Les chiens de Marie-Antoinette

Image de Marie-Antoinette, Reine d'un seul amour (1989) de Caroline Huppert

 

Les chiens représentent la Fidélité et furent de tous les temps un gage d’amitié à offrir avec son cœur même parmi les grands de ce monde …

La mère de Marie-Antoinette, Marie-Thérèse, aimait tant les chiens qu’elle avait un épagneul favori préservé pour l’éternité . Si vous vous trouvez en Autriche , le chien qui semble être un Phalène est exposée au Musée d’Histoire Naturelle de Vienne :

Le chien empaillé de Marie-Thérèse

Les chiens sont présents en filigrane tout le long de la vie de Marie Antoinette. Epagneuls nains de la famille Habsbourg-Lorraine :

Portrait de la famille impériale par Martin Van Meytens, 1756

Il en va de même en France :

Le prince de Condé avait son « gouverneur des canaris », les rois de France avaient leur capitaine des levrettes, qui avait soin des bichons et des carlins pour lesquels le grand Roi avait une prédilection particulière.
Ces animaux familiers logeaient dans des niches tendues de velours
 dans le « cabinet aux chiens » proche de la chambre du roi . Louis XIV donnait lui-même du biscuit à ses chiens deux fois par jour.
Le porte-arquebuse –
c’était sous Louis XIV le sieur Antoine, un vieux serviteur — assistait le capitaine des levrettes et prodiguait lui aussi ses soins aux petits « chiens damerets ».

Elisabeth-Charlotte de Bavière (1652-1722), «La Palatine», ancêtre paternelle de Marie-Antoinette, vit entourée de ses chiens :

Les Épagneuls de la Princesse Palatine

Dans ses lettres, elle évoque le nom des compagnons à poils : «Le parfum des chiens n’est pas ce qui manque ici dans mon cabinet. J’en ai toujours sept autour de moi : Spatou, Charmante, Charmion, Toubille…. ».
« Titi se couche à côté de moi sur la table où j’écris ; MilleMillette se couche sous ma jupe ; Charmion, sa mère, aboie jusqu’à ce qu’on lui place une chaise à côté de moi sur laquelle elle s’installe ; Charmante se couche de l’autre côté de ma jupe ; Stodille est assise en face de moi et Charmille est couché sous mon bras. Ils passent ainsi presque toute la journée ».

Elisabeth-Charlotte de Bavière
André Ferréol est la Palatine dans L'Echange des Princesses (2017) de Marc Dugain

 Les équipages des chasses de Louis XV

Chasse à courre de Louis XV enfant, par Pierre-Denis Martin

« De 1721, date de sa toute première chasse, à sa mort en 1774, Louis XV multiplie les équipages, ce qui lui permet de chasser plusieurs fois par jour, passant d’une meute à l’autre dès que les hommes, chiens et chevaux sont fatigués.
Afin de compléter l’équipage du cerf du Grand chenil de Versailles, le duc de Bourbon lui offrit en 1725 son équipage pour la chasse à courre du lièvre, que le Roi utilisa dès l’année suivante pour chasser le chevreuil.
En 1730, il crée un troisième équipage, la «petite meute du cerf». En 1738, l’équipage du daim, appelé «équipage des chiens verts», commence ses activités.
De 1749 à 1758, le Roi dispose d’un second équipage du chevreuil. Ces différentes meutes chassent quotidiennement, même en l’absence du Roi, afin de maintenir les chiens en haleine. Sans oublier l’équipage du sanglier, ceux des «lévriers de Champagne et levrettes de la Chambre» et des «chiens couchants de la Chambre», qui servent pendant les chasses à tir, les trois équipages de chasse au faucon, de moins en moins souvent utilisés, et l’équipage de chasse au loup, traquant les «bêtes» qui sévissent encore aux quatre coins du royaume.
En tout, le Roi possède jusqu’à onze équipages de chasse, pour un budget annuel d’environ 1 200 000 livres.»

