletan arrivé à quatre heures confirme la mort. Le docteur Dumangin arrive à huit heures, il apprend le décès du fils Capet.»
Témoignage de Damont commissaire civil au Temple
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Les commissaires le pleurent amèrement, tant il s’est fait aimer par ses douces qualités. Il avait beaucoup d’intelligence ; mais l’emprisonnement et les horreurs dont il est la victime l’ont beaucoup changé ; et même, s’il a vécu, il est à craindre que ses facultés mentales ont été atteintes. Le seul poison qui a abrégé sa vie est l’impureté, jointe aux traitements horribles, à la dureté et à la cruauté sans exemple exercés sur lui.
Le 9 juin 1795
A onze heures du matin, le chirurgien Philippe-Jean Pelletan réalise son autopsie qui confirme le diagnostic de tuberculose. Il est secondé par trois médecins dont le docteur Dumangin. C’est justement dans ce rapport d’autopsie que le docteur Pelletan va aussi raconter une idée que lui est venue à l’esprit : celle de s’emparer en toute discrétion du cœur de l’enfant mort et le garder dans sa poche. Après, le cadavre du petit Roi va être jeté dans une fosse commune au cimetière de Sainte-Marguerite. Il va le garder dans l’alcool et le cœur va devenir dur comme de la pierre.
« Vous m’aviez à la vérité proposé d’autres adjoints; et sur mon observation que, d’après les qualités personnelles et les rapports qu’avaient eus M. Pierre Lassus (1741-1807) avec Mesdames de France et Nicolas Dieudonné Jeanroy (1750-1816) dans la Maison de Lorraine, leurs signatures seraient d’un tout autre poids, vous aviez agréé ce choix. »
Le docteur Dumangin rédige le procès-verbal d’autopsie, recopié en quatre exemplaires : Un pour le Comité de sûreté générale et un pour chaque médecin. L’exemplaire du docteur Dumangin est conservé aux Archives Nationales depuis 1891.
« Des doutes intempestifs se sont élevés sur l’identification du cadavre car on n’a pas pensé (ou voulu ? disent certains) le présenter à Marie-Thérèse Charlotte, sa sœur, ni à madame de Tourzel sortie de prison, ni à Hue, ni à Tison, ni à Marie Jeanne Aladame, la veuve de Antoine Simon, ni à aucun des anciens médecins du dauphin (le docteurs Brunier et le docteur Naudin, médecin des prisons). Mais il a été reconnu par un ancien garde national (le citoyen Gagnié, «ancien chef du Temple»), présent à l’autopsie, qui déclara en août 1817 avoir vu le dauphin aux Tuileries, tenant la main à sa mère et se promenant dans son petit jardin aménagé.»
Ce même jour
François Chopart, chirurgien, né le 30 octobre 1743 à Paris, y meurt à l’âge de cinquante-et-un ans.
Il se dit que Pierre Joseph Desault, François Doublet et François Chopart en savaient trop sur l’autopsie d’un faux Louis XVII, il ne fallait pas qu’ils puissent parler : on les a empoisonnés.
Le 12 juin 1795
Louis-Charles est enterré dans le cimetière Sainte-Marguerite. Sous la Restauration, Louis XVIII fait rechercher la sépulture de son neveu : l’énigme de « l’enfant du Temple » se développe alors avec les témoignages contradictoires de ceux qui ont assisté à l’enterrement le 10 juin (fossoyeur, concierge du cimetière, abbé …) qui évoquent une inhumation en fosse commune (le corps ne pouvant dès lors plus être identifié), une réinhumation dans une fosse particulière près de la Chapelle de la Communion de l’église, voire dans le cimetière de Clamart.
Le 12 juin 1795 (24 prairial an III)
L’acte de décès de Louis XVII est rédigé. L’original du document a disparu dans les incendies de la Commune de 1871 mais l’acte avait été recopié par des archivistes et un exemplaire se trouve aussi aux Archives Nationales :
« Du vingt-quatre prairial de l’an trois de la République (12 juin 1795)
Acte de décès de Louis Charles Capet du vingt de ce mois (8 juin), trois heures après-midy, âgé de dix ans deux mois, natif de Versailles, département de Seine-et-Oise, domicilié à Paris aux Tours du Temple, section du Temple, fils de Louis Capet, dernier roy des Français, et de Marie Antoinette Josèphe Jeanne d’Autriche.
Sur la déclaration faite à la maison commune, par Etienne Lasne, âgé de trente-neuf ans, profession gardien du Temple, domicilié à Paris rue et section des Droits-de-l’Homme n° 48 : le déclarant a dit être voisin ; et par Rémy Bigot, âgé de cinquante-sept ans, profession employé, domicilié à Paris vieille rue du Temple n° 61 : le déclarant a dit être ami.
Vu le certificat de Dussert, Commissaire de Police de ladite section, du vingt-deux de ce mois (10 juin). Officier public : Pierre Jacques Robin.
(Signé) : Lasne, Robin, Bigot. »
Le 24 juin 1795
Monsieur, toujours en émigration , est proclamé Roi sous le nom de Louis XVIII.
Dès 1795, des rumeurs faisaient courir le bruit que le Dauphin, remplacé dans sa geôle par un autre garçon, aurait été libéré du Temple. Ces rumeurs avaient été favorisées par les exhumations des restes d’un enfant au crâne scié — traces d’une autopsie — du cimetière Sainte-Marguerite (au cours des deux exhumations réalisées en 1846 et en 1894, plusieurs spécialistes attribuent pourtant le corps à un sujet masculin âgé de plus de seize ans, d’1,63 m et de morphologie différente de celle de Louis XVII) et l réaction thermidorienne : tandis que les royalistes osaient à nouveau s’afficher comme tels, des accords de paix étaient négociés entre la République et les révoltés vendéens et chouans ( traités de La Jaunaye, de la Mabilais et de Saint-Florent-le-Vieil ). La mort du petit Roi, en juin de cette même année, fut par conséquent accueillie avec scepticisme par une partie de l’opinion publique. Ce contexte permit l’éclosion de théories «évasionnistes» et «survivantistes» …
Dès le début du XIXe siècle, des «faux Dauphins» commencèrent à apparaître et à réunir un nombre variable de partisans autour de leurs prétentions. Les condamnations des trois premiers (Hervagault, Bruneau et un certain Hébert, connu sous le titre de «baron de Richemont») à de lourdes peines de prison ne découragèrent pas d’autres imposteurs, dont le plus célèbre est l’horloger prussien Karl-Wilhelm Naundorff (date de naissance inconnue-10 août 1845), qui eut de nombreux adeptes jusqu’à la fin du XXe siècle.
Dans les récits qu’ils firent de leur prétendue évasion du Temple, la plupart de ces prétendants reprenaient la trame du roman de Regnault-Warin, qui évoque des agents royalistes envoyés par Charette qui s’introduisent dans la tour, où ils apportent, au moyen d’une cachette ménagée dans un « cheval de bois », un orphelin drogué à l’opium destiné à prendre la place du vrai Dauphin. Ce dernier, dissimulé dans le même objet, est ainsi libéré de sa prison. Aux termes de nombreuses péripéties, et notamment d’une tentative d’exfiltration vers l’Amérique, l’orphelin royal est repris avant de mourir de maladie.
Malgré les nombreuses invraisemblances et le triste dénouement de ce récit, la thèse de la substitution gagne ainsi un nouveau mode de diffusion le cheval de bois étant quelquefois remplacé par un panier de linge sale, et Charette par le comte de Frotté, ce dernier ayant effectivement échafaudé, sans pouvoir y donner suite, des projets d’enlèvement des orphelins royaux.
Aux imposteurs plus ou moins convaincants s’ajoutent de nombreux fous (comme Dufresne, Persat et Fontolive) ou encore des personnages dont l’identification à Louis XVII a surtout été l’œuvre de tiers, le plus souvent de manière posthume : c’est notamment le cas de l’officier de marine puis architecte français Pierre Benoît (actif à Buenos Aires ), du pasteur iroquois Eliézer Williams, du musicien anglais Augustus Meyes, du célèbre naturaliste John James Audubon et même de Louvel (assassin du duc de Berry, cousin de Louis XVII).
Les circonstances exactes de la mort de Louis XVII et la rumeur concernant une éventuelle évasion de la prison du Temple ont attisé la curiosité de nombreux auteurs, comme Gosselin Lenôtre (1855-1935), André Castelot (1911-2004) ou Alain Decaux (1925-2016).
Il demeure quelques partisans de la survivance du prince.
A partir de 1798 commence la saga des faux dauphins.
Ainsi ce début du XIXe siècle verra-t-il revenir de nombreux prétendants au titre de Louis XVII – on en a comptés environ cent cinquante… : le baron de Richemont, l’horloger prussien Karl-Wilheim Naundorff, Jean-Marie Hervagault ou Mathurin Bruneau ont pu chercher à rencontrer la duchesse d’Angoulême pour se faire reconnaître.
Marie-Thérèse n’en reçut aucun !
Le dénommé Jean-Marie Hervagault, en fugue pour la dixième fois, annonce qu’il est Louis XVII (des rumeurs circulent dès 1795 sur la survie de Louis XVII). Il sera jugé et finira ses jours en prison en 1812. Notons que lors d’une fugue précédente, son père n’a pas voulu le reconnaître !
Sous le Consulat
Barras, l’un des responsables du renversement de Robespierre en 1794 et directeur de la République de 1795 à 1799, a bénéficié d’un traitement de faveur de la part de Louis XVIII ) partir de 1814. Il n’est pas exilé, comme beaucoup d’anciens députés de la Convention (1792-1795).
Il a déclaré sous le Consulat, lors d’un repas, que le fils de Louis XVI était vivant et qu’il «verrait pendre ce diable de corse». Témoignage devant notaire d’une invitée.
Sous le premier Empire
Si l’on en croit les « Mémoires de Talleyrand », à entendre Joséphine de Beauharnais, Napoléon considère avoir la preuve absolue de l’existence de Louis XVII. Il en est si sûr qu’il dit souvent à son entourage : « Quand je voudrai, je sèmerai la discorde dans la famille du prétendant ! ».
En 1814
L’empire français s’écroule et Napoléon prend pour la première fois le chemin de l’exil. Quant à Joséphine, lorsque le Czar Alexandre va la visiter, il lui dit : « Qui mettrons nous sur le trône de France, Madame ? », elle lui répond : « Mais le fils de Louis XVI, évidemment ».
A la Restauration
Voici l’ignare Bruneau et le dandy «Baron de Richemont».
Puis arrive Naundorff, apparu en Prusse. On trouve des traces de lui en 1809.
Le docteur Pelletan va essayer de rendre ce cœur à la famille du petit Roi pendant la restauration, mais ils vont refuser et finalement il va le donner à Monseigneur de Quelen, archevêque de Paris. Pendant la révolution de 1830 l’archevêché va être pillé et le cœur va être récupéré par le fils du Docteur Pelletan qui va se rendre personnellement à l’archevêché pour sauver la royale relique.
Un témoignage navrant du citoyen Gagnié «ancien chef du Temple» est cité dans l’instruction commandée par Louis XVIII au sujet de la détention et de la mort de son neveu. Il assure avoir vu plusieurs fois le Dauphin avec sa mère et c’est le même enfant qu’il découvrit au Temple pendant l’hiver 1795-96 :
« En montant l’escalier qui conduisait au corridor attenant à la chambre de Louis XVII, je sentis une odeur extrêmement infecte qui sortait de la susdite chambre dans laquelle on entrait pas et voyant que depuis trois jours l’enfant renvoyer ses aliments tel qu’on lui portait, je demandai d’obtenir promptement une autorisation du Comité de sûreté générale et de faire ouvrir la porte de sa prison, ce qui fut exécuté, et je proteste qu’en entrant, je vis le jeune prince courbé et accroupi ayant ses bras retresés (sic), une tumeur au genou et au bras dans l’impossibilité de se redresser et ayant le cou rongé de gale, que l’ayant interrogé sur ce qu’il n’avait pas pris de nourriture depuis trois jours, il me répondit: «Que veux tu mon ami, je veux mourir.» Je certifie de plus que cet enfant était véritablement le fils de Louis XVI que j’avais vu aux Tuileries, le même que j’avais vu amené au Temple avec le roi et prendre ses récréations dans le jardin en présence de toute sa famille, enfin le même que je vis après la mort de Louis XVI lorsqu’il fut visité en présence d’un municipal qui était médecin, en ma présence et celle de M. Caillieux, administrateur. La reine craignant que ce ne fut une hernie mais elle sut que ce n’était qu’une glande engorgée que je fus même chargé d’acheter un bandage, le même à qui je donnai des serins et des pigeons lorsqu’il était avec le même Simon, le même que je vis au billard avec La Bazanerie chef de Bataillon (….) Fait à Paris le 27 juillet 1817 et signé Gagnié, ancien chef du Temple.»
En 1819-1820
Naundorff aurait contacté le duc de Berry, fils du futur Charles X. Il se rend en France dans les années 1830, vivant de l’hospitalité de ses partisans. Certaines personnes ayant connu Louis XVII reconnaissent en lui le fils de Marie-Antoinette. Mais que peuvent valoir ces témoignages quarante ans après les faits ? Naundorff donne des renseignements sur la vie du Dauphin. A-t-il soutiré ces informations des gens qui le reconnaissaient ?
Naundorff est expulsé de France. Il vivra à Londres, fondera une religion, partira pour les Pays-Bas où il mettra une bombe connue sous le nom de «bombe Bourbon». Le Roi l’autorise à porter le nom de Bourbon. Naundorff meurt à Delf. Ses partisans se battront pendant des décennies pour sa reconnaissance. Sa famille existe toujours. Une branche vit en France, l’autre au Canada. Elle a été déboutée lors d’un procès en 1954.
Le 13 février 1820
Assassinat du duc de Berry (1778-1820), fils du comte d’Artois (1757-1836).
Le 14 février 1820
La mort du duc de Berry
On a prétendu que Louis Louvel (1783-1820), l’assassin, pouvait être Louis XVII car Louis XVIII l’aurait autorisé à se rendre à l’échafaud coiffé d’un chapeau… Louvel était sobre et travailleur. Il était cultivé, ne se liait à personne. Il a toujours dit avoir agi seul.
Louvel-Louis XVII. des confidences ? De qui ? Ils sont tous morts !
1: le vrai Louvel était en pension de juin 1791 à octobre 1795, donc possibilité d’introduire dans la famille Louvel un inconnu et de le faire passer pour le fils de la famille de retour à Versailles (1794);
2: Robespierre est passé devant chez les Louvel à Versailles tous les jours d’avril à novembre 1789 (première possibilité d’un lien). Robespierre est à Versailles le 20 juin 1791 quand le père Louvel envoie à Paris le futur régicide, en pension. Aurait-il profité du carrosse de Robespierre ? Il a été dit que Robespierre aurait postulé ou aurait été pressenti pour devenir gouverneur du Dauphin. Du moins son nom a circulé pour occuper la charge.
3: Le conventionnel Lecointre accompagne Robespierre le 17 juillet 1791 ( jour de la fusillade du champ de Mars) dans la quête d’un abri sûr. Les Lecointre et les Louvel sont liés (le père Lecointre était parrain chez les Louvel). Et nous retrouvons le soir de la chute de Robespierre Lecointre festoyant avec Barras et les autres membres de la conjuration qui fit chuter le « tyran ».
Un lien Robespierre – Lecointre – famille Louvel ; un second, Barras – Lecointre – famille Louvel !
4: En 1804, Louvel déclare avoir 19 ans (âge de Louis XVII), alors qu’il en a presque 21 ! (ce n’est pas un témoignage, c’est marqué sur son livret ouvrier !)
5: En 1806, Louvel est réformé de la Garde Impériale par Larrey et Sue, amis de Desault, médecin au Temple en mai-juin 1795. Louvel est affecté à l’Artillerie de la Garde Impériale, à Paris, en 1805. Il fut réformé pour varicocèle.
6 : En 1814, Louvel, qui n’aime pas l’armée, rejoint Napoléon à l’île d’Elbe. il y restera deux mois comme sellier. A-t-il voulu parler à l’empereur ?
7 : L’abbé Arnoux, chargé par la famille royale de tirer les vers du nez du régicide, meurt à 28 ans le jour de l’ouverture du procès Louvel ! (d’une maladie poitrinaire, officiellement).
8 : Louvel écrit : je n’ai pas déshonoré ma Nation, je n’ai pas déshonoré ma fille. N’ayant pas d’enfant, la fille de Louvel est-elle la Nation ? (texte lu aux pairs de France).
9 : Louvel ressemble étrangement à Joseph II d’Autriche, oncle de Louis XVII (test réalisé sur quinze personnes – onze ont mis Joseph II en premier, et François II en second, cousin de Louis XVII – sur vingt portraits de même taille).
Les oreilles de Louis XVII et de Louvel présentent de fortes ressemblances.
10 : Louis XVIII ordonne une messe à la mémoire de Louis XVII pour le 8 juin 1821, soit un an et un jour après la mort du régicide. (cérémonie annulée). C’est la première fois que Louis XVIII ordonne cela.
11 : En 1816, Louis XVIII fait effectuer des recherches sur les restes de Louis XVII au cimetière Sainte-Marguerite. Le jardinier en chef des jardins du Luxembourg, Toussaint Charpentier, déclare au préfet Anglés qu’au moment de l’enterrement de l’enfant du Temple, on lui fit creuser de nuit une fosse au cimetière de Clamart pour recevoir un petit cercueil. Une personne de la Municipalité aurait déclaré que le petit Capet aurait bien du chemin à faire pour retrouver sa famille.
Ce Charpentier est également employé à Trianon. Son fils en tant que jardinier en chef à partir de 1824. Ces gens connaissent la marraine de Louvel, Madame Belleville. Curieux !
12 : Les restes de Louvel sont transférés dans une fosse commune, mais bien vite, on les exhume et les transporte dans un lieu toujours inconnu. Volonté de Louis XVIII de ne pas créer un lieu de pèlerinage républicain, ou d’inhumer Louvel dans une tombe royale ? (il existe des emplacements vides à la basilique de Saint-Denis).
13 : Le comte de Vaisons (Le Roi perdu, de l’académicien Octave Aubry), qui n’a jamais existé, (mais le général-marquis de Bonneval correspond à son profil) arrête son enquête diligentée par Louis XVIII à la mort de Louvel en juin 1820.
14 : Louis XVII se blessa aux parties génitales en jouant au cavalier avec un bâton, ceci lorsqu’il était encore avec sa mère, sa tante et sa sœur. On lui mit un suspensoir. Louvel avait également un suspensoir. Il avait été réformé de l’Artillerie de la Garde Impériale en 1806 pour varicocèle :
« La varicocèle testiculaire est une pathologie bénigne qui se caractérise par une dilatation des veines au niveau du cordon spermatique. Elle peut causer des problèmes de fertilité chez l’homme.«
Il se pourrait qu’il y ait eu une erreur de diagnostic, de conséquences de l’accident.
Voici l’explication de l’affaire selon Jean-Claude Pilayrou :
Robespierre a enlevé le Dauphin et l’a confié au père Louvel. On sait ce qui adviendra par la suite de Robespierre.
Barras a enlevé le remplaçant de Louis XVII. Caché à St Domingue, il meurt en 1803 ( ?).
Louis XVIII fit faire une enquête par Bonneval. Entre temps, Louvel tue le duc de Berry.
Louis XVIII, qui est perturbé par les apparitions continuelles de faux dauphins (Hervagault, Bruneau, Dufresnes…), se demande si Louvel n’est pas Louis XVII, qui vient de se venger de son état de roi déchu en tuant Berry. Il fera faire une enquête approfondie. Louvel n’ayant pipé mot, il le laissera aller à la guillotine.
Aujourd’hui comme hier, les héritiers du secret gardent le silence. Et l’analyse ADN de 2000 fut un pieux mensonge, destiné à protéger la mémoire du roi assassin: Louis XVII.
Pour Jean-Claude Pilayrou, Louvel serait Louis XVII
Le 17 août 1833
Âgée de soixante-dix ans, Madame Agathe Mottet Rambaud, fait la déposition suivante :
« Dans le cas où je viendrais à mourir avant la reconnaissance du Prince, fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, je crois devoir affirmer ici par serment, devant Dieu et devant les hommes, que j’ai retrouvé, le 17 août 1833, Monseigneur duc de Normandie, auquel j’eus l’honneur d’être attachée depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792, et comme il était de mon devoir d’en donner connaissance à S. A. R. Madame la duchesse d’Angoulême, je lui écrivis dans le courant de la même année. Je joins ici la copie de ma lettre. Les remarques que j’avais faites dans son enfance sur sa personne ne pouvaient me laisser aucun doute sur son identité partout où je l’eusse retrouvé. Le Prince avait, dans son enfance, le col court et ridé d’une manière extraordinaire. J’avais toujours dit que si jamais je le retrouvais, ce serait un indice irrécusable pour moi. D’après son embonpoint, son col ayant pris une forte dimension est resté tel qu’il était, aussi flexible. Sa tête était forte, son front large et découvert, ses yeux bleus, ses sourcils arqués, ses cheveux d’un blond cendré, bouclant naturellement. Il avait la même bouche que la Reine et portait une petite fossette au menton. Sa poitrine était élevée; j’y ai reconnu plusieurs signes alors très-peu saillants, et un particulièrement au sein droit. La taille d’alors était très cambrée et sa démarche remarquable. C’est enfin identiquement le même personnage que j’ai revu, à l’âge près. Le prince fut inoculé au château de Saint-Cloud, à l’âge de deux ans et quatre mois, en présence de la Reine, par le docteur Joubertou, inoculateur des Enfants de France; et de la Faculté, les docteurs Brunier et Loustonneau. L’inoculation eut lieu pendant son sommeil, entre dix et onze heures du soir, pour prévenir une irritation qui aurait pu donner à l’enfant des convulsions, ce qu’on craignait tous que ce sont les mêmes marques que j’ai retrouvées, auxquelles on donna là forme d’un triangle. Enfin j’avais conservé, comme une chose d’un grand prix pour moi, un habit bleu que le Prince n’avait porté qu’une fois. Je le lui présentai en lui disant, pour voir s’il se tromperait, qu’il l’avait porté à Paris. «Non, Madame; je ne l’ai porté qu’à Versailles, à telle époque. » Nous avons fait ensemble des échanges de souvenirs qui, seuls, auraient été pour moi une preuve irrécusable que le Prince actuel est véritablement ce qu’il dit être : l’orphelin du Temple. »
Agathe Mottet – Veuve de Rambaud, attachée au service du Dauphin, duc de Normandie, depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792.
En 1837
« Je déclare ici et sur mon honneur et devant Dieu que le fils de Louis XVI est mort dans mes bras dans la tour du Temple. … Toute ma vie j’ai dit la vérité, ce n’est pas quand j’atteindrai [la fin] que je la trahirai.»
Etienne de Lasne, dans une lettre à A. Beauchesne
Au début de 1841
Sous la signature de Gozzoli, rédacteur-gérant de La Voix d’un proscrit, Laprade (qui avait été affublé du titre de « président du conseil de l’Eglise catholique évangélique« ) et cinq autres compères, publièrent un désaveu cinglant de leur adhésion à la cause naundorffiste. (Nous savons par l’abbé Laprade que Morel de Saint-Didier lui-même, sans signer le document, en partageait l’esprit.) Ils y rapportent comment, ayant enquêté sur le passé du bonhomme, ils ont été contraint de conclure à la supercherie. Ils mettent en cause la réalité des apparitions, la moralité personnelle de leur ancien «roi», soulignent les contradictions de la doctrine – bref, ils sapent l’édifice qui les a portés pendant tant d’années.
Le 22 juin 1841
L’abbé Laprade écrivait une lettre sévère, à la mesure de sa tristesse et de ses remords :
« Pauvre sire de Normandie qu’as-tu fait de ta baguette, que sont devenus tes talismans imaginaires?(…) quand je songe à mes dispositions d’autrefois et à mes sentiments d’aujourd’hui, je suis si honteux et humilié de mon passé que je voudrais être trois fois taupe pour ne plus le voir et trois mille fois lièvre pour ne plus le rappeler. Quoi! des hommes généreux et intelligents avaient pu planter un drapeau près de l’hôtel de Camberwell? Ils avaient pu faire à cet homme l’honneur de le regarder comme pouvant être de quelque poids dans la balance des destinées humaines…ma foi, ma foi; convenons-en, nous étions en démence. Aussi, dès que j’ai eu aperçu le bout des oreilles de notre Guillot je l’ai fui à toutes jambes et je cours encore..»
Le 10 août 1845
« Nous soussignés, docteurs-médecins en fonctions à Delft, Jean Soutendam et Jean-Gérard Kloppert, autrefois Officier de Santé, et comme tel adjoint comme médecin consultant par feu Son Excellence le ministre List, déclarons avoir traité en 1845 celui qui se nommait Charles-Louis de Bourbon duc de Normandie.
« Beaucoup d’intérêt fut témoigné à l’auguste malade. Des bulletins furent envoyés journellement sur l’état de sa santé au ministre susdit, qui de temps en temps vint en personne prendre des informations. […] Les pensées du malade s’arrêtaient principalement sur feu son malheureux père, Louis XVI, sur le spectacle effroyable de la guillotine ; ou il joignait les mains pour prier et demander, avec des paroles entrecoupées, de bientôt rejoindre au ciel son royal père. Presque jusqu’au dernier soupir ce fut ainsi. Et Charles-Louis de Bourbon mourut en notre présence le 10 août 1845. »
On a retrouvé sur le corps du dénommé Naundorff les sept spécificités corporelles qu’auraient eues Louis XVII et qui étaient connues et témoignées selon certains, et également archivées dans les rapports médicaux (Archives de Versailles), sans que les naundorffistes ne montrent cette pièce en question.
Cette pièce importante se trouve à Deft : Archives Notariales de Deft et copie conforme au Archives Bourgmestrales – volume 46, folio 35, verso 3 à 7.
Voici le procès verbal :
« Aujourd’hui 12 août 1845, le soir à 6 heures et à la requête de Charles Edmond de Bourbon, aussi connu sous le nom de Naundorff, demeurant à Deft en la rue dite de Voostrat, section 5, n° 85, accompagné de M. Cornélis Théodorus Van Meurs, major d l’Artillerie, chevalier du Lion néerlandais, du Maître Jacobus Van Buren, avocat et juge demeurant à…et connu de moi, notaire.. »
« Moi, notaire, Simon Adrianus Sholten, notaire de l’arrondissement de la Haye, résidant à Deft, assisté de Messieurs Carel Heyne den Back, employé au secrétariat de la Vielle et de Adriaan Mardus Schagen Van Leewen, employé à mon étude, connus de moi, notaire, je me suis rendu à une maison située à l’Oude-Deft, section2, n°62 à Deft où le requérant m’a montré dans une des chambres un cadavre qu’il déclara à moi, notaire, être celui de Charles Louis, Duc de Normandie ( Louis dix-sept), ayant été connu sous le nom de Charles Guillaume Naundoff, né au Château de Versailles en France, le 27 mars 1785 … »« Le requérant, Charles Edmond de Bourbon, fait cette déclaration en présence des ci-dessus nommés Van Meurs et Van Buren qui déclarent par ceci reconnaître le cadavre montré pour celui du père du requérant. »« Ainsi furent présents : M. Jean Sontendam, docteur-médecin, demeurant à Deft, Louis Snabilié, docteur-médecin, premier officier de Santé de la 2ème classe, chevalier de l’Ordre Militaire de Guillaume, Joannes Gerdus Kloppert, docteur médecin et accoucheur, officier de santé de 2ème classe, demeurant à Deft, connus de moi, notaire lesquels Messieurs déclarèrent reconnaître le cadavre montré pour celui de la personne qu’ils on traitée médicalement en sa dernière maladie. »
« Et le requérant a prié les médecins susnommés d’expliquer leurs expériences des signes extérieurs qui caractérisaient le cadavre et après avoir examiné à cette fin le cadavre prescrit, les nommés médecins ont noté les signes suivants :.. »
Sont énumérées les sept spécificités corporelles qu’avaient Louis XVII :
1. Le naevius maternus à la cuise ;
2. L’excroissance du sein droit ;
3. Le cou très ridé ;
4. Disposition des deux incisives sortantes « en lièvre » au milieu de la denture inférieure ;
5. Forme du front large et fort, fuyant et s’évasant ;
6. Disposition des yeux bleus avec leurs arcades sourcilières arquées avec un écartement si précis « qu’il comportait entre eux une distance égale à la longueur d’un œil » ;
7. Anomalie de la forme du lobe des oreilles, notamment de l’oreille droite (nettement visible sur la photo représentant Naundorff su son lit de mort et identique à celle d’un portrait de Louis XVII enfant).
Ce constat se termine ainsi :
« Le requérant m’a prié, moi, notaire, de donner acte en minute de tout ce qui précède et qui est ci-dessus mentionné et, après lecture faite au requérant, aux témoins assistants, aux médecins sus-nommés et aux témoins ici-présents : Carel Heyne Van Back et Adriaan Marius Schagen Van Leeuwen, tous deux ci-dessus nommés, toutes ces personnes ont signé. »
Signé :Charles Edmond de Bourbon, Van Meurs, Van Buren, Jean Soutendam, Dr Snabilié, Dr Kloppert, C. Heyne den Back, A.M. Scagen Van Leewen, S.A ?. Scholten, notaire. »
Le receveur : signé : V.D. Mandèle « Pour signé conforme : signé SA Scholten, notaire »
Le cas Richemond
Claude Perrin naquit à Lagnieu (Ain) le 7 septembre 1786. Il est bossu, ayant une épaule plus haute que l’autre. C’est d’ailleurs lui-même qui le précise lorsqu’il doit se défendre devant la Justice de ses supercheries. Il est cependant soldat et ceci lui donne le goût de la tenue militaire qu’il arbore fièrement. Il parle de lui à la troisième personne, ce qui démontre un dédoublement de la personnalité ou une haute opinion de soi, les deux possibilités ne s’excluant l’une l’autre.
On ne sait d’où lui vient l’idée du nom qu’il adopte (« Richemond »), du titre qu’il s’accorde (« baron ») ni, enfin, de l’idée de jouer le rôle d’un faux Dauphin. Il est vrai que la rumeur de l’évasion de Louis XVII battait son plein dans les campagnes de France et Claude Perrin, presque du même âge que Louis XVII, à un an près, doté de cheveux châtain clair, entrevoit peut-être un autre rôle à tenir sur la scène de la vie que celui auquel le destin le prédispose. En 1831, il écrit et publie lui-même un livre : « Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI », puis en 1846 il publie «Mémoires d’un contemporain », livre qui contredit le premier.
Dans le premier récit (« Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI »), le faux Dauphin Richemond n’indique ni date, ni nom, ni désignation précise d’aucun lieu susceptible de décrire les situations vécues par le vrai Roi ; il ne sait même pas quand, à quelle date et comment eut lieu l’évasion du Temple ; ses propos sont contradictoires mais, apparemment, cela et ne le gênait pas pour persévérer dans ses mensonges. Ainsi désavoua-t-il son premier livre : par exemple, il supprime l’épisode dans lequel il vécut chez « les Sauvages ». ; il avait dit qu’il avait passé « plus de six ans, tout seul, nu comme eux, le corps peint, etc. Ces Sauvages s’appelaient les Mamelucks. ». Il prétend, de plus, avoir eu la petite vérole dans la Tour du Temple ; or Louis XVII avait été inoculé et n’eut jamais cette maladie.
« Richemond » fut reconnu par des personnes qualifiées : madame Bequet, qui avait été au service de Marie-Antoinette jusqu’au 10 août 1792; madame Fillette, qui avait été fille de garde-robe du Dauphin ; madame de Rambaud, berceuse du Dauphin… Ce sont là, à l’évidence, les déclarations de Perrin qui, en réalité, ne reçut jamais un témoignage de reconnaissance réelle, écrit, daté et signé sous serment et déposé devant une Instance officielle quelconque (Tribunal, Police, Notaire..).
Il raconte dans « Mémoires d’un contemporain » que trois ans auparavant, en 1843, il rencontra madame de Rambaud, que celle-ci le reconnut bien évidemment en tant que Louis XVII mais comme elle avait auparavant reconnu aussi en Naundorff le Roi, qu’elle aurait décidé de « s’en remettre au Ciel pour faire un choix » (ibidem – page 370). Il est patent que ces propos sortirent du cerveau déséquilibré de Perrin et non de la bouche de Madame de Rambaud. Il précise qu’il « n’a pas revu cette dame depuis ce jour », ce qui est étrange car cette reconnaissance était très importante pour Madame de Rambaud ; aurait-elle évité de revoir celui qu’elle avait chéri ?
La petite fille de de madame de Rambaud, dans une lettre datée du 26 janvier 1884 et adressée l’Abbé Laurent (curé de la paroisse de Sainte Marguerite sur Duclair), écrivit :
« Je m’empresse de satisfaire votre demande. Madame de Rambaud, ma grand-mère, a, en effet, reconnu Louis XVII dans la personne du prétendant Naundorff et n’en a reconnu d’autres. Richemont, il est vrai, s’est fait présenter à elle ; mais à ma connaissance il n’en est rien résulté pour ce personnage de cette entrevue….son frère (le frère – Charles- de son beau-père, Casimir Verger) a connu M. de Joly, que j’ai vu moi-même chez ma grand-mère et qui, comme elle, a attesté ses convictions…Signé L. Verger, née de Rambaud »
Madame de Rambaud vivra encore dix années après la supposée rencontre avec « Richemond » ; elle meurt le 18 octobre 1843 en n’ayant jamais renié la reconnaissance en Naundorff le Roi qu’elle avait élevé pendant sept années. La petite-fille de Madame de Rambaud, Ernestine de Rambaud, dans une lettre qu’elle écrivit en juin 1849 affirma la fidélité de sa grand-mère à cette reconnaissance capitale : « Encore aujourd’hui elle (Madame de Rambaud) ne doute pas de son identité (Louis XVII=Naundorff)».
Comme Hergavault, Richemond sait séduire et comme de très nombreuses personnes espéraient retrouver Louis XVII, elles acceptèrent de le rencontrer mais jamais elles ne le reconnurent vraiment ; une seule rencontre et aucune reconnaissance. Lors du procès de Perrin, la Cour ne retint que les dépositions écrites de Mesdames Bequet et Fillette (respectivement le 20 décembre 1842 et le 15 juillet 1844) dans lesquelles elles déclarent seulement avoir rencontré « Richemond » une seule fois, sans préciser une reconnaissance quelconque.
Claude Perrin meurt à Gleize (Rhône) le 10 août 1853, huit ans jour pour jour après Naundorff…
Perrin/Richemond, Hergavault, Bruneau, Williams, Mévès… tous ces « faux Dauphins » avaient des yeux marrons et seul, un « faux Dauphin » avait les yeux bleus : « Naundorff ». Louis XVII avait les yeux bleus…
En 1943
André Castelot soumet au Docteur Locard, directeur du laboratoire de Police Technique de Lyon, une boucle des cheveux du «Dauphin», propriété de l’abbé Ruiz, jointe à une mèche de Naundorff, qui lui avait été remise par le baron de Genièbre. Le but était de chercher si les cheveux correspondent ou non. Selon les naundorffistes, la confrontation, pratiquée d’après des microphotographies, donnerait des résultats époustouflants : les deux échantillons comporterait la même excentration du canal médullaire, un caractère jugé très rare par l’expert lyonnais. L’identité d’origine des deux mèches de cheveux semble irrécusable : pour les partisans de Naundorff, comment croire que cette excentration, si exceptionnelle, est due à la seule intervention du hasard?
En 1947
Alain Decaux (1925-2016) publie son premier livre, Louis XVII retrouvé, et soutient la thèse survivantiste _ ou naundorffiste_ qui perd par la suite tout crédit chez les historiens. Le futur ministre se ravisera d’ailleurs de cette conclusion de jeunesse.
En septembre 1950
Le cercueil de Naundorff est ouvert à Delft, sous la conduite du Docteur Hulst, médecin expert près les tribunaux hollandais. Castelot, pour s’assurer des conclusions de la première analyse, prie ce dernier d’envoyer à Locard une mèche provenant directement du squelette. Il fait bien. On procède à une seconde expertise.
Le 4 mai 1951
La sentence de la trichoscopie tombe, terrible pour le camp survivantiste. Locard écrit dans son rapport :
« Ces cheveux, d’origine indiscutée, ne présentent pas l’excentrement caractéristique. Ainsi donc les cheveux de Naundorff (…) ne sont pas identiques à ceux de Louis XVII». Le Dr Locard, qui avait entre-temps reçu, par le biais du marquis de Tinguy, d’autres cheveux provenant de Louis XVII qu’il a également analysés, ajoute qu’il semblait établi «que le Dauphin présentait une anomalie capillaire caractéristique» non retrouvée chez Naundorff. Les cheveux n’appartenaient pas à la même personne. La «preuve scientifique», qui, c’est le cas de le dire, n’avait tenu qu’à un cheveu, tombait à l’eau.»
Le spécialiste lyonnais confiera plus tard à Castelot que les deux premières mèches étaient si semblables, qu’il était fort possible que toutes deux aient été prises sur le crâne de Louis XVII.
En 1975
La relique du cœur Pelletan, récupérée par de la famille lointaine de Louis XVII, finit par être donnée à la basilique de Saint-Denis par la princesse Massimo.
En 1996
Après cinq ans d’enquêtes, Paul-Éric Blanrue a conclu à l’imposture du dénommé Naundorff (Le mystère du Temple, la vraie mort de Louis XVII, Claire Vigne éditrice, 1996, p. 229-287) et à la réalité de la mort du petit Roi à la date mentionnée par l’état civil. Il a repris cette thèse dans la préface des Souvenirs de la duchesse d’Angoulême (Communication et Tradition, 1997) dont il a établi l’édition critique, ainsi que dans une dizaine d’articles. Ni Alain Decaux, ni André Castelot, ni personne, n’y a répondu.
En 1998
Des analyses sont menées par l’Université de Louvain et le CHU de Nantes à partir de cheveux et de fragments d’humérus de Naundorff et de cheveux des descendants des sœurs de Marie-Antoinette. Conclusion : les restes de Naundorff ne sont pas ceux du dauphin Louis XVII.
En 1999-2000
L’historien – journaliste Philippe Delorme contacte la noblesse française afin que le cœur du petit décédé le 8 juin 1795 soit analysé avec la méthode ADN. Le résultat est que le cœur examiné était celui d’un parent de Marie-Antoinette, donc en principe de Louis XVII.
Monsieur Delorme a officiellement mis un terme à cette énigme; mais certains avancent que le cœur est celui du frère de Louis XVII, décédé en 1789. Le cœur embaumé de cet enfant a disparu sous la Restauration. Une bataille acharnée se déroule depuis entre Mr Delorme et les partisans de l’autre thèse. Mais une médecin-légiste a affirmé au cours d’une émission diffusée en janvier 2007 qu’elle serait bien en peine de faire la différence entre un cœur embaumé (frère de Louis XVII) et un cœur non embaumé (cœur du décédé le 8 juin 1795).
Monsieur Delorme devait rechercher le cœur du frère ainé de Louis XVII. Il n’y a pas eu de suite : la tombe de Louis-Joseph a, en effet, été ouverte et vidée le 16 octobre 1793 !
En 2004
De nouveaux prélèvements sont effectués sur le squelette de Naundorff. On procède à des analyses en Hollande et en Autriche, mais la famille dite de Bourbon n’a pas fait connaître les résultats.
Ce semble éloquent …
Le 8 juin 2004
Pour le professeur Jean Tulard, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, appelé par le ministre de la Culture à donner son avis sur le dépôt du cœur de Louis « XVII », l’analyse de l’ADN du cœur, conjuguée avec l’enquête menée sur son origine et les péripéties de son histoire, est suffisante pour attester de la mort du prince au Temple.
Sources :
Interrogatoire de Louis-Charles en vue d’obtenir des pièces à charge contre sa mère. Sa sœur, qui ne le voit plus, est confrontée à lui et dit :
« Il a grossi sans prendre de croissance».
« Le quinzième jour du premier mois de l’an second de la République française une et indivisible, Nous, maire, procureur syndic et membres de la commune de Paris nommés par le conseil général de ladite commune pour prendre des renseignements sur différents faits qui se sont passés au Temple, et recevoir les déclarations à cet égard, nous sommes rendus au Temple et arrivés dans ladite Tour, et nous étant présentés au Conseil du Temple, sommes montés à l’appartement du premier occupé par Louis Charles Capet pour entendre ses déclarations au sujet des propos et des événements dont il peut avoir connaissance. Il nous a déclaré que l’hiver dernier pendant qu’il habitait l’appartement de ses mère, tante et sœur, un particulier, nommé Dangé, était de garde auprès d’eux en qualité de commissaire du conseil ; un jour qu’il l’accompagnait à la promenade sur la plate-forme de la Tour, il le prit dans ses bras, l’embrassa et lui dit : « Je voudrais bien vous voir à la place de votre père. »
Nous a déclaré pareillement qu’un autre particulier nommé Toulan, étant aussi de garde à la Tour à la même époque, lesdites femmes l’enfermèrent, lui déclarant, avec sa sœur dans une des tourelles pendant une heure et demie, un peu avant qu’on allumât la chandelle, et que pendant ce temps il s’est entretenu avec lesdites femmes, et qu’il n’entendit pas le sujet de leur conversation.