Misse et Turlu, chiens de chasse de Louis XV (1725) par Jean-Baptiste Oudry

Louis XV connaît parfaitement tous les chiens de sa meute, à laquelle il prodigue des soins attentifs, au point de faire aménager dans ses appartements du château de Versailles le cabinet des chiens.

Un jury de journalistes anglo-saxons a décerné, le 26 mai, 2006 à Cannes, la Palm Dog à Mops, le toutou de Marie-Antoinette dans le film de Sofia Coppola. Le carlin a reçu un collier noir avec la mention «Palm Dog» gravée dessus. – (AFP.)

Plaque de collier de chien en argent avec l'inscription gravée : «Je suis au Roy» - XVIIIe siècle - Musée Lambinet (Versailles)

A Saint-Denis, les gisants des Reines de France ont à leurs pieds des chiens qui marquent leur fidélité à leur royal époux.

Marie-Antoinette aime les chiens. Elle en a eus plusieurs dont un petit Mops, une sorte de carlin, qu’Elle a souhaité faire envoyer de Vienne après Son mariage :

Images de Marie-Antoinette (2006) de Sofia Coppola

Le 16 mai 1770

Le Dauphin Louis-Auguste épouse l’Archiduchesse Marie-Antoinette d’Autriche.

Louis-Auguste, Dauphin de France par Louis-Michel Van Loo
Gravure du mariage de Marie-Antoinette avec le Dauphin, le 16 mai 1770
Marie-Antoinette peinte vers 1770 par Joseph Ducreux
Le mariage de Marie-Antoinette vu par Sofia Coppola (2006)
Le doguin ; Figures pour l'histoire des quadrupèdes par M. de Buffon. Tome I ; Jacques de Sèves ; Dessin, 1754 ; Photo : Bibliothèque Nationale de France

 

On évoque un autre carlin bien-aimé de Marie-Antoinette qui porterait le nom de Vadrouille.

La petite Madame Babet avec son carlin, par Drouais, vers 1770

Alors que certains des chiens de la Reine sont aux dires de Mercy «fort malpropres», Elle les loge dans Sa chambre et dispose pour eux de lits d’apparat miniatures – les comptes de Bonnefoy du Plan font état de la commande, en 1787, d’une niche en velours bleu à la requête de Marie-Antoinette. Sa belle-sœur parle du «sabat» que font, à Versailles, les deux chiens de la Dauphine, son propre chien, et ses deux oiseaux.

Niche, réalisée par Claude Sené, conservée au Met Museum
Chiffre de la Reine qui figure sur la niche du Met

Images de Marie-Antoinette (Canal +) avec Emilia Schüle

En juin 1774

Lors d’une réception à Versailles, Marie-Antoinette éprouve une grande sympathie pour Georgiana, duchesse de Devonshire (1757-1806). Les deux femmes se trouvent mille ressemblances et elles s’écriront et se reverront. En gage d’amitié, Georgiana offre à la Reine un barbichon aux longs poils blancs et soyeux qui ne quitte plus sa maîtresse.

Image des Années Lumière (1989) de Robert Enrico : le bichon de la Reine qui siège sur Son lit.
N'est-ce pas un barbichon qui est représenté ici aux pieds de Marie-Antoinette ?
Marie-Antoinette dans Son Cabinet doré par Benjamin Warlop

Est-ce pour signifier la fidélité dans l’amitié ? Marie-Antoinette offre autant de chiens en cadeau qu’Elle en reçoit.

Marie-Antoinette aurait donné un chien qui s`appelait Marcassin, au comte d’Esterházy (1740-1805).