Que dans une autre circonstance il entendit dire par ledit Toulan à sa mère et à sa tante que tous les soirs il enverrait aux environs du Temple un
colporteur à dix heures et demie du soir pour lui faire crier toutes les nouvelles qui pourraient les intéresser; que par suite de cette promesse il s’aperçut que lesdites femmes un soir, ne se couchèrent qu’à onze heures passées et montrèrent de l’humeur de n’avoir point entendu les cris accoutumés dudit colporteur.
Il a déclaré encore que quatre particuliers nommés Lepitre, Bruneau, Toulan et Vincent, pendant la durée de leur service dans les appartements
avaient coutume d’approcher desdites femmes et de tenir des conversations avec elles à voix basse.
Déclare en outre qu’ayant été surpris plusieurs fois dans son lit par Simon et sa femme, chargés de veiller sur lui par la Commune, à commettre sur
lui des indécences nuisibles à sa santé, il leur avoua qu’il avait été instruit dans ces habitudes pernicieuses par sa mère et sa tante, et que différentes fois elles s’étaient amusées à lui voir répéter ces pratiques devant elles, et que bien souvent cela avait lieu lorsqu’elles le faisaient coucher entre elles.
Que de la manière que l’enfant s’en explique, il nous a fait entendre qu’une fois sa mère le fit approcher d’elle, qu’il en résultat une copulation et que il en résulta un gonflement à un de ses testicules, connu de la citoyenne Simon, pour lequel il porte encore un bandage et que sa mère lui a recommandé de n’en jamais en parler, que cet acte a été répété plusieurs fois depuis.
Il a ajouté que cinq autres particuliers nommés Moelle, Lebœuf, Beugnot, Michonis et Jobert, conversaient avec plus de familiarité que les autres commissaires du Conseil avec sa mère et sa tante ; que Pétion, Manuel, Bailly et Lafayette s’étant comportés très mystérieusement aux Tuileries avec les femmes, il estimait qu’il existait une correspondance directe avec les quatre hommes et les commissaires du Temple depuis la détention de ces femmes au Temple, que dans l’intervalle de ces conférences on l’éloignait.
Il nous a déclaré qu’il n’avait rien de plus à nous faire connaître.
Le citoyen et la citoyenne Simon nous déclare avoir appris ces faits de la bouche de l’enfant qui les leur a répété plusieurs fois et qu’il les pressait
souvent de le mettre à portée de nous en faire la déclaration.
Après avoir reçu la présente déclaration, y avons posé notre signature conjointement avec le citoyen Hébert, substitut du procureur-syndic de la Commune qui est survenu.
A Paris, dans la Tour du Temple les jour et an que dessus.»
LOUIS-CHARLES CAPET.
PACHE, maire; CHAUMETTE, procureur-syndic ; HÉBERT, substitut;
FRIRY, commissaire du conseil général; SEGUY, commissaire de service au Temple ; HEUSSÉE, administrateur de police ; SIMON ; D. E. LAURENT, commissaire du conseil général.
CAMPARDON, Emile, Marie-Antoinette à la Conciergerie (du 1er août au 16 octobre 1793) : pièces originales conservées aux Archives de l’Empire, suivies de notes historiques et du procès imprimé de la reine, Paris, 1863, p.66-71.
Le 14 octobre 1793
Hébert lance l’accusation d’inceste qui vaut à la Reine une réplique mémorable :
« J’en appelle à toutes les mères.»
Et l’ombre pâle dit à Dieu dans le ciel :
« Je suis orphelin et pas roi du tout ;
Hier, j’étais un prisonnier fatigué,
Les meurtriers de mon père ont nourri mon âme de fiel.
Pas moi, Seigneur, le nom royal convient.
La nuit dernière, je me suis endormi dans le dungeon dear
Mais ensuite j’ai vu ma mère dans mes rêves,
Dis, dois-je la trouver ici ?
extrait de Le Roi Louis XVII, une ode de Victor Hugo
Le 16 octobre 1793
Marie-Antoinette est exécutée.
Simon ne doute pas, quant à lui, que le roi ne soit infecté du mal vénérien, quoique, depuis la mort de la reine, on ne lui ait plus présenté de prostituées. Mais il croit que ce que l’on fit à cette époque pour le faire déposer contre sa mère, et prouver par l’état de santé la vérité des dépositions, a suffi pour le corrompre et le gangrener. Il prétend donc très décidément qu’il a du mal et qu’on ne fait rien pour l’en guérir.
Ces derniers propos laissent supposer qu’il y a eu, de la part des géôliers de l’enfant, la volonté de «s’en défaire», mot expressif que l’on retrouve souvent dans la bouche des représentants de l’autorité, à la Commune, dans les comités et même à la Convention, dont la signification est non pas «tuer», mais «faire mourir ou tuer en secret». Le mot «s’en défaire» apparaît encore dans une autre dépêche concernant le Dauphin (FM, II, p.358) ou dans celle dans laquelle, prémices de la loi des suspects, il est question des «gens à argent» que l’on veut «expolier» (spolier) pour financer des «intelligences à l’étranger», et que l’on enfermera dans un local du château de Chantilly ou de l’Isle Adam où il sera plus facile de «s’en défaire» (FM, II, 48).
Les époux Simon sont surveillés par la Commune de Paris et son procureur, Louis-Gaspard Chaumette (1763-1794) quant à leur comportement envers le petit Roi. Il ne faut pas se montrer trop tendre au risque de perdre la vie. C’est dans ce jeu, entre ombres et lumière, qu’ils doivent organiser leur comportement quotidien envers l’enfant : dureté affichée lorsque les municipaux sont présents, et bonté, surtout celle de Marie-Jeanne Simon, lorsqu’ils sont absents. La « femme Simon » aime, en réalité « son petit Charles » ; elle n’a pas eu d’enfant et elle reporte sur lui toute sa tendresse maternelle frustrée.
Il est certain que Louis XVII adopte les manières des sans-culottes que Simon lui inculque (chants révolutionnaires, port du bonnet phrygien, vocabulaire grossier). On sait avec quelle peine horrifiée sa tante et sa sœur, du deuxième étage de la Tour où elles sont enfermées, entendent les chants de l’enfant, pendant qu’il joue dans la cour.
Le 13 novembre 1793
Une dépêche adressée au gouvernement britannique à la date donne les renseignements suivants:
« Après avoir appris au roi toutes les impuretés imaginables, Hébert lui apprend maintenant toutes sortes de blasphèmes. Sa santé cependant s’affaiblit chaque jour, et il a presque un dévoiement (intestinal) continuel. Hébert commence à devenir en horreur à la populace; il a été personnellement insulté à la Halle. Il n’est pas douteux que le Comité de sûreté générale n’ait pratiqué cette manœuvre.»
Le 19 novembre 1793
Un bulletin de la santé de Louis-Charles, portant le cachet de la Commune de Paris, et signé par le cordonnier-tuteur Antoine Simon. Ce bulletin est ainsi conçu :
« Louis a passé la nuit assez tranquillement, ayant moins toussé que la précédente, de l’avis du citoyen Monier, médecin. Il a pris ce matin du petit lait et le continuera pendant quelques jours. Ensuite il prendra quelques légers purgatifs, ce qui n’annonce qu’une légère indisposition.»
Le 15 décembre 1793
A ces témoignage font écho les dépêches conservées à Dropmore par le baron de Fortecue (Fortescue Ms.) cités par G Bord (royaliste) qui les interprète différemment de Mathiez (communiste) : « Le roi est très malade.»
Le 28 décembre 1793
« Le roi est malade toujours d’une espèce dévoiement»
(FM, II, 488)
Depuis que sa maladie a empiré fin décembre l’enfant a logiquement reçu des soins (à base d’opium ou autre substance dangereuse ?) des médecins de l’Hôtel Dieu qui savent donc à quoi s’en tenir sur son état. Tout au moins le docteur le Monnier mais aussi peut-être le médecin Naudin qui, alors, soigne madame Simon (visite le 7 nivôse an II), et a certainement dû examiner l’enfant qui, malade lui aussi, vit chez elle.
Le 10 janvier 1794
«Il est très amaigri. »
Le 19 janvier 1794
Simon, rappelé à ses fonctions municipales, quitte le Temple : Simon a dû choisir entre sa place au Temple et son mandat de municipal à la Commune de Paris car on lui refuse le cumul … ; il choisit la Commune. Sa femme le suit peu après. En réalité, on le soupçonne de « royalisme » – bien camouflé sous des jurons révolutionnaires – ce qui était vrai. Il périra avec Robespierre le 8 thermidor an II. On ne prévoit pas de remplaçant pour Louis XVII. Sa femme, malade, quitte donc également la prison.
Si l’enfant royal est mort ou enlevé à l’époque du départ des Simon, le secret en aurait donc été soigneusement maintenu, au cours de l’hiver 1793-94, par la Commune de Paris encore dirigée par Pache et Chaumette et jusqu’en ventôse An II lorsque le maire Pache, envoyé en prison avec sa famille, est remplacé par Payan puis Lescot de Fleuriot, et que Chaumette, Ronsin, Hébert, Chaumette, Deschamps des Tournelles, Vallet de Villeneuve, Proly, Brichet, Péreyra, Guzman, le ci-devant comte Scipion du Roure et autres maratistes de circonstance et/ou piliers de la Commune de Paris sont arrêtés.
L’informateur du gouvernement britannique, qui entrevoit Simon à sa sortie du Temple, ajoute d’autres précisions au sujet du petit prisonnier :
« On ne lui donne, pour l’amuser, que les livres les plus infâmes, et enfin, depuis la mort du roi (Louis XVI, il n’est rien qu’on ne fasse pour le corrompre.»
Drake à Lord Grenville
« (Simon) prétend que, de temps en temps, il sent sa position et se désespère, alors les commissaires (de la Commune) l’étourdissent avec de l’eau de vie et en le faisant jour au billard. Il prétend aussi que plusieurs fois, Hébert l’a menacé de la guillotine, et que cette menace l’effraye si horriblement qu’il a vu souvent cet enfant s’évanouir à cette menace. Les deux gardes nationaux qui ont monté la garde au temple ont appris à peu près des détails semblables, mais ont ajouté que les princesses étaient obligées à laisser leur porte toujours ouvertes et qu’elles étaient persécutées. »
Compte tenu de la situation faite à l’enfant au Temple depuis l’été 1793, sa consommation forcée et régulière d’alcool, son exposition à l’humidité des lieux à la fin de l’automne on peut admettre que sa santé s’est détériorée comme le révèle le bulletin de santé de novembre. Il tousse et il semble atteint de coliques persistantes.
L’hypothèse de son décès prématuré est donc légitime de même que la question de sa substitution éventuelle, même si les dépêches ultérieures adressées par Drake à Lord Grenville laissent penser que à en lire certains documents officiels, l’enfant était encore vivant en février 1794.
Eh pourtant, à la fin de janvier 1794, Louis XVII semble bien portant, si l’on en croit les autorités :
1 – Le procès-verbal de « décharge » de la garde du petit prisonnier, confié aux époux Simon, effectué par le quatre municipaux Legrand, Lasnier, Cocherfer et Lorinet qui précisent que les Simon « leur ont exhibé la personne dudit Capet en bonne santé ».
2 – La déclaration de Lasnier, gardien de Louis XVII, précisant également que les Simon « ont remis cet enfant en bonne santé », déclaration qui parut dans le Moniteur Universel du 3 pluviôse an II (22 janvier 1794).
Après le départ des Simon, Louis XVII déménage et est enfermé au deuxième étage de la Tour.
Mais est-ce le même enfant ? toute la question est là. Si il était mort pour une raison ou une autre, les membres de la Commune avaient tout à redouter la grande colère des comités de gouvernement, et notamment le comité de salut public qui n’a aucun intérêt à perdre son otage précieux. Dans ce cas, de leur propre chef, les meneurs de la Commune de Paris auraient-ils procédé au remplacement du cadavre (enterré anonymement) par un enfant, peut être un orphelin qui mourut lui même un an et demi plus tard (8 juin 1795) ?
Les conclusions des médecins qui l’autopsièrent sont, paraît-il, contradictoires et jettent un doute sur l’identification du corps, notamment le docteur Desault qui ne l’a pas reconnu, témoignage relayé inlassablement son épouse et son entourage après son décès..
A partir de là, commence un état de solitude, de réel abandon.
Louis-Charles est cloîtré dans une chambre du Temple. Il reçoit sa nourriture par un petit guichet et vit dans la pénombre. Les commissaires qui se succèdent chaque jour pour le garder ne peuvent le voir. Pas de visite de médecin.
Le 12 février 1794
Après une longue interruption, nouvelle dépêche relative à l’enfant. Elle est troublante par ce qu’elle suggère :
« Simon devenu si effrayé par le danger qu’il courait (l’enfant ou lui même ?), qu’il se prêtait à tout ce que voulaient les scélérats, ne rendait compte de rien et ne travaillait qu’à la sortie de cette place».
(FM, II, 528)
Dans quelque sens qu’on lit cette phrase on en retient que l’état de l’enfant du Temple est sérieux voire critique et que les autorités de la Commune (les «scélérats») ont demandé à Simon de se montrer discret sur ce qu’il a vu.
Le 10 mars 1794
Une Dénonciation du 20 ventôse an II «relative à des faits qui se sont passé à la garde de la tour du temple et à une consigne qui empêchait les officiers d’Etat major de pénétrer dans cette maison» (AN, W 88, dos. 11, 2 pièces.) laisse penser que la Commune aux abois (ses membres sont arrêtés ces mêmes jours) ne tient pas à ce que des officiers viennent constater ou surprennent des faits relatifs à ce qui s’est passé au Temple.
Le 16 mars 1794
Une Importante déclaration de Georges Couthon, le 26 ventôse an II, à la veille de la chute de la Commune, alors que Ronsin, Vincent, Hébert sont arrêtés, laisse penser qu’il y a eu «conspiration»:
« Les preuves de la conspiration que nous avons dévoilée s’accumulent au Comité de sûreté générale. Je suis chargé de vous faire part d’un fait qu’il n’y a plus d’inconvénients à révéler puisque que les coupables sont en lieu de sûreté, le voici. On a tenté de faire parvenir au Temple, aux enfants Capet, une lettre, un paquet et cinquante louis en or. Le but de cet envoi était de faciliter l’évasion du fils de Capet; car les conjurés ayant formé le projet d’établir un conseil de régence, la présence de l’enfant était nécessaire à l’installation du régent.»
Georges Couthon
La veuve Simon déclare à la Police au début de la Restauration qu’elle a vu des choses lors du déménagement de janvier 1794. Voiture, panier de linge… Elle dit que le Dauphin est sorti du Temple. Elle prétend qu’il est venu la voir à l’hospice sous l’Empire. Puis elle change plus tard de version et dit que c’est le second de cuisine Meunier (en poste à Versailles, aux Tuileries, au Temple) qui lui a dit que l’enfant avait quitté la prison.
Le 24 mars 1794
Jacques-René Hébert est guillotiné : lors de son trajet de la conciergerie à la place de la Révolution, il est hué par le peuple. Quand vient son tour de « jouer à la main chaude » (« être guillotiné »), Hébert doit être traîné à l’échafaud : sa tête montrée par le bourreau est saluée par des quolibets.
Il est vraisemblable que le Comité de salut public, au moment ou la tête de Hébert roule sur l’échafaud, est fixé sur la situation réelle au Temple. Après la mort des hébertistes le Comité de sûreté générale regarde comme inutile la surveillance particulière réduite à deux gardes nationaux pour la famille royale (trois personnes).
Si l’enfant est mort avant la chute de la Commune hébertiste, les mêmes autorités – la Commune de Pache et Chaumette puis le Comité de salut public -, en admettant que tous soient au courant, feraient en logique tout pour cacher ce décès au public. Mais cela ne prouve pas qu’il y ait eu substitution.
Les 27 et 29 mars 1794
Les 7-9 germinal An II une séance de la Commune de Paris :
«On nomme les membres qui doivent aller au Temple y maintenir l’ordre et la tranquillité; le citoyen Cressant est proposé: plusieurs s’opposent à son admission et lui reprochent d’avoir plaint le sort du jeune Capet (sic), d’avoir même recueilli les noms de ceux qui montent journellement au Temple ». Après délibération le conseil arrête l’exclusion de Cressant du conseil, renvoyé à l’administration de police et scellés sur ses papiers (il ne sortira de prison que plus tard). »
Moniteur XX, 69 et 154
On effectue des travaux d’isolation et de confinement strict de l’enfant pour prévenir tout enlèvement. Quatre commissaires sont nommés à cet effet (Moniteur XIX, 239). Depuis cette date sept membres du conseil général de la Commune forment la nouvelle commission spéciale de la surveillance du Temple.
Le Roi semble mieux traité. voir Ng p 564
Le 8 mai 1794
On vient chercher Madame Elisabeth au Temple pour la conduire à la Conciergerie.
En mai 1794
Déposition de Barelle
D’après une dépêche conservée dans les Dropmore papers, Robespierre aurait sorti Louis-Charles (peut-être un autre enfant) de la prison du Temple et l’aurait conduit à la forteresse de Meudon en mai 1794, répétition d’une opération qui pourrait avoir lieu au cas où les armées ennemies encercleraient Paris. On sait que le vieux château de Meudon est alors devenu un arsenal et une réserve de poudre. Si l’information donnée par l’informateur du gouvernement anglais est exacte, on trouve une logique immédiate qui tient à l’inquiétude de Robespierre. Celui ci avait de bonnes raisons de penser que tôt ou tard les armées coalisées encercleraient la capitale. Cette hypothèse n’est pas à rejeter absolument. Pour négocier une porte de sortie pour lui et les membres des comités on peut penser qu’ils avaient l’intention de mettre dans la balance la vie même de l’enfant du Temple qu’on transporterait hâtivement du Temple à Meudon, avec la menace dissuasive d’une explosion des réserves de poudre et le sacrifice de l’otage (cette hypothèse a davantage de sens qu’un nébuleux projet d’exfiltration de cet enfant dont Robespierre se serait rendu complice… mais l’information est peut-être simplement inexacte. Quoi qu’il en soit de ce pont particulier qui a donné lieu à de nombreuses spéculations fantaisistes, les dépêches, issues des Dropmore papers (Public Record office à Londres), sont utilisées et discutées par MM. de Beaucourt et Gustave Bord, historiens «royalistes» qui contrairement à MM. Alphonse Aulard et Albert Mathiez (dont les théories y sont parfois mises à mal), pensent qu’elles contiennent des vérités. Comme souvent, la «vérité», justement, est entre deux. Les informateurs des cabinets étrangers se trompent ou sont mal renseignés sûrement plus qu’ils ne cherchent à tromper (comme cela a parfois été exagérément soutenu par Jacques Godechot).
Le 10 mai 1794
Exécution de Madame Élisabeth.
Madame Royale reste seule au Temple, au dessus de chez son petit frère…
On sait que la Commune de Paris et la haute administration du ministère de la guerre, à savoir Bouchotte, Ronsin, Vincent, Turreau, Quétineau, Hanriot, Santerre etc. sont, en ce même hiver 1794, au moment de tenter un coup d’état militaire contre la Convention et ses comités tout puissants qu’ils critiqueent. Ils désirent imposer à la France entière le gouvernement de Paris et de ses sections, appuyés sur un conseil de régence dont Jean-Nicolas Pache (1746-1823) serait Grand Juge. On sait aussi que le général Henriot à la veille de la révélation du complot «pachiste» par (selon la tradition) le sieur Souberbielle, lui même médecin de Robespierre qui lui a fait part de ses craintes, est pardonné par Robespierre. Celui-ci demande aussitôt à Saint-Just et aux comités de gouvernement de reprendre la Commune et sa force armée en main, de décapiter sans délai le mouvement popularisé par Hébert et d’épurer la Commune «gangrenée par l’étranger» (Pache est arrêté et remplacé par Lescot de Fleuriot).
En mai, l’enfant du Temple semble se bien porter, ce qui n’est pas le cas de sa sœur qui doit être accablée de chagrin depuis le départ de sa tante Elisabeth dont elle ignore le sort :
Ceux qui ont eu l’occasion de voir Louis XVII dans le lieu où les tyrans le retiennent en captivité s’accordent à dire qu’il est de la plus belle figure. On le coëffe d’un bonnet rouge, on l’occupe à faire des souliers, on lui paye son travail avec des sous de fonte des cloches, et on le laisse jouer avec des polissons. Quant à madame, sa sœur, elle a dépéri d’une manière effrayante, on la fait travailler à des chemises pour la nation.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 12 juin 1794, p.1340
Le 11 juin 1794
Le citoyen Desault chirurgien major du grand hospice de l’humanité de Paris (est) arrêté au moment où il donn(e) sa leçon et conduit à la Maison d’arrêt du Luxembourg. Le citoyen Manoury (est) nommé pour le remplacer provisoirement.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 11 juin, p.1402)
Le 27 juillet 1794
Chute de Maximilien de Robespierre ( né le 6 mai 1758), il est guillotiné le lendemain.
… Antoine Simon fait partie du convoi de la guillotine.
Marie Jeanne Aladame (1745-1819) la veuve Simon, ancienne domestique entrée aux Incurables en 1796, assurera toujours que l’enfant mort en janvier 1794 fut remplacé, et cela jusque sous la Restauration où, pressée par Decazes elle soutiendra une version contraire. Jusqu’à sa mort, le 10 juin 1819) elle assure néanmoins aux religieuses qui s’occupent d’elle que l’enfant du Temple a été substitué (remplacé), alimentant une rumeur qui a marqué l’historiographie légitimiste.
Jusqu’au 28 juillet 1794
Louis-Charles est enfermé au secret dans une chambre obscure, sans hygiène ni secours, pendant six mois. Son état de santé se dégrade, il est rongé par la gale et surtout la tuberculose. Il vit accroupi. Sa nourriture lui est servie à travers un guichet et peu de personnes lui parlent ou lui rendent visite. Ces conditions de vie entraînent une rapide dégradation de son état de santé. L’isolement total dans lequel il est placé laisse planer un certain mystère et donne l’occasion à l’imagination populaire de soulever l’hypothèse de substitution de l’enfant et de son exfiltration, donnant naissance au « mythe évasionniste et survivantiste ».
Le 28 juillet 1794
Le député Barras découvre ainsi un enfant mutique, brisé psychologiquement. Les comités de salut public et de sûreté générale nomment Laurent, membre du comité révolutionnaire de la section du Temple, pour le garder, lui et sa sœur.
Son sort s’améliore relativement, mais le prisonnier de la tour du Temple est rongé par la tuberculose, ce qu’omet de signaler Laurent lorsqu’il écrit, sur le bulletin de la tour du Temple, que les prisonniers « se portent bien ».
Après le 27 juillet 1794
Après le 9 thermidor, Barras fait désigner comme garde le citoyen Laurent, ancien président de la section du Temple, avec ordre d’améliorer les conditions de détention de l’enfant.
Le 9 novembre 1794
Jean-Baptiste Gomin (1757-1841), fils d’un tapissier de l’île Saint-Louis, est nommé adjoint de Laurent et devient gardien des enfants de France à la prison du Temple. L’enfant est décrit en bonne santé mais il doit certainement y avoir des signes avant coureur de sa maladie qu’ils ne perçoivent pas.
Le 19 décembre 1794
C’est seulement lors de la visite, le 19 décembre 1794 (et non en mars 1795), des citoyens représentants du Comité de sûreté générale Harmand, Mathieu et Reverchon qu’on constaterait, prétendra beaucoup plus tard Harmand, des anomalies physiques (tumeurs au genou droit et au poignet gauche) et psychologiques (mutisme).
Entre décembre 1794 et mai 1795
Aucune disposition sur la santé de Louis Charles n’est prise par l’exécutif. L’indifférence semble prédominer.
Cette indifférence à soigner l’enfant pourrait bien avoir un rapport avec les négociations de paix en cours avec l’Espagne qui réclame, entre autres, les deux enfants de Louis XVI. La République craint, elle, d’abandonner son otage qui permettrait à ses ennemis de relancer la coalition et de réactiver la guerre pour organiser une restauration de leur choix. La mort de l’enfant arrangerait la haute politique française.
Retrouver les portraits authentiques du petit Roi relèverait, si l’on en croit tout ce qui a été dit, écrit et publié, de l’enquête policière. Eh pourtant, c’est bien le peintre Greuze de Tournus qui est la piste la plus intéressante. En 1791, avant l’incarcération de la famille royale, il a fait un premier portrait de l’enfant alors qu’il n’avait que six ans (en dessous, à gauche). Il n’est pas besoin d’être un grand spécialiste pour constater une ressemblance probable avec le portrait oublié que j’ai replacé au milieu, compte tenu, bien entendu, qu’en quatre ans, un visage d’enfant s’allonge mais que certains détails ne changent pas (la bouche avec sa lèvre inférieure déjà bourbonienne, la chevelure, le nez, les yeux). L’enfant a pourtant bien changé. Les épaules sont tombantes, la poitrine étroite et rentrée, le visage émacié. Les joues se sont creusées, la bouche ne sourit pas et le regard n’est plus le même.
Ce tableau oublié tout à fait inconnu s’est vendu dans une salle des ventes parisienne, le 11 octobre 1981. La description était la suivante : «Portrait présumé du dauphin Louis XVII, attribué à Greuze» L’inscription collée au dos donnait les précisions suivantes : «Portrait du dauphin Louis XVII à l’âge de dix ans. Huile sur toile attribuée à Greuze, non signée, portant en haut et à droite les armes de la famille royale de France.»
Le tableau est merveilleusement peint. Les cheveux blonds sont d’une grande finesse. L’expression du visage est d’une étrange délicatesse mais révèle un état maladif. Madame Vigée Le Brun, amie de Marie-Antoinette qui fit plusieurs portraits de la famille royale ayant émigré dès 1789, ne peut en être l’auteure. En revanche, plusieurs artistes ont pu peindre l’héritier de la couronne. Tout d’abord Ducreux qui a dessiné Louis XVI au Temple, Prieur qui peignit Marie-Antoinette à la Conciergerie, et tous ceux qui firent les portraits des héros de la Révolution… mais c’est bien le tournusien Greuze qui est la piste la plus crédible. Il était alors à Paris. C’est d’ailleurs l’hypothèse retenue dans le catalogue «Chrysanthemum» qui fait par ailleurs remonter l’origine du tableau jusqu’au baron Mayer de Rothschild.
Il s’agit de Louis XVII dans sa triste authenticité et non dans une posture académique d’enfant royal.
Le 31 mars 1795
Laurent démissionne. Il est remplacé par Etienne Lasne (1757-1841), ancien peintre en bâtiment, de la section Des droits de l’homme.
Les citoyens Lasne et Gomin traitent l’enfant avec douceur mais son état les inquiète.
Le 13 avril 1795
« Un enfant vivant est au Temple : il est incommodé selon un rapport de Sevestre sur le caractère et les signes extérieurs de la maladie.»
(source ? Moniteur XXIV, 650)
Le 3 mai 1795 (14 Floréal an III)
Les gardiens Gomin et Lasne inscrivent sur les registres du Temple « Le petit Capet est indisposé ».
Le 6 mai 1795 (17 Floréal an III)
La tuberculose prend un tour critique, caractérisé par l’apparition d’une péritonite.
Dans les derniers jours de mai 1795
Les gardiens signalent au comité de Sûreté générale que l’enfant Capet manifeste « une indisposition et des infirmités qui paraissent prendre un caractère grave ».
Cette fois le gouvernement réagit. Le docteur Desault médecin chef de l’Hôtel Dieu, examine l’enfant et prétend, dit-on, ne pas le reconnaître (ce que confirme son épouse), confirme la gravité de l’état du malade mais … meurt les jours suivants. On le remplace par ses collègues Pelletan, chirurgien, qui observe certains symptômes caractéristiques révélant un stade avancé d’une maladie infectieuse mortelle, et demande confirmation de diagnostique à son collègue Dumangin qui l’approuve. Il s’agit pour eux d’un «vice scrofuleux» qui signifie tuberculose osseuse. Cette maladie a frappé son frère aîné, décédé le 4 juin 1789. Il est possible que les carences en vitamines C et D, le confinement et le manque d’exercice prolongé après le départ des Simon, ou encore l’humidité aient favorisé l’apparition de cette maladie chez Louis-Charles. Il est possible enfin que Marie-Antoinette ait été porteuse saine de cette maladie et l’ait transmise à ses deux fils, mais il n’y a aucune évidence à cela.
Le Comité « arrête que le premier officier de santé de l’hospice de l’Humanité visiterait le malade en présence de ses gardiens et administrerait des remèdes ». Le docteur Desault passe à cette époque pour être le premier praticien de Paris.
Pendant tout ce temps, l’état du petit Roi s’est tellement aggravé qu’enfin, à la demande pressante des geôliers, on fait venir un médecin. M. Desault le soigne et lui prescrit quelques remèdes, bien qu’il fait comprendre dès le début à Gomin qu’il a peu d’espoir de guérison pour l’enfant. Ils le déplacent dans une pièce plus claire et ensoleillée, mais il est très faible et le changement ne freine guère la progression de la maladie. Bien que son bon ami le conduise souvent jusqu’à la plate-forme de la Tour, le léger mieux apporté par la respiration de l’air frais compense à peine la fatigue que lui coûte l’effort.
Le 29 mai 1795
Desault fait sa dernière visite au malade car il meurt le 1er juin, à l’âge de cinquante-sept ans.
Madame de Tourzel parvient à s’assurer des contacts avec Gomin et Lasne, anciens commissaires de la Commune de Paris, en charge de la surveillance du petit Roi au Temple. Elle prend connaissance des interventions de Desault et Pelletan, les derniers médecins qui tentent d’adoucir les souffrances de l’enfant … Le témoignage du docteur Jeanroy, « un vieillard de plus de quatre-vingts ans, d’une probité peu commune et profondément attaché à la famille royale. Il (a) été choisi pour assister à l’ouverture du jeune roi ; et pouvant compter sur son témoignage comme le mien propre, (elle) le f(ait) passer chez (elle)».
De réputation fiable et solide, qui l’a fait choisir par les membres de la Convention pour fortifier de sa signature la preuve que le jeune roi n’a pas été empoisonné.« Ils n'(ont) pas eu besoin d’employer le poison : la barbarie de leur conduite vis-à-vis d’un enfant de cet âge d(oit) immanquablement le conduire au tombeau. Sa bonne constitution prolongea so n supplice ; la malpropreté dans laquelle on le laissait volontairement et le défaut d’air et d’exercices, lui avaient dissous le sang et vicié toutes les humeurs.»
Madame de Tourzel
Pour la marquise, le jeune prince est bien mort au Temple.
Les trois médecins de Louis XVII au Temple meurent presque en même temps
Le 1er juin 1795
Mort de Pierre Joseph Desault, né à Vouhenans (Haute-Saône) le 6 février 1738 d’une famille rurale de sept enfants et mort à Paris , il était chirurgien et anatomiste.
Le 5 juin 1795
François Doublet, né le 30 juillet 1751, était médecin de la faculté de médecine de Paris et membre de la société royale de médecine.
Le 6 juin 1795
Le docteur Pelletan, quarante-huit ans, chirurgien en chef de l’Hospice de l’Humanité, succède au docteur Desault.
Ne voulant pas prendre seul la responsabilité de soigner l’enfant, le Comité de sûreté général lui adjoint le docteur Dumangin, cinquante-et-un ans, médecin chef de l’hospice de l’Unité (Hôpital de la Charité de Paris). Ils n’ont aucun espoir. Ils lui font prendre des médicaments qu’il avale avec difficulté. Heureusement, sa maladie ne le fait pas beaucoup souffrir ; c’est une débilité et un dépérissement total plutôt qu’une douleur aiguë. Il a plusieurs crises pénibles ; la fièvre le saisit, ses forces diminuent de jour en jour, et il expire sans lutte.
Dans la nuit du 7 au 8 juin 1795
Gomin et Lasne alarmés par l’état de santé de l’enfant ont envoyé cherché en urgence le docteur Pelletan. Il répond qu’il viendra demain matin avec le docteur Dumangin.
Le lundi 8 juin 1795 (20 prairial an III)
Les docteurs Dumangin et Pelletan arrivent ensemble à onze heures du matin au Temple, l’état de l’enfant s’est aggravé.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
« Le sieur Lasne gardien et moi, nous prêtions nos soins au petit dauphin, et enfin à trois heures (de l’après-midi) lorsque le sieur Gomin fut revenu, l’enfant venait de mourir ». Pelletan arrivé à quatre heures confirme la mort. Le docteur Dumangin arrive à huit heures, il apprend le décès du fils Capet.»
Témoignage de Damont commissaire civil au Temple
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Les commissaires le pleurent amèrement, tant il s’est fait aimer par ses douces qualités. Il avait beaucoup d’intelligence ; mais l’emprisonnement et les horreurs dont il est la victime l’ont beaucoup changé ; et même, s’il a vécu, il est à craindre que ses facultés mentales ont été atteintes. Le seul poison qui a abrégé sa vie est l’impureté, jointe aux traitements horribles, à la dureté et à la cruauté sans exemple exercés sur lui.
Le 9 juin 1795
A onze heures du matin, le chirurgien Philippe-Jean Pelletan réalise son autopsie qui confirme le diagnostic de tuberculose. Il est secondé par trois médecins dont le docteur Dumangin. C’est justement dans ce rapport d’autopsie que le docteur Pelletan va aussi raconter une idée que lui est venue à l’esprit : celle de s’emparer en toute discrétion du cœur de l’enfant mort et le garder dans sa poche. Après, le cadavre du petit Roi va être jeté dans une fosse commune au cimetière de Sainte-Marguerite. Il va le garder dans l’alcool et le cœur va devenir dur comme de la pierre.
« Vous m’aviez à la vérité proposé d’autres adjoints; et sur mon observation que, d’après les qualités personnelles et les rapports qu’avaient eus M. Pierre Lassus (1741-1807) avec Mesdames de France et Nicolas Dieudonné Jeanroy (1750-1816) dans la Maison de Lorraine, leurs signatures seraient d’un tout autre poids, vous aviez agréé ce choix. »
Le docteur Dumangin rédige le procès-verbal d’autopsie, recopié en quatre exemplaires : Un pour le Comité de sûreté générale et un pour chaque médecin. L’exemplaire du docteur Dumangin est conservé aux Archives Nationales depuis 1891.
« Des doutes intempestifs se sont élevés sur l’identification du cadavre car on n’a pas pensé (ou voulu ? disent certains) le présenter à Marie-Thérèse Charlotte, sa sœur, ni à madame de Tourzel sortie de prison, ni à Hue, ni à Tison, ni à Marie Jeanne Aladame, la veuve de Antoine Simon, ni à aucun des anciens médecins du dauphin (le docteurs Brunier et le docteur Naudin, médecin des prisons). Mais il a été reconnu par un ancien garde national (le citoyen Gagnié, «ancien chef du Temple»), présent à l’autopsie, qui déclara en août 1817 avoir vu le dauphin aux Tuileries, tenant la main à sa mère et se promenant dans son petit jardin aménagé.»
Ce même jour
François Chopart, chirurgien, né le 30 octobre 1743 à Paris, y meurt à l’âge de cinquante-et-un ans.
Il se dit que Pierre Joseph Desault, François Doublet et François Chopart en savaient trop sur l’autopsie d’un faux Louis XVII, il ne fallait pas qu’ils puissent parler : on les a empoisonnés.
Le 12 juin 1795
Louis-Charles est enterré dans le cimetière Sainte-Marguerite. Sous la Restauration, Louis XVIII fait rechercher la sépulture de son neveu : l’énigme de « l’enfant du Temple » se développe alors avec les témoignages contradictoires de ceux qui ont assisté à l’enterrement le 10 juin (fossoyeur, concierge du cimetière, abbé …) qui évoquent une inhumation en fosse commune (le corps ne pouvant dès lors plus être identifié), une réinhumation dans une fosse particulière près de la Chapelle de la Communion de l’église, voire dans le cimetière de Clamart.
Le 12 juin 1795 (24 prairial an III)
L’acte de décès de Louis XVII est rédigé. L’original du document a disparu dans les incendies de la Commune de 1871 mais l’acte avait été recopié par des archivistes et un exemplaire se trouve aussi aux Archives Nationales :
« Du vingt-quatre prairial de l’an trois de la République (12 juin 1795)
Acte de décès de Louis Charles Capet du vingt de ce mois (8 juin), trois heures après-midy, âgé de dix ans deux mois, natif de Versailles, département de Seine-et-Oise, domicilié à Paris aux Tours du Temple, section du Temple, fils de Louis Capet, dernier roy des Français, et de Marie Antoinette Josèphe Jeanne d’Autriche.
Sur la déclaration faite à la maison commune, par Etienne Lasne, âgé de trente-neuf ans, profession gardien du Temple, domicilié à Paris rue et section des Droits-de-l’Homme n° 48 : le déclarant a dit être voisin ; et par Rémy Bigot, âgé de cinquante-sept ans, profession employé, domicilié à Paris vieille rue du Temple n° 61 : le déclarant a dit être ami.
Vu le certificat de Dussert, Commissaire de Police de ladite section, du vingt-deux de ce mois (10 juin). Officier public : Pierre Jacques Robin.
(Signé) : Lasne, Robin, Bigot. »
Le 24 juin 1795
Monsieur, toujours en émigration , est proclamé Roi sous le nom de Louis XVIII.
Dès 1795, des rumeurs faisaient courir le bruit que le Dauphin, remplacé dans sa geôle par un autre garçon, aurait été libéré du Temple. Ces rumeurs avaient été favorisées par les exhumations des restes d’un enfant au crâne scié — traces d’une autopsie — du cimetière Sainte-Marguerite (au cours des deux exhumations réalisées en 1846 et en 1894, plusieurs spécialistes attribuent pourtant le corps à un sujet masculin âgé de plus de seize ans, d’1,63 m et de morphologie différente de celle de Louis XVII) et l réaction thermidorienne : tandis que les royalistes osaient à nouveau s’afficher comme tels, des accords de paix étaient négociés entre la République et les révoltés vendéens et chouans ( traités de La Jaunaye, de la Mabilais et de Saint-Florent-le-Vieil ). La mort du petit Roi, en juin de cette même année, fut par conséquent accueillie avec scepticisme par une partie de l’opinion publique. Ce contexte permit l’éclosion de théories «évasionnistes» et «survivantistes» …
Dès le début du XIXe siècle, des «faux Dauphins» commencèrent à apparaître et à réunir un nombre variable de partisans autour de leurs prétentions. Les condamnations des trois premiers (Hervagault, Bruneau et un certain Hébert, connu sous le titre de «baron de Richemont») à de lourdes peines de prison ne découragèrent pas d’autres imposteurs, dont le plus célèbre est l’horloger prussien Karl-Wilhelm Naundorff (date de naissance inconnue-10 août 1845), qui eut de nombreux adeptes jusqu’à la fin du XXe siècle.
Dans les récits qu’ils firent de leur prétendue évasion du Temple, la plupart de ces prétendants reprenaient la trame du roman de Regnault-Warin, qui évoque des agents royalistes envoyés par Charette qui s’introduisent dans la tour, où ils apportent, au moyen d’une cachette ménagée dans un « cheval de bois », un orphelin drogué à l’opium destiné à prendre la place du vrai Dauphin. Ce dernier, dissimulé dans le même objet, est ainsi libéré de sa prison. Aux termes de nombreuses péripéties, et notamment d’une tentative d’exfiltration vers l’Amérique, l’orphelin royal est repris avant de mourir de maladie.
Malgré les nombreuses invraisemblances et le triste dénouement de ce récit, la thèse de la substitution gagne ainsi un nouveau mode de diffusion le cheval de bois étant quelquefois remplacé par un panier de linge sale, et Charette par le comte de Frotté, ce dernier ayant effectivement échafaudé, sans pouvoir y donner suite, des projets d’enlèvement des orphelins royaux.
Aux imposteurs plus ou moins convaincants s’ajoutent de nombreux fous (comme Dufresne, Persat et Fontolive) ou encore des personnages dont l’identification à Louis XVII a surtout été l’œuvre de tiers, le plus souvent de manière posthume : c’est notamment le cas de l’officier de marine puis architecte français Pierre Benoît (actif à Buenos Aires ), du pasteur iroquois Eliézer Williams, du musicien anglais Augustus Meyes, du célèbre naturaliste John James Audubon et même de Louvel (assassin du duc de Berry, cousin de Louis XVII).
Les circonstances exactes de la mort de Louis XVII et la rumeur concernant une éventuelle évasion de la prison du Temple ont attisé la curiosité de nombreux auteurs, comme Gosselin Lenôtre (1855-1935), André Castelot (1911-2004) ou Alain Decaux (1925-2016).
Il demeure quelques partisans de la survivance du prince.
A partir de 1798 commence la saga des faux dauphins.