Le chien du portrait de Marie-Antoinette qui est à Chambord
Gabrielle Lazure est madame de Lamballe dans Les Années Lumières (1989) de R. Enrico ; elle tient un barbichon dans ses bras dans cette scène du hameau de la Reine.
Valentin d'Esterházy par Benjamin Warlop

En 1780

«Le leonberg est le favori des Empereurs d’Autriche, et Marie-Antoinette en fait ramener un splendide en France, en 1780, qui mesure 3 pieds à l’épaule, soit près d’un mètre»


Les chiens de la Reine porteraient des colliers incrustés de pierres précieuses. Elle les nourrit de poulet.

En 1781

Au printemps 1781, la Reine est enceinte de Son deuxième enfant que tous espèrent être un mâle. On s’inquiète des chaleurs précoces. Agacée par cet affairement autour d’Elle, Marie-Antoinette cherche à s’en retrancher et fait aménager à cette fin le petit cabinet de repos à l’arrière de Sa chambre. Il est depuis lors connu sous le nom de Cabinet de la Méridienne.

Fauteuil de la Méridienne

Marie-Antoinette a un Spitz nain : ces chiens de manchons sont très à la mode.

Marie-Antoinette et Son chien Spitz par François Dumont
Marie-Antoinette et Son chien Spitz par François Dumont
Portrait d'un chien de Marie Antoinette qui s'appellerait Blue
Louis-Auguste Brun. les chiens de la Reine, détail, 1783
Etude de Spitz nain par Nicolas Huet (1820)
Marie-Antoinette au hameau avec une chèvre et un spitz (château de Champ-de-Bataille)
Portrait d'un pompon, par Delamarre, cadeau de la princesse de Lamballe en 1783 de Bothuri B collection...
Louis-Auguste Brun. Portrait de Marie-Antoinette à cheval, 1783

En 1785

 « La Reine charge Fersen de lui acheter un chien suédois et dès son retour en Suède (il est dit qu’il arrive à Stockholm le 5 août 1784) , il s’occupe de trouver un chien qui convient à Marie-Antoinette, comme nous le voyons par deux lettres qu’il adresse pendant l’automne 1784 à un certain M. de Boye :
1784. 22 oct. Mr de Boye… que le chien n’est pas arrivé comment je dois faire pour l’avoir.
9 nov. Mr de Boye. Prie de m’envoyer un chien qui ne fut pas petit, de la taille de ceux qu’avait Monsieur Pollett, dit que c’était pour la Reine de France.»

          Alma Söderjhelm

Louis-Charles par Benjamin Warlop

Ce grand chien suédois tout blanc, offert par Axel de Fersen, sera baptisé Odin.

Le petit Dauphin Louis-Charles, futur Louis XVII, a peur des aboiements. Il a pourtant un chien à Versailles nommé Mouflet.

Le cabinet doré

Le cabinet doré de Marie-Antoinette est agrémenté d’une quantité de petits objets d’art, notamment des vases en pierre dure et bois pétrifiés, des porcelaines d’Extrême-Orient, et surtout une importante collection de laques japonais. L’Impératrice Marie-Thérèse qui meurt en 1780, lègue à Marie-Antoinette sa collection de cinquante laques qui arrive à Versailles en mai 1781.

Boîte en forme de petit chien posée sur un socle rectangulaire à bords profilé et pieds incurvés de style chinois. Le couvercle et le corps de la boîte sont en laque noire recouverte de taches figurant le pelage de l'animal. Les yeux du chien sont en verre et les pupilles en laque noire. Le plateau de la table basse est orné de fleurs éparses, narcisses, chrysanthèmes, fleurs de prunier et de cerisier. D'autres fleurs ornent les pieds et le cadre de la table.

Le 5 octobre 1789

Des milliers de femmes du peuple venues de Paris marchent sur Versailles pour demander du pain.

Image de Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy

Le 6 octobre 1789

Vers cinq heures du matin, les appartements privés sont envahis. La Reine s’échappe en jupon par une porte dérobée. Plus tard, Sa présence est réclamée par la foule. Elle va au-devant du peuple, courageuse, au mépris de Sa vie.

Le matin du 6 octobre 1789 par Benjamin Warlop

La famille royale est ramenée de force à Paris. 

Les Tuileries dans Marie-Antoinette (1956) de Jean Delannoy
Départ du Roi de Versailles, par Joseph Navlet

La famille royale s’installe aux Tuileries et un semblant de vie de Cour se met en place.

En octobre 1789

« Dès les premiers jours aux Tuileries, Madame de Lamballe a l’idée, comme Fersen quelques années auparavant, d’offrir un chien en signe d’affection à la reine.  Elle choisit un épagneul, clin d’œil à son premier chien  ?  Thysbé.   Un Thysbé sans Pyrame. Connaissait-elle la destinée tragique des amants de la pièce de Théophile de Viau ? Thisbé préfère mettre fin à ses jours plutôt que de vivre sans Pyrame.  La triste destinée des amants de la mythologie grecque n’inspirait pas M.A. qui rebaptisa le chien Mignon.  Certains témoignages indiquent que c’est Madame Royale qui aurait débaptisé Thisbé pour éliminer toute référence à Fersen qu’elle déteste.  Nous ne saurons jamais. Peu importe. Mignon sera présent jusqu’à la fin et il partira avec Mousseline.»

Christine Orban,   Charmer, s’égarer et mourir (2016)

Pour moi, Madame Royale quittera le Temple et la France avec un chien qui se nomme Coco.Catriona Seth parle d’un épagneul blanc et feu, Thysbé, surnommé «Mignon», donné par madame de Lamballe pour égayer les Tuileries.

En 1791

Marie-Antoinette passe du premier étage au rez-de-chaussée, où Elle a Son cabinet de toilette, Sa chambre à coucher, Son salon. A l’instar de Versailles où Elle avait Sa chambre du rez-de-chaussée donnant sur la cour de marbre pour faciliter son repos du fait de Sa mauvaise jambe causée par un érysipèle en janvier 1781.

   La chambre de Marie-Antoinette (1975) aux Tuileries dans la                                       série de Guy-André LefrancL’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est MA-Casile-chambre-de-la-Reine.jpg.

Portrait présumé du chien de Marie-Antoinette, nommé Thysbé.

Aux Tuileries, c’est un petit chien couché dans Sa chambre qui sert à avertir la souveraine lorsque que quelqu’un s’approche. Madame de Tourzel déplore qu’une Reine de France soit réduite à de telles extrémités.

En 1792

Marie-Antoinette partage la tristesse de Fersen dont les deux chiens ont été empoisonnés.

Le chien préféré de Marie-Antoinette

Ce modèle de Sèvres représentant le chien favori de Marie-Antoinette a été trouvé dans Sa chambre aux Tuileries après Son départ pour l’Assemblée Nationale, puis les Feuillants et enfin…la Tour du Temple :

Ce petit chien était un cadeau de Fersen et s'appelait Odin

Cette figure en porcelaine de Sèvres représente le chien favori de Marie-Antoinette. Elle a été fabriquée sur ordre de la Reine par la Manufacture de Sèvres.

Est-ce le chien de Marie-Antoinette, dès les Tuileries puis au Temple ou le chien que madame de Tourzel récupère ( il l’aurait donc suivie à la prison de La Force et aurait échappé aux massacres de septembre 1792 … ) ou encore celui que Madame Royale emmène à Vienne ?

Elle est retrouvée dans Son cabinet de toilette aux Tuileries le 10 août 1792.

Cette figure se trouve aujourd’hui dans la collection de céramique avec Lady Rosebery à Dalmeny House, près d’Edimbourg. La collection a été héritée par le mariage de la famille Rothschild et était exposée à Mentmore Towers jusqu’en 1977.

Le 10 août 1792

Les Tuileries sont assiégées par les parisiens. On craint pour la vie de la Reine. Le Roi décide alors de gagner l’Assemblée nationale. Il est accompagné par sa famille, Madame Élisabeth, la princesse de Lamballe, la marquise de Tourzel, ainsi que des ministres, dont Étienne de Joly, et quelques nobles restés fidèles.