Ainsi ce début du XIXe siècle verra-t-il revenir de nombreux prétendants au titre de Louis XVII – on en a comptés environ cent cinquante… : le baron de Richemont, l’horloger prussien Karl-Wilheim Naundorff, Jean-Marie Hervagault ou Mathurin Bruneau ont pu chercher à rencontrer la duchesse d’Angoulême pour se faire reconnaître.
Marie-Thérèse n’en reçut aucun !
Le dénommé Jean-Marie Hervagault, en fugue pour la dixième fois, annonce qu’il est Louis XVII (des rumeurs circulent dès 1795 sur la survie de Louis XVII). Il sera jugé et finira ses jours en prison en 1812. Notons que lors d’une fugue précédente, son père n’a pas voulu le reconnaître !
Sous le Consulat
Barras, l’un des responsables du renversement de Robespierre en 1794 et directeur de la République de 1795 à 1799, a bénéficié d’un traitement de faveur de la part de Louis XVIII ) partir de 1814. Il n’est pas exilé, comme beaucoup d’anciens députés de la Convention (1792-1795).
Il a déclaré sous le Consulat, lors d’un repas, que le fils de Louis XVI était vivant et qu’il «verrait pendre ce diable de corse». Témoignage devant notaire d’une invitée.
Sous le premier Empire
Si l’on en croit les « Mémoires de Talleyrand », à entendre Joséphine de Beauharnais, Napoléon considère avoir la preuve absolue de l’existence de Louis XVII. Il en est si sûr qu’il dit souvent à son entourage : « Quand je voudrai, je sèmerai la discorde dans la famille du prétendant ! ».
En 1814
L’empire français s’écroule et Napoléon prend pour la première fois le chemin de l’exil. Quant à Joséphine, lorsque le Czar Alexandre va la visiter, il lui dit : « Qui mettrons nous sur le trône de France, Madame ? », elle lui répond : « Mais le fils de Louis XVI, évidemment ».
A la Restauration
Voici l’ignare Bruneau et le dandy «Baron de Richemont».
Puis arrive Naundorff, apparu en Prusse. On trouve des traces de lui en 1809.
Le docteur Pelletan va essayer de rendre ce cœur à la famille du petit Roi pendant la restauration, mais ils vont refuser et finalement il va le donner à Monseigneur de Quelen, archevêque de Paris. Pendant la révolution de 1830 l’archevêché va être pillé et le cœur va être récupéré par le fils du Docteur Pelletan qui va se rendre personnellement à l’archevêché pour sauver la royale relique.
Un témoignage navrant du citoyen Gagnié «ancien chef du Temple» est cité dans l’instruction commandée par Louis XVIII au sujet de la détention et de la mort de son neveu. Il assure avoir vu plusieurs fois le Dauphin avec sa mère et c’est le même enfant qu’il découvrit au Temple pendant l’hiver 1795-96 :
« En montant l’escalier qui conduisait au corridor attenant à la chambre de Louis XVII, je sentis une odeur extrêmement infecte qui sortait de la susdite chambre dans laquelle on entrait pas et voyant que depuis trois jours l’enfant renvoyer ses aliments tel qu’on lui portait, je demandai d’obtenir promptement une autorisation du Comité de sûreté générale et de faire ouvrir la porte de sa prison, ce qui fut exécuté, et je proteste qu’en entrant, je vis le jeune prince courbé et accroupi ayant ses bras retresés (sic), une tumeur au genou et au bras dans l’impossibilité de se redresser et ayant le cou rongé de gale, que l’ayant interrogé sur ce qu’il n’avait pas pris de nourriture depuis trois jours, il me répondit: «Que veux tu mon ami, je veux mourir.» Je certifie de plus que cet enfant était véritablement le fils de Louis XVI que j’avais vu aux Tuileries, le même que j’avais vu amené au Temple avec le roi et prendre ses récréations dans le jardin en présence de toute sa famille, enfin le même que je vis après la mort de Louis XVI lorsqu’il fut visité en présence d’un municipal qui était médecin, en ma présence et celle de M. Caillieux, administrateur. La reine craignant que ce ne fut une hernie mais elle sut que ce n’était qu’une glande engorgée que je fus même chargé d’acheter un bandage, le même à qui je donnai des serins et des pigeons lorsqu’il était avec le même Simon, le même que je vis au billard avec La Bazanerie chef de Bataillon (….) Fait à Paris le 27 juillet 1817 et signé Gagnié, ancien chef du Temple.»
En 1819-1820
Naundorff aurait contacté le duc de Berry, fils du futur Charles X. Il se rend en France dans les années 1830, vivant de l’hospitalité de ses partisans. Certaines personnes ayant connu Louis XVII reconnaissent en lui le fils de Marie-Antoinette. Mais que peuvent valoir ces témoignages quarante ans après les faits ? Naundorff donne des renseignements sur la vie du Dauphin. A-t-il soutiré ces informations des gens qui le reconnaissaient ?
Naundorff est expulsé de France. Il vivra à Londres, fondera une religion, partira pour les Pays-Bas où il mettra une bombe connue sous le nom de «bombe Bourbon». Le Roi l’autorise à porter le nom de Bourbon. Naundorff meurt à Delf. Ses partisans se battront pendant des décennies pour sa reconnaissance. Sa famille existe toujours. Une branche vit en France, l’autre au Canada. Elle a été déboutée lors d’un procès en 1954.
Le 13 février 1820
Assassinat du duc de Berry (1778-1820), fils du comte d’Artois (1757-1836).
Le 14 février 1820
La mort du duc de Berry
On a prétendu que Louis Louvel (1783-1820), l’assassin, pouvait être Louis XVII car Louis XVIII l’aurait autorisé à se rendre à l’échafaud coiffé d’un chapeau… Louvel était sobre et travailleur. Il était cultivé, ne se liait à personne. Il a toujours dit avoir agi seul.
Louvel-Louis XVII. des confidences ? De qui ? Ils sont tous morts !
1: le vrai Louvel était en pension de juin 1791 à octobre 1795, donc possibilité d’introduire dans la famille Louvel un inconnu et de le faire passer pour le fils de la famille de retour à Versailles (1794);
2: Robespierre est passé devant chez les Louvel à Versailles tous les jours d’avril à novembre 1789 (première possibilité d’un lien). Robespierre est à Versailles le 20 juin 1791 quand le père Louvel envoie à Paris le futur régicide, en pension. Aurait-il profité du carrosse de Robespierre ? Il a été dit que Robespierre aurait postulé ou aurait été pressenti pour devenir gouverneur du Dauphin. Du moins son nom a circulé pour occuper la charge.
3: Le conventionnel Lecointre accompagne Robespierre le 17 juillet 1791 ( jour de la fusillade du champ de Mars) dans la quête d’un abri sûr. Les Lecointre et les Louvel sont liés (le père Lecointre était parrain chez les Louvel). Et nous retrouvons le soir de la chute de Robespierre Lecointre festoyant avec Barras et les autres membres de la conjuration qui fit chuter le « tyran ».
Un lien Robespierre – Lecointre – famille Louvel ; un second, Barras – Lecointre – famille Louvel !
4: En 1804, Louvel déclare avoir 19 ans (âge de Louis XVII), alors qu’il en a presque 21 ! (ce n’est pas un témoignage, c’est marqué sur son livret ouvrier !)
5: En 1806, Louvel est réformé de la Garde Impériale par Larrey et Sue, amis de Desault, médecin au Temple en mai-juin 1795. Louvel est affecté à l’Artillerie de la Garde Impériale, à Paris, en 1805. Il fut réformé pour varicocèle.
6 : En 1814, Louvel, qui n’aime pas l’armée, rejoint Napoléon à l’île d’Elbe. il y restera deux mois comme sellier. A-t-il voulu parler à l’empereur ?
7 : L’abbé Arnoux, chargé par la famille royale de tirer les vers du nez du régicide, meurt à 28 ans le jour de l’ouverture du procès Louvel ! (d’une maladie poitrinaire, officiellement).
8 : Louvel écrit : je n’ai pas déshonoré ma Nation, je n’ai pas déshonoré ma fille. N’ayant pas d’enfant, la fille de Louvel est-elle la Nation ? (texte lu aux pairs de France).
9 : Louvel ressemble étrangement à Joseph II d’Autriche, oncle de Louis XVII (test réalisé sur quinze personnes – onze ont mis Joseph II en premier, et François II en second, cousin de Louis XVII – sur vingt portraits de même taille).
Les oreilles de Louis XVII et de Louvel présentent de fortes ressemblances.
10 : Louis XVIII ordonne une messe à la mémoire de Louis XVII pour le 8 juin 1821, soit un an et un jour après la mort du régicide. (cérémonie annulée). C’est la première fois que Louis XVIII ordonne cela.
11 : En 1816, Louis XVIII fait effectuer des recherches sur les restes de Louis XVII au cimetière Sainte-Marguerite. Le jardinier en chef des jardins du Luxembourg, Toussaint Charpentier, déclare au préfet Anglés qu’au moment de l’enterrement de l’enfant du Temple, on lui fit creuser de nuit une fosse au cimetière de Clamart pour recevoir un petit cercueil. Une personne de la Municipalité aurait déclaré que le petit Capet aurait bien du chemin à faire pour retrouver sa famille.
Ce Charpentier est également employé à Trianon. Son fils en tant que jardinier en chef à partir de 1824. Ces gens connaissent la marraine de Louvel, Madame Belleville. Curieux !
12 : Les restes de Louvel sont transférés dans une fosse commune, mais bien vite, on les exhume et les transporte dans un lieu toujours inconnu. Volonté de Louis XVIII de ne pas créer un lieu de pèlerinage républicain, ou d’inhumer Louvel dans une tombe royale ? (il existe des emplacements vides à la basilique de Saint-Denis).
13 : Le comte de Vaisons (Le Roi perdu, de l’académicien Octave Aubry), qui n’a jamais existé, (mais le général-marquis de Bonneval correspond à son profil) arrête son enquête diligentée par Louis XVIII à la mort de Louvel en juin 1820.
14 : Louis XVII se blessa aux parties génitales en jouant au cavalier avec un bâton, ceci lorsqu’il était encore avec sa mère, sa tante et sa sœur. On lui mit un suspensoir. Louvel avait également un suspensoir. Il avait été réformé de l’Artillerie de la Garde Impériale en 1806 pour varicocèle :
« La varicocèle testiculaire est une pathologie bénigne qui se caractérise par une dilatation des veines au niveau du cordon spermatique. Elle peut causer des problèmes de fertilité chez l’homme.«
Il se pourrait qu’il y ait eu une erreur de diagnostic, de conséquences de l’accident.
Voici l’explication de l’affaire selon Jean-Claude Pilayrou :
Robespierre a enlevé le Dauphin et l’a confié au père Louvel. On sait ce qui adviendra par la suite de Robespierre.
Barras a enlevé le remplaçant de Louis XVII. Caché à St Domingue, il meurt en 1803 ( ?).
Louis XVIII fit faire une enquête par Bonneval. Entre temps, Louvel tue le duc de Berry.
Louis XVIII, qui est perturbé par les apparitions continuelles de faux dauphins (Hervagault, Bruneau, Dufresnes…), se demande si Louvel n’est pas Louis XVII, qui vient de se venger de son état de roi déchu en tuant Berry. Il fera faire une enquête approfondie. Louvel n’ayant pipé mot, il le laissera aller à la guillotine.
Aujourd’hui comme hier, les héritiers du secret gardent le silence. Et l’analyse ADN de 2000 fut un pieux mensonge, destiné à protéger la mémoire du roi assassin: Louis XVII.
Pour Jean-Claude Pilayrou, Louvel serait Louis XVII
Le 17 août 1833
Âgée de soixante-dix ans, Madame Agathe Mottet Rambaud, fait la déposition suivante :
« Dans le cas où je viendrais à mourir avant la reconnaissance du Prince, fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, je crois devoir affirmer ici par serment, devant Dieu et devant les hommes, que j’ai retrouvé, le 17 août 1833, Monseigneur duc de Normandie, auquel j’eus l’honneur d’être attachée depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792, et comme il était de mon devoir d’en donner connaissance à S. A. R. Madame la duchesse d’Angoulême, je lui écrivis dans le courant de la même année. Je joins ici la copie de ma lettre. Les remarques que j’avais faites dans son enfance sur sa personne ne pouvaient me laisser aucun doute sur son identité partout où je l’eusse retrouvé. Le Prince avait, dans son enfance, le col court et ridé d’une manière extraordinaire. J’avais toujours dit que si jamais je le retrouvais, ce serait un indice irrécusable pour moi. D’après son embonpoint, son col ayant pris une forte dimension est resté tel qu’il était, aussi flexible. Sa tête était forte, son front large et découvert, ses yeux bleus, ses sourcils arqués, ses cheveux d’un blond cendré, bouclant naturellement. Il avait la même bouche que la Reine et portait une petite fossette au menton. Sa poitrine était élevée; j’y ai reconnu plusieurs signes alors très-peu saillants, et un particulièrement au sein droit. La taille d’alors était très cambrée et sa démarche remarquable. C’est enfin identiquement le même personnage que j’ai revu, à l’âge près. Le prince fut inoculé au château de Saint-Cloud, à l’âge de deux ans et quatre mois, en présence de la Reine, par le docteur Joubertou, inoculateur des Enfants de France; et de la Faculté, les docteurs Brunier et Loustonneau. L’inoculation eut lieu pendant son sommeil, entre dix et onze heures du soir, pour prévenir une irritation qui aurait pu donner à l’enfant des convulsions, ce qu’on craignait tous que ce sont les mêmes marques que j’ai retrouvées, auxquelles on donna là forme d’un triangle. Enfin j’avais conservé, comme une chose d’un grand prix pour moi, un habit bleu que le Prince n’avait porté qu’une fois. Je le lui présentai en lui disant, pour voir s’il se tromperait, qu’il l’avait porté à Paris. «Non, Madame; je ne l’ai porté qu’à Versailles, à telle époque. » Nous avons fait ensemble des échanges de souvenirs qui, seuls, auraient été pour moi une preuve irrécusable que le Prince actuel est véritablement ce qu’il dit être : l’orphelin du Temple. »
Agathe Mottet – Veuve de Rambaud, attachée au service du Dauphin, duc de Normandie, depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792.
En 1837
« Je déclare ici et sur mon honneur et devant Dieu que le fils de Louis XVI est mort dans mes bras dans la tour du Temple. … Toute ma vie j’ai dit la vérité, ce n’est pas quand j’atteindrai [la fin] que je la trahirai.»
Etienne de Lasne, dans une lettre à A. Beauchesne
Au début de 1841
Sous la signature de Gozzoli, rédacteur-gérant de La Voix d’un proscrit, Laprade (qui avait été affublé du titre de « président du conseil de l’Eglise catholique évangélique« ) et cinq autres compères, publièrent un désaveu cinglant de leur adhésion à la cause naundorffiste. (Nous savons par l’abbé Laprade que Morel de Saint-Didier lui-même, sans signer le document, en partageait l’esprit.) Ils y rapportent comment, ayant enquêté sur le passé du bonhomme, ils ont été contraint de conclure à la supercherie. Ils mettent en cause la réalité des apparitions, la moralité personnelle de leur ancien «roi», soulignent les contradictions de la doctrine – bref, ils sapent l’édifice qui les a portés pendant tant d’années.
Le 22 juin 1841
L’abbé Laprade écrivait une lettre sévère, à la mesure de sa tristesse et de ses remords :
« Pauvre sire de Normandie qu’as-tu fait de ta baguette, que sont devenus tes talismans imaginaires?(…) quand je songe à mes dispositions d’autrefois et à mes sentiments d’aujourd’hui, je suis si honteux et humilié de mon passé que je voudrais être trois fois taupe pour ne plus le voir et trois mille fois lièvre pour ne plus le rappeler. Quoi! des hommes généreux et intelligents avaient pu planter un drapeau près de l’hôtel de Camberwell? Ils avaient pu faire à cet homme l’honneur de le regarder comme pouvant être de quelque poids dans la balance des destinées humaines…ma foi, ma foi; convenons-en, nous étions en démence. Aussi, dès que j’ai eu aperçu le bout des oreilles de notre Guillot je l’ai fui à toutes jambes et je cours encore..»
Le 10 août 1845
« Nous soussignés, docteurs-médecins en fonctions à Delft, Jean Soutendam et Jean-Gérard Kloppert, autrefois Officier de Santé, et comme tel adjoint comme médecin consultant par feu Son Excellence le ministre List, déclarons avoir traité en 1845 celui qui se nommait Charles-Louis de Bourbon duc de Normandie.
« Beaucoup d’intérêt fut témoigné à l’auguste malade. Des bulletins furent envoyés journellement sur l’état de sa santé au ministre susdit, qui de temps en temps vint en personne prendre des informations. […] Les pensées du malade s’arrêtaient principalement sur feu son malheureux père, Louis XVI, sur le spectacle effroyable de la guillotine ; ou il joignait les mains pour prier et demander, avec des paroles entrecoupées, de bientôt rejoindre au ciel son royal père. Presque jusqu’au dernier soupir ce fut ainsi. Et Charles-Louis de Bourbon mourut en notre présence le 10 août 1845. »
On a retrouvé sur le corps du dénommé Naundorff les sept spécificités corporelles qu’auraient eues Louis XVII et qui étaient connues et témoignées selon certains, et également archivées dans les rapports médicaux (Archives de Versailles), sans que les naundorffistes ne montrent cette pièce en question.
Cette pièce importante se trouve à Deft : Archives Notariales de Deft et copie conforme au Archives Bourgmestrales – volume 46, folio 35, verso 3 à 7.
Voici le procès verbal :
« Aujourd’hui 12 août 1845, le soir à 6 heures et à la requête de Charles Edmond de Bourbon, aussi connu sous le nom de Naundorff, demeurant à Deft en la rue dite de Voostrat, section 5, n° 85, accompagné de M. Cornélis Théodorus Van Meurs, major d l’Artillerie, chevalier du Lion néerlandais, du Maître Jacobus Van Buren, avocat et juge demeurant à…et connu de moi, notaire.. »
« Moi, notaire, Simon Adrianus Sholten, notaire de l’arrondissement de la Haye, résidant à Deft, assisté de Messieurs Carel Heyne den Back, employé au secrétariat de la Vielle et de Adriaan Mardus Schagen Van Leewen, employé à mon étude, connus de moi, notaire, je me suis rendu à une maison située à l’Oude-Deft, section2, n°62 à Deft où le requérant m’a montré dans une des chambres un cadavre qu’il déclara à moi, notaire, être celui de Charles Louis, Duc de Normandie ( Louis dix-sept), ayant été connu sous le nom de Charles Guillaume Naundoff, né au Château de Versailles en France, le 27 mars 1785 … »« Le requérant, Charles Edmond de Bourbon, fait cette déclaration en présence des ci-dessus nommés Van Meurs et Van Buren qui déclarent par ceci reconnaître le cadavre montré pour celui du père du requérant. »« Ainsi furent présents : M. Jean Sontendam, docteur-médecin, demeurant à Deft, Louis Snabilié, docteur-médecin, premier officier de Santé de la 2ème classe, chevalier de l’Ordre Militaire de Guillaume, Joannes Gerdus Kloppert, docteur médecin et accoucheur, officier de santé de 2ème classe, demeurant à Deft, connus de moi, notaire lesquels Messieurs déclarèrent reconnaître le cadavre montré pour celui de la personne qu’ils on traitée médicalement en sa dernière maladie. »
« Et le requérant a prié les médecins susnommés d’expliquer leurs expériences des signes extérieurs qui caractérisaient le cadavre et après avoir examiné à cette fin le cadavre prescrit, les nommés médecins ont noté les signes suivants :.. »
Sont énumérées les sept spécificités corporelles qu’avaient Louis XVII :
1. Le naevius maternus à la cuise ;
2. L’excroissance du sein droit ;
3. Le cou très ridé ;
4. Disposition des deux incisives sortantes « en lièvre » au milieu de la denture inférieure ;
5. Forme du front large et fort, fuyant et s’évasant ;
6. Disposition des yeux bleus avec leurs arcades sourcilières arquées avec un écartement si précis « qu’il comportait entre eux une distance égale à la longueur d’un œil » ;
7. Anomalie de la forme du lobe des oreilles, notamment de l’oreille droite (nettement visible sur la photo représentant Naundorff su son lit de mort et identique à celle d’un portrait de Louis XVII enfant).
Ce constat se termine ainsi :
« Le requérant m’a prié, moi, notaire, de donner acte en minute de tout ce qui précède et qui est ci-dessus mentionné et, après lecture faite au requérant, aux témoins assistants, aux médecins sus-nommés et aux témoins ici-présents : Carel Heyne Van Back et Adriaan Marius Schagen Van Leeuwen, tous deux ci-dessus nommés, toutes ces personnes ont signé. »
Signé :Charles Edmond de Bourbon, Van Meurs, Van Buren, Jean Soutendam, Dr Snabilié, Dr Kloppert, C. Heyne den Back, A.M. Scagen Van Leewen, S.A ?. Scholten, notaire. »
Le receveur : signé : V.D. Mandèle « Pour signé conforme : signé SA Scholten, notaire »
Le cas Richemond
Claude Perrin naquit à Lagnieu (Ain) le 7 septembre 1786. Il est bossu, ayant une épaule plus haute que l’autre. C’est d’ailleurs lui-même qui le précise lorsqu’il doit se défendre devant la Justice de ses supercheries. Il est cependant soldat et ceci lui donne le goût de la tenue militaire qu’il arbore fièrement. Il parle de lui à la troisième personne, ce qui démontre un dédoublement de la personnalité ou une haute opinion de soi, les deux possibilités ne s’excluant l’une l’autre.
On ne sait d’où lui vient l’idée du nom qu’il adopte (« Richemond »), du titre qu’il s’accorde (« baron ») ni, enfin, de l’idée de jouer le rôle d’un faux Dauphin. Il est vrai que la rumeur de l’évasion de Louis XVII battait son plein dans les campagnes de France et Claude Perrin, presque du même âge que Louis XVII, à un an près, doté de cheveux châtain clair, entrevoit peut-être un autre rôle à tenir sur la scène de la vie que celui auquel le destin le prédispose. En 1831, il écrit et publie lui-même un livre : « Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI », puis en 1846 il publie «Mémoires d’un contemporain », livre qui contredit le premier.
Dans le premier récit (« Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI »), le faux Dauphin Richemond n’indique ni date, ni nom, ni désignation précise d’aucun lieu susceptible de décrire les situations vécues par le vrai Roi ; il ne sait même pas quand, à quelle date et comment eut lieu l’évasion du Temple ; ses propos sont contradictoires mais, apparemment, cela et ne le gênait pas pour persévérer dans ses mensonges. Ainsi désavoua-t-il son premier livre : par exemple, il supprime l’épisode dans lequel il vécut chez « les Sauvages ». ; il avait dit qu’il avait passé « plus de six ans, tout seul, nu comme eux, le corps peint, etc. Ces Sauvages s’appelaient les Mamelucks. ». Il prétend, de plus, avoir eu la petite vérole dans la Tour du Temple ; or Louis XVII avait été inoculé et n’eut jamais cette maladie.
« Richemond » fut reconnu par des personnes qualifiées : madame Bequet, qui avait été au service de Marie-Antoinette jusqu’au 10 août 1792; madame Fillette, qui avait été fille de garde-robe du Dauphin ; madame de Rambaud, berceuse du Dauphin… Ce sont là, à l’évidence, les déclarations de Perrin qui, en réalité, ne reçut jamais un témoignage de reconnaissance réelle, écrit, daté et signé sous serment et déposé devant une Instance officielle quelconque (Tribunal, Police, Notaire..).
Il raconte dans « Mémoires d’un contemporain » que trois ans auparavant, en 1843, il rencontra madame de Rambaud, que celle-ci le reconnut bien évidemment en tant que Louis XVII mais comme elle avait auparavant reconnu aussi en Naundorff le Roi, qu’elle aurait décidé de « s’en remettre au Ciel pour faire un choix » (ibidem – page 370). Il est patent que ces propos sortirent du cerveau déséquilibré de Perrin et non de la bouche de Madame de Rambaud. Il précise qu’il « n’a pas revu cette dame depuis ce jour », ce qui est étrange car cette reconnaissance était très importante pour Madame de Rambaud ; aurait-elle évité de revoir celui qu’elle avait chéri ?
La petite fille de de madame de Rambaud, dans une lettre datée du 26 janvier 1884 et adressée l’Abbé Laurent (curé de la paroisse de Sainte Marguerite sur Duclair), écrivit :
« Je m’empresse de satisfaire votre demande. Madame de Rambaud, ma grand-mère, a, en effet, reconnu Louis XVII dans la personne du prétendant Naundorff et n’en a reconnu d’autres. Richemont, il est vrai, s’est fait présenter à elle ; mais à ma connaissance il n’en est rien résulté pour ce personnage de cette entrevue….son frère (le frère – Charles- de son beau-père, Casimir Verger) a connu M. de Joly, que j’ai vu moi-même chez ma grand-mère et qui, comme elle, a attesté ses convictions…Signé L. Verger, née de Rambaud »
Madame de Rambaud vivra encore dix années après la supposée rencontre avec « Richemond » ; elle meurt le 18 octobre 1843 en n’ayant jamais renié la reconnaissance en Naundorff le Roi qu’elle avait élevé pendant sept années. La petite-fille de Madame de Rambaud, Ernestine de Rambaud, dans une lettre qu’elle écrivit en juin 1849 affirma la fidélité de sa grand-mère à cette reconnaissance capitale : « Encore aujourd’hui elle (Madame de Rambaud) ne doute pas de son identité (Louis XVII=Naundorff)».
Comme Hergavault, Richemond sait séduire et comme de très nombreuses personnes espéraient retrouver Louis XVII, elles acceptèrent de le rencontrer mais jamais elles ne le reconnurent vraiment ; une seule rencontre et aucune reconnaissance. Lors du procès de Perrin, la Cour ne retint que les dépositions écrites de Mesdames Bequet et Fillette (respectivement le 20 décembre 1842 et le 15 juillet 1844) dans lesquelles elles déclarent seulement avoir rencontré « Richemond » une seule fois, sans préciser une reconnaissance quelconque.
Claude Perrin meurt à Gleize (Rhône) le 10 août 1853, huit ans jour pour jour après Naundorff…
Perrin/Richemond, Hergavault, Bruneau, Williams, Mévès… tous ces « faux Dauphins » avaient des yeux marrons et seul, un « faux Dauphin » avait les yeux bleus : « Naundorff ». Louis XVII avait les yeux bleus…
En 1943
André Castelot soumet au Docteur Locard, directeur du laboratoire de Police Technique de Lyon, une boucle des cheveux du «Dauphin», propriété de l’abbé Ruiz, jointe à une mèche de Naundorff, qui lui avait été remise par le baron de Genièbre. Le but était de chercher si les cheveux correspondent ou non. Selon les naundorffistes, la confrontation, pratiquée d’après des microphotographies, donnerait des résultats époustouflants : les deux échantillons comporterait la même excentration du canal médullaire, un caractère jugé très rare par l’expert lyonnais. L’identité d’origine des deux mèches de cheveux semble irrécusable : pour les partisans de Naundorff, comment croire que cette excentration, si exceptionnelle, est due à la seule intervention du hasard?
En 1947
Alain Decaux (1925-2016) publie son premier livre, Louis XVII retrouvé, et soutient la thèse survivantiste _ ou naundorffiste_ qui perd par la suite tout crédit chez les historiens. Le futur ministre se ravisera d’ailleurs de cette conclusion de jeunesse.
En septembre 1950
Le cercueil de Naundorff est ouvert à Delft, sous la conduite du Docteur Hulst, médecin expert près les tribunaux hollandais. Castelot, pour s’assurer des conclusions de la première analyse, prie ce dernier d’envoyer à Locard une mèche provenant directement du squelette. Il fait bien. On procède à une seconde expertise.
Le 4 mai 1951
La sentence de la trichoscopie tombe, terrible pour le camp survivantiste. Locard écrit dans son rapport :
« Ces cheveux, d’origine indiscutée, ne présentent pas l’excentrement caractéristique. Ainsi donc les cheveux de Naundorff (…) ne sont pas identiques à ceux de Louis XVII». Le Dr Locard, qui avait entre-temps reçu, par le biais du marquis de Tinguy, d’autres cheveux provenant de Louis XVII qu’il a également analysés, ajoute qu’il semblait établi «que le Dauphin présentait une anomalie capillaire caractéristique» non retrouvée chez Naundorff. Les cheveux n’appartenaient pas à la même personne. La «preuve scientifique», qui, c’est le cas de le dire, n’avait tenu qu’à un cheveu, tombait à l’eau.»
Le spécialiste lyonnais confiera plus tard à Castelot que les deux premières mèches étaient si semblables, qu’il était fort possible que toutes deux aient été prises sur le crâne de Louis XVII.
En 1975
La relique du cœur Pelletan, récupérée par de la famille lointaine de Louis XVII, finit par être donnée à la basilique de Saint-Denis par la princesse Massimo.
En 1996
Après cinq ans d’enquêtes, Paul-Éric Blanrue a conclu à l’imposture du dénommé Naundorff (Le mystère du Temple, la vraie mort de Louis XVII, Claire Vigne éditrice, 1996, p. 229-287) et à la réalité de la mort du petit Roi à la date mentionnée par l’état civil. Il a repris cette thèse dans la préface des Souvenirs de la duchesse d’Angoulême (Communication et Tradition, 1997) dont il a établi l’édition critique, ainsi que dans une dizaine d’articles. Ni Alain Decaux, ni André Castelot, ni personne, n’y a répondu.
En 1998
Des analyses sont menées par l’Université de Louvain et le CHU de Nantes à partir de cheveux et de fragments d’humérus de Naundorff et de cheveux des descendants des sœurs de Marie-Antoinette. Conclusion : les restes de Naundorff ne sont pas ceux du dauphin Louis XVII.
En 1999-2000
L’historien – journaliste Philippe Delorme contacte la noblesse française afin que le cœur du petit décédé le 8 juin 1795 soit analysé avec la méthode ADN. Le résultat est que le cœur examiné était celui d’un parent de Marie-Antoinette, donc en principe de Louis XVII.
Monsieur Delorme a officiellement mis un terme à cette énigme; mais certains avancent que le cœur est celui du frère de Louis XVII, décédé en 1789. Le cœur embaumé de cet enfant a disparu sous la Restauration. Une bataille acharnée se déroule depuis entre Mr Delorme et les partisans de l’autre thèse. Mais une médecin-légiste a affirmé au cours d’une émission diffusée en janvier 2007 qu’elle serait bien en peine de faire la différence entre un cœur embaumé (frère de Louis XVII) et un cœur non embaumé (cœur du décédé le 8 juin 1795).
Monsieur Delorme devait rechercher le cœur du frère ainé de Louis XVII. Il n’y a pas eu de suite : la tombe de Louis-Joseph a, en effet, été ouverte et vidée le 16 octobre 1793 !
En 2004
De nouveaux prélèvements sont effectués sur le squelette de Naundorff. On procède à des analyses en Hollande et en Autriche, mais la famille dite de Bourbon n’a pas fait connaître les résultats.
Ce semble éloquent …
Le 8 juin 2004
Pour le professeur Jean Tulard, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, appelé par le ministre de la Culture à donner son avis sur le dépôt du cœur de Louis « XVII », l’analyse de l’ADN du cœur, conjuguée avec l’enquête menée sur son origine et les péripéties de son histoire, est suffisante pour attester de la mort du prince au Temple.
Sources :
Sources :
Interrogatoire de Louis-Charles en vue d’obtenir des pièces à charge contre sa mère. Sa sœur, qui ne le voit plus, est confrontée à lui et dit :
« Il a grossi sans prendre de croissance».
« Le quinzième jour du premier mois de l’an second de la République française une et indivisible, Nous, maire, procureur syndic et membres de la commune de Paris nommés par le conseil général de ladite commune pour prendre des renseignements sur différents faits qui se sont passés au Temple, et recevoir les déclarations à cet égard, nous sommes rendus au Temple et arrivés dans ladite Tour, et nous étant présentés au Conseil du Temple, sommes montés à l’appartement du premier occupé par Louis Charles Capet pour entendre ses déclarations au sujet des propos et des événements dont il peut avoir connaissance. Il nous a déclaré que l’hiver dernier pendant qu’il habitait l’appartement de ses mère, tante et sœur, un particulier, nommé Dangé, était de garde auprès d’eux en qualité de commissaire du conseil ; un jour qu’il l’accompagnait à la promenade sur la plate-forme de la Tour, il le prit dans ses bras, l’embrassa et lui dit : « Je voudrais bien vous voir à la place de votre père. »
Nous a déclaré pareillement qu’un autre particulier nommé Toulan, étant aussi de garde à la Tour à la même époque, lesdites femmes l’enfermèrent, lui déclarant, avec sa sœur dans une des tourelles pendant une heure et demie, un peu avant qu’on allumât la chandelle, et que pendant ce temps il s’est entretenu avec lesdites femmes, et qu’il n’entendit pas le sujet de leur conversation.
Que dans une autre circonstance il entendit dire par ledit Toulan à sa mère et à sa tante que tous les soirs il enverrait aux environs du Temple un
colporteur à dix heures et demie du soir pour lui faire crier toutes les nouvelles qui pourraient les intéresser; que par suite de cette promesse il s’aperçut que lesdites femmes un soir, ne se couchèrent qu’à onze heures passées et montrèrent de l’humeur de n’avoir point entendu les cris accoutumés dudit colporteur.
Il a déclaré encore que quatre particuliers nommés Lepitre, Bruneau, Toulan et Vincent, pendant la durée de leur service dans les appartements
avaient coutume d’approcher desdites femmes et de tenir des conversations avec elles à voix basse.
Déclare en outre qu’ayant été surpris plusieurs fois dans son lit par Simon et sa femme, chargés de veiller sur lui par la Commune, à commettre sur
lui des indécences nuisibles à sa santé, il leur avoua qu’il avait été instruit dans ces habitudes pernicieuses par sa mère et sa tante, et que différentes fois elles s’étaient amusées à lui voir répéter ces pratiques devant elles, et que bien souvent cela avait lieu lorsqu’elles le faisaient coucher entre elles.
Que de la manière que l’enfant s’en explique, il nous a fait entendre qu’une fois sa mère le fit approcher d’elle, qu’il en résultat une copulation et que il en résulta un gonflement à un de ses testicules, connu de la citoyenne Simon, pour lequel il porte encore un bandage et que sa mère lui a recommandé de n’en jamais en parler, que cet acte a été répété plusieurs fois depuis.
Il a ajouté que cinq autres particuliers nommés Moelle, Lebœuf, Beugnot, Michonis et Jobert, conversaient avec plus de familiarité que les autres commissaires du Conseil avec sa mère et sa tante ; que Pétion, Manuel, Bailly et Lafayette s’étant comportés très mystérieusement aux Tuileries avec les femmes, il estimait qu’il existait une correspondance directe avec les quatre hommes et les commissaires du Temple depuis la détention de ces femmes au Temple, que dans l’intervalle de ces conférences on l’éloignait.
Il nous a déclaré qu’il n’avait rien de plus à nous faire connaître.
Le citoyen et la citoyenne Simon nous déclare avoir appris ces faits de la bouche de l’enfant qui les leur a répété plusieurs fois et qu’il les pressait
souvent de le mettre à portée de nous en faire la déclaration.
Après avoir reçu la présente déclaration, y avons posé notre signature conjointement avec le citoyen Hébert, substitut du procureur-syndic de la Commune qui est survenu.
A Paris, dans la Tour du Temple les jour et an que dessus.»
LOUIS-CHARLES CAPET.
PACHE, maire; CHAUMETTE, procureur-syndic ; HÉBERT, substitut;
FRIRY, commissaire du conseil général; SEGUY, commissaire de service au Temple ; HEUSSÉE, administrateur de police ; SIMON ; D. E. LAURENT, commissaire du conseil général.
CAMPARDON, Emile, Marie-Antoinette à la Conciergerie (du 1er août au 16 octobre 1793) : pièces originales conservées aux Archives de l’Empire, suivies de notes historiques et du procès imprimé de la reine, Paris, 1863, p.66-71.
Le 14 octobre 1793
Hébert lance l’accusation d’inceste qui vaut à la Reine une réplique mémorable :
« J’en appelle à toutes les mères.»
Et l’ombre pâle dit à Dieu dans le ciel :
« Je suis orphelin et pas roi du tout ;
Hier, j’étais un prisonnier fatigué,
Les meurtriers de mon père ont nourri mon âme de fiel.
Pas moi, Seigneur, le nom royal convient.
La nuit dernière, je me suis endormi dans le dungeon dear
Mais ensuite j’ai vu ma mère dans mes rêves,
Dis, dois-je la trouver ici ?
extrait de Le Roi Louis XVII, une ode de Victor Hugo
Le 16 octobre 1793
Marie-Antoinette est exécutée.
Simon ne doute pas, quant à lui, que le roi ne soit infecté du mal vénérien, quoique, depuis la mort de la reine, on ne lui ait plus présenté de prostituées. Mais il croit que ce que l’on fit à cette époque pour le faire déposer contre sa mère, et prouver par l’état de santé la vérité des dépositions, a suffi pour le corrompre et le gangrener. Il prétend donc très décidément qu’il a du mal et qu’on ne fait rien pour l’en guérir.
Ces derniers propos laissent supposer qu’il y a eu, de la part des géôliers de l’enfant, la volonté de «s’en défaire», mot expressif que l’on retrouve souvent dans la bouche des représentants de l’autorité, à la Commune, dans les comités et même à la Convention, dont la signification est non pas «tuer», mais «faire mourir ou tuer en secret». Le mot «s’en défaire» apparaît encore dans une autre dépêche concernant le Dauphin (FM, II, p.358) ou dans celle dans laquelle, prémices de la loi des suspects, il est question des «gens à argent» que l’on veut «expolier» (spolier) pour financer des «intelligences à l’étranger», et que l’on enfermera dans un local du château de Chantilly ou de l’Isle Adam où il sera plus facile de «s’en défaire» (FM, II, 48).
Les époux Simon sont surveillés par la Commune de Paris et son procureur, Louis-Gaspard Chaumette (1763-1794) quant à leur comportement envers le petit Roi. Il ne faut pas se montrer trop tendre au risque de perdre la vie. C’est dans ce jeu, entre ombres et lumière, qu’ils doivent organiser leur comportement quotidien envers l’enfant : dureté affichée lorsque les municipaux sont présents, et bonté, surtout celle de Marie-Jeanne Simon, lorsqu’ils sont absents. La « femme Simon » aime, en réalité « son petit Charles » ; elle n’a pas eu d’enfant et elle reporte sur lui toute sa tendresse maternelle frustrée.
Il est certain que Louis XVII adopte les manières des sans-culottes que Simon lui inculque (chants révolutionnaires, port du bonnet phrygien, vocabulaire grossier). On sait avec quelle peine horrifiée sa tante et sa sœur, du deuxième étage de la Tour où elles sont enfermées, entendent les chants de l’enfant, pendant qu’il joue dans la cour.
Le 13 novembre 1793
Une dépêche adressée au gouvernement britannique à la date donne les renseignements suivants:
« Après avoir appris au roi toutes les impuretés imaginables, Hébert lui apprend maintenant toutes sortes de blasphèmes. Sa santé cependant s’affaiblit chaque jour, et il a presque un dévoiement (intestinal) continuel. Hébert commence à devenir en horreur à la populace; il a été personnellement insulté à la Halle. Il n’est pas douteux que le Comité de sûreté générale n’ait pratiqué cette manœuvre.»
Le 19 novembre 1793
Un bulletin de la santé de Louis-Charles, portant le cachet de la Commune de Paris, et signé par le cordonnier-tuteur Antoine Simon. Ce bulletin est ainsi conçu :
« Louis a passé la nuit assez tranquillement, ayant moins toussé que la précédente, de l’avis du citoyen Monier, médecin. Il a pris ce matin du petit lait et le continuera pendant quelques jours. Ensuite il prendra quelques légers purgatifs, ce qui n’annonce qu’une légère indisposition.»
Le 15 décembre 1793
A ces témoignage font écho les dépêches conservées à Dropmore par le baron de Fortecue (Fortescue Ms.) cités par G Bord (royaliste) qui les interprète différemment de Mathiez (communiste) : « Le roi est très malade.»
Le 28 décembre 1793
« Le roi est malade toujours d’une espèce dévoiement»
(FM, II, 488)
Depuis que sa maladie a empiré fin décembre l’enfant a logiquement reçu des soins (à base d’opium ou autre substance dangereuse ?) des médecins de l’Hôtel Dieu qui savent donc à quoi s’en tenir sur son état. Tout au moins le docteur le Monnier mais aussi peut-être le médecin Naudin qui, alors, soigne madame Simon (visite le 7 nivôse an II), et a certainement dû examiner l’enfant qui, malade lui aussi, vit chez elle.
Le 10 janvier 1794
«Il est très amaigri. »
Le 19 janvier 1794
Simon, rappelé à ses fonctions municipales, quitte le Temple : Simon a dû choisir entre sa place au Temple et son mandat de municipal à la Commune de Paris car on lui refuse le cumul … ; il choisit la Commune. Sa femme le suit peu après. En réalité, on le soupçonne de « royalisme » – bien camouflé sous des jurons révolutionnaires – ce qui était vrai. Il périra avec Robespierre le 8 thermidor an II. On ne prévoit pas de remplaçant pour Louis XVII. Sa femme, malade, quitte donc également la prison.
Si l’enfant royal est mort ou enlevé à l’époque du départ des Simon, le secret en aurait donc été soigneusement maintenu, au cours de l’hiver 1793-94, par la Commune de Paris encore dirigée par Pache et Chaumette et jusqu’en ventôse An II lorsque le maire Pache, envoyé en prison avec sa famille, est remplacé par Payan puis Lescot de Fleuriot, et que Chaumette, Ronsin, Hébert, Chaumette, Deschamps des Tournelles, Vallet de Villeneuve, Proly, Brichet, Péreyra, Guzman, le ci-devant comte Scipion du Roure et autres maratistes de circonstance et/ou piliers de la Commune de Paris sont arrêtés.
L’informateur du gouvernement britannique, qui entrevoit Simon à sa sortie du Temple, ajoute d’autres précisions au sujet du petit prisonnier :
« On ne lui donne, pour l’amuser, que les livres les plus infâmes, et enfin, depuis la mort du roi (Louis XVI, il n’est rien qu’on ne fasse pour le corrompre.»
Drake à Lord Grenville
« (Simon) prétend que, de temps en temps, il sent sa position et se désespère, alors les commissaires (de la Commune) l’étourdissent avec de l’eau de vie et en le faisant jour au billard. Il prétend aussi que plusieurs fois, Hébert l’a menacé de la guillotine, et que cette menace l’effraye si horriblement qu’il a vu souvent cet enfant s’évanouir à cette menace. Les deux gardes nationaux qui ont monté la garde au temple ont appris à peu près des détails semblables, mais ont ajouté que les princesses étaient obligées à laisser leur porte toujours ouvertes et qu’elles étaient persécutées. »
Compte tenu de la situation faite à l’enfant au Temple depuis l’été 1793, sa consommation forcée et régulière d’alcool, son exposition à l’humidité des lieux à la fin de l’automne on peut admettre que sa santé s’est détériorée comme le révèle le bulletin de santé de novembre. Il tousse et il semble atteint de coliques persistantes.
L’hypothèse de son décès prématuré est donc légitime de même que la question de sa substitution éventuelle, même si les dépêches ultérieures adressées par Drake à Lord Grenville laissent penser que à en lire certains documents officiels, l’enfant était encore vivant en février 1794.
Eh pourtant, à la fin de janvier 1794, Louis XVII semble bien portant, si l’on en croit les autorités :
1 – Le procès-verbal de « décharge » de la garde du petit prisonnier, confié aux époux Simon, effectué par le quatre municipaux Legrand, Lasnier, Cocherfer et Lorinet qui précisent que les Simon « leur ont exhibé la personne dudit Capet en bonne santé ».
2 – La déclaration de Lasnier, gardien de Louis XVII, précisant également que les Simon « ont remis cet enfant en bonne santé », déclaration qui parut dans le Moniteur Universel du 3 pluviôse an II (22 janvier 1794).
Après le départ des Simon, Louis XVII déménage et est enfermé au deuxième étage de la Tour.
Mais est-ce le même enfant ? toute la question est là. Si il était mort pour une raison ou une autre, les membres de la Commune avaient tout à redouter la grande colère des comités de gouvernement, et notamment le comité de salut public qui n’a aucun intérêt à perdre son otage précieux. Dans ce cas, de leur propre chef, les meneurs de la Commune de Paris auraient-ils procédé au remplacement du cadavre (enterré anonymement) par un enfant, peut être un orphelin qui mourut lui même un an et demi plus tard (8 juin 1795) ?
Les conclusions des médecins qui l’autopsièrent sont, paraît-il, contradictoires et jettent un doute sur l’identification du corps, notamment le docteur Desault qui ne l’a pas reconnu, témoignage relayé inlassablement son épouse et son entourage après son décès..
A partir de là, commence un état de solitude, de réel abandon.
Louis-Charles est cloîtré dans une chambre du Temple. Il reçoit sa nourriture par un petit guichet et vit dans la pénombre. Les commissaires qui se succèdent chaque jour pour le garder ne peuvent le voir. Pas de visite de médecin.
Le 12 février 1794
Après une longue interruption, nouvelle dépêche relative à l’enfant. Elle est troublante par ce qu’elle suggère :
« Simon devenu si effrayé par le danger qu’il courait (l’enfant ou lui même ?), qu’il se prêtait à tout ce que voulaient les scélérats, ne rendait compte de rien et ne travaillait qu’à la sortie de cette place».
(FM, II, 528)
Dans quelque sens qu’on lit cette phrase on en retient que l’état de l’enfant du Temple est sérieux voire critique et que les autorités de la Commune (les «scélérats») ont demandé à Simon de se montrer discret sur ce qu’il a vu.
Le 10 mars 1794
Une Dénonciation du 20 ventôse an II «relative à des faits qui se sont passé à la garde de la tour du temple et à une consigne qui empêchait les officiers d’Etat major de pénétrer dans cette maison» (AN, W 88, dos. 11, 2 pièces.) laisse penser que la Commune aux abois (ses membres sont arrêtés ces mêmes jours) ne tient pas à ce que des officiers viennent constater ou surprennent des faits relatifs à ce qui s’est passé au Temple.
Le 16 mars 1794
Une Importante déclaration de Georges Couthon, le 26 ventôse an II, à la veille de la chute de la Commune, alors que Ronsin, Vincent, Hébert sont arrêtés, laisse penser qu’il y a eu «conspiration»:
« Les preuves de la conspiration que nous avons dévoilée s’accumulent au Comité de sûreté générale. Je suis chargé de vous faire part d’un fait qu’il n’y a plus d’inconvénients à révéler puisque que les coupables sont en lieu de sûreté, le voici. On a tenté de faire parvenir au Temple, aux enfants Capet, une lettre, un paquet et cinquante louis en or. Le but de cet envoi était de faciliter l’évasion du fils de Capet; car les conjurés ayant formé le projet d’établir un conseil de régence, la présence de l’enfant était nécessaire à l’installation du régent.»
Georges Couthon
La veuve Simon déclare à la Police au début de la Restauration qu’elle a vu des choses lors du déménagement de janvier 1794. Voiture, panier de linge… Elle dit que le Dauphin est sorti du Temple. Elle prétend qu’il est venu la voir à l’hospice sous l’Empire. Puis elle change plus tard de version et dit que c’est le second de cuisine Meunier (en poste à Versailles, aux Tuileries, au Temple) qui lui a dit que l’enfant avait quitté la prison.
Le 24 mars 1794
Jacques-René Hébert est guillotiné : lors de son trajet de la conciergerie à la place de la Révolution, il est hué par le peuple. Quand vient son tour de « jouer à la main chaude » (« être guillotiné »), Hébert doit être traîné à l’échafaud : sa tête montrée par le bourreau est saluée par des quolibets.
Il est vraisemblable que le Comité de salut public, au moment ou la tête de Hébert roule sur l’échafaud, est fixé sur la situation réelle au Temple. Après la mort des hébertistes le Comité de sûreté générale regarde comme inutile la surveillance particulière réduite à deux gardes nationaux pour la famille royale (trois personnes).
Si l’enfant est mort avant la chute de la Commune hébertiste, les mêmes autorités – la Commune de Pache et Chaumette puis le Comité de salut public -, en admettant que tous soient au courant, feraient en logique tout pour cacher ce décès au public. Mais cela ne prouve pas qu’il y ait eu substitution.
Les 27 et 29 mars 1794
Les 7-9 germinal An II une séance de la Commune de Paris :
«On nomme les membres qui doivent aller au Temple y maintenir l’ordre et la tranquillité; le citoyen Cressant est proposé: plusieurs s’opposent à son admission et lui reprochent d’avoir plaint le sort du jeune Capet (sic), d’avoir même recueilli les noms de ceux qui montent journellement au Temple ». Après délibération le conseil arrête l’exclusion de Cressant du conseil, renvoyé à l’administration de police et scellés sur ses papiers (il ne sortira de prison que plus tard). »
Moniteur XX, 69 et 154
On effectue des travaux d’isolation et de confinement strict de l’enfant pour prévenir tout enlèvement. Quatre commissaires sont nommés à cet effet (Moniteur XIX, 239). Depuis cette date sept membres du conseil général de la Commune forment la nouvelle commission spéciale de la surveillance du Temple.
Le Roi semble mieux traité. voir Ng p 564
Le 8 mai 1794
On vient chercher Madame Elisabeth au Temple pour la conduire à la Conciergerie.
En mai 1794
Déposition de Barelle
D’après une dépêche conservée dans les Dropmore papers, Robespierre aurait sorti Louis-Charles (peut-être un autre enfant) de la prison du Temple et l’aurait conduit à la forteresse de Meudon en mai 1794, répétition d’une opération qui pourrait avoir lieu au cas où les armées ennemies encercleraient Paris. On sait que le vieux château de Meudon est alors devenu un arsenal et une réserve de poudre. Si l’information donnée par l’informateur du gouvernement anglais est exacte, on trouve une logique immédiate qui tient à l’inquiétude de Robespierre. Celui ci avait de bonnes raisons de penser que tôt ou tard les armées coalisées encercleraient la capitale. Cette hypothèse n’est pas à rejeter absolument. Pour négocier une porte de sortie pour lui et les membres des comités on peut penser qu’ils avaient l’intention de mettre dans la balance la vie même de l’enfant du Temple qu’on transporterait hâtivement du Temple à Meudon, avec la menace dissuasive d’une explosion des réserves de poudre et le sacrifice de l’otage (cette hypothèse a davantage de sens qu’un nébuleux projet d’exfiltration de cet enfant dont Robespierre se serait rendu complice… mais l’information est peut-être simplement inexacte. Quoi qu’il en soit de ce pont particulier qui a donné lieu à de nombreuses spéculations fantaisistes, les dépêches, issues des Dropmore papers (Public Record office à Londres), sont utilisées et discutées par MM. de Beaucourt et Gustave Bord, historiens «royalistes» qui contrairement à MM. Alphonse Aulard et Albert Mathiez (dont les théories y sont parfois mises à mal), pensent qu’elles contiennent des vérités. Comme souvent, la «vérité», justement, est entre deux. Les informateurs des cabinets étrangers se trompent ou sont mal renseignés sûrement plus qu’ils ne cherchent à tromper (comme cela a parfois été exagérément soutenu par Jacques Godechot).
Le 10 mai 1794
Exécution de Madame Élisabeth.
Madame Royale reste seule au Temple, au dessus de chez son petit frère…
On sait que la Commune de Paris et la haute administration du ministère de la guerre, à savoir Bouchotte, Ronsin, Vincent, Turreau, Quétineau, Hanriot, Santerre etc. sont, en ce même hiver 1794, au moment de tenter un coup d’état militaire contre la Convention et ses comités tout puissants qu’ils critiqueent. Ils désirent imposer à la France entière le gouvernement de Paris et de ses sections, appuyés sur un conseil de régence dont Jean-Nicolas Pache (1746-1823) serait Grand Juge. On sait aussi que le général Henriot à la veille de la révélation du complot «pachiste» par (selon la tradition) le sieur Souberbielle, lui même médecin de Robespierre qui lui a fait part de ses craintes, est pardonné par Robespierre. Celui-ci demande aussitôt à Saint-Just et aux comités de gouvernement de reprendre la Commune et sa force armée en main, de décapiter sans délai le mouvement popularisé par Hébert et d’épurer la Commune «gangrenée par l’étranger» (Pache est arrêté et remplacé par Lescot de Fleuriot).
En mai, l’enfant du Temple semble se bien porter, ce qui n’est pas le cas de sa sœur qui doit être accablée de chagrin depuis le départ de sa tante Elisabeth dont elle ignore le sort :
Ceux qui ont eu l’occasion de voir Louis XVII dans le lieu où les tyrans le retiennent en captivité s’accordent à dire qu’il est de la plus belle figure. On le coëffe d’un bonnet rouge, on l’occupe à faire des souliers, on lui paye son travail avec des sous de fonte des cloches, et on le laisse jouer avec des polissons. Quant à madame, sa sœur, elle a dépéri d’une manière effrayante, on la fait travailler à des chemises pour la nation.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 12 juin 1794, p.1340
Le 11 juin 1794
Le citoyen Desault chirurgien major du grand hospice de l’humanité de Paris (est) arrêté au moment où il donn(e) sa leçon et conduit à la Maison d’arrêt du Luxembourg. Le citoyen Manoury (est) nommé pour le remplacer provisoirement.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 11 juin, p.1402)
Le 27 juillet 1794
Chute de Maximilien de Robespierre ( né le 6 mai 1758), il est guillotiné le lendemain.
… Antoine Simon fait partie du convoi de la guillotine.
Marie Jeanne Aladame (1745-1819) la veuve Simon, ancienne domestique entrée aux Incurables en 1796, assurera toujours que l’enfant mort en janvier 1794 fut remplacé, et cela jusque sous la Restauration où, pressée par Decazes elle soutiendra une version contraire. Jusqu’à sa mort, le 10 juin 1819) elle assure néanmoins aux religieuses qui s’occupent d’elle que l’enfant du Temple a été substitué (remplacé), alimentant une rumeur qui a marqué l’historiographie légitimiste.
Jusqu’au 28 juillet 1794
Louis-Charles est enfermé au secret dans une chambre obscure, sans hygiène ni secours, pendant six mois. Son état de santé se dégrade, il est rongé par la gale et surtout la tuberculose. Il vit accroupi. Sa nourriture lui est servie à travers un guichet et peu de personnes lui parlent ou lui rendent visite. Ces conditions de vie entraînent une rapide dégradation de son état de santé. L’isolement total dans lequel il est placé laisse planer un certain mystère et donne l’occasion à l’imagination populaire de soulever l’hypothèse de substitution de l’enfant et de son exfiltration, donnant naissance au « mythe évasionniste et survivantiste ».
Le 28 juillet 1794
Le député Barras découvre ainsi un enfant mutique, brisé psychologiquement. Les comités de salut public et de sûreté générale nomment Laurent, membre du comité révolutionnaire de la section du Temple, pour le garder, lui et sa sœur.
Son sort s’améliore relativement, mais le prisonnier de la tour du Temple est rongé par la tuberculose, ce qu’omet de signaler Laurent lorsqu’il écrit, sur le bulletin de la tour du Temple, que les prisonniers « se portent bien ».
Après le 27 juillet 1794
Après le 9 thermidor, Barras fait désigner comme garde le citoyen Laurent, ancien président de la section du Temple, avec ordre d’améliorer les conditions de détention de l’enfant.
Le 9 novembre 1794
Jean-Baptiste Gomin (1757-1841), fils d’un tapissier de l’île Saint-Louis, est nommé adjoint de Laurent et devient gardien des enfants de France à la prison du Temple. L’enfant est décrit en bonne santé mais il doit certainement y avoir des signes avant coureur de sa maladie qu’ils ne perçoivent pas.
Le 19 décembre 1794
C’est seulement lors de la visite, le 19 décembre 1794 (et non en mars 1795), des citoyens représentants du Comité de sûreté générale Harmand, Mathieu et Reverchon qu’on constaterait, prétendra beaucoup plus tard Harmand, des anomalies physiques (tumeurs au genou droit et au poignet gauche) et psychologiques (mutisme).
Entre décembre 1794 et mai 1795
Aucune disposition sur la santé de Louis Charles n’est prise par l’exécutif. L’indifférence semble prédominer.
Cette indifférence à soigner l’enfant pourrait bien avoir un rapport avec les négociations de paix en cours avec l’Espagne qui réclame, entre autres, les deux enfants de Louis XVI. La République craint, elle, d’abandonner son otage qui permettrait à ses ennemis de relancer la coalition et de réactiver la guerre pour organiser une restauration de leur choix. La mort de l’enfant arrangerait la haute politique française.
Retrouver les portraits authentiques du petit Roi relèverait, si l’on en croit tout ce qui a été dit, écrit et publié, de l’enquête policière. Eh pourtant, c’est bien le peintre Greuze de Tournus qui est la piste la plus intéressante. En 1791, avant l’incarcération de la famille royale, il a fait un premier portrait de l’enfant alors qu’il n’avait que six ans (en dessous, à gauche). Il n’est pas besoin d’être un grand spécialiste pour constater une ressemblance probable avec le portrait oublié que j’ai replacé au milieu, compte tenu, bien entendu, qu’en quatre ans, un visage d’enfant s’allonge mais que certains détails ne changent pas (la bouche avec sa lèvre inférieure déjà bourbonienne, la chevelure, le nez, les yeux). L’enfant a pourtant bien changé. Les épaules sont tombantes, la poitrine étroite et rentrée, le visage émacié. Les joues se sont creusées, la bouche ne sourit pas et le regard n’est plus le même.
Ce tableau oublié tout à fait inconnu s’est vendu dans une salle des ventes parisienne, le 11 octobre 1981. La description était la suivante : «Portrait présumé du dauphin Louis XVII, attribué à Greuze» L’inscription collée au dos donnait les précisions suivantes : «Portrait du dauphin Louis XVII à l’âge de dix ans. Huile sur toile attribuée à Greuze, non signée, portant en haut et à droite les armes de la famille royale de France.»
Le tableau est merveilleusement peint. Les cheveux blonds sont d’une grande finesse. L’expression du visage est d’une étrange délicatesse mais révèle un état maladif. Madame Vigée Le Brun, amie de Marie-Antoinette qui fit plusieurs portraits de la famille royale ayant émigré dès 1789, ne peut en être l’auteure. En revanche, plusieurs artistes ont pu peindre l’héritier de la couronne. Tout d’abord Ducreux qui a dessiné Louis XVI au Temple, Prieur qui peignit Marie-Antoinette à la Conciergerie, et tous ceux qui firent les portraits des héros de la Révolution… mais c’est bien le tournusien Greuze qui est la piste la plus crédible. Il était alors à Paris. C’est d’ailleurs l’hypothèse retenue dans le catalogue «Chrysanthemum» qui fait par ailleurs remonter l’origine du tableau jusqu’au baron Mayer de Rothschild.
Il s’agit de Louis XVII dans sa triste authenticité et non dans une posture académique d’enfant royal.
Le 31 mars 1795
Laurent démissionne. Il est remplacé par Etienne Lasne (1757-1841), ancien peintre en bâtiment, de la section Des droits de l’homme.
Les citoyens Lasne et Gomin traitent l’enfant avec douceur mais son état les inquiète.
Le 13 avril 1795
« Un enfant vivant est au Temple : il est incommodé selon un rapport de Sevestre sur le caractère et les signes extérieurs de la maladie.»
(source ? Moniteur XXIV, 650)
Le 3 mai 1795 (14 Floréal an III)
Les gardiens Gomin et Lasne inscrivent sur les registres du Temple « Le petit Capet est indisposé ».
Le 6 mai 1795 (17 Floréal an III)
La tuberculose prend un tour critique, caractérisé par l’apparition d’une péritonite.
Dans les derniers jours de mai 1795
Les gardiens signalent au comité de Sûreté générale que l’enfant Capet manifeste « une indisposition et des infirmités qui paraissent prendre un caractère grave ».
Cette fois le gouvernement réagit. Le docteur Desault médecin chef de l’Hôtel Dieu, examine l’enfant et prétend, dit-on, ne pas le reconnaître (ce que confirme son épouse), confirme la gravité de l’état du malade mais … meurt les jours suivants. On le remplace par ses collègues Pelletan, chirurgien, qui observe certains symptômes caractéristiques révélant un stade avancé d’une maladie infectieuse mortelle, et demande confirmation de diagnostique à son collègue Dumangin qui l’approuve. Il s’agit pour eux d’un «vice scrofuleux» qui signifie tuberculose osseuse. Cette maladie a frappé son frère aîné, décédé le 4 juin 1789. Il est possible que les carences en vitamines C et D, le confinement et le manque d’exercice prolongé après le départ des Simon, ou encore l’humidité aient favorisé l’apparition de cette maladie chez Louis-Charles. Il est possible enfin que Marie-Antoinette ait été porteuse saine de cette maladie et l’ait transmise à ses deux fils, mais il n’y a aucune évidence à cela.
Le Comité « arrête que le premier officier de santé de l’hospice de l’Humanité visiterait le malade en présence de ses gardiens et administrerait des remèdes ». Le docteur Desault passe à cette époque pour être le premier praticien de Paris.
Pendant tout ce temps, l’état du petit Roi s’est tellement aggravé qu’enfin, à la demande pressante des geôliers, on fait venir un médecin. M. Desault le soigne et lui prescrit quelques remèdes, bien qu’il fait comprendre dès le début à Gomin qu’il a peu d’espoir de guérison pour l’enfant. Ils le déplacent dans une pièce plus claire et ensoleillée, mais il est très faible et le changement ne freine guère la progression de la maladie. Bien que son bon ami le conduise souvent jusqu’à la plate-forme de la Tour, le léger mieux apporté par la respiration de l’air frais compense à peine la fatigue que lui coûte l’effort.
Le 29 mai 1795
Desault fait sa dernière visite au malade car il meurt le 1er juin, à l’âge de cinquante-sept ans.
Madame de Tourzel parvient à s’assurer des contacts avec Gomin et Lasne, anciens commissaires de la Commune de Paris, en charge de la surveillance du petit Roi au Temple. Elle prend connaissance des interventions de Desault et Pelletan, les derniers médecins qui tentent d’adoucir les souffrances de l’enfant … Le témoignage du docteur Jeanroy, « un vieillard de plus de quatre-vingts ans, d’une probité peu commune et profondément attaché à la famille royale. Il (a) été choisi pour assister à l’ouverture du jeune roi ; et pouvant compter sur son témoignage comme le mien propre, (elle) le f(ait) passer chez (elle)».
De réputation fiable et solide, qui l’a fait choisir par les membres de la Convention pour fortifier de sa signature la preuve que le jeune roi n’a pas été empoisonné.« Ils n'(ont) pas eu besoin d’employer le poison : la barbarie de leur conduite vis-à-vis d’un enfant de cet âge d(oit) immanquablement le conduire au tombeau. Sa bonne constitution prolongea so n supplice ; la malpropreté dans laquelle on le laissait volontairement et le défaut d’air et d’exercices, lui avaient dissous le sang et vicié toutes les humeurs.»
Madame de Tourzel
Pour la marquise, le jeune prince est bien mort au Temple.
Les trois médecins de Louis XVII au Temple meurent presque en même temps
Le 1er juin 1795
Mort de Pierre Joseph Desault, né à Vouhenans (Haute-Saône) le 6 février 1738 d’une famille rurale de sept enfants et mort à Paris , il était chirurgien et anatomiste.
Le 5 juin 1795
François Doublet, né le 30 juillet 1751, était médecin de la faculté de médecine de Paris et membre de la société royale de médecine.
Le 6 juin 1795
Le docteur Pelletan, quarante-huit ans, chirurgien en chef de l’Hospice de l’Humanité, succède au docteur Desault.
Ne voulant pas prendre seul la responsabilité de soigner l’enfant, le Comité de sûreté général lui adjoint le docteur Dumangin, cinquante-et-un ans, médecin chef de l’hospice de l’Unité (Hôpital de la Charité de Paris). Ils n’ont aucun espoir. Ils lui font prendre des médicaments qu’il avale avec difficulté. Heureusement, sa maladie ne le fait pas beaucoup souffrir ; c’est une débilité et un dépérissement total plutôt qu’une douleur aiguë. Il a plusieurs crises pénibles ; la fièvre le saisit, ses forces diminuent de jour en jour, et il expire sans lutte.
Dans la nuit du 7 au 8 juin 1795
Gomin et Lasne alarmés par l’état de santé de l’enfant ont envoyé cherché en urgence le docteur Pelletan. Il répond qu’il viendra demain matin avec le docteur Dumangin.
Le lundi 8 juin 1795 (20 prairial an III)
Les docteurs Dumangin et Pelletan arrivent ensemble à onze heures du matin au Temple, l’état de l’enfant s’est aggravé.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
« Le sieur Lasne gardien et moi, nous prêtions nos soins au petit dauphin, et enfin à trois heures (de l’après-midi) lorsque le sieur Gomin fut revenu, l’enfant venait de mourir ». Pelletan arrivé à quatre heures confirme la mort. Le docteur Dumangin arrive à huit heures, il apprend le décès du fils Capet.»
Témoignage de Damont commissaire civil au Temple
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Les commissaires le pleurent amèrement, tant il s’est fait aimer par ses douces qualités. Il avait beaucoup d’intelligence ; mais l’emprisonnement et les horreurs dont il est la victime l’ont beaucoup changé ; et même, s’il a vécu, il est à craindre que ses facultés mentales ont été atteintes. Le seul poison qui a abrégé sa vie est l’impureté, jointe aux traitements horribles, à la dureté et à la cruauté sans exemple exercés sur lui.
Le 9 juin 1795
A onze heures du matin, le chirurgien Philippe-Jean Pelletan réalise son autopsie qui confirme le diagnostic de tuberculose. Il est secondé par trois médecins dont le docteur Dumangin. C’est justement dans ce rapport d’autopsie que le docteur Pelletan va aussi raconter une idée que lui est venue à l’esprit : celle de s’emparer en toute discrétion du cœur de l’enfant mort et le garder dans sa poche. Après, le cadavre du petit Roi va être jeté dans une fosse commune au cimetière de Sainte-Marguerite. Il va le garder dans l’alcool et le cœur va devenir dur comme de la pierre.
« Vous m’aviez à la vérité proposé d’autres adjoints; et sur mon observation que, d’après les qualités personnelles et les rapports qu’avaient eus M. Pierre Lassus (1741-1807) avec Mesdames de France et Nicolas Dieudonné Jeanroy (1750-1816) dans la Maison de Lorraine, leurs signatures seraient d’un tout autre poids, vous aviez agréé ce choix. »
Le docteur Dumangin rédige le procès-verbal d’autopsie, recopié en quatre exemplaires : Un pour le Comité de sûreté générale et un pour chaque médecin. L’exemplaire du docteur Dumangin est conservé aux Archives Nationales depuis 1891.
« Des doutes intempestifs se sont élevés sur l’identification du cadavre car on n’a pas pensé (ou voulu ? disent certains) le présenter à Marie-Thérèse Charlotte, sa sœur, ni à madame de Tourzel sortie de prison, ni à Hue, ni à Tison, ni à Marie Jeanne Aladame, la veuve de Antoine Simon, ni à aucun des anciens médecins du dauphin (le docteurs Brunier et le docteur Naudin, médecin des prisons). Mais il a été reconnu par un ancien garde national (le citoyen Gagnié, «ancien chef du Temple»), présent à l’autopsie, qui déclara en août 1817 avoir vu le dauphin aux Tuileries, tenant la main à sa mère et se promenant dans son petit jardin aménagé.»
Ce même jour
François Chopart, chirurgien, né le 30 octobre 1743 à Paris, y meurt à l’âge de cinquante-et-un ans.
Il se dit que Pierre Joseph Desault, François Doublet et François Chopart en savaient trop sur l’autopsie d’un faux Louis XVII, il ne fallait pas qu’ils puissent parler : on les a empoisonnés.
Le 12 juin 1795
Louis-Charles est enterré dans le cimetière Sainte-Marguerite. Sous la Restauration, Louis XVIII fait rechercher la sépulture de son neveu : l’énigme de « l’enfant du Temple » se développe alors avec les témoignages contradictoires de ceux qui ont assisté à l’enterrement le 10 juin (fossoyeur, concierge du cimetière, abbé …) qui évoquent une inhumation en fosse commune (le corps ne pouvant dès lors plus être identifié), une réinhumation dans une fosse particulière près de la Chapelle de la Communion de l’église, voire dans le cimetière de Clamart.
Le 12 juin 1795 (24 prairial an III)
L’acte de décès de Louis XVII est rédigé. L’original du document a disparu dans les incendies de la Commune de 1871 mais l’acte avait été recopié par des archivistes et un exemplaire se trouve aussi aux Archives Nationales :
« Du vingt-quatre prairial de l’an trois de la République (12 juin 1795)
Acte de décès de Louis Charles Capet du vingt de ce mois (8 juin), trois heures après-midy, âgé de dix ans deux mois, natif de Versailles, département de Seine-et-Oise, domicilié à Paris aux Tours du Temple, section du Temple, fils de Louis Capet, dernier roy des Français, et de Marie Antoinette Josèphe Jeanne d’Autriche.
Sur la déclaration faite à la maison commune, par Etienne Lasne, âgé de trente-neuf ans, profession gardien du Temple, domicilié à Paris rue et section des Droits-de-l’Homme n° 48 : le déclarant a dit être voisin ; et par Rémy Bigot, âgé de cinquante-sept ans, profession employé, domicilié à Paris vieille rue du Temple n° 61 : le déclarant a dit être ami.
Vu le certificat de Dussert, Commissaire de Police de ladite section, du vingt-deux de ce mois (10 juin). Officier public : Pierre Jacques Robin.
(Signé) : Lasne, Robin, Bigot. »
Le 24 juin 1795
Monsieur, toujours en émigration , est proclamé Roi sous le nom de Louis XVIII.
Dès 1795, des rumeurs faisaient courir le bruit que le Dauphin, remplacé dans sa geôle par un autre garçon, aurait été libéré du Temple. Ces rumeurs avaient été favorisées par les exhumations des restes d’un enfant au crâne scié — traces d’une autopsie — du cimetière Sainte-Marguerite (au cours des deux exhumations réalisées en 1846 et en 1894, plusieurs spécialistes attribuent pourtant le corps à un sujet masculin âgé de plus de seize ans, d’1,63 m et de morphologie différente de celle de Louis XVII) et l réaction thermidorienne : tandis que les royalistes osaient à nouveau s’afficher comme tels, des accords de paix étaient négociés entre la République et les révoltés vendéens et chouans ( traités de La Jaunaye, de la Mabilais et de Saint-Florent-le-Vieil ). La mort du petit Roi, en juin de cette même année, fut par conséquent accueillie avec scepticisme par une partie de l’opinion publique. Ce contexte permit l’éclosion de théories «évasionnistes» et «survivantistes» …
Dès le début du XIXe siècle, des «faux Dauphins» commencèrent à apparaître et à réunir un nombre variable de partisans autour de leurs prétentions. Les condamnations des trois premiers (Hervagault, Bruneau et un certain Hébert, connu sous le titre de «baron de Richemont») à de lourdes peines de prison ne découragèrent pas d’autres imposteurs, dont le plus célèbre est l’horloger prussien Karl-Wilhelm Naundorff (date de naissance inconnue-10 août 1845), qui eut de nombreux adeptes jusqu’à la fin du XXe siècle.
Dans les récits qu’ils firent de leur prétendue évasion du Temple, la plupart de ces prétendants reprenaient la trame du roman de Regnault-Warin, qui évoque des agents royalistes envoyés par Charette qui s’introduisent dans la tour, où ils apportent, au moyen d’une cachette ménagée dans un « cheval de bois », un orphelin drogué à l’opium destiné à prendre la place du vrai Dauphin. Ce dernier, dissimulé dans le même objet, est ainsi libéré de sa prison. Aux termes de nombreuses péripéties, et notamment d’une tentative d’exfiltration vers l’Amérique, l’orphelin royal est repris avant de mourir de maladie.
Malgré les nombreuses invraisemblances et le triste dénouement de ce récit, la thèse de la substitution gagne ainsi un nouveau mode de diffusion le cheval de bois étant quelquefois remplacé par un panier de linge sale, et Charette par le comte de Frotté, ce dernier ayant effectivement échafaudé, sans pouvoir y donner suite, des projets d’enlèvement des orphelins royaux.
Aux imposteurs plus ou moins convaincants s’ajoutent de nombreux fous (comme Dufresne, Persat et Fontolive) ou encore des personnages dont l’identification à Louis XVII a surtout été l’œuvre de tiers, le plus souvent de manière posthume : c’est notamment le cas de l’officier de marine puis architecte français Pierre Benoît (actif à Buenos Aires ), du pasteur iroquois Eliézer Williams, du musicien anglais Augustus Meyes, du célèbre naturaliste John James Audubon et même de Louvel (assassin du duc de Berry, cousin de Louis XVII).
Les circonstances exactes de la mort de Louis XVII et la rumeur concernant une éventuelle évasion de la prison du Temple ont attisé la curiosité de nombreux auteurs, comme Gosselin Lenôtre (1855-1935), André Castelot (1911-2004) ou Alain Decaux (1925-2016).
Il demeure quelques partisans de la survivance du prince.
A partir de 1798 commence la saga des faux dauphins.
Ainsi ce début du XIXe siècle verra-t-il revenir de nombreux prétendants au titre de Louis XVII – on en a comptés environ cent cinquante… : le baron de Richemont, l’horloger prussien Karl-Wilheim Naundorff, Jean-Marie Hervagault ou Mathurin Bruneau ont pu chercher à rencontrer la duchesse d’Angoulême pour se faire reconnaître.
Marie-Thérèse n’en reçut aucun !
Le dénommé Jean-Marie Hervagault, en fugue pour la dixième fois, annonce qu’il est Louis XVII (des rumeurs circulent dès 1795 sur la survie de Louis XVII). Il sera jugé et finira ses jours en prison en 1812. Notons que lors d’une fugue précédente, son père n’a pas voulu le reconnaître !
Sous le Consulat
Barras, l’un des responsables du renversement de Robespierre en 1794 et directeur de la République de 1795 à 1799, a bénéficié d’un traitement de faveur de la part de Louis XVIII ) partir de 1814. Il n’est pas exilé, comme beaucoup d’anciens députés de la Convention (1792-1795).
Il a déclaré sous le Consulat, lors d’un repas, que le fils de Louis XVI était vivant et qu’il «verrait pendre ce diable de corse». Témoignage devant notaire d’une invitée.
Sous le premier Empire
Si l’on en croit les « Mémoires de Talleyrand », à entendre Joséphine de Beauharnais, Napoléon considère avoir la preuve absolue de l’existence de Louis XVII. Il en est si sûr qu’il dit souvent à son entourage : « Quand je voudrai, je sèmerai la discorde dans la famille du prétendant ! ».
En 1814
L’empire français s’écroule et Napoléon prend pour la première fois le chemin de l’exil. Quant à Joséphine, lorsque le Czar Alexandre va la visiter, il lui dit : « Qui mettrons nous sur le trône de France, Madame ? », elle lui répond : « Mais le fils de Louis XVI, évidemment ».
A la Restauration
Voici l’ignare Bruneau et le dandy «Baron de Richemont».
Puis arrive Naundorff, apparu en Prusse. On trouve des traces de lui en 1809.
Le docteur Pelletan va essayer de rendre ce cœur à la famille du petit Roi pendant la restauration, mais ils vont refuser et finalement il va le donner à Monseigneur de Quelen, archevêque de Paris. Pendant la révolution de 1830 l’archevêché va être pillé et le cœur va être récupéré par le fils du Docteur Pelletan qui va se rendre personnellement à l’archevêché pour sauver la royale relique.
Un témoignage navrant du citoyen Gagnié «ancien chef du Temple» est cité dans l’instruction commandée par Louis XVIII au sujet de la détention et de la mort de son neveu. Il assure avoir vu plusieurs fois le Dauphin avec sa mère et c’est le même enfant qu’il découvrit au Temple pendant l’hiver 1795-96 :
« En montant l’escalier qui conduisait au corridor attenant à la chambre de Louis XVII, je sentis une odeur extrêmement infecte qui sortait de la susdite chambre dans laquelle on entrait pas et voyant que depuis trois jours l’enfant renvoyer ses aliments tel qu’on lui portait, je demandai d’obtenir promptement une autorisation du Comité de sûreté générale et de faire ouvrir la porte de sa prison, ce qui fut exécuté, et je proteste qu’en entrant, je vis le jeune prince courbé et accroupi ayant ses bras retresés (sic), une tumeur au genou et au bras dans l’impossibilité de se redresser et ayant le cou rongé de gale, que l’ayant interrogé sur ce qu’il n’avait pas pris de nourriture depuis trois jours, il me répondit: «Que veux tu mon ami, je veux mourir.» Je certifie de plus que cet enfant était véritablement le fils de Louis XVI que j’avais vu aux Tuileries, le même que j’avais vu amené au Temple avec le roi et prendre ses récréations dans le jardin en présence de toute sa famille, enfin le même que je vis après la mort de Louis XVI lorsqu’il fut visité en présence d’un municipal qui était médecin, en ma présence et celle de M. Caillieux, administrateur. La reine craignant que ce ne fut une hernie mais elle sut que ce n’était qu’une glande engorgée que je fus même chargé d’acheter un bandage, le même à qui je donnai des serins et des pigeons lorsqu’il était avec le même Simon, le même que je vis au billard avec La Bazanerie chef de Bataillon (….) Fait à Paris le 27 juillet 1817 et signé Gagnié, ancien chef du Temple.»
En 1819-1820
Naundorff aurait contacté le duc de Berry, fils du futur Charles X. Il se rend en France dans les années 1830, vivant de l’hospitalité de ses partisans. Certaines personnes ayant connu Louis XVII reconnaissent en lui le fils de Marie-Antoinette. Mais que peuvent valoir ces témoignages quarante ans après les faits ? Naundorff donne des renseignements sur la vie du Dauphin. A-t-il soutiré ces informations des gens qui le reconnaissaient ?
Naundorff est expulsé de France. Il vivra à Londres, fondera une religion, partira pour les Pays-Bas où il mettra une bombe connue sous le nom de «bombe Bourbon». Le Roi l’autorise à porter le nom de Bourbon. Naundorff meurt à Delf. Ses partisans se battront pendant des décennies pour sa reconnaissance. Sa famille existe toujours. Une branche vit en France, l’autre au Canada. Elle a été déboutée lors d’un procès en 1954.
Le 13 février 1820
Assassinat du duc de Berry (1778-1820), fils du comte d’Artois (1757-1836).
Le 14 février 1820
La mort du duc de Berry
On a prétendu que Louis Louvel (1783-1820), l’assassin, pouvait être Louis XVII car Louis XVIII l’aurait autorisé à se rendre à l’échafaud coiffé d’un chapeau… Louvel était sobre et travailleur. Il était cultivé, ne se liait à personne. Il a toujours dit avoir agi seul.
Louvel-Louis XVII. des confidences ? De qui ? Ils sont tous morts !
1: le vrai Louvel était en pension de juin 1791 à octobre 1795, donc possibilité d’introduire dans la famille Louvel un inconnu et de le faire passer pour le fils de la famille de retour à Versailles (1794);
2: Robespierre est passé devant chez les Louvel à Versailles tous les jours d’avril à novembre 1789 (première possibilité d’un lien). Robespierre est à Versailles le 20 juin 1791 quand le père Louvel envoie à Paris le futur régicide, en pension. Aurait-il profité du carrosse de Robespierre ? Il a été dit que Robespierre aurait postulé ou aurait été pressenti pour devenir gouverneur du Dauphin. Du moins son nom a circulé pour occuper la charge.
3: Le conventionnel Lecointre accompagne Robespierre le 17 juillet 1791 ( jour de la fusillade du champ de Mars) dans la quête d’un abri sûr. Les Lecointre et les Louvel sont liés (le père Lecointre était parrain chez les Louvel). Et nous retrouvons le soir de la chute de Robespierre Lecointre festoyant avec Barras et les autres membres de la conjuration qui fit chuter le « tyran ».
Un lien Robespierre – Lecointre – famille Louvel ; un second, Barras – Lecointre – famille Louvel !
4: En 1804, Louvel déclare avoir 19 ans (âge de Louis XVII), alors qu’il en a presque 21 ! (ce n’est pas un témoignage, c’est marqué sur son livret ouvrier !)
5: En 1806, Louvel est réformé de la Garde Impériale par Larrey et Sue, amis de Desault, médecin au Temple en mai-juin 1795. Louvel est affecté à l’Artillerie de la Garde Impériale, à Paris, en 1805. Il fut réformé pour varicocèle.
6 : En 1814, Louvel, qui n’aime pas l’armée, rejoint Napoléon à l’île d’Elbe. il y restera deux mois comme sellier. A-t-il voulu parler à l’empereur ?
7 : L’abbé Arnoux, chargé par la famille royale de tirer les vers du nez du régicide, meurt à 28 ans le jour de l’ouverture du procès Louvel ! (d’une maladie poitrinaire, officiellement).
8 : Louvel écrit : je n’ai pas déshonoré ma Nation, je n’ai pas déshonoré ma fille. N’ayant pas d’enfant, la fille de Louvel est-elle la Nation ? (texte lu aux pairs de France).
9 : Louvel ressemble étrangement à Joseph II d’Autriche, oncle de Louis XVII (test réalisé sur quinze personnes – onze ont mis Joseph II en premier, et François II en second, cousin de Louis XVII – sur vingt portraits de même taille).
Les oreilles de Louis XVII et de Louvel présentent de fortes ressemblances.
10 : Louis XVIII ordonne une messe à la mémoire de Louis XVII pour le 8 juin 1821, soit un an et un jour après la mort du régicide. (cérémonie annulée). C’est la première fois que Louis XVIII ordonne cela.