Selon Dominique Sabourdin-Perrin, entendue en décembre 2016 aux Archives Nationales, Marie-Antoinette emporta au Temple Odin, offert par le comte de Fersen, et Thysbé, offert par la princesse de Lamballe . Odin put La suivre à la Conciergerie… et Thysbé n’en eut pas la permission … Elle a expliqué qu’il fut recueilli par une aristocrate polonaise , dont le nom m’échappe, là, et qu’il mourut en Pologne, dans un accident : en voyant revenir sa nouvelle maîtresse dont la voiture traversait un pont, il sauta d’émotion dans l’eau pour la rejoindre plus vite et succomba à ce saut d’amour.

Lise Delamare est Marie-Antoinette dans La Marseillaise (1938) de Jean Renoir
Image d'Un peuple et son Roi (2018) de Pierre Schoeller

 

C’est donc la dernière promenade en liberté de ce petit chien.

La prise des Tuileries le 10 août 1792

Le 13 août 1792

La Commune décide de transférer la famille royale au Temple…

La Tour du Temple

Le 20 août 1792

On vient chercher tous ceux qui n’appartiennent pas à la famille royale stricto sensu. madame de Lamballe, madame de Tourzel et sa fille Pauline sont transférées dans l’affreuse prison de la Petite Force, les trois dames sont réunies dans une seule cellule assez spacieuse. Madame de Tourzel part-elle à ce moment avec le petit chien que lui confie la Reine?

Promenade de la famille royale dans le jardin du Temple dans Les Années Terribles de Richard Heffron

 

Les récits de la captivité de la Reine évoquent souvent un chien qu’Elle aurait baptisé «Fedelta» ou «Fidèle».

Le 21 janvier 1793

Exécution de Louis XVI qui a pu prendre congé de sa famille la veille et être accompagné à l’échafaud par un prêtre insermenté, l’abbé Edgeworth de Firmont (1745-1807).

« Après la mort de Louis , lorsque ses enfants habitaient avec leur mère , on avait permis au jeune Charles de dissiper son chagrin et l’ennui de sa captivité , en élevant un chien. Cet animal, en même temps qu’il faisait les plaisirs des enfants , contribuait à la distraction de la mère. Elle lui avait donné le nom de Fédeltà , qu’il justifiait par ses gentillesses et son attachement.»

            L’abbé Edgeworth de Firmont (ultime confesseur de Louis XVI) à Regnault Warin 

Le 22 juin 1793

Alexandre Dumas le nomme «Black» dans Le chevalier de Maison-Rouge et le rend responsable de l’échec d’un complot (celui de Jarjayes) pour faire évader sa maîtresse, Madame Élisabeth et Madame Royale du Temple.

Le baron de Batz, singulier personnage au cerveau débordant d’idées, royaliste fougueux, financier sans vergogne, s’il n’a pu sauver Louis XVI le 21 janvier, n’a pas renoncé a sauver sa famille. A son tour, ce diable d’homme, aidé de l’officier municipal Mîchonis et d’un épicier appelé Cortey, capitaine dans la garde nationale, s’introduit au Temple, le jour où Michonis est de service à la Tour. Les princesses, revêtues de capotes d’uniforme, doivent sortir l’arme au bras avec le petit Roi dans une patrouille conduite par Cortey.Mais, avertie par une lettre anonyme (provenant sans doute des Tison, espions qu’elle a placés au Temple), la Commune envoie l’un de ses membres, le cordonnier Simon, inviter Michonis a lui remettre ses pouvoirs et a se rendre à l’Hôtel de ville.

Michonis ne peut qu’obéir, Batz s’enfuit; une fois de plus le complot a avorté.

«Fidèle» n’a donc pas dérogé à son nom !