11 : En 1816, Louis XVIII fait effectuer des recherches sur les restes de Louis XVII au cimetière Sainte-Marguerite. Le jardinier en chef des jardins du Luxembourg, Toussaint Charpentier, déclare au préfet Anglés qu’au moment de l’enterrement de l’enfant du Temple, on lui fit creuser de nuit une fosse au cimetière de Clamart pour recevoir un petit cercueil. Une personne de la Municipalité aurait déclaré que le petit Capet aurait bien du chemin à faire pour retrouver sa famille.
Ce Charpentier est également employé à Trianon. Son fils en tant que jardinier en chef à partir de 1824. Ces gens connaissent la marraine de Louvel, Madame Belleville. Curieux !
12 : Les restes de Louvel sont transférés dans une fosse commune, mais bien vite, on les exhume et les transporte dans un lieu toujours inconnu. Volonté de Louis XVIII de ne pas créer un lieu de pèlerinage républicain, ou d’inhumer Louvel dans une tombe royale ? (il existe des emplacements vides à la basilique de Saint-Denis).
13 : Le comte de Vaisons (Le Roi perdu, de l’académicien Octave Aubry), qui n’a jamais existé, (mais le général-marquis de Bonneval correspond à son profil) arrête son enquête diligentée par Louis XVIII à la mort de Louvel en juin 1820.
14 : Louis XVII se blessa aux parties génitales en jouant au cavalier avec un bâton, ceci lorsqu’il était encore avec sa mère, sa tante et sa sœur. On lui mit un suspensoir. Louvel avait également un suspensoir. Il avait été réformé de l’Artillerie de la Garde Impériale en 1806 pour varicocèle :
« La varicocèle testiculaire est une pathologie bénigne qui se caractérise par une dilatation des veines au niveau du cordon spermatique. Elle peut causer des problèmes de fertilité chez l’homme.«
Il se pourrait qu’il y ait eu une erreur de diagnostic, de conséquences de l’accident.
Voici l’explication de l’affaire selon Jean-Claude Pilayrou :
Robespierre a enlevé le Dauphin et l’a confié au père Louvel. On sait ce qui adviendra par la suite de Robespierre.
Barras a enlevé le remplaçant de Louis XVII. Caché à St Domingue, il meurt en 1803 ( ?).
Louis XVIII fit faire une enquête par Bonneval. Entre temps, Louvel tue le duc de Berry.
Louis XVIII, qui est perturbé par les apparitions continuelles de faux dauphins (Hervagault, Bruneau, Dufresnes…), se demande si Louvel n’est pas Louis XVII, qui vient de se venger de son état de roi déchu en tuant Berry. Il fera faire une enquête approfondie. Louvel n’ayant pipé mot, il le laissera aller à la guillotine.
Aujourd’hui comme hier, les héritiers du secret gardent le silence. Et l’analyse ADN de 2000 fut un pieux mensonge, destiné à protéger la mémoire du roi assassin: Louis XVII.
Pour Jean-Claude Pilayrou, Louvel serait Louis XVII
Le 17 août 1833
Âgée de soixante-dix ans, Madame Agathe Mottet Rambaud, fait la déposition suivante :
« Dans le cas où je viendrais à mourir avant la reconnaissance du Prince, fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, je crois devoir affirmer ici par serment, devant Dieu et devant les hommes, que j’ai retrouvé, le 17 août 1833, Monseigneur duc de Normandie, auquel j’eus l’honneur d’être attachée depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792, et comme il était de mon devoir d’en donner connaissance à S. A. R. Madame la duchesse d’Angoulême, je lui écrivis dans le courant de la même année. Je joins ici la copie de ma lettre. Les remarques que j’avais faites dans son enfance sur sa personne ne pouvaient me laisser aucun doute sur son identité partout où je l’eusse retrouvé. Le Prince avait, dans son enfance, le col court et ridé d’une manière extraordinaire. J’avais toujours dit que si jamais je le retrouvais, ce serait un indice irrécusable pour moi. D’après son embonpoint, son col ayant pris une forte dimension est resté tel qu’il était, aussi flexible. Sa tête était forte, son front large et découvert, ses yeux bleus, ses sourcils arqués, ses cheveux d’un blond cendré, bouclant naturellement. Il avait la même bouche que la Reine et portait une petite fossette au menton. Sa poitrine était élevée; j’y ai reconnu plusieurs signes alors très-peu saillants, et un particulièrement au sein droit. La taille d’alors était très cambrée et sa démarche remarquable. C’est enfin identiquement le même personnage que j’ai revu, à l’âge près. Le prince fut inoculé au château de Saint-Cloud, à l’âge de deux ans et quatre mois, en présence de la Reine, par le docteur Joubertou, inoculateur des Enfants de France; et de la Faculté, les docteurs Brunier et Loustonneau. L’inoculation eut lieu pendant son sommeil, entre dix et onze heures du soir, pour prévenir une irritation qui aurait pu donner à l’enfant des convulsions, ce qu’on craignait tous que ce sont les mêmes marques que j’ai retrouvées, auxquelles on donna là forme d’un triangle. Enfin j’avais conservé, comme une chose d’un grand prix pour moi, un habit bleu que le Prince n’avait porté qu’une fois. Je le lui présentai en lui disant, pour voir s’il se tromperait, qu’il l’avait porté à Paris. «Non, Madame; je ne l’ai porté qu’à Versailles, à telle époque. » Nous avons fait ensemble des échanges de souvenirs qui, seuls, auraient été pour moi une preuve irrécusable que le Prince actuel est véritablement ce qu’il dit être : l’orphelin du Temple. »
Agathe Mottet – Veuve de Rambaud, attachée au service du Dauphin, duc de Normandie, depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792.
En 1837
« Je déclare ici et sur mon honneur et devant Dieu que le fils de Louis XVI est mort dans mes bras dans la tour du Temple. … Toute ma vie j’ai dit la vérité, ce n’est pas quand j’atteindrai [la fin] que je la trahirai.»
Etienne de Lasne, dans une lettre à A. Beauchesne
Au début de 1841
Sous la signature de Gozzoli, rédacteur-gérant de La Voix d’un proscrit, Laprade (qui avait été affublé du titre de « président du conseil de l’Eglise catholique évangélique« ) et cinq autres compères, publièrent un désaveu cinglant de leur adhésion à la cause naundorffiste. (Nous savons par l’abbé Laprade que Morel de Saint-Didier lui-même, sans signer le document, en partageait l’esprit.) Ils y rapportent comment, ayant enquêté sur le passé du bonhomme, ils ont été contraint de conclure à la supercherie. Ils mettent en cause la réalité des apparitions, la moralité personnelle de leur ancien «roi», soulignent les contradictions de la doctrine – bref, ils sapent l’édifice qui les a portés pendant tant d’années.
Le 22 juin 1841
L’abbé Laprade écrivait une lettre sévère, à la mesure de sa tristesse et de ses remords :
« Pauvre sire de Normandie qu’as-tu fait de ta baguette, que sont devenus tes talismans imaginaires?(…) quand je songe à mes dispositions d’autrefois et à mes sentiments d’aujourd’hui, je suis si honteux et humilié de mon passé que je voudrais être trois fois taupe pour ne plus le voir et trois mille fois lièvre pour ne plus le rappeler. Quoi! des hommes généreux et intelligents avaient pu planter un drapeau près de l’hôtel de Camberwell? Ils avaient pu faire à cet homme l’honneur de le regarder comme pouvant être de quelque poids dans la balance des destinées humaines…ma foi, ma foi; convenons-en, nous étions en démence. Aussi, dès que j’ai eu aperçu le bout des oreilles de notre Guillot je l’ai fui à toutes jambes et je cours encore..»
Le 10 août 1845
« Nous soussignés, docteurs-médecins en fonctions à Delft, Jean Soutendam et Jean-Gérard Kloppert, autrefois Officier de Santé, et comme tel adjoint comme médecin consultant par feu Son Excellence le ministre List, déclarons avoir traité en 1845 celui qui se nommait Charles-Louis de Bourbon duc de Normandie.
« Beaucoup d’intérêt fut témoigné à l’auguste malade. Des bulletins furent envoyés journellement sur l’état de sa santé au ministre susdit, qui de temps en temps vint en personne prendre des informations. […] Les pensées du malade s’arrêtaient principalement sur feu son malheureux père, Louis XVI, sur le spectacle effroyable de la guillotine ; ou il joignait les mains pour prier et demander, avec des paroles entrecoupées, de bientôt rejoindre au ciel son royal père. Presque jusqu’au dernier soupir ce fut ainsi. Et Charles-Louis de Bourbon mourut en notre présence le 10 août 1845. »
On a retrouvé sur le corps du dénommé Naundorff les sept spécificités corporelles qu’auraient eues Louis XVII et qui étaient connues et témoignées selon certains, et également archivées dans les rapports médicaux (Archives de Versailles), sans que les naundorffistes ne montrent cette pièce en question.
Cette pièce importante se trouve à Deft : Archives Notariales de Deft et copie conforme au Archives Bourgmestrales – volume 46, folio 35, verso 3 à 7.
Voici le procès verbal :
« Aujourd’hui 12 août 1845, le soir à 6 heures et à la requête de Charles Edmond de Bourbon, aussi connu sous le nom de Naundorff, demeurant à Deft en la rue dite de Voostrat, section 5, n° 85, accompagné de M. Cornélis Théodorus Van Meurs, major d l’Artillerie, chevalier du Lion néerlandais, du Maître Jacobus Van Buren, avocat et juge demeurant à…et connu de moi, notaire.. »
« Moi, notaire, Simon Adrianus Sholten, notaire de l’arrondissement de la Haye, résidant à Deft, assisté de Messieurs Carel Heyne den Back, employé au secrétariat de la Vielle et de Adriaan Mardus Schagen Van Leewen, employé à mon étude, connus de moi, notaire, je me suis rendu à une maison située à l’Oude-Deft, section2, n°62 à Deft où le requérant m’a montré dans une des chambres un cadavre qu’il déclara à moi, notaire, être celui de Charles Louis, Duc de Normandie ( Louis dix-sept), ayant été connu sous le nom de Charles Guillaume Naundoff, né au Château de Versailles en France, le 27 mars 1785 … »« Le requérant, Charles Edmond de Bourbon, fait cette déclaration en présence des ci-dessus nommés Van Meurs et Van Buren qui déclarent par ceci reconnaître le cadavre montré pour celui du père du requérant. »« Ainsi furent présents : M. Jean Sontendam, docteur-médecin, demeurant à Deft, Louis Snabilié, docteur-médecin, premier officier de Santé de la 2ème classe, chevalier de l’Ordre Militaire de Guillaume, Joannes Gerdus Kloppert, docteur médecin et accoucheur, officier de santé de 2ème classe, demeurant à Deft, connus de moi, notaire lesquels Messieurs déclarèrent reconnaître le cadavre montré pour celui de la personne qu’ils on traitée médicalement en sa dernière maladie. »
« Et le requérant a prié les médecins susnommés d’expliquer leurs expériences des signes extérieurs qui caractérisaient le cadavre et après avoir examiné à cette fin le cadavre prescrit, les nommés médecins ont noté les signes suivants :.. »
Sont énumérées les sept spécificités corporelles qu’avaient Louis XVII :
1. Le naevius maternus à la cuise ;
2. L’excroissance du sein droit ;
3. Le cou très ridé ;
4. Disposition des deux incisives sortantes « en lièvre » au milieu de la denture inférieure ;
5. Forme du front large et fort, fuyant et s’évasant ;
6. Disposition des yeux bleus avec leurs arcades sourcilières arquées avec un écartement si précis « qu’il comportait entre eux une distance égale à la longueur d’un œil » ;
7. Anomalie de la forme du lobe des oreilles, notamment de l’oreille droite (nettement visible sur la photo représentant Naundorff su son lit de mort et identique à celle d’un portrait de Louis XVII enfant).
Ce constat se termine ainsi :
« Le requérant m’a prié, moi, notaire, de donner acte en minute de tout ce qui précède et qui est ci-dessus mentionné et, après lecture faite au requérant, aux témoins assistants, aux médecins sus-nommés et aux témoins ici-présents : Carel Heyne Van Back et Adriaan Marius Schagen Van Leeuwen, tous deux ci-dessus nommés, toutes ces personnes ont signé. »
Signé :Charles Edmond de Bourbon, Van Meurs, Van Buren, Jean Soutendam, Dr Snabilié, Dr Kloppert, C. Heyne den Back, A.M. Scagen Van Leewen, S.A ?. Scholten, notaire. »
Le receveur : signé : V.D. Mandèle « Pour signé conforme : signé SA Scholten, notaire »
Le cas Richemond
Claude Perrin naquit à Lagnieu (Ain) le 7 septembre 1786. Il est bossu, ayant une épaule plus haute que l’autre. C’est d’ailleurs lui-même qui le précise lorsqu’il doit se défendre devant la Justice de ses supercheries. Il est cependant soldat et ceci lui donne le goût de la tenue militaire qu’il arbore fièrement. Il parle de lui à la troisième personne, ce qui démontre un dédoublement de la personnalité ou une haute opinion de soi, les deux possibilités ne s’excluant l’une l’autre.
On ne sait d’où lui vient l’idée du nom qu’il adopte (« Richemond »), du titre qu’il s’accorde (« baron ») ni, enfin, de l’idée de jouer le rôle d’un faux Dauphin. Il est vrai que la rumeur de l’évasion de Louis XVII battait son plein dans les campagnes de France et Claude Perrin, presque du même âge que Louis XVII, à un an près, doté de cheveux châtain clair, entrevoit peut-être un autre rôle à tenir sur la scène de la vie que celui auquel le destin le prédispose. En 1831, il écrit et publie lui-même un livre : « Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI », puis en 1846 il publie «Mémoires d’un contemporain », livre qui contredit le premier.
Dans le premier récit (« Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI »), le faux Dauphin Richemond n’indique ni date, ni nom, ni désignation précise d’aucun lieu susceptible de décrire les situations vécues par le vrai Roi ; il ne sait même pas quand, à quelle date et comment eut lieu l’évasion du Temple ; ses propos sont contradictoires mais, apparemment, cela et ne le gênait pas pour persévérer dans ses mensonges. Ainsi désavoua-t-il son premier livre : par exemple, il supprime l’épisode dans lequel il vécut chez « les Sauvages ». ; il avait dit qu’il avait passé « plus de six ans, tout seul, nu comme eux, le corps peint, etc. Ces Sauvages s’appelaient les Mamelucks. ». Il prétend, de plus, avoir eu la petite vérole dans la Tour du Temple ; or Louis XVII avait été inoculé et n’eut jamais cette maladie.
« Richemond » fut reconnu par des personnes qualifiées : madame Bequet, qui avait été au service de Marie-Antoinette jusqu’au 10 août 1792; madame Fillette, qui avait été fille de garde-robe du Dauphin ; madame de Rambaud, berceuse du Dauphin… Ce sont là, à l’évidence, les déclarations de Perrin qui, en réalité, ne reçut jamais un témoignage de reconnaissance réelle, écrit, daté et signé sous serment et déposé devant une Instance officielle quelconque (Tribunal, Police, Notaire..).
Il raconte dans « Mémoires d’un contemporain » que trois ans auparavant, en 1843, il rencontra madame de Rambaud, que celle-ci le reconnut bien évidemment en tant que Louis XVII mais comme elle avait auparavant reconnu aussi en Naundorff le Roi, qu’elle aurait décidé de « s’en remettre au Ciel pour faire un choix » (ibidem – page 370). Il est patent que ces propos sortirent du cerveau déséquilibré de Perrin et non de la bouche de Madame de Rambaud. Il précise qu’il « n’a pas revu cette dame depuis ce jour », ce qui est étrange car cette reconnaissance était très importante pour Madame de Rambaud ; aurait-elle évité de revoir celui qu’elle avait chéri ?
La petite fille de de madame de Rambaud, dans une lettre datée du 26 janvier 1884 et adressée l’Abbé Laurent (curé de la paroisse de Sainte Marguerite sur Duclair), écrivit :
« Je m’empresse de satisfaire votre demande. Madame de Rambaud, ma grand-mère, a, en effet, reconnu Louis XVII dans la personne du prétendant Naundorff et n’en a reconnu d’autres. Richemont, il est vrai, s’est fait présenter à elle ; mais à ma connaissance il n’en est rien résulté pour ce personnage de cette entrevue….son frère (le frère – Charles- de son beau-père, Casimir Verger) a connu M. de Joly, que j’ai vu moi-même chez ma grand-mère et qui, comme elle, a attesté ses convictions…Signé L. Verger, née de Rambaud »
Madame de Rambaud vivra encore dix années après la supposée rencontre avec « Richemond » ; elle meurt le 18 octobre 1843 en n’ayant jamais renié la reconnaissance en Naundorff le Roi qu’elle avait élevé pendant sept années. La petite-fille de Madame de Rambaud, Ernestine de Rambaud, dans une lettre qu’elle écrivit en juin 1849 affirma la fidélité de sa grand-mère à cette reconnaissance capitale : « Encore aujourd’hui elle (Madame de Rambaud) ne doute pas de son identité (Louis XVII=Naundorff)».
Comme Hergavault, Richemond sait séduire et comme de très nombreuses personnes espéraient retrouver Louis XVII, elles acceptèrent de le rencontrer mais jamais elles ne le reconnurent vraiment ; une seule rencontre et aucune reconnaissance. Lors du procès de Perrin, la Cour ne retint que les dépositions écrites de Mesdames Bequet et Fillette (respectivement le 20 décembre 1842 et le 15 juillet 1844) dans lesquelles elles déclarent seulement avoir rencontré « Richemond » une seule fois, sans préciser une reconnaissance quelconque.
Claude Perrin meurt à Gleize (Rhône) le 10 août 1853, huit ans jour pour jour après Naundorff…
Perrin/Richemond, Hergavault, Bruneau, Williams, Mévès… tous ces « faux Dauphins » avaient des yeux marrons et seul, un « faux Dauphin » avait les yeux bleus : « Naundorff ». Louis XVII avait les yeux bleus…
En 1943
André Castelot soumet au Docteur Locard, directeur du laboratoire de Police Technique de Lyon, une boucle des cheveux du «Dauphin», propriété de l’abbé Ruiz, jointe à une mèche de Naundorff, qui lui avait été remise par le baron de Genièbre. Le but était de chercher si les cheveux correspondent ou non. Selon les naundorffistes, la confrontation, pratiquée d’après des microphotographies, donnerait des résultats époustouflants : les deux échantillons comporterait la même excentration du canal médullaire, un caractère jugé très rare par l’expert lyonnais. L’identité d’origine des deux mèches de cheveux semble irrécusable : pour les partisans de Naundorff, comment croire que cette excentration, si exceptionnelle, est due à la seule intervention du hasard?
En 1947
Alain Decaux (1925-2016) publie son premier livre, Louis XVII retrouvé, et soutient la thèse survivantiste _ ou naundorffiste_ qui perd par la suite tout crédit chez les historiens. Le futur ministre se ravisera d’ailleurs de cette conclusion de jeunesse.
En septembre 1950
Le cercueil de Naundorff est ouvert à Delft, sous la conduite du Docteur Hulst, médecin expert près les tribunaux hollandais. Castelot, pour s’assurer des conclusions de la première analyse, prie ce dernier d’envoyer à Locard une mèche provenant directement du squelette. Il fait bien. On procède à une seconde expertise.
Le 4 mai 1951
La sentence de la trichoscopie tombe, terrible pour le camp survivantiste. Locard écrit dans son rapport :
« Ces cheveux, d’origine indiscutée, ne présentent pas l’excentrement caractéristique. Ainsi donc les cheveux de Naundorff (…) ne sont pas identiques à ceux de Louis XVII». Le Dr Locard, qui avait entre-temps reçu, par le biais du marquis de Tinguy, d’autres cheveux provenant de Louis XVII qu’il a également analysés, ajoute qu’il semblait établi «que le Dauphin présentait une anomalie capillaire caractéristique» non retrouvée chez Naundorff. Les cheveux n’appartenaient pas à la même personne. La «preuve scientifique», qui, c’est le cas de le dire, n’avait tenu qu’à un cheveu, tombait à l’eau.»
Le spécialiste lyonnais confiera plus tard à Castelot que les deux premières mèches étaient si semblables, qu’il était fort possible que toutes deux aient été prises sur le crâne de Louis XVII.
En 1975
La relique du cœur Pelletan, récupérée par de la famille lointaine de Louis XVII, finit par être donnée à la basilique de Saint-Denis par la princesse Massimo.
En 1996
Après cinq ans d’enquêtes, Paul-Éric Blanrue a conclu à l’imposture du dénommé Naundorff (Le mystère du Temple, la vraie mort de Louis XVII, Claire Vigne éditrice, 1996, p. 229-287) et à la réalité de la mort du petit Roi à la date mentionnée par l’état civil. Il a repris cette thèse dans la préface des Souvenirs de la duchesse d’Angoulême (Communication et Tradition, 1997) dont il a établi l’édition critique, ainsi que dans une dizaine d’articles. Ni Alain Decaux, ni André Castelot, ni personne, n’y a répondu.
En 1998
Des analyses sont menées par l’Université de Louvain et le CHU de Nantes à partir de cheveux et de fragments d’humérus de Naundorff et de cheveux des descendants des sœurs de Marie-Antoinette. Conclusion : les restes de Naundorff ne sont pas ceux du dauphin Louis XVII.
En 1999-2000
L’historien – journaliste Philippe Delorme contacte la noblesse française afin que le cœur du petit décédé le 8 juin 1795 soit analysé avec la méthode ADN. Le résultat est que le cœur examiné était celui d’un parent de Marie-Antoinette, donc en principe de Louis XVII.
Monsieur Delorme a officiellement mis un terme à cette énigme; mais certains avancent que le cœur est celui du frère de Louis XVII, décédé en 1789. Le cœur embaumé de cet enfant a disparu sous la Restauration. Une bataille acharnée se déroule depuis entre Mr Delorme et les partisans de l’autre thèse. Mais une médecin-légiste a affirmé au cours d’une émission diffusée en janvier 2007 qu’elle serait bien en peine de faire la différence entre un cœur embaumé (frère de Louis XVII) et un cœur non embaumé (cœur du décédé le 8 juin 1795).
Monsieur Delorme devait rechercher le cœur du frère ainé de Louis XVII. Il n’y a pas eu de suite : la tombe de Louis-Joseph a, en effet, été ouverte et vidée le 16 octobre 1793 !
En 2004
De nouveaux prélèvements sont effectués sur le squelette de Naundorff. On procède à des analyses en Hollande et en Autriche, mais la famille dite de Bourbon n’a pas fait connaître les résultats.
Ce semble éloquent …
Le 8 juin 2004
Pour le professeur Jean Tulard, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, appelé par le ministre de la Culture à donner son avis sur le dépôt du cœur de Louis « XVII », l’analyse de l’ADN du cœur, conjuguée avec l’enquête menée sur son origine et les péripéties de son histoire, est suffisante pour attester de la mort du prince au Temple.
Sources :
Jacques-René Hébert est guillotiné : lors de son trajet de la conciergerie à la place de la Révolution, il est hué par le peuple. Quand vient son tour de « jouer à la main chaude » (« être guillotiné »), Hébert doit être traîné à l’échafaud : sa tête montrée par le bourreau est saluée par des quolibets.
Il est vraisemblable que le Comité de salut public, au moment ou la tête de Hébert roule sur l’échafaud, est fixé sur la situation réelle au Temple. Après la mort des hébertistes le Comité de sûreté générale regarde comme inutile la surveillance particulière réduite à deux gardes nationaux pour la famille royale (trois personnes).
Si l’enfant est mort avant la chute de la Commune hébertiste, les mêmes autorités – la Commune de Pache et Chaumette puis le Comité de salut public -, en admettant que tous soient au courant, feraient en logique tout pour cacher ce décès au public. Mais cela ne prouve pas qu’il y ait eu substitution.
Les 27 et 29 mars 1794
Les 7-9 germinal An II une séance de la Commune de Paris :
«On nomme les membres qui doivent aller au Temple y maintenir l’ordre et la tranquillité; le citoyen Cressant est proposé: plusieurs s’opposent à son admission et lui reprochent d’avoir plaint le sort du jeune Capet (sic), d’avoir même recueilli les noms de ceux qui montent journellement au Temple ». Après délibération le conseil arrête l’exclusion de Cressant du conseil, renvoyé à l’administration de police et scellés sur ses papiers (il ne sortira de prison que plus tard). »
Moniteur XX, 69 et 154
On effectue des travaux d’isolation et de confinement strict de l’enfant pour prévenir tout enlèvement. Quatre commissaires sont nommés à cet effet (Moniteur XIX, 239). Depuis cette date sept membres du conseil général de la Commune forment la nouvelle commission spéciale de la surveillance du Temple.
Le Roi semble mieux traité. voir Ng p 564
Le 8 mai 1794
On vient chercher Madame Elisabeth au Temple pour la conduire à la Conciergerie.
En mai 1794
Déposition de Barelle
D’après une dépêche conservée dans les Dropmore papers, Robespierre aurait sorti Louis-Charles (peut-être un autre enfant) de la prison du Temple et l’aurait conduit à la forteresse de Meudon en mai 1794, répétition d’une opération qui pourrait avoir lieu au cas où les armées ennemies encercleraient Paris. On sait que le vieux château de Meudon est alors devenu un arsenal et une réserve de poudre. Si l’information donnée par l’informateur du gouvernement anglais est exacte, on trouve une logique immédiate qui tient à l’inquiétude de Robespierre. Celui ci avait de bonnes raisons de penser que tôt ou tard les armées coalisées encercleraient la capitale. Cette hypothèse n’est pas à rejeter absolument. Pour négocier une porte de sortie pour lui et les membres des comités on peut penser qu’ils avaient l’intention de mettre dans la balance la vie même de l’enfant du Temple qu’on transporterait hâtivement du Temple à Meudon, avec la menace dissuasive d’une explosion des réserves de poudre et le sacrifice de l’otage (cette hypothèse a davantage de sens qu’un nébuleux projet d’exfiltration de cet enfant dont Robespierre se serait rendu complice… mais l’information est peut-être simplement inexacte. Quoi qu’il en soit de ce pont particulier qui a donné lieu à de nombreuses spéculations fantaisistes, les dépêches, issues des Dropmore papers (Public Record office à Londres), sont utilisées et discutées par MM. de Beaucourt et Gustave Bord, historiens «royalistes» qui contrairement à MM. Alphonse Aulard et Albert Mathiez (dont les théories y sont parfois mises à mal), pensent qu’elles contiennent des vérités. Comme souvent, la «vérité», justement, est entre deux. Les informateurs des cabinets étrangers se trompent ou sont mal renseignés sûrement plus qu’ils ne cherchent à tromper (comme cela a parfois été exagérément soutenu par Jacques Godechot).
Le 10 mai 1794
Exécution de Madame Élisabeth.
Madame Royale reste seule au Temple, au dessus de chez son petit frère…
On sait que la Commune de Paris et la haute administration du ministère de la guerre, à savoir Bouchotte, Ronsin, Vincent, Turreau, Quétineau, Hanriot, Santerre etc. sont, en ce même hiver 1794, au moment de tenter un coup d’état militaire contre la Convention et ses comités tout puissants qu’ils critiqueent. Ils désirent imposer à la France entière le gouvernement de Paris et de ses sections, appuyés sur un conseil de régence dont Jean-Nicolas Pache (1746-1823) serait Grand Juge. On sait aussi que le général Henriot à la veille de la révélation du complot «pachiste» par (selon la tradition) le sieur Souberbielle, lui même médecin de Robespierre qui lui a fait part de ses craintes, est pardonné par Robespierre. Celui-ci demande aussitôt à Saint-Just et aux comités de gouvernement de reprendre la Commune et sa force armée en main, de décapiter sans délai le mouvement popularisé par Hébert et d’épurer la Commune «gangrenée par l’étranger» (Pache est arrêté et remplacé par Lescot de Fleuriot).
En mai, l’enfant du Temple semble se bien porter, ce qui n’est pas le cas de sa sœur qui doit être accablée de chagrin depuis le départ de sa tante Elisabeth dont elle ignore le sort :
Ceux qui ont eu l’occasion de voir Louis XVII dans le lieu où les tyrans le retiennent en captivité s’accordent à dire qu’il est de la plus belle figure. On le coëffe d’un bonnet rouge, on l’occupe à faire des souliers, on lui paye son travail avec des sous de fonte des cloches, et on le laisse jouer avec des polissons. Quant à madame, sa sœur, elle a dépéri d’une manière effrayante, on la fait travailler à des chemises pour la nation.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 12 juin 1794, p.1340
Le 11 juin 1794
Le citoyen Desault chirurgien major du grand hospice de l’humanité de Paris (est) arrêté au moment où il donn(e) sa leçon et conduit à la Maison d’arrêt du Luxembourg. Le citoyen Manoury (est) nommé pour le remplacer provisoirement.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 11 juin, p.1402)
Le 27 juillet 1794
Chute de Maximilien de Robespierre ( né le 6 mai 1758), il est guillotiné le lendemain.
… Antoine Simon fait partie du convoi de la guillotine.
Marie Jeanne Aladame (1745-1819) la veuve Simon, ancienne domestique entrée aux Incurables en 1796, assurera toujours que l’enfant mort en janvier 1794 fut remplacé, et cela jusque sous la Restauration où, pressée par Decazes elle soutiendra une version contraire. Jusqu’à sa mort, le 10 juin 1819) elle assure néanmoins aux religieuses qui s’occupent d’elle que l’enfant du Temple a été substitué (remplacé), alimentant une rumeur qui a marqué l’historiographie légitimiste.
Jusqu’au 28 juillet 1794
Louis-Charles est enfermé au secret dans une chambre obscure, sans hygiène ni secours, pendant six mois. Son état de santé se dégrade, il est rongé par la gale et surtout la tuberculose. Il vit accroupi. Sa nourriture lui est servie à travers un guichet et peu de personnes lui parlent ou lui rendent visite. Ces conditions de vie entraînent une rapide dégradation de son état de santé. L’isolement total dans lequel il est placé laisse planer un certain mystère et donne l’occasion à l’imagination populaire de soulever l’hypothèse de substitution de l’enfant et de son exfiltration, donnant naissance au « mythe évasionniste et survivantiste ».
Le 28 juillet 1794
Le député Barras découvre ainsi un enfant mutique, brisé psychologiquement. Les comités de salut public et de sûreté générale nomment Laurent, membre du comité révolutionnaire de la section du Temple, pour le garder, lui et sa sœur.
Son sort s’améliore relativement, mais le prisonnier de la tour du Temple est rongé par la tuberculose, ce qu’omet de signaler Laurent lorsqu’il écrit, sur le bulletin de la tour du Temple, que les prisonniers « se portent bien ».
Après le 27 juillet 1794
Après le 9 thermidor, Barras fait désigner comme garde le citoyen Laurent, ancien président de la section du Temple, avec ordre d’améliorer les conditions de détention de l’enfant.
Le 9 novembre 1794
Jean-Baptiste Gomin (1757-1841), fils d’un tapissier de l’île Saint-Louis, est nommé adjoint de Laurent et devient gardien des enfants de France à la prison du Temple. L’enfant est décrit en bonne santé mais il doit certainement y avoir des signes avant coureur de sa maladie qu’ils ne perçoivent pas.
Le 19 décembre 1794
C’est seulement lors de la visite, le 19 décembre 1794 (et non en mars 1795), des citoyens représentants du Comité de sûreté générale Harmand, Mathieu et Reverchon qu’on constaterait, prétendra beaucoup plus tard Harmand, des anomalies physiques (tumeurs au genou droit et au poignet gauche) et psychologiques (mutisme).
Entre décembre 1794 et mai 1795
Aucune disposition sur la santé de Louis Charles n’est prise par l’exécutif. L’indifférence semble prédominer.
Cette indifférence à soigner l’enfant pourrait bien avoir un rapport avec les négociations de paix en cours avec l’Espagne qui réclame, entre autres, les deux enfants de Louis XVI. La République craint, elle, d’abandonner son otage qui permettrait à ses ennemis de relancer la coalition et de réactiver la guerre pour organiser une restauration de leur choix. La mort de l’enfant arrangerait la haute politique française.
Retrouver les portraits authentiques du petit Roi relèverait, si l’on en croit tout ce qui a été dit, écrit et publié, de l’enquête policière. Eh pourtant, c’est bien le peintre Greuze de Tournus qui est la piste la plus intéressante. En 1791, avant l’incarcération de la famille royale, il a fait un premier portrait de l’enfant alors qu’il n’avait que six ans (en dessous, à gauche). Il n’est pas besoin d’être un grand spécialiste pour constater une ressemblance probable avec le portrait oublié que j’ai replacé au milieu, compte tenu, bien entendu, qu’en quatre ans, un visage d’enfant s’allonge mais que certains détails ne changent pas (la bouche avec sa lèvre inférieure déjà bourbonienne, la chevelure, le nez, les yeux). L’enfant a pourtant bien changé. Les épaules sont tombantes, la poitrine étroite et rentrée, le visage émacié. Les joues se sont creusées, la bouche ne sourit pas et le regard n’est plus le même.
Ce tableau oublié tout à fait inconnu s’est vendu dans une salle des ventes parisienne, le 11 octobre 1981. La description était la suivante : «Portrait présumé du dauphin Louis XVII, attribué à Greuze» L’inscription collée au dos donnait les précisions suivantes : «Portrait du dauphin Louis XVII à l’âge de dix ans. Huile sur toile attribuée à Greuze, non signée, portant en haut et à droite les armes de la famille royale de France.»
Le tableau est merveilleusement peint. Les cheveux blonds sont d’une grande finesse. L’expression du visage est d’une étrange délicatesse mais révèle un état maladif. Madame Vigée Le Brun, amie de Marie-Antoinette qui fit plusieurs portraits de la famille royale ayant émigré dès 1789, ne peut en être l’auteure. En revanche, plusieurs artistes ont pu peindre l’héritier de la couronne. Tout d’abord Ducreux qui a dessiné Louis XVI au Temple, Prieur qui peignit Marie-Antoinette à la Conciergerie, et tous ceux qui firent les portraits des héros de la Révolution… mais c’est bien le tournusien Greuze qui est la piste la plus crédible. Il était alors à Paris. C’est d’ailleurs l’hypothèse retenue dans le catalogue «Chrysanthemum» qui fait par ailleurs remonter l’origine du tableau jusqu’au baron Mayer de Rothschild.
Il s’agit de Louis XVII dans sa triste authenticité et non dans une posture académique d’enfant royal.
Le 31 mars 1795
Laurent démissionne. Il est remplacé par Etienne Lasne (1757-1841), ancien peintre en bâtiment, de la section Des droits de l’homme.
Les citoyens Lasne et Gomin traitent l’enfant avec douceur mais son état les inquiète.
Le 13 avril 1795
« Un enfant vivant est au Temple : il est incommodé selon un rapport de Sevestre sur le caractère et les signes extérieurs de la maladie.»
(source ? Moniteur XXIV, 650)
Le 3 mai 1795 (14 Floréal an III)
Les gardiens Gomin et Lasne inscrivent sur les registres du Temple « Le petit Capet est indisposé ».
Le 6 mai 1795 (17 Floréal an III)
La tuberculose prend un tour critique, caractérisé par l’apparition d’une péritonite.
Dans les derniers jours de mai 1795
Les gardiens signalent au comité de Sûreté générale que l’enfant Capet manifeste « une indisposition et des infirmités qui paraissent prendre un caractère grave ».
Cette fois le gouvernement réagit. Le docteur Desault médecin chef de l’Hôtel Dieu, examine l’enfant et prétend, dit-on, ne pas le reconnaître (ce que confirme son épouse), confirme la gravité de l’état du malade mais … meurt les jours suivants. On le remplace par ses collègues Pelletan, chirurgien, qui observe certains symptômes caractéristiques révélant un stade avancé d’une maladie infectieuse mortelle, et demande confirmation de diagnostique à son collègue Dumangin qui l’approuve. Il s’agit pour eux d’un «vice scrofuleux» qui signifie tuberculose osseuse. Cette maladie a frappé son frère aîné, décédé le 4 juin 1789. Il est possible que les carences en vitamines C et D, le confinement et le manque d’exercice prolongé après le départ des Simon, ou encore l’humidité aient favorisé l’apparition de cette maladie chez Louis-Charles. Il est possible enfin que Marie-Antoinette ait été porteuse saine de cette maladie et l’ait transmise à ses deux fils, mais il n’y a aucune évidence à cela.
Le Comité « arrête que le premier officier de santé de l’hospice de l’Humanité visiterait le malade en présence de ses gardiens et administrerait des remèdes ». Le docteur Desault passe à cette époque pour être le premier praticien de Paris.
Pendant tout ce temps, l’état du petit Roi s’est tellement aggravé qu’enfin, à la demande pressante des geôliers, on fait venir un médecin. M. Desault le soigne et lui prescrit quelques remèdes, bien qu’il fait comprendre dès le début à Gomin qu’il a peu d’espoir de guérison pour l’enfant. Ils le déplacent dans une pièce plus claire et ensoleillée, mais il est très faible et le changement ne freine guère la progression de la maladie. Bien que son bon ami le conduise souvent jusqu’à la plate-forme de la Tour, le léger mieux apporté par la respiration de l’air frais compense à peine la fatigue que lui coûte l’effort.
Le 29 mai 1795
Desault fait sa dernière visite au malade car il meurt le 1er juin, à l’âge de cinquante-sept ans.
Madame de Tourzel parvient à s’assurer des contacts avec Gomin et Lasne, anciens commissaires de la Commune de Paris, en charge de la surveillance du petit Roi au Temple. Elle prend connaissance des interventions de Desault et Pelletan, les derniers médecins qui tentent d’adoucir les souffrances de l’enfant … Le témoignage du docteur Jeanroy, « un vieillard de plus de quatre-vingts ans, d’une probité peu commune et profondément attaché à la famille royale. Il (a) été choisi pour assister à l’ouverture du jeune roi ; et pouvant compter sur son témoignage comme le mien propre, (elle) le f(ait) passer chez (elle)».
De réputation fiable et solide, qui l’a fait choisir par les membres de la Convention pour fortifier de sa signature la preuve que le jeune roi n’a pas été empoisonné.« Ils n'(ont) pas eu besoin d’employer le poison : la barbarie de leur conduite vis-à-vis d’un enfant de cet âge d(oit) immanquablement le conduire au tombeau. Sa bonne constitution prolongea so n supplice ; la malpropreté dans laquelle on le laissait volontairement et le défaut d’air et d’exercices, lui avaient dissous le sang et vicié toutes les humeurs.»
Madame de Tourzel
Pour la marquise, le jeune prince est bien mort au Temple.
Les trois médecins de Louis XVII au Temple meurent presque en même temps
Le 1er juin 1795
Mort de Pierre Joseph Desault, né à Vouhenans (Haute-Saône) le 6 février 1738 d’une famille rurale de sept enfants et mort à Paris , il était chirurgien et anatomiste.
Le 5 juin 1795
François Doublet, né le 30 juillet 1751, était médecin de la faculté de médecine de Paris et membre de la société royale de médecine.
Le 6 juin 1795
Le docteur Pelletan, quarante-huit ans, chirurgien en chef de l’Hospice de l’Humanité, succède au docteur Desault.
Ne voulant pas prendre seul la responsabilité de soigner l’enfant, le Comité de sûreté général lui adjoint le docteur Dumangin, cinquante-et-un ans, médecin chef de l’hospice de l’Unité (Hôpital de la Charité de Paris). Ils n’ont aucun espoir. Ils lui font prendre des médicaments qu’il avale avec difficulté. Heureusement, sa maladie ne le fait pas beaucoup souffrir ; c’est une débilité et un dépérissement total plutôt qu’une douleur aiguë. Il a plusieurs crises pénibles ; la fièvre le saisit, ses forces diminuent de jour en jour, et il expire sans lutte.
Dans la nuit du 7 au 8 juin 1795
Gomin et Lasne alarmés par l’état de santé de l’enfant ont envoyé cherché en urgence le docteur Pelletan. Il répond qu’il viendra demain matin avec le docteur Dumangin.
Le lundi 8 juin 1795 (20 prairial an III)
Les docteurs Dumangin et Pelletan arrivent ensemble à onze heures du matin au Temple, l’état de l’enfant s’est aggravé.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
« Le sieur Lasne gardien et moi, nous prêtions nos soins au petit dauphin, et enfin à trois heures (de l’après-midi) lorsque le sieur Gomin fut revenu, l’enfant venait de mourir ». Pelletan arrivé à quatre heures confirme la mort. Le docteur Dumangin arrive à huit heures, il apprend le décès du fils Capet.»
Témoignage de Damont commissaire civil au Temple
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Les commissaires le pleurent amèrement, tant il s’est fait aimer par ses douces qualités. Il avait beaucoup d’intelligence ; mais l’emprisonnement et les horreurs dont il est la victime l’ont beaucoup changé ; et même, s’il a vécu, il est à craindre que ses facultés mentales ont été atteintes. Le seul poison qui a abrégé sa vie est l’impureté, jointe aux traitements horribles, à la dureté et à la cruauté sans exemple exercés sur lui.
Le 9 juin 1795
A onze heures du matin, le chirurgien Philippe-Jean Pelletan réalise son autopsie qui confirme le diagnostic de tuberculose. Il est secondé par trois médecins dont le docteur Dumangin. C’est justement dans ce rapport d’autopsie que le docteur Pelletan va aussi raconter une idée que lui est venue à l’esprit : celle de s’emparer en toute discrétion du cœur de l’enfant mort et le garder dans sa poche. Après, le cadavre du petit Roi va être jeté dans une fosse commune au cimetière de Sainte-Marguerite. Il va le garder dans l’alcool et le cœur va devenir dur comme de la pierre.
« Vous m’aviez à la vérité proposé d’autres adjoints; et sur mon observation que, d’après les qualités personnelles et les rapports qu’avaient eus M. Pierre Lassus (1741-1807) avec Mesdames de France et Nicolas Dieudonné Jeanroy (1750-1816) dans la Maison de Lorraine, leurs signatures seraient d’un tout autre poids, vous aviez agréé ce choix. »
Le docteur Dumangin rédige le procès-verbal d’autopsie, recopié en quatre exemplaires : Un pour le Comité de sûreté générale et un pour chaque médecin. L’exemplaire du docteur Dumangin est conservé aux Archives Nationales depuis 1891.
« Des doutes intempestifs se sont élevés sur l’identification du cadavre car on n’a pas pensé (ou voulu ? disent certains) le présenter à Marie-Thérèse Charlotte, sa sœur, ni à madame de Tourzel sortie de prison, ni à Hue, ni à Tison, ni à Marie Jeanne Aladame, la veuve de Antoine Simon, ni à aucun des anciens médecins du dauphin (le docteurs Brunier et le docteur Naudin, médecin des prisons). Mais il a été reconnu par un ancien garde national (le citoyen Gagnié, «ancien chef du Temple»), présent à l’autopsie, qui déclara en août 1817 avoir vu le dauphin aux Tuileries, tenant la main à sa mère et se promenant dans son petit jardin aménagé.»
Ce même jour
François Chopart, chirurgien, né le 30 octobre 1743 à Paris, y meurt à l’âge de cinquante-et-un ans.
Il se dit que Pierre Joseph Desault, François Doublet et François Chopart en savaient trop sur l’autopsie d’un faux Louis XVII, il ne fallait pas qu’ils puissent parler : on les a empoisonnés.
Le 12 juin 1795
Louis-Charles est enterré dans le cimetière Sainte-Marguerite. Sous la Restauration, Louis XVIII fait rechercher la sépulture de son neveu : l’énigme de « l’enfant du Temple » se développe alors avec les témoignages contradictoires de ceux qui ont assisté à l’enterrement le 10 juin (fossoyeur, concierge du cimetière, abbé …) qui évoquent une inhumation en fosse commune (le corps ne pouvant dès lors plus être identifié), une réinhumation dans une fosse particulière près de la Chapelle de la Communion de l’église, voire dans le cimetière de Clamart.
Le 12 juin 1795 (24 prairial an III)
L’acte de décès de Louis XVII est rédigé. L’original du document a disparu dans les incendies de la Commune de 1871 mais l’acte avait été recopié par des archivistes et un exemplaire se trouve aussi aux Archives Nationales :
« Du vingt-quatre prairial de l’an trois de la République (12 juin 1795)
Acte de décès de Louis Charles Capet du vingt de ce mois (8 juin), trois heures après-midy, âgé de dix ans deux mois, natif de Versailles, département de Seine-et-Oise, domicilié à Paris aux Tours du Temple, section du Temple, fils de Louis Capet, dernier roy des Français, et de Marie Antoinette Josèphe Jeanne d’Autriche.
Sur la déclaration faite à la maison commune, par Etienne Lasne, âgé de trente-neuf ans, profession gardien du Temple, domicilié à Paris rue et section des Droits-de-l’Homme n° 48 : le déclarant a dit être voisin ; et par Rémy Bigot, âgé de cinquante-sept ans, profession employé, domicilié à Paris vieille rue du Temple n° 61 : le déclarant a dit être ami.
Vu le certificat de Dussert, Commissaire de Police de ladite section, du vingt-deux de ce mois (10 juin). Officier public : Pierre Jacques Robin.
(Signé) : Lasne, Robin, Bigot. »
Le 24 juin 1795
Monsieur, toujours en émigration , est proclamé Roi sous le nom de Louis XVIII.
Dès 1795, des rumeurs faisaient courir le bruit que le Dauphin, remplacé dans sa geôle par un autre garçon, aurait été libéré du Temple. Ces rumeurs avaient été favorisées par les exhumations des restes d’un enfant au crâne scié — traces d’une autopsie — du cimetière Sainte-Marguerite (au cours des deux exhumations réalisées en 1846 et en 1894, plusieurs spécialistes attribuent pourtant le corps à un sujet masculin âgé de plus de seize ans, d’1,63 m et de morphologie différente de celle de Louis XVII) et l réaction thermidorienne : tandis que les royalistes osaient à nouveau s’afficher comme tels, des accords de paix étaient négociés entre la République et les révoltés vendéens et chouans ( traités de La Jaunaye, de la Mabilais et de Saint-Florent-le-Vieil ). La mort du petit Roi, en juin de cette même année, fut par conséquent accueillie avec scepticisme par une partie de l’opinion publique. Ce contexte permit l’éclosion de théories «évasionnistes» et «survivantistes» …
Dès le début du XIXe siècle, des «faux Dauphins» commencèrent à apparaître et à réunir un nombre variable de partisans autour de leurs prétentions. Les condamnations des trois premiers (Hervagault, Bruneau et un certain Hébert, connu sous le titre de «baron de Richemont») à de lourdes peines de prison ne découragèrent pas d’autres imposteurs, dont le plus célèbre est l’horloger prussien Karl-Wilhelm Naundorff (date de naissance inconnue-10 août 1845), qui eut de nombreux adeptes jusqu’à la fin du XXe siècle.
Dans les récits qu’ils firent de leur prétendue évasion du Temple, la plupart de ces prétendants reprenaient la trame du roman de Regnault-Warin, qui évoque des agents royalistes envoyés par Charette qui s’introduisent dans la tour, où ils apportent, au moyen d’une cachette ménagée dans un « cheval de bois », un orphelin drogué à l’opium destiné à prendre la place du vrai Dauphin. Ce dernier, dissimulé dans le même objet, est ainsi libéré de sa prison. Aux termes de nombreuses péripéties, et notamment d’une tentative d’exfiltration vers l’Amérique, l’orphelin royal est repris avant de mourir de maladie.
Malgré les nombreuses invraisemblances et le triste dénouement de ce récit, la thèse de la substitution gagne ainsi un nouveau mode de diffusion le cheval de bois étant quelquefois remplacé par un panier de linge sale, et Charette par le comte de Frotté, ce dernier ayant effectivement échafaudé, sans pouvoir y donner suite, des projets d’enlèvement des orphelins royaux.
Aux imposteurs plus ou moins convaincants s’ajoutent de nombreux fous (comme Dufresne, Persat et Fontolive) ou encore des personnages dont l’identification à Louis XVII a surtout été l’œuvre de tiers, le plus souvent de manière posthume : c’est notamment le cas de l’officier de marine puis architecte français Pierre Benoît (actif à Buenos Aires ), du pasteur iroquois Eliézer Williams, du musicien anglais Augustus Meyes, du célèbre naturaliste John James Audubon et même de Louvel (assassin du duc de Berry, cousin de Louis XVII).
Les circonstances exactes de la mort de Louis XVII et la rumeur concernant une éventuelle évasion de la prison du Temple ont attisé la curiosité de nombreux auteurs, comme Gosselin Lenôtre (1855-1935), André Castelot (1911-2004) ou Alain Decaux (1925-2016).
Il demeure quelques partisans de la survivance du prince.
A partir de 1798 commence la saga des faux dauphins.
Ainsi ce début du XIXe siècle verra-t-il revenir de nombreux prétendants au titre de Louis XVII – on en a comptés environ cent cinquante… : le baron de Richemont, l’horloger prussien Karl-Wilheim Naundorff, Jean-Marie Hervagault ou Mathurin Bruneau ont pu chercher à rencontrer la duchesse d’Angoulême pour se faire reconnaître.
Marie-Thérèse n’en reçut aucun !
Le dénommé Jean-Marie Hervagault, en fugue pour la dixième fois, annonce qu’il est Louis XVII (des rumeurs circulent dès 1795 sur la survie de Louis XVII). Il sera jugé et finira ses jours en prison en 1812. Notons que lors d’une fugue précédente, son père n’a pas voulu le reconnaître !
Sous le Consulat
Barras, l’un des responsables du renversement de Robespierre en 1794 et directeur de la République de 1795 à 1799, a bénéficié d’un traitement de faveur de la part de Louis XVIII ) partir de 1814. Il n’est pas exilé, comme beaucoup d’anciens députés de la Convention (1792-1795).
Il a déclaré sous le Consulat, lors d’un repas, que le fils de Louis XVI était vivant et qu’il «verrait pendre ce diable de corse». Témoignage devant notaire d’une invitée.
Sous le premier Empire
Si l’on en croit les « Mémoires de Talleyrand », à entendre Joséphine de Beauharnais, Napoléon considère avoir la preuve absolue de l’existence de Louis XVII. Il en est si sûr qu’il dit souvent à son entourage : « Quand je voudrai, je sèmerai la discorde dans la famille du prétendant ! ».
En 1814
L’empire français s’écroule et Napoléon prend pour la première fois le chemin de l’exil. Quant à Joséphine, lorsque le Czar Alexandre va la visiter, il lui dit : « Qui mettrons nous sur le trône de France, Madame ? », elle lui répond : « Mais le fils de Louis XVI, évidemment ».
A la Restauration
Voici l’ignare Bruneau et le dandy «Baron de Richemont».
Puis arrive Naundorff, apparu en Prusse. On trouve des traces de lui en 1809.
Le docteur Pelletan va essayer de rendre ce cœur à la famille du petit Roi pendant la restauration, mais ils vont refuser et finalement il va le donner à Monseigneur de Quelen, archevêque de Paris. Pendant la révolution de 1830 l’archevêché va être pillé et le cœur va être récupéré par le fils du Docteur Pelletan qui va se rendre personnellement à l’archevêché pour sauver la royale relique.
Un témoignage navrant du citoyen Gagnié «ancien chef du Temple» est cité dans l’instruction commandée par Louis XVIII au sujet de la détention et de la mort de son neveu. Il assure avoir vu plusieurs fois le Dauphin avec sa mère et c’est le même enfant qu’il découvrit au Temple pendant l’hiver 1795-96 :
« En montant l’escalier qui conduisait au corridor attenant à la chambre de Louis XVII, je sentis une odeur extrêmement infecte qui sortait de la susdite chambre dans laquelle on entrait pas et voyant que depuis trois jours l’enfant renvoyer ses aliments tel qu’on lui portait, je demandai d’obtenir promptement une autorisation du Comité de sûreté générale et de faire ouvrir la porte de sa prison, ce qui fut exécuté, et je proteste qu’en entrant, je vis le jeune prince courbé et accroupi ayant ses bras retresés (sic), une tumeur au genou et au bras dans l’impossibilité de se redresser et ayant le cou rongé de gale, que l’ayant interrogé sur ce qu’il n’avait pas pris de nourriture depuis trois jours, il me répondit: «Que veux tu mon ami, je veux mourir.» Je certifie de plus que cet enfant était véritablement le fils de Louis XVI que j’avais vu aux Tuileries, le même que j’avais vu amené au Temple avec le roi et prendre ses récréations dans le jardin en présence de toute sa famille, enfin le même que je vis après la mort de Louis XVI lorsqu’il fut visité en présence d’un municipal qui était médecin, en ma présence et celle de M. Caillieux, administrateur. La reine craignant que ce ne fut une hernie mais elle sut que ce n’était qu’une glande engorgée que je fus même chargé d’acheter un bandage, le même à qui je donnai des serins et des pigeons lorsqu’il était avec le même Simon, le même que je vis au billard avec La Bazanerie chef de Bataillon (….) Fait à Paris le 27 juillet 1817 et signé Gagnié, ancien chef du Temple.»
En 1819-1820
Naundorff aurait contacté le duc de Berry, fils du futur Charles X. Il se rend en France dans les années 1830, vivant de l’hospitalité de ses partisans. Certaines personnes ayant connu Louis XVII reconnaissent en lui le fils de Marie-Antoinette. Mais que peuvent valoir ces témoignages quarante ans après les faits ? Naundorff donne des renseignements sur la vie du Dauphin. A-t-il soutiré ces informations des gens qui le reconnaissaient ?
Naundorff est expulsé de France. Il vivra à Londres, fondera une religion, partira pour les Pays-Bas où il mettra une bombe connue sous le nom de «bombe Bourbon». Le Roi l’autorise à porter le nom de Bourbon. Naundorff meurt à Delf. Ses partisans se battront pendant des décennies pour sa reconnaissance. Sa famille existe toujours. Une branche vit en France, l’autre au Canada. Elle a été déboutée lors d’un procès en 1954.
Le 13 février 1820
Assassinat du duc de Berry (1778-1820), fils du comte d’Artois (1757-1836).
Le 14 février 1820
La mort du duc de Berry
On a prétendu que Louis Louvel (1783-1820), l’assassin, pouvait être Louis XVII car Louis XVIII l’aurait autorisé à se rendre à l’échafaud coiffé d’un chapeau… Louvel était sobre et travailleur. Il était cultivé, ne se liait à personne. Il a toujours dit avoir agi seul.
Louvel-Louis XVII. des confidences ? De qui ? Ils sont tous morts !
1: le vrai Louvel était en pension de juin 1791 à octobre 1795, donc possibilité d’introduire dans la famille Louvel un inconnu et de le faire passer pour le fils de la famille de retour à Versailles (1794);
2: Robespierre est passé devant chez les Louvel à Versailles tous les jours d’avril à novembre 1789 (première possibilité d’un lien). Robespierre est à Versailles le 20 juin 1791 quand le père Louvel envoie à Paris le futur régicide, en pension. Aurait-il profité du carrosse de Robespierre ? Il a été dit que Robespierre aurait postulé ou aurait été pressenti pour devenir gouverneur du Dauphin. Du moins son nom a circulé pour occuper la charge.
3: Le conventionnel Lecointre accompagne Robespierre le 17 juillet 1791 ( jour de la fusillade du champ de Mars) dans la quête d’un abri sûr. Les Lecointre et les Louvel sont liés (le père Lecointre était parrain chez les Louvel). Et nous retrouvons le soir de la chute de Robespierre Lecointre festoyant avec Barras et les autres membres de la conjuration qui fit chuter le « tyran ».
Un lien Robespierre – Lecointre – famille Louvel ; un second, Barras – Lecointre – famille Louvel !
4: En 1804, Louvel déclare avoir 19 ans (âge de Louis XVII), alors qu’il en a presque 21 ! (ce n’est pas un témoignage, c’est marqué sur son livret ouvrier !)
5: En 1806, Louvel est réformé de la Garde Impériale par Larrey et Sue, amis de Desault, médecin au Temple en mai-juin 1795. Louvel est affecté à l’Artillerie de la Garde Impériale, à Paris, en 1805. Il fut réformé pour varicocèle.
6 : En 1814, Louvel, qui n’aime pas l’armée, rejoint Napoléon à l’île d’Elbe. il y restera deux mois comme sellier. A-t-il voulu parler à l’empereur ?
7 : L’abbé Arnoux, chargé par la famille royale de tirer les vers du nez du régicide, meurt à 28 ans le jour de l’ouverture du procès Louvel ! (d’une maladie poitrinaire, officiellement).
8 : Louvel écrit : je n’ai pas déshonoré ma Nation, je n’ai pas déshonoré ma fille. N’ayant pas d’enfant, la fille de Louvel est-elle la Nation ? (texte lu aux pairs de France).
9 : Louvel ressemble étrangement à Joseph II d’Autriche, oncle de Louis XVII (test réalisé sur quinze personnes – onze ont mis Joseph II en premier, et François II en second, cousin de Louis XVII – sur vingt portraits de même taille).
Les oreilles de Louis XVII et de Louvel présentent de fortes ressemblances.
10 : Louis XVIII ordonne une messe à la mémoire de Louis XVII pour le 8 juin 1821, soit un an et un jour après la mort du régicide. (cérémonie annulée). C’est la première fois que Louis XVIII ordonne cela.
11 : En 1816, Louis XVIII fait effectuer des recherches sur les restes de Louis XVII au cimetière Sainte-Marguerite. Le jardinier en chef des jardins du Luxembourg, Toussaint Charpentier, déclare au préfet Anglés qu’au moment de l’enterrement de l’enfant du Temple, on lui fit creuser de nuit une fosse au cimetière de Clamart pour recevoir un petit cercueil. Une personne de la Municipalité aurait déclaré que le petit Capet aurait bien du chemin à faire pour retrouver sa famille.
Ce Charpentier est également employé à Trianon. Son fils en tant que jardinier en chef à partir de 1824. Ces gens connaissent la marraine de Louvel, Madame Belleville. Curieux !
12 : Les restes de Louvel sont transférés dans une fosse commune, mais bien vite, on les exhume et les transporte dans un lieu toujours inconnu. Volonté de Louis XVIII de ne pas créer un lieu de pèlerinage républicain, ou d’inhumer Louvel dans une tombe royale ? (il existe des emplacements vides à la basilique de Saint-Denis).
13 : Le comte de Vaisons (Le Roi perdu, de l’académicien Octave Aubry), qui n’a jamais existé, (mais le général-marquis de Bonneval correspond à son profil) arrête son enquête diligentée par Louis XVIII à la mort de Louvel en juin 1820.
14 : Louis XVII se blessa aux parties génitales en jouant au cavalier avec un bâton, ceci lorsqu’il était encore avec sa mère, sa tante et sa sœur. On lui mit un suspensoir. Louvel avait également un suspensoir. Il avait été réformé de l’Artillerie de la Garde Impériale en 1806 pour varicocèle :
« La varicocèle testiculaire est une pathologie bénigne qui se caractérise par une dilatation des veines au niveau du cordon spermatique. Elle peut causer des problèmes de fertilité chez l’homme.«
Il se pourrait qu’il y ait eu une erreur de diagnostic, de conséquences de l’accident.
Voici l’explication de l’affaire selon Jean-Claude Pilayrou :
Robespierre a enlevé le Dauphin et l’a confié au père Louvel. On sait ce qui adviendra par la suite de Robespierre.
Barras a enlevé le remplaçant de Louis XVII. Caché à St Domingue, il meurt en 1803 ( ?).
Louis XVIII fit faire une enquête par Bonneval. Entre temps, Louvel tue le duc de Berry.
Louis XVIII, qui est perturbé par les apparitions continuelles de faux dauphins (Hervagault, Bruneau, Dufresnes…), se demande si Louvel n’est pas Louis XVII, qui vient de se venger de son état de roi déchu en tuant Berry. Il fera faire une enquête approfondie. Louvel n’ayant pipé mot, il le laissera aller à la guillotine.
Aujourd’hui comme hier, les héritiers du secret gardent le silence. Et l’analyse ADN de 2000 fut un pieux mensonge, destiné à protéger la mémoire du roi assassin: Louis XVII.
Pour Jean-Claude Pilayrou, Louvel serait Louis XVII
Le 17 août 1833
Âgée de soixante-dix ans, Madame Agathe Mottet Rambaud, fait la déposition suivante :
« Dans le cas où je viendrais à mourir avant la reconnaissance du Prince, fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, je crois devoir affirmer ici par serment, devant Dieu et devant les hommes, que j’ai retrouvé, le 17 août 1833, Monseigneur duc de Normandie, auquel j’eus l’honneur d’être attachée depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792, et comme il était de mon devoir d’en donner connaissance à S. A. R. Madame la duchesse d’Angoulême, je lui écrivis dans le courant de la même année. Je joins ici la copie de ma lettre. Les remarques que j’avais faites dans son enfance sur sa personne ne pouvaient me laisser aucun doute sur son identité partout où je l’eusse retrouvé. Le Prince avait, dans son enfance, le col court et ridé d’une manière extraordinaire. J’avais toujours dit que si jamais je le retrouvais, ce serait un indice irrécusable pour moi. D’après son embonpoint, son col ayant pris une forte dimension est resté tel qu’il était, aussi flexible. Sa tête était forte, son front large et découvert, ses yeux bleus, ses sourcils arqués, ses cheveux d’un blond cendré, bouclant naturellement. Il avait la même bouche que la Reine et portait une petite fossette au menton. Sa poitrine était élevée; j’y ai reconnu plusieurs signes alors très-peu saillants, et un particulièrement au sein droit. La taille d’alors était très cambrée et sa démarche remarquable. C’est enfin identiquement le même personnage que j’ai revu, à l’âge près. Le prince fut inoculé au château de Saint-Cloud, à l’âge de deux ans et quatre mois, en présence de la Reine, par le docteur Joubertou, inoculateur des Enfants de France; et de la Faculté, les docteurs Brunier et Loustonneau. L’inoculation eut lieu pendant son sommeil, entre dix et onze heures du soir, pour prévenir une irritation qui aurait pu donner à l’enfant des convulsions, ce qu’on craignait tous que ce sont les mêmes marques que j’ai retrouvées, auxquelles on donna là forme d’un triangle. Enfin j’avais conservé, comme une chose d’un grand prix pour moi, un habit bleu que le Prince n’avait porté qu’une fois. Je le lui présentai en lui disant, pour voir s’il se tromperait, qu’il l’avait porté à Paris. «Non, Madame; je ne l’ai porté qu’à Versailles, à telle époque. » Nous avons fait ensemble des échanges de souvenirs qui, seuls, auraient été pour moi une preuve irrécusable que le Prince actuel est véritablement ce qu’il dit être : l’orphelin du Temple. »
Agathe Mottet – Veuve de Rambaud, attachée au service du Dauphin, duc de Normandie, depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792.
En 1837
« Je déclare ici et sur mon honneur et devant Dieu que le fils de Louis XVI est mort dans mes bras dans la tour du Temple. … Toute ma vie j’ai dit la vérité, ce n’est pas quand j’atteindrai [la fin] que je la trahirai.»
Etienne de Lasne, dans une lettre à A. Beauchesne
Au début de 1841
Sous la signature de Gozzoli, rédacteur-gérant de La Voix d’un proscrit, Laprade (qui avait été affublé du titre de « président du conseil de l’Eglise catholique évangélique« ) et cinq autres compères, publièrent un désaveu cinglant de leur adhésion à la cause naundorffiste. (Nous savons par l’abbé Laprade que Morel de Saint-Didier lui-même, sans signer le document, en partageait l’esprit.) Ils y rapportent comment, ayant enquêté sur le passé du bonhomme, ils ont été contraint de conclure à la supercherie. Ils mettent en cause la réalité des apparitions, la moralité personnelle de leur ancien «roi», soulignent les contradictions de la doctrine – bref, ils sapent l’édifice qui les a portés pendant tant d’années.
Le 22 juin 1841
L’abbé Laprade écrivait une lettre sévère, à la mesure de sa tristesse et de ses remords :
« Pauvre sire de Normandie qu’as-tu fait de ta baguette, que sont devenus tes talismans imaginaires?(…) quand je songe à mes dispositions d’autrefois et à mes sentiments d’aujourd’hui, je suis si honteux et humilié de mon passé que je voudrais être trois fois taupe pour ne plus le voir et trois mille fois lièvre pour ne plus le rappeler. Quoi! des hommes généreux et intelligents avaient pu planter un drapeau près de l’hôtel de Camberwell? Ils avaient pu faire à cet homme l’honneur de le regarder comme pouvant être de quelque poids dans la balance des destinées humaines…ma foi, ma foi; convenons-en, nous étions en démence. Aussi, dès que j’ai eu aperçu le bout des oreilles de notre Guillot je l’ai fui à toutes jambes et je cours encore..»
Le 10 août 1845
« Nous soussignés, docteurs-médecins en fonctions à Delft, Jean Soutendam et Jean-Gérard Kloppert, autrefois Officier de Santé, et comme tel adjoint comme médecin consultant par feu Son Excellence le ministre List, déclarons avoir traité en 1845 celui qui se nommait Charles-Louis de Bourbon duc de Normandie.
« Beaucoup d’intérêt fut témoigné à l’auguste malade. Des bulletins furent envoyés journellement sur l’état de sa santé au ministre susdit, qui de temps en temps vint en personne prendre des informations. […] Les pensées du malade s’arrêtaient principalement sur feu son malheureux père, Louis XVI, sur le spectacle effroyable de la guillotine ; ou il joignait les mains pour prier et demander, avec des paroles entrecoupées, de bientôt rejoindre au ciel son royal père. Presque jusqu’au dernier soupir ce fut ainsi. Et Charles-Louis de Bourbon mourut en notre présence le 10 août 1845. »
On a retrouvé sur le corps du dénommé Naundorff les sept spécificités corporelles qu’auraient eues Louis XVII et qui étaient connues et témoignées selon certains, et également archivées dans les rapports médicaux (Archives de Versailles), sans que les naundorffistes ne montrent cette pièce en question.
Cette pièce importante se trouve à Deft : Archives Notariales de Deft et copie conforme au Archives Bourgmestrales – volume 46, folio 35, verso 3 à 7.
Voici le procès verbal :
« Aujourd’hui 12 août 1845, le soir à 6 heures et à la requête de Charles Edmond de Bourbon, aussi connu sous le nom de Naundorff, demeurant à Deft en la rue dite de Voostrat, section 5, n° 85, accompagné de M. Cornélis Théodorus Van Meurs, major d l’Artillerie, chevalier du Lion néerlandais, du Maître Jacobus Van Buren, avocat et juge demeurant à…et connu de moi, notaire.. »
« Moi, notaire, Simon Adrianus Sholten, notaire de l’arrondissement de la Haye, résidant à Deft, assisté de Messieurs Carel Heyne den Back, employé au secrétariat de la Vielle et de Adriaan Mardus Schagen Van Leewen, employé à mon étude, connus de moi, notaire, je me suis rendu à une maison située à l’Oude-Deft, section2, n°62 à Deft où le requérant m’a montré dans une des chambres un cadavre qu’il déclara à moi, notaire, être celui de Charles Louis, Duc de Normandie ( Louis dix-sept), ayant été connu sous le nom de Charles Guillaume Naundoff, né au Château de Versailles en France, le 27 mars 1785 … »« Le requérant, Charles Edmond de Bourbon, fait cette déclaration en présence des ci-dessus nommés Van Meurs et Van Buren qui déclarent par ceci reconnaître le cadavre montré pour celui du père du requérant. »« Ainsi furent présents : M. Jean Sontendam, docteur-médecin, demeurant à Deft, Louis Snabilié, docteur-médecin, premier officier de Santé de la 2ème classe, chevalier de l’Ordre Militaire de Guillaume, Joannes Gerdus Kloppert, docteur médecin et accoucheur, officier de santé de 2ème classe, demeurant à Deft, connus de moi, notaire lesquels Messieurs déclarèrent reconnaître le cadavre montré pour celui de la personne qu’ils on traitée médicalement en sa dernière maladie. »
« Et le requérant a prié les médecins susnommés d’expliquer leurs expériences des signes extérieurs qui caractérisaient le cadavre et après avoir examiné à cette fin le cadavre prescrit, les nommés médecins ont noté les signes suivants :.. »
Sont énumérées les sept spécificités corporelles qu’avaient Louis XVII :
1. Le naevius maternus à la cuise ;
2. L’excroissance du sein droit ;
3. Le cou très ridé ;
4. Disposition des deux incisives sortantes « en lièvre » au milieu de la denture inférieure ;
5. Forme du front large et fort, fuyant et s’évasant ;
6. Disposition des yeux bleus avec leurs arcades sourcilières arquées avec un écartement si précis « qu’il comportait entre eux une distance égale à la longueur d’un œil » ;
7. Anomalie de la forme du lobe des oreilles, notamment de l’oreille droite (nettement visible sur la photo représentant Naundorff su son lit de mort et identique à celle d’un portrait de Louis XVII enfant).
Ce constat se termine ainsi :
« Le requérant m’a prié, moi, notaire, de donner acte en minute de tout ce qui précède et qui est ci-dessus mentionné et, après lecture faite au requérant, aux témoins assistants, aux médecins sus-nommés et aux témoins ici-présents : Carel Heyne Van Back et Adriaan Marius Schagen Van Leeuwen, tous deux ci-dessus nommés, toutes ces personnes ont signé. »
Signé :Charles Edmond de Bourbon, Van Meurs, Van Buren, Jean Soutendam, Dr Snabilié, Dr Kloppert, C. Heyne den Back, A.M. Scagen Van Leewen, S.A ?. Scholten, notaire. »
Le receveur : signé : V.D. Mandèle « Pour signé conforme : signé SA Scholten, notaire »
Le cas Richemond
Claude Perrin naquit à Lagnieu (Ain) le 7 septembre 1786. Il est bossu, ayant une épaule plus haute que l’autre. C’est d’ailleurs lui-même qui le précise lorsqu’il doit se défendre devant la Justice de ses supercheries. Il est cependant soldat et ceci lui donne le goût de la tenue militaire qu’il arbore fièrement. Il parle de lui à la troisième personne, ce qui démontre un dédoublement de la personnalité ou une haute opinion de soi, les deux possibilités ne s’excluant l’une l’autre.
On ne sait d’où lui vient l’idée du nom qu’il adopte (« Richemond »), du titre qu’il s’accorde (« baron ») ni, enfin, de l’idée de jouer le rôle d’un faux Dauphin. Il est vrai que la rumeur de l’évasion de Louis XVII battait son plein dans les campagnes de France et Claude Perrin, presque du même âge que Louis XVII, à un an près, doté de cheveux châtain clair, entrevoit peut-être un autre rôle à tenir sur la scène de la vie que celui auquel le destin le prédispose. En 1831, il écrit et publie lui-même un livre : « Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI », puis en 1846 il publie «Mémoires d’un contemporain », livre qui contredit le premier.
Dans le premier récit (« Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI »), le faux Dauphin Richemond n’indique ni date, ni nom, ni désignation précise d’aucun lieu susceptible de décrire les situations vécues par le vrai Roi ; il ne sait même pas quand, à quelle date et comment eut lieu l’évasion du Temple ; ses propos sont contradictoires mais, apparemment, cela et ne le gênait pas pour persévérer dans ses mensonges. Ainsi désavoua-t-il son premier livre : par exemple, il supprime l’épisode dans lequel il vécut chez « les Sauvages ». ; il avait dit qu’il avait passé « plus de six ans, tout seul, nu comme eux, le corps peint, etc. Ces Sauvages s’appelaient les Mamelucks. ». Il prétend, de plus, avoir eu la petite vérole dans la Tour du Temple ; or Louis XVII avait été inoculé et n’eut jamais cette maladie.
« Richemond » fut reconnu par des personnes qualifiées : madame Bequet, qui avait été au service de Marie-Antoinette jusqu’au 10 août 1792; madame Fillette, qui avait été fille de garde-robe du Dauphin ; madame de Rambaud, berceuse du Dauphin… Ce sont là, à l’évidence, les déclarations de Perrin qui, en réalité, ne reçut jamais un témoignage de reconnaissance réelle, écrit, daté et signé sous serment et déposé devant une Instance officielle quelconque (Tribunal, Police, Notaire..).
Il raconte dans « Mémoires d’un contemporain » que trois ans auparavant, en 1843, il rencontra madame de Rambaud, que celle-ci le reconnut bien évidemment en tant que Louis XVII mais comme elle avait auparavant reconnu aussi en Naundorff le Roi, qu’elle aurait décidé de « s’en remettre au Ciel pour faire un choix » (ibidem – page 370). Il est patent que ces propos sortirent du cerveau déséquilibré de Perrin et non de la bouche de Madame de Rambaud. Il précise qu’il « n’a pas revu cette dame depuis ce jour », ce qui est étrange car cette reconnaissance était très importante pour Madame de Rambaud ; aurait-elle évité de revoir celui qu’elle avait chéri ?
La petite fille de de madame de Rambaud, dans une lettre datée du 26 janvier 1884 et adressée l’Abbé Laurent (curé de la paroisse de Sainte Marguerite sur Duclair), écrivit :
« Je m’empresse de satisfaire votre demande. Madame de Rambaud, ma grand-mère, a, en effet, reconnu Louis XVII dans la personne du prétendant Naundorff et n’en a reconnu d’autres. Richemont, il est vrai, s’est fait présenter à elle ; mais à ma connaissance il n’en est rien résulté pour ce personnage de cette entrevue….son frère (le frère – Charles- de son beau-père, Casimir Verger) a connu M. de Joly, que j’ai vu moi-même chez ma grand-mère et qui, comme elle, a attesté ses convictions…Signé L. Verger, née de Rambaud »
Madame de Rambaud vivra encore dix années après la supposée rencontre avec « Richemond » ; elle meurt le 18 octobre 1843 en n’ayant jamais renié la reconnaissance en Naundorff le Roi qu’elle avait élevé pendant sept années. La petite-fille de Madame de Rambaud, Ernestine de Rambaud, dans une lettre qu’elle écrivit en juin 1849 affirma la fidélité de sa grand-mère à cette reconnaissance capitale : « Encore aujourd’hui elle (Madame de Rambaud) ne doute pas de son identité (Louis XVII=Naundorff)».
Comme Hergavault, Richemond sait séduire et comme de très nombreuses personnes espéraient retrouver Louis XVII, elles acceptèrent de le rencontrer mais jamais elles ne le reconnurent vraiment ; une seule rencontre et aucune reconnaissance. Lors du procès de Perrin, la Cour ne retint que les dépositions écrites de Mesdames Bequet et Fillette (respectivement le 20 décembre 1842 et le 15 juillet 1844) dans lesquelles elles déclarent seulement avoir rencontré « Richemond » une seule fois, sans préciser une reconnaissance quelconque.
Claude Perrin meurt à Gleize (Rhône) le 10 août 1853, huit ans jour pour jour après Naundorff…
Perrin/Richemond, Hergavault, Bruneau, Williams, Mévès… tous ces « faux Dauphins » avaient des yeux marrons et seul, un « faux Dauphin » avait les yeux bleus : « Naundorff ». Louis XVII avait les yeux bleus…
En 1943
André Castelot soumet au Docteur Locard, directeur du laboratoire de Police Technique de Lyon, une boucle des cheveux du «Dauphin», propriété de l’abbé Ruiz, jointe à une mèche de Naundorff, qui lui avait été remise par le baron de Genièbre. Le but était de chercher si les cheveux correspondent ou non. Selon les naundorffistes, la confrontation, pratiquée d’après des microphotographies, donnerait des résultats époustouflants : les deux échantillons comporterait la même excentration du canal médullaire, un caractère jugé très rare par l’expert lyonnais. L’identité d’origine des deux mèches de cheveux semble irrécusable : pour les partisans de Naundorff, comment croire que cette excentration, si exceptionnelle, est due à la seule intervention du hasard?
En 1947
Alain Decaux (1925-2016) publie son premier livre, Louis XVII retrouvé, et soutient la thèse survivantiste _ ou naundorffiste_ qui perd par la suite tout crédit chez les historiens. Le futur ministre se ravisera d’ailleurs de cette conclusion de jeunesse.
En septembre 1950
Le cercueil de Naundorff est ouvert à Delft, sous la conduite du Docteur Hulst, médecin expert près les tribunaux hollandais. Castelot, pour s’assurer des conclusions de la première analyse, prie ce dernier d’envoyer à Locard une mèche provenant directement du squelette. Il fait bien. On procède à une seconde expertise.
Le 4 mai 1951
La sentence de la trichoscopie tombe, terrible pour le camp survivantiste. Locard écrit dans son rapport :
« Ces cheveux, d’origine indiscutée, ne présentent pas l’excentrement caractéristique. Ainsi donc les cheveux de Naundorff (…) ne sont pas identiques à ceux de Louis XVII». Le Dr Locard, qui avait entre-temps reçu, par le biais du marquis de Tinguy, d’autres cheveux provenant de Louis XVII qu’il a également analysés, ajoute qu’il semblait établi «que le Dauphin présentait une anomalie capillaire caractéristique» non retrouvée chez Naundorff. Les cheveux n’appartenaient pas à la même personne. La «preuve scientifique», qui, c’est le cas de le dire, n’avait tenu qu’à un cheveu, tombait à l’eau.»
Le spécialiste lyonnais confiera plus tard à Castelot que les deux premières mèches étaient si semblables, qu’il était fort possible que toutes deux aient été prises sur le crâne de Louis XVII.
En 1975
La relique du cœur Pelletan, récupérée par de la famille lointaine de Louis XVII, finit par être donnée à la basilique de Saint-Denis par la princesse Massimo.
En 1996
Après cinq ans d’enquêtes, Paul-Éric Blanrue a conclu à l’imposture du dénommé Naundorff (Le mystère du Temple, la vraie mort de Louis XVII, Claire Vigne éditrice, 1996, p. 229-287) et à la réalité de la mort du petit Roi à la date mentionnée par l’état civil. Il a repris cette thèse dans la préface des Souvenirs de la duchesse d’Angoulême (Communication et Tradition, 1997) dont il a établi l’édition critique, ainsi que dans une dizaine d’articles. Ni Alain Decaux, ni André Castelot, ni personne, n’y a répondu.
En 1998
Des analyses sont menées par l’Université de Louvain et le CHU de Nantes à partir de cheveux et de fragments d’humérus de Naundorff et de cheveux des descendants des sœurs de Marie-Antoinette. Conclusion : les restes de Naundorff ne sont pas ceux du dauphin Louis XVII.
En 1999-2000
L’historien – journaliste Philippe Delorme contacte la noblesse française afin que le cœur du petit décédé le 8 juin 1795 soit analysé avec la méthode ADN. Le résultat est que le cœur examiné était celui d’un parent de Marie-Antoinette, donc en principe de Louis XVII.
Monsieur Delorme a officiellement mis un terme à cette énigme; mais certains avancent que le cœur est celui du frère de Louis XVII, décédé en 1789. Le cœur embaumé de cet enfant a disparu sous la Restauration. Une bataille acharnée se déroule depuis entre Mr Delorme et les partisans de l’autre thèse. Mais une médecin-légiste a affirmé au cours d’une émission diffusée en janvier 2007 qu’elle serait bien en peine de faire la différence entre un cœur embaumé (frère de Louis XVII) et un cœur non embaumé (cœur du décédé le 8 juin 1795).
Monsieur Delorme devait rechercher le cœur du frère ainé de Louis XVII. Il n’y a pas eu de suite : la tombe de Louis-Joseph a, en effet, été ouverte et vidée le 16 octobre 1793 !
En 2004
De nouveaux prélèvements sont effectués sur le squelette de Naundorff. On procède à des analyses en Hollande et en Autriche, mais la famille dite de Bourbon n’a pas fait connaître les résultats.
Ce semble éloquent …
Le 8 juin 2004
Pour le professeur Jean Tulard, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, appelé par le ministre de la Culture à donner son avis sur le dépôt du cœur de Louis « XVII », l’analyse de l’ADN du cœur, conjuguée avec l’enquête menée sur son origine et les péripéties de son histoire, est suffisante pour attester de la mort du prince au Temple.
Sources :
Interrogatoire de Louis-Charles en vue d’obtenir des pièces à charge contre sa mère. Sa sœur, qui ne le voit plus, est confrontée à lui et dit :
« Il a grossi sans prendre de croissance».
« Le quinzième jour du premier mois de l’an second de la République française une et indivisible, Nous, maire, procureur syndic et membres de la commune de Paris nommés par le conseil général de ladite commune pour prendre des renseignements sur différents faits qui se sont passés au Temple, et recevoir les déclarations à cet égard, nous sommes rendus au Temple et arrivés dans ladite Tour, et nous étant présentés au Conseil du Temple, sommes montés à l’appartement du premier occupé par Louis Charles Capet pour entendre ses déclarations au sujet des propos et des événements dont il peut avoir connaissance. Il nous a déclaré que l’hiver dernier pendant qu’il habitait l’appartement de ses mère, tante et sœur, un particulier, nommé Dangé, était de garde auprès d’eux en qualité de commissaire du conseil ; un jour qu’il l’accompagnait à la promenade sur la plate-forme de la Tour, il le prit dans ses bras, l’embrassa et lui dit : « Je voudrais bien vous voir à la place de votre père. »
Nous a déclaré pareillement qu’un autre particulier nommé Toulan, étant aussi de garde à la Tour à la même époque, lesdites femmes l’enfermèrent, lui déclarant, avec sa sœur dans une des tourelles pendant une heure et demie, un peu avant qu’on allumât la chandelle, et que pendant ce temps il s’est entretenu avec lesdites femmes, et qu’il n’entendit pas le sujet de leur conversation.
Que dans une autre circonstance il entendit dire par ledit Toulan à sa mère et à sa tante que tous les soirs il enverrait aux environs du Temple un
colporteur à dix heures et demie du soir pour lui faire crier toutes les nouvelles qui pourraient les intéresser; que par suite de cette promesse il s’aperçut que lesdites femmes un soir, ne se couchèrent qu’à onze heures passées et montrèrent de l’humeur de n’avoir point entendu les cris accoutumés dudit colporteur.