Le chien de Louis XVII

Le 3 juillet 1793

Par arrêté du Comité de salut public du 1er juillet 1793, Louis est enlevé à sa mère et mis sous la garde du cordonnier Antoine Simon (« l’instituteur » désigné sait pourtant à peine écrire) et de sa femme, qui résident au Temple.

« Lorsqu’on eut enlevé Charles à sa mère , Fédeltà , qui aurait bien voulu suivre son jeune maître , ne se consola de sa perte , que par les caresses de la reine »

          L’abbé Edgeworth de Firmont à Regnault Warin

Le chien Coc, dernier compagnon du Dauphin de France, futur Louis XVII (1785-1795), et de sa soeur Marie-Thérèse (1778-1851), dans la prison du Temple. Gravure par Duchez d'après Bertin.

Le 2 août 1793

Marie-Antoinette est transférée de nuit à la Conciergerie. Elle est accompagnée d’Odin, le chien offert par Fersen.

Un fiacre où Elle prend place L’attend au perron du palais du Temple. Deux policiers et deux municipaux restent près d’elle. Thysbé, l’autre épagneul offert aux Tuileries par la princesse de Lamballe, aurait suivi la voiture de la Reine jusqu’à la Conciergerie.

«(…) mais quand (Marie-Antoinette) a été transférée du Temple à la Conciergerie , le chien a trouvé moyen , en échappant à tous les yeux, de suivre de loin la voiture de l’infortunée princesse.
Arrivé aux guichets de la prison , les redoutables geoliers l’en ont écarté. Chaque jour , depuis cette époque il est venu gémir et ramper sous ces voûtes sombres , où un porte-clefs , moins inhumain, l’a recueilli. Aujourd’hui , à l’instant même , ayant vu passer Michonis près de lui , il l’a reconnu , et lui a témoigné sa joie par ses transports. De son côté , le municipal satisfait de pouvoir causer une agréable surprise à la prisonnière, s’est empressé de lui rapporter Fédeltà. Rien de plus touchant que le premier moment de cette entrevue. L’animal , après avoir exprimé par ses aboiements d’allégresse, les mouvements de sa queue, ses sauts , ses bonds multipliés , tout le plaisir qu’il éprouve , succombant à l’excès même de son contentement , vient en soupirant se coucher aux pieds de sa maîtresse , dont les yeux pleins de larmes prouvent combien elle est sensible à cet attachement. « Vous le voyez, me dit-elle, ce n’est point la reine qu’il flatte, c’est une femme malheureuse qu’il chérit. Quelle leçon, quel exemple pour l’ingratitude des hommes !  » »

           L’abbé Edgeworth de Firmont à Regnault Warin 

Marie-Antoinette avait, effectivement, un chien à la Conciergerie. Mgr Salomon (1759-1829), qui fut interné à la conciergerie en 1796 :

« Le premier matin où je bénéficiai de cette mesure (que sa porte soit ouverte dès le point du jour), je vis, comme ma porte s’ouvrait, un carlin entrer dans ma chambre, sauter sur mon lit, en faire le tour et s’en aller. C’était le carlin de la reine, que Richard avait recueilli et dont il prenait le plus grand soin. Il venait de la sorte pour flairer le matelas de sa maîtresse. Je le vis faire ainsi tous les matins, à la même heure, pendant trois mois entiers, et, malgré tous mes efforts, je ne pus jamais l’attraper.»

Mgr Salomon, cité par Gosselin Lenotre, Marie-Antoinette, la captivité et la mort, Perrin, 1920, pp 256-259

Certains spécialistes de la Reine prêtent foi à ce récit… , et précisent qu’un chien était avec Elle dans Sa cellule. Dans le roman de Paul Belaiche Daninos, Les soixante-seize jours de Marie-Antoinette à la Conciergerie, il s’appelle Baps. La relation de Monseigneur Salomon n’affirme pas que ce chien a vécu avec la Reine en prison, mais seulement qu’il a été recueilli par Richard. Il est possible que le concierge l’ait adopté au moment de l’incarcération de Marie-Antoinette. 