Il a déclaré encore que quatre particuliers nommés Lepitre, Bruneau, Toulan et Vincent, pendant la durée de leur service dans les appartements
avaient coutume d’approcher desdites femmes et de tenir des conversations avec elles à voix basse.
Déclare en outre qu’ayant été surpris plusieurs fois dans son lit par Simon et sa femme, chargés de veiller sur lui par la Commune, à commettre sur
lui des indécences nuisibles à sa santé, il leur avoua qu’il avait été instruit dans ces habitudes pernicieuses par sa mère et sa tante, et que différentes fois elles s’étaient amusées à lui voir répéter ces pratiques devant elles, et que bien souvent cela avait lieu lorsqu’elles le faisaient coucher entre elles.
Que de la manière que l’enfant s’en explique, il nous a fait entendre qu’une fois sa mère le fit approcher d’elle, qu’il en résultat une copulation et que il en résulta un gonflement à un de ses testicules, connu de la citoyenne Simon, pour lequel il porte encore un bandage et que sa mère lui a recommandé de n’en jamais en parler, que cet acte a été répété plusieurs fois depuis.
Il a ajouté que cinq autres particuliers nommés Moelle, Lebœuf, Beugnot, Michonis et Jobert, conversaient avec plus de familiarité que les autres commissaires du Conseil avec sa mère et sa tante ; que Pétion, Manuel, Bailly et Lafayette s’étant comportés très mystérieusement aux Tuileries avec les femmes, il estimait qu’il existait une correspondance directe avec les quatre hommes et les commissaires du Temple depuis la détention de ces femmes au Temple, que dans l’intervalle de ces conférences on l’éloignait.
Il nous a déclaré qu’il n’avait rien de plus à nous faire connaître.
Le citoyen et la citoyenne Simon nous déclare avoir appris ces faits de la bouche de l’enfant qui les leur a répété plusieurs fois et qu’il les pressait
souvent de le mettre à portée de nous en faire la déclaration.
Après avoir reçu la présente déclaration, y avons posé notre signature conjointement avec le citoyen Hébert, substitut du procureur-syndic de la Commune qui est survenu.
A Paris, dans la Tour du Temple les jour et an que dessus.»
LOUIS-CHARLES CAPET.
PACHE, maire; CHAUMETTE, procureur-syndic ; HÉBERT, substitut;
FRIRY, commissaire du conseil général; SEGUY, commissaire de service au Temple ; HEUSSÉE, administrateur de police ; SIMON ; D. E. LAURENT, commissaire du conseil général.
CAMPARDON, Emile, Marie-Antoinette à la Conciergerie (du 1er août au 16 octobre 1793) : pièces originales conservées aux Archives de l’Empire, suivies de notes historiques et du procès imprimé de la reine, Paris, 1863, p.66-71.
Le 14 octobre 1793
Hébert lance l’accusation d’inceste qui vaut à la Reine une réplique mémorable :
« J’en appelle à toutes les mères.»
Et l’ombre pâle dit à Dieu dans le ciel :
« Je suis orphelin et pas roi du tout ;
Hier, j’étais un prisonnier fatigué,
Les meurtriers de mon père ont nourri mon âme de fiel.
Pas moi, Seigneur, le nom royal convient.
La nuit dernière, je me suis endormi dans le dungeon dear
Mais ensuite j’ai vu ma mère dans mes rêves,
Dis, dois-je la trouver ici ?
extrait de Le Roi Louis XVII, une ode de Victor Hugo
Le 16 octobre 1793
Marie-Antoinette est exécutée.
Simon ne doute pas, quant à lui, que le roi ne soit infecté du mal vénérien, quoique, depuis la mort de la reine, on ne lui ait plus présenté de prostituées. Mais il croit que ce que l’on fit à cette époque pour le faire déposer contre sa mère, et prouver par l’état de santé la vérité des dépositions, a suffi pour le corrompre et le gangrener. Il prétend donc très décidément qu’il a du mal et qu’on ne fait rien pour l’en guérir.
Ces derniers propos laissent supposer qu’il y a eu, de la part des géôliers de l’enfant, la volonté de «s’en défaire», mot expressif que l’on retrouve souvent dans la bouche des représentants de l’autorité, à la Commune, dans les comités et même à la Convention, dont la signification est non pas «tuer», mais «faire mourir ou tuer en secret». Le mot «s’en défaire» apparaît encore dans une autre dépêche concernant le Dauphin (FM, II, p.358) ou dans celle dans laquelle, prémices de la loi des suspects, il est question des «gens à argent» que l’on veut «expolier» (spolier) pour financer des «intelligences à l’étranger», et que l’on enfermera dans un local du château de Chantilly ou de l’Isle Adam où il sera plus facile de «s’en défaire» (FM, II, 48).
Les époux Simon sont surveillés par la Commune de Paris et son procureur, Louis-Gaspard Chaumette (1763-1794) quant à leur comportement envers le petit Roi. Il ne faut pas se montrer trop tendre au risque de perdre la vie. C’est dans ce jeu, entre ombres et lumière, qu’ils doivent organiser leur comportement quotidien envers l’enfant : dureté affichée lorsque les municipaux sont présents, et bonté, surtout celle de Marie-Jeanne Simon, lorsqu’ils sont absents. La « femme Simon » aime, en réalité « son petit Charles » ; elle n’a pas eu d’enfant et elle reporte sur lui toute sa tendresse maternelle frustrée.
Il est certain que Louis XVII adopte les manières des sans-culottes que Simon lui inculque (chants révolutionnaires, port du bonnet phrygien, vocabulaire grossier). On sait avec quelle peine horrifiée sa tante et sa sœur, du deuxième étage de la Tour où elles sont enfermées, entendent les chants de l’enfant, pendant qu’il joue dans la cour.
Le 13 novembre 1793
Une dépêche adressée au gouvernement britannique à la date donne les renseignements suivants:
« Après avoir appris au roi toutes les impuretés imaginables, Hébert lui apprend maintenant toutes sortes de blasphèmes. Sa santé cependant s’affaiblit chaque jour, et il a presque un dévoiement (intestinal) continuel. Hébert commence à devenir en horreur à la populace; il a été personnellement insulté à la Halle. Il n’est pas douteux que le Comité de sûreté générale n’ait pratiqué cette manœuvre.»
Le 19 novembre 1793
Un bulletin de la santé de Louis-Charles, portant le cachet de la Commune de Paris, et signé par le cordonnier-tuteur Antoine Simon. Ce bulletin est ainsi conçu :
« Louis a passé la nuit assez tranquillement, ayant moins toussé que la précédente, de l’avis du citoyen Monier, médecin. Il a pris ce matin du petit lait et le continuera pendant quelques jours. Ensuite il prendra quelques légers purgatifs, ce qui n’annonce qu’une légère indisposition.»
Le 15 décembre 1793
A ces témoignage font écho les dépêches conservées à Dropmore par le baron de Fortecue (Fortescue Ms.) cités par G Bord (royaliste) qui les interprète différemment de Mathiez (communiste) : « Le roi est très malade.»
Le 28 décembre 1793
« Le roi est malade toujours d’une espèce dévoiement»
(FM, II, 488)
Depuis que sa maladie a empiré fin décembre l’enfant a logiquement reçu des soins (à base d’opium ou autre substance dangereuse ?) des médecins de l’Hôtel Dieu qui savent donc à quoi s’en tenir sur son état. Tout au moins le docteur le Monnier mais aussi peut-être le médecin Naudin qui, alors, soigne madame Simon (visite le 7 nivôse an II), et a certainement dû examiner l’enfant qui, malade lui aussi, vit chez elle.
Le 10 janvier 1794
«Il est très amaigri. »
Le 19 janvier 1794
Simon, rappelé à ses fonctions municipales, quitte le Temple : Simon a dû choisir entre sa place au Temple et son mandat de municipal à la Commune de Paris car on lui refuse le cumul … ; il choisit la Commune. Sa femme le suit peu après. En réalité, on le soupçonne de « royalisme » – bien camouflé sous des jurons révolutionnaires – ce qui était vrai. Il périra avec Robespierre le 8 thermidor an II. On ne prévoit pas de remplaçant pour Louis XVII. Sa femme, malade, quitte donc également la prison.
Si l’enfant royal est mort ou enlevé à l’époque du départ des Simon, le secret en aurait donc été soigneusement maintenu, au cours de l’hiver 1793-94, par la Commune de Paris encore dirigée par Pache et Chaumette et jusqu’en ventôse An II lorsque le maire Pache, envoyé en prison avec sa famille, est remplacé par Payan puis Lescot de Fleuriot, et que Chaumette, Ronsin, Hébert, Chaumette, Deschamps des Tournelles, Vallet de Villeneuve, Proly, Brichet, Péreyra, Guzman, le ci-devant comte Scipion du Roure et autres maratistes de circonstance et/ou piliers de la Commune de Paris sont arrêtés.
L’informateur du gouvernement britannique, qui entrevoit Simon à sa sortie du Temple, ajoute d’autres précisions au sujet du petit prisonnier :
« On ne lui donne, pour l’amuser, que les livres les plus infâmes, et enfin, depuis la mort du roi (Louis XVI, il n’est rien qu’on ne fasse pour le corrompre.»
Drake à Lord Grenville
« (Simon) prétend que, de temps en temps, il sent sa position et se désespère, alors les commissaires (de la Commune) l’étourdissent avec de l’eau de vie et en le faisant jour au billard. Il prétend aussi que plusieurs fois, Hébert l’a menacé de la guillotine, et que cette menace l’effraye si horriblement qu’il a vu souvent cet enfant s’évanouir à cette menace. Les deux gardes nationaux qui ont monté la garde au temple ont appris à peu près des détails semblables, mais ont ajouté que les princesses étaient obligées à laisser leur porte toujours ouvertes et qu’elles étaient persécutées. »
Compte tenu de la situation faite à l’enfant au Temple depuis l’été 1793, sa consommation forcée et régulière d’alcool, son exposition à l’humidité des lieux à la fin de l’automne on peut admettre que sa santé s’est détériorée comme le révèle le bulletin de santé de novembre. Il tousse et il semble atteint de coliques persistantes.
L’hypothèse de son décès prématuré est donc légitime de même que la question de sa substitution éventuelle, même si les dépêches ultérieures adressées par Drake à Lord Grenville laissent penser que à en lire certains documents officiels, l’enfant était encore vivant en février 1794.
Eh pourtant, à la fin de janvier 1794, Louis XVII semble bien portant, si l’on en croit les autorités :
1 – Le procès-verbal de « décharge » de la garde du petit prisonnier, confié aux époux Simon, effectué par le quatre municipaux Legrand, Lasnier, Cocherfer et Lorinet qui précisent que les Simon « leur ont exhibé la personne dudit Capet en bonne santé ».
2 – La déclaration de Lasnier, gardien de Louis XVII, précisant également que les Simon « ont remis cet enfant en bonne santé », déclaration qui parut dans le Moniteur Universel du 3 pluviôse an II (22 janvier 1794).
Après le départ des Simon, Louis XVII déménage et est enfermé au deuxième étage de la Tour.
Mais est-ce le même enfant ? toute la question est là. Si il était mort pour une raison ou une autre, les membres de la Commune avaient tout à redouter la grande colère des comités de gouvernement, et notamment le comité de salut public qui n’a aucun intérêt à perdre son otage précieux. Dans ce cas, de leur propre chef, les meneurs de la Commune de Paris auraient-ils procédé au remplacement du cadavre (enterré anonymement) par un enfant, peut être un orphelin qui mourut lui même un an et demi plus tard (8 juin 1795) ?
Les conclusions des médecins qui l’autopsièrent sont, paraît-il, contradictoires et jettent un doute sur l’identification du corps, notamment le docteur Desault qui ne l’a pas reconnu, témoignage relayé inlassablement son épouse et son entourage après son décès..
A partir de là, commence un état de solitude, de réel abandon.
Louis-Charles est cloîtré dans une chambre du Temple. Il reçoit sa nourriture par un petit guichet et vit dans la pénombre. Les commissaires qui se succèdent chaque jour pour le garder ne peuvent le voir. Pas de visite de médecin.
Le 12 février 1794
Après une longue interruption, nouvelle dépêche relative à l’enfant. Elle est troublante par ce qu’elle suggère :
« Simon devenu si effrayé par le danger qu’il courait (l’enfant ou lui même ?), qu’il se prêtait à tout ce que voulaient les scélérats, ne rendait compte de rien et ne travaillait qu’à la sortie de cette place».
(FM, II, 528)
Dans quelque sens qu’on lit cette phrase on en retient que l’état de l’enfant du Temple est sérieux voire critique et que les autorités de la Commune (les «scélérats») ont demandé à Simon de se montrer discret sur ce qu’il a vu.
Le 10 mars 1794
Une Dénonciation du 20 ventôse an II «relative à des faits qui se sont passé à la garde de la tour du temple et à une consigne qui empêchait les officiers d’Etat major de pénétrer dans cette maison» (AN, W 88, dos. 11, 2 pièces.) laisse penser que la Commune aux abois (ses membres sont arrêtés ces mêmes jours) ne tient pas à ce que des officiers viennent constater ou surprennent des faits relatifs à ce qui s’est passé au Temple.
Le 16 mars 1794
Une Importante déclaration de Georges Couthon, le 26 ventôse an II, à la veille de la chute de la Commune, alors que Ronsin, Vincent, Hébert sont arrêtés, laisse penser qu’il y a eu «conspiration»:
« Les preuves de la conspiration que nous avons dévoilée s’accumulent au Comité de sûreté générale. Je suis chargé de vous faire part d’un fait qu’il n’y a plus d’inconvénients à révéler puisque que les coupables sont en lieu de sûreté, le voici. On a tenté de faire parvenir au Temple, aux enfants Capet, une lettre, un paquet et cinquante louis en or. Le but de cet envoi était de faciliter l’évasion du fils de Capet; car les conjurés ayant formé le projet d’établir un conseil de régence, la présence de l’enfant était nécessaire à l’installation du régent.»
Georges Couthon
La veuve Simon déclare à la Police au début de la Restauration qu’elle a vu des choses lors du déménagement de janvier 1794. Voiture, panier de linge… Elle dit que le Dauphin est sorti du Temple. Elle prétend qu’il est venu la voir à l’hospice sous l’Empire. Puis elle change plus tard de version et dit que c’est le second de cuisine Meunier (en poste à Versailles, aux Tuileries, au Temple) qui lui a dit que l’enfant avait quitté la prison.
Le 24 mars 1794
Jacques-René Hébert est guillotiné : lors de son trajet de la conciergerie à la place de la Révolution, il est hué par le peuple. Quand vient son tour de « jouer à la main chaude » (« être guillotiné »), Hébert doit être traîné à l’échafaud : sa tête montrée par le bourreau est saluée par des quolibets.
Il est vraisemblable que le Comité de salut public, au moment ou la tête de Hébert roule sur l’échafaud, est fixé sur la situation réelle au Temple. Après la mort des hébertistes le Comité de sûreté générale regarde comme inutile la surveillance particulière réduite à deux gardes nationaux pour la famille royale (trois personnes).
Si l’enfant est mort avant la chute de la Commune hébertiste, les mêmes autorités – la Commune de Pache et Chaumette puis le Comité de salut public -, en admettant que tous soient au courant, feraient en logique tout pour cacher ce décès au public. Mais cela ne prouve pas qu’il y ait eu substitution.
Les 27 et 29 mars 1794
Les 7-9 germinal An II une séance de la Commune de Paris :
«On nomme les membres qui doivent aller au Temple y maintenir l’ordre et la tranquillité; le citoyen Cressant est proposé: plusieurs s’opposent à son admission et lui reprochent d’avoir plaint le sort du jeune Capet (sic), d’avoir même recueilli les noms de ceux qui montent journellement au Temple ». Après délibération le conseil arrête l’exclusion de Cressant du conseil, renvoyé à l’administration de police et scellés sur ses papiers (il ne sortira de prison que plus tard). »
Moniteur XX, 69 et 154
On effectue des travaux d’isolation et de confinement strict de l’enfant pour prévenir tout enlèvement. Quatre commissaires sont nommés à cet effet (Moniteur XIX, 239). Depuis cette date sept membres du conseil général de la Commune forment la nouvelle commission spéciale de la surveillance du Temple.
Le Roi semble mieux traité. voir Ng p 564
Le 8 mai 1794
On vient chercher Madame Elisabeth au Temple pour la conduire à la Conciergerie.
En mai 1794
Déposition de Barelle
D’après une dépêche conservée dans les Dropmore papers, Robespierre aurait sorti Louis-Charles (peut-être un autre enfant) de la prison du Temple et l’aurait conduit à la forteresse de Meudon en mai 1794, répétition d’une opération qui pourrait avoir lieu au cas où les armées ennemies encercleraient Paris. On sait que le vieux château de Meudon est alors devenu un arsenal et une réserve de poudre. Si l’information donnée par l’informateur du gouvernement anglais est exacte, on trouve une logique immédiate qui tient à l’inquiétude de Robespierre. Celui ci avait de bonnes raisons de penser que tôt ou tard les armées coalisées encercleraient la capitale. Cette hypothèse n’est pas à rejeter absolument. Pour négocier une porte de sortie pour lui et les membres des comités on peut penser qu’ils avaient l’intention de mettre dans la balance la vie même de l’enfant du Temple qu’on transporterait hâtivement du Temple à Meudon, avec la menace dissuasive d’une explosion des réserves de poudre et le sacrifice de l’otage (cette hypothèse a davantage de sens qu’un nébuleux projet d’exfiltration de cet enfant dont Robespierre se serait rendu complice… mais l’information est peut-être simplement inexacte. Quoi qu’il en soit de ce pont particulier qui a donné lieu à de nombreuses spéculations fantaisistes, les dépêches, issues des Dropmore papers (Public Record office à Londres), sont utilisées et discutées par MM. de Beaucourt et Gustave Bord, historiens «royalistes» qui contrairement à MM. Alphonse Aulard et Albert Mathiez (dont les théories y sont parfois mises à mal), pensent qu’elles contiennent des vérités. Comme souvent, la «vérité», justement, est entre deux. Les informateurs des cabinets étrangers se trompent ou sont mal renseignés sûrement plus qu’ils ne cherchent à tromper (comme cela a parfois été exagérément soutenu par Jacques Godechot).
Le 10 mai 1794
Exécution de Madame Élisabeth.
Madame Royale reste seule au Temple, au dessus de chez son petit frère…
On sait que la Commune de Paris et la haute administration du ministère de la guerre, à savoir Bouchotte, Ronsin, Vincent, Turreau, Quétineau, Hanriot, Santerre etc. sont, en ce même hiver 1794, au moment de tenter un coup d’état militaire contre la Convention et ses comités tout puissants qu’ils critiqueent. Ils désirent imposer à la France entière le gouvernement de Paris et de ses sections, appuyés sur un conseil de régence dont Jean-Nicolas Pache (1746-1823) serait Grand Juge. On sait aussi que le général Henriot à la veille de la révélation du complot «pachiste» par (selon la tradition) le sieur Souberbielle, lui même médecin de Robespierre qui lui a fait part de ses craintes, est pardonné par Robespierre. Celui-ci demande aussitôt à Saint-Just et aux comités de gouvernement de reprendre la Commune et sa force armée en main, de décapiter sans délai le mouvement popularisé par Hébert et d’épurer la Commune «gangrenée par l’étranger» (Pache est arrêté et remplacé par Lescot de Fleuriot).
En mai, l’enfant du Temple semble se bien porter, ce qui n’est pas le cas de sa sœur qui doit être accablée de chagrin depuis le départ de sa tante Elisabeth dont elle ignore le sort :
Ceux qui ont eu l’occasion de voir Louis XVII dans le lieu où les tyrans le retiennent en captivité s’accordent à dire qu’il est de la plus belle figure. On le coëffe d’un bonnet rouge, on l’occupe à faire des souliers, on lui paye son travail avec des sous de fonte des cloches, et on le laisse jouer avec des polissons. Quant à madame, sa sœur, elle a dépéri d’une manière effrayante, on la fait travailler à des chemises pour la nation.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 12 juin 1794, p.1340
Le 11 juin 1794
Le citoyen Desault chirurgien major du grand hospice de l’humanité de Paris (est) arrêté au moment où il donn(e) sa leçon et conduit à la Maison d’arrêt du Luxembourg. Le citoyen Manoury (est) nommé pour le remplacer provisoirement.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 11 juin, p.1402)
Le 27 juillet 1794
Chute de Maximilien de Robespierre ( né le 6 mai 1758), il est guillotiné le lendemain.
… Antoine Simon fait partie du convoi de la guillotine.
Marie Jeanne Aladame (1745-1819) la veuve Simon, ancienne domestique entrée aux Incurables en 1796, assurera toujours que l’enfant mort en janvier 1794 fut remplacé, et cela jusque sous la Restauration où, pressée par Decazes elle soutiendra une version contraire. Jusqu’à sa mort, le 10 juin 1819) elle assure néanmoins aux religieuses qui s’occupent d’elle que l’enfant du Temple a été substitué (remplacé), alimentant une rumeur qui a marqué l’historiographie légitimiste.
Jusqu’au 28 juillet 1794
Louis-Charles est enfermé au secret dans une chambre obscure, sans hygiène ni secours, pendant six mois. Son état de santé se dégrade, il est rongé par la gale et surtout la tuberculose. Il vit accroupi. Sa nourriture lui est servie à travers un guichet et peu de personnes lui parlent ou lui rendent visite. Ces conditions de vie entraînent une rapide dégradation de son état de santé. L’isolement total dans lequel il est placé laisse planer un certain mystère et donne l’occasion à l’imagination populaire de soulever l’hypothèse de substitution de l’enfant et de son exfiltration, donnant naissance au « mythe évasionniste et survivantiste ».
Le 28 juillet 1794
Le député Barras découvre ainsi un enfant mutique, brisé psychologiquement. Les comités de salut public et de sûreté générale nomment Laurent, membre du comité révolutionnaire de la section du Temple, pour le garder, lui et sa sœur.
Son sort s’améliore relativement, mais le prisonnier de la tour du Temple est rongé par la tuberculose, ce qu’omet de signaler Laurent lorsqu’il écrit, sur le bulletin de la tour du Temple, que les prisonniers « se portent bien ».
Après le 27 juillet 1794
Après le 9 thermidor, Barras fait désigner comme garde le citoyen Laurent, ancien président de la section du Temple, avec ordre d’améliorer les conditions de détention de l’enfant.
Le 9 novembre 1794
Jean-Baptiste Gomin (1757-1841), fils d’un tapissier de l’île Saint-Louis, est nommé adjoint de Laurent et devient gardien des enfants de France à la prison du Temple. L’enfant est décrit en bonne santé mais il doit certainement y avoir des signes avant coureur de sa maladie qu’ils ne perçoivent pas.
Le 19 décembre 1794
C’est seulement lors de la visite, le 19 décembre 1794 (et non en mars 1795), des citoyens représentants du Comité de sûreté générale Harmand, Mathieu et Reverchon qu’on constaterait, prétendra beaucoup plus tard Harmand, des anomalies physiques (tumeurs au genou droit et au poignet gauche) et psychologiques (mutisme).
Entre décembre 1794 et mai 1795
Aucune disposition sur la santé de Louis Charles n’est prise par l’exécutif. L’indifférence semble prédominer.
Cette indifférence à soigner l’enfant pourrait bien avoir un rapport avec les négociations de paix en cours avec l’Espagne qui réclame, entre autres, les deux enfants de Louis XVI. La République craint, elle, d’abandonner son otage qui permettrait à ses ennemis de relancer la coalition et de réactiver la guerre pour organiser une restauration de leur choix. La mort de l’enfant arrangerait la haute politique française.
Retrouver les portraits authentiques du petit Roi relèverait, si l’on en croit tout ce qui a été dit, écrit et publié, de l’enquête policière. Eh pourtant, c’est bien le peintre Greuze de Tournus qui est la piste la plus intéressante. En 1791, avant l’incarcération de la famille royale, il a fait un premier portrait de l’enfant alors qu’il n’avait que six ans (en dessous, à gauche). Il n’est pas besoin d’être un grand spécialiste pour constater une ressemblance probable avec le portrait oublié que j’ai replacé au milieu, compte tenu, bien entendu, qu’en quatre ans, un visage d’enfant s’allonge mais que certains détails ne changent pas (la bouche avec sa lèvre inférieure déjà bourbonienne, la chevelure, le nez, les yeux). L’enfant a pourtant bien changé. Les épaules sont tombantes, la poitrine étroite et rentrée, le visage émacié. Les joues se sont creusées, la bouche ne sourit pas et le regard n’est plus le même.
Ce tableau oublié tout à fait inconnu s’est vendu dans une salle des ventes parisienne, le 11 octobre 1981. La description était la suivante : «Portrait présumé du dauphin Louis XVII, attribué à Greuze» L’inscription collée au dos donnait les précisions suivantes : «Portrait du dauphin Louis XVII à l’âge de dix ans. Huile sur toile attribuée à Greuze, non signée, portant en haut et à droite les armes de la famille royale de France.»
Le tableau est merveilleusement peint. Les cheveux blonds sont d’une grande finesse. L’expression du visage est d’une étrange délicatesse mais révèle un état maladif. Madame Vigée Le Brun, amie de Marie-Antoinette qui fit plusieurs portraits de la famille royale ayant émigré dès 1789, ne peut en être l’auteure. En revanche, plusieurs artistes ont pu peindre l’héritier de la couronne. Tout d’abord Ducreux qui a dessiné Louis XVI au Temple, Prieur qui peignit Marie-Antoinette à la Conciergerie, et tous ceux qui firent les portraits des héros de la Révolution… mais c’est bien le tournusien Greuze qui est la piste la plus crédible. Il était alors à Paris. C’est d’ailleurs l’hypothèse retenue dans le catalogue «Chrysanthemum» qui fait par ailleurs remonter l’origine du tableau jusqu’au baron Mayer de Rothschild.
Il s’agit de Louis XVII dans sa triste authenticité et non dans une posture académique d’enfant royal.
Le 31 mars 1795
Laurent démissionne. Il est remplacé par Etienne Lasne (1757-1841), ancien peintre en bâtiment, de la section Des droits de l’homme.
Les citoyens Lasne et Gomin traitent l’enfant avec douceur mais son état les inquiète.
Le 13 avril 1795
« Un enfant vivant est au Temple : il est incommodé selon un rapport de Sevestre sur le caractère et les signes extérieurs de la maladie.»
(source ? Moniteur XXIV, 650)
Le 3 mai 1795 (14 Floréal an III)
Les gardiens Gomin et Lasne inscrivent sur les registres du Temple « Le petit Capet est indisposé ».
Le 6 mai 1795 (17 Floréal an III)
La tuberculose prend un tour critique, caractérisé par l’apparition d’une péritonite.
Dans les derniers jours de mai 1795
Les gardiens signalent au comité de Sûreté générale que l’enfant Capet manifeste « une indisposition et des infirmités qui paraissent prendre un caractère grave ».
Cette fois le gouvernement réagit. Le docteur Desault médecin chef de l’Hôtel Dieu, examine l’enfant et prétend, dit-on, ne pas le reconnaître (ce que confirme son épouse), confirme la gravité de l’état du malade mais … meurt les jours suivants. On le remplace par ses collègues Pelletan, chirurgien, qui observe certains symptômes caractéristiques révélant un stade avancé d’une maladie infectieuse mortelle, et demande confirmation de diagnostique à son collègue Dumangin qui l’approuve. Il s’agit pour eux d’un «vice scrofuleux» qui signifie tuberculose osseuse. Cette maladie a frappé son frère aîné, décédé le 4 juin 1789. Il est possible que les carences en vitamines C et D, le confinement et le manque d’exercice prolongé après le départ des Simon, ou encore l’humidité aient favorisé l’apparition de cette maladie chez Louis-Charles. Il est possible enfin que Marie-Antoinette ait été porteuse saine de cette maladie et l’ait transmise à ses deux fils, mais il n’y a aucune évidence à cela.
Le Comité « arrête que le premier officier de santé de l’hospice de l’Humanité visiterait le malade en présence de ses gardiens et administrerait des remèdes ». Le docteur Desault passe à cette époque pour être le premier praticien de Paris.
Pendant tout ce temps, l’état du petit Roi s’est tellement aggravé qu’enfin, à la demande pressante des geôliers, on fait venir un médecin. M. Desault le soigne et lui prescrit quelques remèdes, bien qu’il fait comprendre dès le début à Gomin qu’il a peu d’espoir de guérison pour l’enfant. Ils le déplacent dans une pièce plus claire et ensoleillée, mais il est très faible et le changement ne freine guère la progression de la maladie. Bien que son bon ami le conduise souvent jusqu’à la plate-forme de la Tour, le léger mieux apporté par la respiration de l’air frais compense à peine la fatigue que lui coûte l’effort.
Le 29 mai 1795
Desault fait sa dernière visite au malade car il meurt le 1er juin, à l’âge de cinquante-sept ans.
Madame de Tourzel parvient à s’assurer des contacts avec Gomin et Lasne, anciens commissaires de la Commune de Paris, en charge de la surveillance du petit Roi au Temple. Elle prend connaissance des interventions de Desault et Pelletan, les derniers médecins qui tentent d’adoucir les souffrances de l’enfant … Le témoignage du docteur Jeanroy, « un vieillard de plus de quatre-vingts ans, d’une probité peu commune et profondément attaché à la famille royale. Il (a) été choisi pour assister à l’ouverture du jeune roi ; et pouvant compter sur son témoignage comme le mien propre, (elle) le f(ait) passer chez (elle)».
De réputation fiable et solide, qui l’a fait choisir par les membres de la Convention pour fortifier de sa signature la preuve que le jeune roi n’a pas été empoisonné.« Ils n'(ont) pas eu besoin d’employer le poison : la barbarie de leur conduite vis-à-vis d’un enfant de cet âge d(oit) immanquablement le conduire au tombeau. Sa bonne constitution prolongea so n supplice ; la malpropreté dans laquelle on le laissait volontairement et le défaut d’air et d’exercices, lui avaient dissous le sang et vicié toutes les humeurs.»
Madame de Tourzel
Pour la marquise, le jeune prince est bien mort au Temple.
Les trois médecins de Louis XVII au Temple meurent presque en même temps
Le 1er juin 1795
Mort de Pierre Joseph Desault, né à Vouhenans (Haute-Saône) le 6 février 1738 d’une famille rurale de sept enfants et mort à Paris , il était chirurgien et anatomiste.
Le 5 juin 1795
François Doublet, né le 30 juillet 1751, était médecin de la faculté de médecine de Paris et membre de la société royale de médecine.
Le 6 juin 1795
Le docteur Pelletan, quarante-huit ans, chirurgien en chef de l’Hospice de l’Humanité, succède au docteur Desault.
Ne voulant pas prendre seul la responsabilité de soigner l’enfant, le Comité de sûreté général lui adjoint le docteur Dumangin, cinquante-et-un ans, médecin chef de l’hospice de l’Unité (Hôpital de la Charité de Paris). Ils n’ont aucun espoir. Ils lui font prendre des médicaments qu’il avale avec difficulté. Heureusement, sa maladie ne le fait pas beaucoup souffrir ; c’est une débilité et un dépérissement total plutôt qu’une douleur aiguë. Il a plusieurs crises pénibles ; la fièvre le saisit, ses forces diminuent de jour en jour, et il expire sans lutte.
Dans la nuit du 7 au 8 juin 1795
Gomin et Lasne alarmés par l’état de santé de l’enfant ont envoyé cherché en urgence le docteur Pelletan. Il répond qu’il viendra demain matin avec le docteur Dumangin.
Le lundi 8 juin 1795 (20 prairial an III)
Les docteurs Dumangin et Pelletan arrivent ensemble à onze heures du matin au Temple, l’état de l’enfant s’est aggravé.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
A trois heures de relevée
Louis XVII meurt dans sa prison, probablement d’une péritonite ulcéro-caséeuse venue compliquer la tuberculose (le « vice scrofuleux » qui a déjà coûté la vie à son frère aîné), à l’âge de dix ans et après presque trois ans de captivité.
« Le sieur Lasne gardien et moi, nous prêtions nos soins au petit dauphin, et enfin à trois heures (de l’après-midi) lorsque le sieur Gomin fut revenu, l’enfant venait de mourir ». Pelletan arrivé à quatre heures confirme la mort. Le docteur Dumangin arrive à huit heures, il apprend le décès du fils Capet.»
Témoignage de Damont commissaire civil au Temple
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Les commissaires le pleurent amèrement, tant il s’est fait aimer par ses douces qualités. Il avait beaucoup d’intelligence ; mais l’emprisonnement et les horreurs dont il est la victime l’ont beaucoup changé ; et même, s’il a vécu, il est à craindre que ses facultés mentales ont été atteintes. Le seul poison qui a abrégé sa vie est l’impureté, jointe aux traitements horribles, à la dureté et à la cruauté sans exemple exercés sur lui.
Le 9 juin 1795
A onze heures du matin, le chirurgien Philippe-Jean Pelletan réalise son autopsie qui confirme le diagnostic de tuberculose. Il est secondé par trois médecins dont le docteur Dumangin. C’est justement dans ce rapport d’autopsie que le docteur Pelletan va aussi raconter une idée que lui est venue à l’esprit : celle de s’emparer en toute discrétion du cœur de l’enfant mort et le garder dans sa poche. Après, le cadavre du petit Roi va être jeté dans une fosse commune au cimetière de Sainte-Marguerite. Il va le garder dans l’alcool et le cœur va devenir dur comme de la pierre.
« Vous m’aviez à la vérité proposé d’autres adjoints; et sur mon observation que, d’après les qualités personnelles et les rapports qu’avaient eus M. Pierre Lassus (1741-1807) avec Mesdames de France et Nicolas Dieudonné Jeanroy (1750-1816) dans la Maison de Lorraine, leurs signatures seraient d’un tout autre poids, vous aviez agréé ce choix. »
Le docteur Dumangin rédige le procès-verbal d’autopsie, recopié en quatre exemplaires : Un pour le Comité de sûreté générale et un pour chaque médecin. L’exemplaire du docteur Dumangin est conservé aux Archives Nationales depuis 1891.
« Des doutes intempestifs se sont élevés sur l’identification du cadavre car on n’a pas pensé (ou voulu ? disent certains) le présenter à Marie-Thérèse Charlotte, sa sœur, ni à madame de Tourzel sortie de prison, ni à Hue, ni à Tison, ni à Marie Jeanne Aladame, la veuve de Antoine Simon, ni à aucun des anciens médecins du dauphin (le docteurs Brunier et le docteur Naudin, médecin des prisons). Mais il a été reconnu par un ancien garde national (le citoyen Gagnié, «ancien chef du Temple»), présent à l’autopsie, qui déclara en août 1817 avoir vu le dauphin aux Tuileries, tenant la main à sa mère et se promenant dans son petit jardin aménagé.»
Ce même jour
François Chopart, chirurgien, né le 30 octobre 1743 à Paris, y meurt à l’âge de cinquante-et-un ans.
Il se dit que Pierre Joseph Desault, François Doublet et François Chopart en savaient trop sur l’autopsie d’un faux Louis XVII, il ne fallait pas qu’ils puissent parler : on les a empoisonnés.
Le 12 juin 1795
Louis-Charles est enterré dans le cimetière Sainte-Marguerite. Sous la Restauration, Louis XVIII fait rechercher la sépulture de son neveu : l’énigme de « l’enfant du Temple » se développe alors avec les témoignages contradictoires de ceux qui ont assisté à l’enterrement le 10 juin (fossoyeur, concierge du cimetière, abbé …) qui évoquent une inhumation en fosse commune (le corps ne pouvant dès lors plus être identifié), une réinhumation dans une fosse particulière près de la Chapelle de la Communion de l’église, voire dans le cimetière de Clamart.
Le 12 juin 1795 (24 prairial an III)
L’acte de décès de Louis XVII est rédigé. L’original du document a disparu dans les incendies de la Commune de 1871 mais l’acte avait été recopié par des archivistes et un exemplaire se trouve aussi aux Archives Nationales :
« Du vingt-quatre prairial de l’an trois de la République (12 juin 1795)
Acte de décès de Louis Charles Capet du vingt de ce mois (8 juin), trois heures après-midy, âgé de dix ans deux mois, natif de Versailles, département de Seine-et-Oise, domicilié à Paris aux Tours du Temple, section du Temple, fils de Louis Capet, dernier roy des Français, et de Marie Antoinette Josèphe Jeanne d’Autriche.
Sur la déclaration faite à la maison commune, par Etienne Lasne, âgé de trente-neuf ans, profession gardien du Temple, domicilié à Paris rue et section des Droits-de-l’Homme n° 48 : le déclarant a dit être voisin ; et par Rémy Bigot, âgé de cinquante-sept ans, profession employé, domicilié à Paris vieille rue du Temple n° 61 : le déclarant a dit être ami.
Vu le certificat de Dussert, Commissaire de Police de ladite section, du vingt-deux de ce mois (10 juin). Officier public : Pierre Jacques Robin.
(Signé) : Lasne, Robin, Bigot. »
Le 24 juin 1795
Monsieur, toujours en émigration , est proclamé Roi sous le nom de Louis XVIII.
Dès 1795, des rumeurs faisaient courir le bruit que le Dauphin, remplacé dans sa geôle par un autre garçon, aurait été libéré du Temple. Ces rumeurs avaient été favorisées par les exhumations des restes d’un enfant au crâne scié — traces d’une autopsie — du cimetière Sainte-Marguerite (au cours des deux exhumations réalisées en 1846 et en 1894, plusieurs spécialistes attribuent pourtant le corps à un sujet masculin âgé de plus de seize ans, d’1,63 m et de morphologie différente de celle de Louis XVII) et l réaction thermidorienne : tandis que les royalistes osaient à nouveau s’afficher comme tels, des accords de paix étaient négociés entre la République et les révoltés vendéens et chouans ( traités de La Jaunaye, de la Mabilais et de Saint-Florent-le-Vieil ). La mort du petit Roi, en juin de cette même année, fut par conséquent accueillie avec scepticisme par une partie de l’opinion publique. Ce contexte permit l’éclosion de théories «évasionnistes» et «survivantistes» …
Dès le début du XIXe siècle, des «faux Dauphins» commencèrent à apparaître et à réunir un nombre variable de partisans autour de leurs prétentions. Les condamnations des trois premiers (Hervagault, Bruneau et un certain Hébert, connu sous le titre de «baron de Richemont») à de lourdes peines de prison ne découragèrent pas d’autres imposteurs, dont le plus célèbre est l’horloger prussien Karl-Wilhelm Naundorff (date de naissance inconnue-10 août 1845), qui eut de nombreux adeptes jusqu’à la fin du XXe siècle.
Dans les récits qu’ils firent de leur prétendue évasion du Temple, la plupart de ces prétendants reprenaient la trame du roman de Regnault-Warin, qui évoque des agents royalistes envoyés par Charette qui s’introduisent dans la tour, où ils apportent, au moyen d’une cachette ménagée dans un « cheval de bois », un orphelin drogué à l’opium destiné à prendre la place du vrai Dauphin. Ce dernier, dissimulé dans le même objet, est ainsi libéré de sa prison. Aux termes de nombreuses péripéties, et notamment d’une tentative d’exfiltration vers l’Amérique, l’orphelin royal est repris avant de mourir de maladie.
Malgré les nombreuses invraisemblances et le triste dénouement de ce récit, la thèse de la substitution gagne ainsi un nouveau mode de diffusion le cheval de bois étant quelquefois remplacé par un panier de linge sale, et Charette par le comte de Frotté, ce dernier ayant effectivement échafaudé, sans pouvoir y donner suite, des projets d’enlèvement des orphelins royaux.
Aux imposteurs plus ou moins convaincants s’ajoutent de nombreux fous (comme Dufresne, Persat et Fontolive) ou encore des personnages dont l’identification à Louis XVII a surtout été l’œuvre de tiers, le plus souvent de manière posthume : c’est notamment le cas de l’officier de marine puis architecte français Pierre Benoît (actif à Buenos Aires ), du pasteur iroquois Eliézer Williams, du musicien anglais Augustus Meyes, du célèbre naturaliste John James Audubon et même de Louvel (assassin du duc de Berry, cousin de Louis XVII).
Les circonstances exactes de la mort de Louis XVII et la rumeur concernant une éventuelle évasion de la prison du Temple ont attisé la curiosité de nombreux auteurs, comme Gosselin Lenôtre (1855-1935), André Castelot (1911-2004) ou Alain Decaux (1925-2016).
Il demeure quelques partisans de la survivance du prince.
A partir de 1798 commence la saga des faux dauphins.
Ainsi ce début du XIXe siècle verra-t-il revenir de nombreux prétendants au titre de Louis XVII – on en a comptés environ cent cinquante… : le baron de Richemont, l’horloger prussien Karl-Wilheim Naundorff, Jean-Marie Hervagault ou Mathurin Bruneau ont pu chercher à rencontrer la duchesse d’Angoulême pour se faire reconnaître.
Marie-Thérèse n’en reçut aucun !
Le dénommé Jean-Marie Hervagault, en fugue pour la dixième fois, annonce qu’il est Louis XVII (des rumeurs circulent dès 1795 sur la survie de Louis XVII). Il sera jugé et finira ses jours en prison en 1812. Notons que lors d’une fugue précédente, son père n’a pas voulu le reconnaître !
Sous le Consulat
Barras, l’un des responsables du renversement de Robespierre en 1794 et directeur de la République de 1795 à 1799, a bénéficié d’un traitement de faveur de la part de Louis XVIII ) partir de 1814. Il n’est pas exilé, comme beaucoup d’anciens députés de la Convention (1792-1795).
Il a déclaré sous le Consulat, lors d’un repas, que le fils de Louis XVI était vivant et qu’il «verrait pendre ce diable de corse». Témoignage devant notaire d’une invitée.
Sous le premier Empire
Si l’on en croit les « Mémoires de Talleyrand », à entendre Joséphine de Beauharnais, Napoléon considère avoir la preuve absolue de l’existence de Louis XVII. Il en est si sûr qu’il dit souvent à son entourage : « Quand je voudrai, je sèmerai la discorde dans la famille du prétendant ! ».
En 1814
L’empire français s’écroule et Napoléon prend pour la première fois le chemin de l’exil. Quant à Joséphine, lorsque le Czar Alexandre va la visiter, il lui dit : « Qui mettrons nous sur le trône de France, Madame ? », elle lui répond : « Mais le fils de Louis XVI, évidemment ».
A la Restauration
Voici l’ignare Bruneau et le dandy «Baron de Richemont».
Puis arrive Naundorff, apparu en Prusse. On trouve des traces de lui en 1809.
Le docteur Pelletan va essayer de rendre ce cœur à la famille du petit Roi pendant la restauration, mais ils vont refuser et finalement il va le donner à Monseigneur de Quelen, archevêque de Paris. Pendant la révolution de 1830 l’archevêché va être pillé et le cœur va être récupéré par le fils du Docteur Pelletan qui va se rendre personnellement à l’archevêché pour sauver la royale relique.
Un témoignage navrant du citoyen Gagnié «ancien chef du Temple» est cité dans l’instruction commandée par Louis XVIII au sujet de la détention et de la mort de son neveu. Il assure avoir vu plusieurs fois le Dauphin avec sa mère et c’est le même enfant qu’il découvrit au Temple pendant l’hiver 1795-96 :
« En montant l’escalier qui conduisait au corridor attenant à la chambre de Louis XVII, je sentis une odeur extrêmement infecte qui sortait de la susdite chambre dans laquelle on entrait pas et voyant que depuis trois jours l’enfant renvoyer ses aliments tel qu’on lui portait, je demandai d’obtenir promptement une autorisation du Comité de sûreté générale et de faire ouvrir la porte de sa prison, ce qui fut exécuté, et je proteste qu’en entrant, je vis le jeune prince courbé et accroupi ayant ses bras retresés (sic), une tumeur au genou et au bras dans l’impossibilité de se redresser et ayant le cou rongé de gale, que l’ayant interrogé sur ce qu’il n’avait pas pris de nourriture depuis trois jours, il me répondit: «Que veux tu mon ami, je veux mourir.» Je certifie de plus que cet enfant était véritablement le fils de Louis XVI que j’avais vu aux Tuileries, le même que j’avais vu amené au Temple avec le roi et prendre ses récréations dans le jardin en présence de toute sa famille, enfin le même que je vis après la mort de Louis XVI lorsqu’il fut visité en présence d’un municipal qui était médecin, en ma présence et celle de M. Caillieux, administrateur. La reine craignant que ce ne fut une hernie mais elle sut que ce n’était qu’une glande engorgée que je fus même chargé d’acheter un bandage, le même à qui je donnai des serins et des pigeons lorsqu’il était avec le même Simon, le même que je vis au billard avec La Bazanerie chef de Bataillon (….) Fait à Paris le 27 juillet 1817 et signé Gagnié, ancien chef du Temple.»
En 1819-1820
Naundorff aurait contacté le duc de Berry, fils du futur Charles X. Il se rend en France dans les années 1830, vivant de l’hospitalité de ses partisans. Certaines personnes ayant connu Louis XVII reconnaissent en lui le fils de Marie-Antoinette. Mais que peuvent valoir ces témoignages quarante ans après les faits ? Naundorff donne des renseignements sur la vie du Dauphin. A-t-il soutiré ces informations des gens qui le reconnaissaient ?
Naundorff est expulsé de France. Il vivra à Londres, fondera une religion, partira pour les Pays-Bas où il mettra une bombe connue sous le nom de «bombe Bourbon». Le Roi l’autorise à porter le nom de Bourbon. Naundorff meurt à Delf. Ses partisans se battront pendant des décennies pour sa reconnaissance. Sa famille existe toujours. Une branche vit en France, l’autre au Canada. Elle a été déboutée lors d’un procès en 1954.
Le 13 février 1820
Assassinat du duc de Berry (1778-1820), fils du comte d’Artois (1757-1836).
Le 14 février 1820
La mort du duc de Berry
On a prétendu que Louis Louvel (1783-1820), l’assassin, pouvait être Louis XVII car Louis XVIII l’aurait autorisé à se rendre à l’échafaud coiffé d’un chapeau… Louvel était sobre et travailleur. Il était cultivé, ne se liait à personne. Il a toujours dit avoir agi seul.
Louvel-Louis XVII. des confidences ? De qui ? Ils sont tous morts !
1: le vrai Louvel était en pension de juin 1791 à octobre 1795, donc possibilité d’introduire dans la famille Louvel un inconnu et de le faire passer pour le fils de la famille de retour à Versailles (1794);
2: Robespierre est passé devant chez les Louvel à Versailles tous les jours d’avril à novembre 1789 (première possibilité d’un lien). Robespierre est à Versailles le 20 juin 1791 quand le père Louvel envoie à Paris le futur régicide, en pension. Aurait-il profité du carrosse de Robespierre ? Il a été dit que Robespierre aurait postulé ou aurait été pressenti pour devenir gouverneur du Dauphin. Du moins son nom a circulé pour occuper la charge.
3: Le conventionnel Lecointre accompagne Robespierre le 17 juillet 1791 ( jour de la fusillade du champ de Mars) dans la quête d’un abri sûr. Les Lecointre et les Louvel sont liés (le père Lecointre était parrain chez les Louvel). Et nous retrouvons le soir de la chute de Robespierre Lecointre festoyant avec Barras et les autres membres de la conjuration qui fit chuter le « tyran ».
Un lien Robespierre – Lecointre – famille Louvel ; un second, Barras – Lecointre – famille Louvel !
4: En 1804, Louvel déclare avoir 19 ans (âge de Louis XVII), alors qu’il en a presque 21 ! (ce n’est pas un témoignage, c’est marqué sur son livret ouvrier !)
5: En 1806, Louvel est réformé de la Garde Impériale par Larrey et Sue, amis de Desault, médecin au Temple en mai-juin 1795. Louvel est affecté à l’Artillerie de la Garde Impériale, à Paris, en 1805. Il fut réformé pour varicocèle.
6 : En 1814, Louvel, qui n’aime pas l’armée, rejoint Napoléon à l’île d’Elbe. il y restera deux mois comme sellier. A-t-il voulu parler à l’empereur ?
7 : L’abbé Arnoux, chargé par la famille royale de tirer les vers du nez du régicide, meurt à 28 ans le jour de l’ouverture du procès Louvel ! (d’une maladie poitrinaire, officiellement).
8 : Louvel écrit : je n’ai pas déshonoré ma Nation, je n’ai pas déshonoré ma fille. N’ayant pas d’enfant, la fille de Louvel est-elle la Nation ? (texte lu aux pairs de France).
9 : Louvel ressemble étrangement à Joseph II d’Autriche, oncle de Louis XVII (test réalisé sur quinze personnes – onze ont mis Joseph II en premier, et François II en second, cousin de Louis XVII – sur vingt portraits de même taille).
Les oreilles de Louis XVII et de Louvel présentent de fortes ressemblances.
10 : Louis XVIII ordonne une messe à la mémoire de Louis XVII pour le 8 juin 1821, soit un an et un jour après la mort du régicide. (cérémonie annulée). C’est la première fois que Louis XVIII ordonne cela.
11 : En 1816, Louis XVIII fait effectuer des recherches sur les restes de Louis XVII au cimetière Sainte-Marguerite. Le jardinier en chef des jardins du Luxembourg, Toussaint Charpentier, déclare au préfet Anglés qu’au moment de l’enterrement de l’enfant du Temple, on lui fit creuser de nuit une fosse au cimetière de Clamart pour recevoir un petit cercueil. Une personne de la Municipalité aurait déclaré que le petit Capet aurait bien du chemin à faire pour retrouver sa famille.
Ce Charpentier est également employé à Trianon. Son fils en tant que jardinier en chef à partir de 1824. Ces gens connaissent la marraine de Louvel, Madame Belleville. Curieux !
12 : Les restes de Louvel sont transférés dans une fosse commune, mais bien vite, on les exhume et les transporte dans un lieu toujours inconnu. Volonté de Louis XVIII de ne pas créer un lieu de pèlerinage républicain, ou d’inhumer Louvel dans une tombe royale ? (il existe des emplacements vides à la basilique de Saint-Denis).
13 : Le comte de Vaisons (Le Roi perdu, de l’académicien Octave Aubry), qui n’a jamais existé, (mais le général-marquis de Bonneval correspond à son profil) arrête son enquête diligentée par Louis XVIII à la mort de Louvel en juin 1820.
14 : Louis XVII se blessa aux parties génitales en jouant au cavalier avec un bâton, ceci lorsqu’il était encore avec sa mère, sa tante et sa sœur. On lui mit un suspensoir. Louvel avait également un suspensoir. Il avait été réformé de l’Artillerie de la Garde Impériale en 1806 pour varicocèle :
« La varicocèle testiculaire est une pathologie bénigne qui se caractérise par une dilatation des veines au niveau du cordon spermatique. Elle peut causer des problèmes de fertilité chez l’homme.«
Il se pourrait qu’il y ait eu une erreur de diagnostic, de conséquences de l’accident.
Voici l’explication de l’affaire selon Jean-Claude Pilayrou :
Robespierre a enlevé le Dauphin et l’a confié au père Louvel. On sait ce qui adviendra par la suite de Robespierre.
Barras a enlevé le remplaçant de Louis XVII. Caché à St Domingue, il meurt en 1803 ( ?).
Louis XVIII fit faire une enquête par Bonneval. Entre temps, Louvel tue le duc de Berry.
Louis XVIII, qui est perturbé par les apparitions continuelles de faux dauphins (Hervagault, Bruneau, Dufresnes…), se demande si Louvel n’est pas Louis XVII, qui vient de se venger de son état de roi déchu en tuant Berry. Il fera faire une enquête approfondie. Louvel n’ayant pipé mot, il le laissera aller à la guillotine.
Aujourd’hui comme hier, les héritiers du secret gardent le silence. Et l’analyse ADN de 2000 fut un pieux mensonge, destiné à protéger la mémoire du roi assassin: Louis XVII.
Pour Jean-Claude Pilayrou, Louvel serait Louis XVII
Le 17 août 1833
Âgée de soixante-dix ans, Madame Agathe Mottet Rambaud, fait la déposition suivante :
« Dans le cas où je viendrais à mourir avant la reconnaissance du Prince, fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette, je crois devoir affirmer ici par serment, devant Dieu et devant les hommes, que j’ai retrouvé, le 17 août 1833, Monseigneur duc de Normandie, auquel j’eus l’honneur d’être attachée depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792, et comme il était de mon devoir d’en donner connaissance à S. A. R. Madame la duchesse d’Angoulême, je lui écrivis dans le courant de la même année. Je joins ici la copie de ma lettre. Les remarques que j’avais faites dans son enfance sur sa personne ne pouvaient me laisser aucun doute sur son identité partout où je l’eusse retrouvé. Le Prince avait, dans son enfance, le col court et ridé d’une manière extraordinaire. J’avais toujours dit que si jamais je le retrouvais, ce serait un indice irrécusable pour moi. D’après son embonpoint, son col ayant pris une forte dimension est resté tel qu’il était, aussi flexible. Sa tête était forte, son front large et découvert, ses yeux bleus, ses sourcils arqués, ses cheveux d’un blond cendré, bouclant naturellement. Il avait la même bouche que la Reine et portait une petite fossette au menton. Sa poitrine était élevée; j’y ai reconnu plusieurs signes alors très-peu saillants, et un particulièrement au sein droit. La taille d’alors était très cambrée et sa démarche remarquable. C’est enfin identiquement le même personnage que j’ai revu, à l’âge près. Le prince fut inoculé au château de Saint-Cloud, à l’âge de deux ans et quatre mois, en présence de la Reine, par le docteur Joubertou, inoculateur des Enfants de France; et de la Faculté, les docteurs Brunier et Loustonneau. L’inoculation eut lieu pendant son sommeil, entre dix et onze heures du soir, pour prévenir une irritation qui aurait pu donner à l’enfant des convulsions, ce qu’on craignait tous que ce sont les mêmes marques que j’ai retrouvées, auxquelles on donna là forme d’un triangle. Enfin j’avais conservé, comme une chose d’un grand prix pour moi, un habit bleu que le Prince n’avait porté qu’une fois. Je le lui présentai en lui disant, pour voir s’il se tromperait, qu’il l’avait porté à Paris. «Non, Madame; je ne l’ai porté qu’à Versailles, à telle époque. » Nous avons fait ensemble des échanges de souvenirs qui, seuls, auraient été pour moi une preuve irrécusable que le Prince actuel est véritablement ce qu’il dit être : l’orphelin du Temple. »
Agathe Mottet – Veuve de Rambaud, attachée au service du Dauphin, duc de Normandie, depuis le jour de sa naissance jusqu’au 12 août 1792.
En 1837
« Je déclare ici et sur mon honneur et devant Dieu que le fils de Louis XVI est mort dans mes bras dans la tour du Temple. … Toute ma vie j’ai dit la vérité, ce n’est pas quand j’atteindrai [la fin] que je la trahirai.»
Etienne de Lasne, dans une lettre à A. Beauchesne
Au début de 1841
Sous la signature de Gozzoli, rédacteur-gérant de La Voix d’un proscrit, Laprade (qui avait été affublé du titre de « président du conseil de l’Eglise catholique évangélique« ) et cinq autres compères, publièrent un désaveu cinglant de leur adhésion à la cause naundorffiste. (Nous savons par l’abbé Laprade que Morel de Saint-Didier lui-même, sans signer le document, en partageait l’esprit.) Ils y rapportent comment, ayant enquêté sur le passé du bonhomme, ils ont été contraint de conclure à la supercherie. Ils mettent en cause la réalité des apparitions, la moralité personnelle de leur ancien «roi», soulignent les contradictions de la doctrine – bref, ils sapent l’édifice qui les a portés pendant tant d’années.
Le 22 juin 1841
L’abbé Laprade écrivait une lettre sévère, à la mesure de sa tristesse et de ses remords :
« Pauvre sire de Normandie qu’as-tu fait de ta baguette, que sont devenus tes talismans imaginaires?(…) quand je songe à mes dispositions d’autrefois et à mes sentiments d’aujourd’hui, je suis si honteux et humilié de mon passé que je voudrais être trois fois taupe pour ne plus le voir et trois mille fois lièvre pour ne plus le rappeler. Quoi! des hommes généreux et intelligents avaient pu planter un drapeau près de l’hôtel de Camberwell? Ils avaient pu faire à cet homme l’honneur de le regarder comme pouvant être de quelque poids dans la balance des destinées humaines…ma foi, ma foi; convenons-en, nous étions en démence. Aussi, dès que j’ai eu aperçu le bout des oreilles de notre Guillot je l’ai fui à toutes jambes et je cours encore..»
Le 10 août 1845
« Nous soussignés, docteurs-médecins en fonctions à Delft, Jean Soutendam et Jean-Gérard Kloppert, autrefois Officier de Santé, et comme tel adjoint comme médecin consultant par feu Son Excellence le ministre List, déclarons avoir traité en 1845 celui qui se nommait Charles-Louis de Bourbon duc de Normandie.
« Beaucoup d’intérêt fut témoigné à l’auguste malade. Des bulletins furent envoyés journellement sur l’état de sa santé au ministre susdit, qui de temps en temps vint en personne prendre des informations. […] Les pensées du malade s’arrêtaient principalement sur feu son malheureux père, Louis XVI, sur le spectacle effroyable de la guillotine ; ou il joignait les mains pour prier et demander, avec des paroles entrecoupées, de bientôt rejoindre au ciel son royal père. Presque jusqu’au dernier soupir ce fut ainsi. Et Charles-Louis de Bourbon mourut en notre présence le 10 août 1845. »
On a retrouvé sur le corps du dénommé Naundorff les sept spécificités corporelles qu’auraient eues Louis XVII et qui étaient connues et témoignées selon certains, et également archivées dans les rapports médicaux (Archives de Versailles), sans que les naundorffistes ne montrent cette pièce en question.
Cette pièce importante se trouve à Deft : Archives Notariales de Deft et copie conforme au Archives Bourgmestrales – volume 46, folio 35, verso 3 à 7.
Voici le procès verbal :
« Aujourd’hui 12 août 1845, le soir à 6 heures et à la requête de Charles Edmond de Bourbon, aussi connu sous le nom de Naundorff, demeurant à Deft en la rue dite de Voostrat, section 5, n° 85, accompagné de M. Cornélis Théodorus Van Meurs, major d l’Artillerie, chevalier du Lion néerlandais, du Maître Jacobus Van Buren, avocat et juge demeurant à…et connu de moi, notaire.. »
« Moi, notaire, Simon Adrianus Sholten, notaire de l’arrondissement de la Haye, résidant à Deft, assisté de Messieurs Carel Heyne den Back, employé au secrétariat de la Vielle et de Adriaan Mardus Schagen Van Leewen, employé à mon étude, connus de moi, notaire, je me suis rendu à une maison située à l’Oude-Deft, section2, n°62 à Deft où le requérant m’a montré dans une des chambres un cadavre qu’il déclara à moi, notaire, être celui de Charles Louis, Duc de Normandie ( Louis dix-sept), ayant été connu sous le nom de Charles Guillaume Naundoff, né au Château de Versailles en France, le 27 mars 1785 … »« Le requérant, Charles Edmond de Bourbon, fait cette déclaration en présence des ci-dessus nommés Van Meurs et Van Buren qui déclarent par ceci reconnaître le cadavre montré pour celui du père du requérant. »« Ainsi furent présents : M. Jean Sontendam, docteur-médecin, demeurant à Deft, Louis Snabilié, docteur-médecin, premier officier de Santé de la 2ème classe, chevalier de l’Ordre Militaire de Guillaume, Joannes Gerdus Kloppert, docteur médecin et accoucheur, officier de santé de 2ème classe, demeurant à Deft, connus de moi, notaire lesquels Messieurs déclarèrent reconnaître le cadavre montré pour celui de la personne qu’ils on traitée médicalement en sa dernière maladie. »
« Et le requérant a prié les médecins susnommés d’expliquer leurs expériences des signes extérieurs qui caractérisaient le cadavre et après avoir examiné à cette fin le cadavre prescrit, les nommés médecins ont noté les signes suivants :.. »
Sont énumérées les sept spécificités corporelles qu’avaient Louis XVII :
1. Le naevius maternus à la cuise ;
2. L’excroissance du sein droit ;
3. Le cou très ridé ;
4. Disposition des deux incisives sortantes « en lièvre » au milieu de la denture inférieure ;
5. Forme du front large et fort, fuyant et s’évasant ;
6. Disposition des yeux bleus avec leurs arcades sourcilières arquées avec un écartement si précis « qu’il comportait entre eux une distance égale à la longueur d’un œil » ;
7. Anomalie de la forme du lobe des oreilles, notamment de l’oreille droite (nettement visible sur la photo représentant Naundorff su son lit de mort et identique à celle d’un portrait de Louis XVII enfant).
Ce constat se termine ainsi :
« Le requérant m’a prié, moi, notaire, de donner acte en minute de tout ce qui précède et qui est ci-dessus mentionné et, après lecture faite au requérant, aux témoins assistants, aux médecins sus-nommés et aux témoins ici-présents : Carel Heyne Van Back et Adriaan Marius Schagen Van Leeuwen, tous deux ci-dessus nommés, toutes ces personnes ont signé. »
Signé :Charles Edmond de Bourbon, Van Meurs, Van Buren, Jean Soutendam, Dr Snabilié, Dr Kloppert, C. Heyne den Back, A.M. Scagen Van Leewen, S.A ?. Scholten, notaire. »
Le receveur : signé : V.D. Mandèle « Pour signé conforme : signé SA Scholten, notaire »
Le cas Richemond
Claude Perrin naquit à Lagnieu (Ain) le 7 septembre 1786. Il est bossu, ayant une épaule plus haute que l’autre. C’est d’ailleurs lui-même qui le précise lorsqu’il doit se défendre devant la Justice de ses supercheries. Il est cependant soldat et ceci lui donne le goût de la tenue militaire qu’il arbore fièrement. Il parle de lui à la troisième personne, ce qui démontre un dédoublement de la personnalité ou une haute opinion de soi, les deux possibilités ne s’excluant l’une l’autre.
On ne sait d’où lui vient l’idée du nom qu’il adopte (« Richemond »), du titre qu’il s’accorde (« baron ») ni, enfin, de l’idée de jouer le rôle d’un faux Dauphin. Il est vrai que la rumeur de l’évasion de Louis XVII battait son plein dans les campagnes de France et Claude Perrin, presque du même âge que Louis XVII, à un an près, doté de cheveux châtain clair, entrevoit peut-être un autre rôle à tenir sur la scène de la vie que celui auquel le destin le prédispose. En 1831, il écrit et publie lui-même un livre : « Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI », puis en 1846 il publie «Mémoires d’un contemporain », livre qui contredit le premier.
Dans le premier récit (« Mémoires du Duc de Normandie, fils de Louis XVI »), le faux Dauphin Richemond n’indique ni date, ni nom, ni désignation précise d’aucun lieu susceptible de décrire les situations vécues par le vrai Roi ; il ne sait même pas quand, à quelle date et comment eut lieu l’évasion du Temple ; ses propos sont contradictoires mais, apparemment, cela et ne le gênait pas pour persévérer dans ses mensonges. Ainsi désavoua-t-il son premier livre : par exemple, il supprime l’épisode dans lequel il vécut chez « les Sauvages ». ; il avait dit qu’il avait passé « plus de six ans, tout seul, nu comme eux, le corps peint, etc. Ces Sauvages s’appelaient les Mamelucks. ». Il prétend, de plus, avoir eu la petite vérole dans la Tour du Temple ; or Louis XVII avait été inoculé et n’eut jamais cette maladie.
« Richemond » fut reconnu par des personnes qualifiées : madame Bequet, qui avait été au service de Marie-Antoinette jusqu’au 10 août 1792; madame Fillette, qui avait été fille de garde-robe du Dauphin ; madame de Rambaud, berceuse du Dauphin… Ce sont là, à l’évidence, les déclarations de Perrin qui, en réalité, ne reçut jamais un témoignage de reconnaissance réelle, écrit, daté et signé sous serment et déposé devant une Instance officielle quelconque (Tribunal, Police, Notaire..).
Il raconte dans « Mémoires d’un contemporain » que trois ans auparavant, en 1843, il rencontra madame de Rambaud, que celle-ci le reconnut bien évidemment en tant que Louis XVII mais comme elle avait auparavant reconnu aussi en Naundorff le Roi, qu’elle aurait décidé de « s’en remettre au Ciel pour faire un choix » (ibidem – page 370). Il est patent que ces propos sortirent du cerveau déséquilibré de Perrin et non de la bouche de Madame de Rambaud. Il précise qu’il « n’a pas revu cette dame depuis ce jour », ce qui est étrange car cette reconnaissance était très importante pour Madame de Rambaud ; aurait-elle évité de revoir celui qu’elle avait chéri ?
La petite fille de de madame de Rambaud, dans une lettre datée du 26 janvier 1884 et adressée l’Abbé Laurent (curé de la paroisse de Sainte Marguerite sur Duclair), écrivit :
« Je m’empresse de satisfaire votre demande. Madame de Rambaud, ma grand-mère, a, en effet, reconnu Louis XVII dans la personne du prétendant Naundorff et n’en a reconnu d’autres. Richemont, il est vrai, s’est fait présenter à elle ; mais à ma connaissance il n’en est rien résulté pour ce personnage de cette entrevue….son frère (le frère – Charles- de son beau-père, Casimir Verger) a connu M. de Joly, que j’ai vu moi-même chez ma grand-mère et qui, comme elle, a attesté ses convictions…Signé L. Verger, née de Rambaud »
Madame de Rambaud vivra encore dix années après la supposée rencontre avec « Richemond » ; elle meurt le 18 octobre 1843 en n’ayant jamais renié la reconnaissance en Naundorff le Roi qu’elle avait élevé pendant sept années. La petite-fille de Madame de Rambaud, Ernestine de Rambaud, dans une lettre qu’elle écrivit en juin 1849 affirma la fidélité de sa grand-mère à cette reconnaissance capitale : « Encore aujourd’hui elle (Madame de Rambaud) ne doute pas de son identité (Louis XVII=Naundorff)».
Comme Hergavault, Richemond sait séduire et comme de très nombreuses personnes espéraient retrouver Louis XVII, elles acceptèrent de le rencontrer mais jamais elles ne le reconnurent vraiment ; une seule rencontre et aucune reconnaissance. Lors du procès de Perrin, la Cour ne retint que les dépositions écrites de Mesdames Bequet et Fillette (respectivement le 20 décembre 1842 et le 15 juillet 1844) dans lesquelles elles déclarent seulement avoir rencontré « Richemond » une seule fois, sans préciser une reconnaissance quelconque.
Claude Perrin meurt à Gleize (Rhône) le 10 août 1853, huit ans jour pour jour après Naundorff…
Perrin/Richemond, Hergavault, Bruneau, Williams, Mévès… tous ces « faux Dauphins » avaient des yeux marrons et seul, un « faux Dauphin » avait les yeux bleus : « Naundorff ». Louis XVII avait les yeux bleus…
En 1943
André Castelot soumet au Docteur Locard, directeur du laboratoire de Police Technique de Lyon, une boucle des cheveux du «Dauphin», propriété de l’abbé Ruiz, jointe à une mèche de Naundorff, qui lui avait été remise par le baron de Genièbre. Le but était de chercher si les cheveux correspondent ou non. Selon les naundorffistes, la confrontation, pratiquée d’après des microphotographies, donnerait des résultats époustouflants : les deux échantillons comporterait la même excentration du canal médullaire, un caractère jugé très rare par l’expert lyonnais. L’identité d’origine des deux mèches de cheveux semble irrécusable : pour les partisans de Naundorff, comment croire que cette excentration, si exceptionnelle, est due à la seule intervention du hasard?
En 1947
Alain Decaux (1925-2016) publie son premier livre, Louis XVII retrouvé, et soutient la thèse survivantiste _ ou naundorffiste_ qui perd par la suite tout crédit chez les historiens. Le futur ministre se ravisera d’ailleurs de cette conclusion de jeunesse.
En septembre 1950
Le cercueil de Naundorff est ouvert à Delft, sous la conduite du Docteur Hulst, médecin expert près les tribunaux hollandais. Castelot, pour s’assurer des conclusions de la première analyse, prie ce dernier d’envoyer à Locard une mèche provenant directement du squelette. Il fait bien. On procède à une seconde expertise.
Le 4 mai 1951
La sentence de la trichoscopie tombe, terrible pour le camp survivantiste. Locard écrit dans son rapport :
« Ces cheveux, d’origine indiscutée, ne présentent pas l’excentrement caractéristique. Ainsi donc les cheveux de Naundorff (…) ne sont pas identiques à ceux de Louis XVII». Le Dr Locard, qui avait entre-temps reçu, par le biais du marquis de Tinguy, d’autres cheveux provenant de Louis XVII qu’il a également analysés, ajoute qu’il semblait établi «que le Dauphin présentait une anomalie capillaire caractéristique» non retrouvée chez Naundorff. Les cheveux n’appartenaient pas à la même personne. La «preuve scientifique», qui, c’est le cas de le dire, n’avait tenu qu’à un cheveu, tombait à l’eau.»
Le spécialiste lyonnais confiera plus tard à Castelot que les deux premières mèches étaient si semblables, qu’il était fort possible que toutes deux aient été prises sur le crâne de Louis XVII.
En 1975
La relique du cœur Pelletan, récupérée par de la famille lointaine de Louis XVII, finit par être donnée à la basilique de Saint-Denis par la princesse Massimo.
En 1996
Après cinq ans d’enquêtes, Paul-Éric Blanrue a conclu à l’imposture du dénommé Naundorff (Le mystère du Temple, la vraie mort de Louis XVII, Claire Vigne éditrice, 1996, p. 229-287) et à la réalité de la mort du petit Roi à la date mentionnée par l’état civil. Il a repris cette thèse dans la préface des Souvenirs de la duchesse d’Angoulême (Communication et Tradition, 1997) dont il a établi l’édition critique, ainsi que dans une dizaine d’articles. Ni Alain Decaux, ni André Castelot, ni personne, n’y a répondu.
En 1998
Des analyses sont menées par l’Université de Louvain et le CHU de Nantes à partir de cheveux et de fragments d’humérus de Naundorff et de cheveux des descendants des sœurs de Marie-Antoinette. Conclusion : les restes de Naundorff ne sont pas ceux du dauphin Louis XVII.
En 1999-2000
L’historien – journaliste Philippe Delorme contacte la noblesse française afin que le cœur du petit décédé le 8 juin 1795 soit analysé avec la méthode ADN. Le résultat est que le cœur examiné était celui d’un parent de Marie-Antoinette, donc en principe de Louis XVII.
Monsieur Delorme a officiellement mis un terme à cette énigme; mais certains avancent que le cœur est celui du frère de Louis XVII, décédé en 1789. Le cœur embaumé de cet enfant a disparu sous la Restauration. Une bataille acharnée se déroule depuis entre Mr Delorme et les partisans de l’autre thèse. Mais une médecin-légiste a affirmé au cours d’une émission diffusée en janvier 2007 qu’elle serait bien en peine de faire la différence entre un cœur embaumé (frère de Louis XVII) et un cœur non embaumé (cœur du décédé le 8 juin 1795).
Monsieur Delorme devait rechercher le cœur du frère ainé de Louis XVII. Il n’y a pas eu de suite : la tombe de Louis-Joseph a, en effet, été ouverte et vidée le 16 octobre 1793 !
En 2004
De nouveaux prélèvements sont effectués sur le squelette de Naundorff. On procède à des analyses en Hollande et en Autriche, mais la famille dite de Bourbon n’a pas fait connaître les résultats.
Ce semble éloquent …
Le 8 juin 2004
Pour le professeur Jean Tulard, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, appelé par le ministre de la Culture à donner son avis sur le dépôt du cœur de Louis « XVII », l’analyse de l’ADN du cœur, conjuguée avec l’enquête menée sur son origine et les péripéties de son histoire, est suffisante pour attester de la mort du prince au Temple.
Sources :
Jacques-René Hébert est guillotiné : lors de son trajet de la conciergerie à la place de la Révolution, il est hué par le peuple. Quand vient son tour de « jouer à la main chaude » (« être guillotiné »), Hébert doit être traîné à l’échafaud : sa tête montrée par le bourreau est saluée par des quolibets.
Il est vraisemblable que le Comité de salut public, au moment ou la tête de Hébert roule sur l’échafaud, est fixé sur la situation réelle au Temple. Après la mort des hébertistes le Comité de sûreté générale regarde comme inutile la surveillance particulière réduite à deux gardes nationaux pour la famille royale (trois personnes).
Si l’enfant est mort avant la chute de la Commune hébertiste, les mêmes autorités – la Commune de Pache et Chaumette puis le Comité de salut public -, en admettant que tous soient au courant, feraient en logique tout pour cacher ce décès au public. Mais cela ne prouve pas qu’il y ait eu substitution.
Les 27 et 29 mars 1794
Les 7-9 germinal An II une séance de la Commune de Paris :
«On nomme les membres qui doivent aller au Temple y maintenir l’ordre et la tranquillité; le citoyen Cressant est proposé: plusieurs s’opposent à son admission et lui reprochent d’avoir plaint le sort du jeune Capet (sic), d’avoir même recueilli les noms de ceux qui montent journellement au Temple ». Après délibération le conseil arrête l’exclusion de Cressant du conseil, renvoyé à l’administration de police et scellés sur ses papiers (il ne sortira de prison que plus tard). »
Moniteur XX, 69 et 154
On effectue des travaux d’isolation et de confinement strict de l’enfant pour prévenir tout enlèvement. Quatre commissaires sont nommés à cet effet (Moniteur XIX, 239). Depuis cette date sept membres du conseil général de la Commune forment la nouvelle commission spéciale de la surveillance du Temple.
Le Roi semble mieux traité. voir Ng p 564
Le 8 mai 1794
On vient chercher Madame Elisabeth au Temple pour la conduire à la Conciergerie.
En mai 1794
Déposition de Barelle
D’après une dépêche conservée dans les Dropmore papers, Robespierre aurait sorti Louis-Charles (peut-être un autre enfant) de la prison du Temple et l’aurait conduit à la forteresse de Meudon en mai 1794, répétition d’une opération qui pourrait avoir lieu au cas où les armées ennemies encercleraient Paris. On sait que le vieux château de Meudon est alors devenu un arsenal et une réserve de poudre. Si l’information donnée par l’informateur du gouvernement anglais est exacte, on trouve une logique immédiate qui tient à l’inquiétude de Robespierre. Celui ci avait de bonnes raisons de penser que tôt ou tard les armées coalisées encercleraient la capitale. Cette hypothèse n’est pas à rejeter absolument. Pour négocier une porte de sortie pour lui et les membres des comités on peut penser qu’ils avaient l’intention de mettre dans la balance la vie même de l’enfant du Temple qu’on transporterait hâtivement du Temple à Meudon, avec la menace dissuasive d’une explosion des réserves de poudre et le sacrifice de l’otage (cette hypothèse a davantage de sens qu’un nébuleux projet d’exfiltration de cet enfant dont Robespierre se serait rendu complice… mais l’information est peut-être simplement inexacte. Quoi qu’il en soit de ce pont particulier qui a donné lieu à de nombreuses spéculations fantaisistes, les dépêches, issues des Dropmore papers (Public Record office à Londres), sont utilisées et discutées par MM. de Beaucourt et Gustave Bord, historiens «royalistes» qui contrairement à MM. Alphonse Aulard et Albert Mathiez (dont les théories y sont parfois mises à mal), pensent qu’elles contiennent des vérités. Comme souvent, la «vérité», justement, est entre deux. Les informateurs des cabinets étrangers se trompent ou sont mal renseignés sûrement plus qu’ils ne cherchent à tromper (comme cela a parfois été exagérément soutenu par Jacques Godechot).
Le 10 mai 1794
Exécution de Madame Élisabeth.
Madame Royale reste seule au Temple, au dessus de chez son petit frère…
On sait que la Commune de Paris et la haute administration du ministère de la guerre, à savoir Bouchotte, Ronsin, Vincent, Turreau, Quétineau, Hanriot, Santerre etc. sont, en ce même hiver 1794, au moment de tenter un coup d’état militaire contre la Convention et ses comités tout puissants qu’ils critiqueent. Ils désirent imposer à la France entière le gouvernement de Paris et de ses sections, appuyés sur un conseil de régence dont Jean-Nicolas Pache (1746-1823) serait Grand Juge. On sait aussi que le général Henriot à la veille de la révélation du complot «pachiste» par (selon la tradition) le sieur Souberbielle, lui même médecin de Robespierre qui lui a fait part de ses craintes, est pardonné par Robespierre. Celui-ci demande aussitôt à Saint-Just et aux comités de gouvernement de reprendre la Commune et sa force armée en main, de décapiter sans délai le mouvement popularisé par Hébert et d’épurer la Commune «gangrenée par l’étranger» (Pache est arrêté et remplacé par Lescot de Fleuriot).
En mai, l’enfant du Temple semble se bien porter, ce qui n’est pas le cas de sa sœur qui doit être accablée de chagrin depuis le départ de sa tante Elisabeth dont elle ignore le sort :
Ceux qui ont eu l’occasion de voir Louis XVII dans le lieu où les tyrans le retiennent en captivité s’accordent à dire qu’il est de la plus belle figure. On le coëffe d’un bonnet rouge, on l’occupe à faire des souliers, on lui paye son travail avec des sous de fonte des cloches, et on le laisse jouer avec des polissons. Quant à madame, sa sœur, elle a dépéri d’une manière effrayante, on la fait travailler à des chemises pour la nation.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 12 juin 1794, p.1340
Le 11 juin 1794
Le citoyen Desault chirurgien major du grand hospice de l’humanité de Paris (est) arrêté au moment où il donn(e) sa leçon et conduit à la Maison d’arrêt du Luxembourg. Le citoyen Manoury (est) nommé pour le remplacer provisoirement.
Extrait des feuilles de Paris du 5 juin (1794), n°164 in Journal de la Guerre du 11 juin, p.1402)
Le 27 juillet 1794
Chute de Maximilien de Robespierre ( né le 6 mai 1758), il est guillotiné le lendemain.
… Antoine Simon fait partie du convoi de la guillotine.
Marie Jeanne Aladame (1745-1819) la veuve Simon, ancienne domestique entrée aux Incurables en 1796, assurera toujours que l’enfant mort en janvier 1794 fut remplacé, et cela jusque sous la Restauration où, pressée par Decazes elle soutiendra une version contraire. Jusqu’à sa mort, le 10 juin 1819) elle assure néanmoins aux religieuses qui s’occupent d’elle que l’enfant du Temple a été substitué (remplacé), alimentant une rumeur qui a marqué l’historiographie légitimiste.
Jusqu’au 28 juillet 1794
Louis-Charles est enfermé au secret dans une chambre obscure, sans hygiène ni secours, pendant six mois. Son état de santé se dégrade, il est rongé par la gale et surtout la tuberculose. Il vit accroupi. Sa nourriture lui est servie à travers un guichet et peu de personnes lui parlent ou lui rendent visite. Ces conditions de vie entraînent une rapide dégradation de son état de santé. L’isolement total dans lequel il est placé laisse planer un certain mystère et donne l’occasion à l’imagination populaire de soulever l’hypothèse de substitution de l’enfant et de son exfiltration, donnant naissance au « mythe évasionniste et survivantiste ».
Le 28 juillet 1794
Le député Barras découvre ainsi un enfant mutique, brisé psychologiquement. Les comités de salut public et de sûreté générale nomment Laurent, membre du comité révolutionnaire de la section du Temple, pour le garder, lui et sa sœur.
Son sort s’améliore relativement, mais le prisonnier de la tour du Temple est rongé par la tuberculose, ce qu’omet de signaler Laurent lorsqu’il écrit, sur le bulletin de la tour du Temple, que les prisonniers « se portent bien ».
Après le 27 juillet 1794
Après le 9 thermidor, Barras fait désigner comme garde le citoyen Laurent, ancien président de la section du Temple, avec ordre d’améliorer les conditions de détention de l’enfant.
Le 9 novembre 1794
Jean-Baptiste Gomin (1757-1841), fils d’un tapissier de l’île Saint-Louis, est nommé adjoint de Laurent et devient gardien des enfants de France à la prison du Temple. L’enfant est décrit en bonne santé mais il doit certainement y avoir des signes avant coureur de sa maladie qu’ils ne perçoivent pas.
Le 19 décembre 1794
C’est seulement lors de la visite, le 19 décembre 1794 (et non en mars 1795), des citoyens représentants du Comité de sûreté générale Harmand, Mathieu et Reverchon qu’on constaterait, prétendra beaucoup plus tard Harmand, des anomalies physiques (tumeurs au genou droit et au poignet gauche) et psychologiques (mutisme).
Entre décembre 1794 et mai 1795
Aucune disposition sur la santé de Louis Charles n’est prise par l’exécutif. L’indifférence semble prédominer.
Cette indifférence à soigner l’enfant pourrait bien avoir un rapport avec les négociations de paix en cours avec l’Espagne qui réclame, entre autres, les deux enfants de Louis XVI. La République craint, elle, d’abandonner son otage qui permettrait à ses ennemis de relancer la coalition et de réactiver la guerre pour organiser une restauration de leur choix. La mort de l’enfant arrangerait la haute politique française.
Retrouver les portraits authentiques du petit Roi relèverait, si l’on en croit tout ce qui a été dit, écrit et publié, de l’enquête policière. Eh pourtant, c’est bien le peintre Greuze de Tournus qui est la piste la plus intéressante. En 1791, avant l’incarcération de la famille royale, il a fait un premier portrait de l’enfant alors qu’il n’avait que six ans (en dessous, à gauche). Il n’est pas besoin d’être un grand spécialiste pour constater une ressemblance probable avec le portrait oublié que j’ai replacé au milieu, compte tenu, bien entendu, qu’en quatre ans, un visage d’enfant s’allonge mais que certains détails ne changent pas (la bouche avec sa lèvre inférieure déjà bourbonienne, la chevelure, le nez, les yeux). L’enfant a pourtant bien changé. Les épaules sont tombantes, la poitrine étroite et rentrée, le visage émacié. Les joue