Marie-Antoinette dans Sa cellule par Benjamin Warlop
On pense ici au leonberg de 1780 ...
Silhouette de Marie-Antoinette dans Sa cellule

Mgr Salomon n’affirme pas que ce chien a vécu avec la Reine en prison, mais seulement qu’il a été recueilli par Richard.

« Dans la nuit froide du cachot, elle percevait l’agitation perpétuelle de la Conciergerie où l’on amenait de nouveaux condamnés à toute heure. Il y avait les cris des femmes, les ordres des officiers municipaux, les aboiements des chiens. Le sien, Odin, offert par Fersen, qui l’avait suivie depuis le Temple et que le concierge gardait.»

          Elisabeth Reynaud, Marie-Antoinette, l’indomptée.

Le 16 octobre 1793

Marie-Antoinette est condamnée à mort à quatre heures du matin. Elle part pour l’échafaud à onze heures.

Geneviève Casile (1976)
Ute Lemper (1991)
Thysbé que la Reine surnomme Mignon

Les épagneuls papillons sont si fidèles que, selon une légende très romantique, le chien Papillon de Marie-Antoinette L’aurait accompagnée sur l’échafaud et la petite Thysbé aurait couru se jeter dans la Seine après l’exécution de sa maîtresse.

 

Cette légende cherche assurément à rapprocher Marie-Antoinette de Marie Stuart (1542-1587)… quand la Reine d’Ecosse a été décapitée, l’assemblée a frémis de voir son corps remuer encore … et fut surprise de voir un petit chien sortir de sous ses jupes. Lorsque le bourreau s’empara de la tête royale, une tête aux cheveux blancs lui échappa des mains, il n’en tenait plus que la perruque.

Le supplice de Marie Stuart

En 1794

Pour distraire Madame Royale dans sa solitude au Temple, François Hüe lui concocte de petits concerts en priant sa femme, très bonne harpiste disait-on, d’accompagner une chanteuse du Théâtre Louvois qui, penchée à une mansarde, interprétait des comptines, airs de circonstance, inventées pour la princesse.

Un épagneul papillon

Dans celle-ci, le petit chien de Louis-Charles, Coco, est cité en exemple d’amour et de fidélité :

« Vous qui toujours éloignés d’elle
Sur son sort n’avez point gémi,
Ingrats !  voyez son chien fidèle,
Et rougissez de votre oubli.

Il a partagé sa misère,
Dans ses fers il l’a su charmer.
Oui ! C’est ainsi qu’on peut lui plaire,
Et voilà comme on doit l’aimer .
»

Dans le parc du ministère du Commerce extérieur, à l’hôtel de Seignelay, au 80, rue de Lille, à Paris, se trouve la tombe de Coco, le petit chien que Marie-Antoinette aurait confié à Madame de Tourzel avant d’être enfermée au temple. Madame de Tourzel aurait pris soin de lui jusqu’à sa mort.

La tombe du chien Coco, un épagneul papillon

Le 18 décembre 1795

Madame Royale quitte la prison du Temple pour être remise  à sa famille autrichienne…

« Le chien que Madame a dit qu’on lui avait permis d’emporter et qui était à son frère est sans doute une erreur, il ne pouvait les souffrir et en avait peur, il aura probablement été à sa mère.»

          Dagbok de Fersen

Départ de Marie-Thérèse du Temple
Marie-Thérèse de France

Le 16 avril 1796

« ( … )   Le charmant Coco a été perdu un jour ; Madame (Royale) en était affligée et sentait encore plus vivement la douleur de l’homme des mains duquel il était échappé en se promenant.  Un jeune cocher a rapporté à sa maîtresse cet intéressant animal.»

François Hüe à sa femme, de Vienne,

Le dernier ami… le titre de cette représentation le dit bien, une telle force symbolique est attachée à l’image du chien qu’il faut craindre que tous ces beaux récits ne soient que de compatissantes légendes… 

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