
« La scène de l’orangerie, sur laquelle depuis 1776 on donnait la comédie au Petit Trianon, n’était qu’un bâti de planches, de toile et de carton, sans machines ni dessous, sans dépendances pour le service des acteurs dont les foyers se trouvaient dans la ménagerie. La reine aimait trop les spectacles pour se contenter d’une installation si incomplète. Elle voulut avoir un vrai théâtre, muni de tout l’appareil nécessaire. Elle en avait eu la pensée dès 1777, et, sur son ordre, Mique fît alors relever les plans et profils de la petite salle de Choisy. Il étudia lui-même un projet quelle adopta, et les travaux commencèrent en juin 1778. Les premiers croquis terminés, on prépara un modèle en relief, ciselé, peint, doré, tendu de velours et de soie et éclairé par vingt-quatre lampions minuscules. Ensuite, chacun des détails de l’ornementation fut modelé en terre ou en plâtre avant d’être exécuté définitivement.»
Le Petit Trianon, histoire et description de Gustave Desjardins
Fin août 1779
Afin de satisfaire Son goût prononcé pour les arts, et plus particulièrement pour le théâtre, Marie-Antoinette confie à l’architecte Richard Mique l’édification d’un théâtre dans Son nouveau domaine : le Petit Trianon. On utilise l’emplacement d’une ancienne serre du jardin botanique de Louis XV, à quelques mètres à l’est de la ménagerie. Habilement dissimulé dans les jardins du Petit Trianon, le Théâtre de la Reine est achevé en été 1779.

L’extérieur du bâtiment, à l’apparence d’une dépendance, contraste avec la décoration sophistiquée de son intérieur, paré de soie et de velours bleus et de sculptures dorées, pourtant tout de faux-semblant.


Le 1er août 1780
Pour l’ouverture du théâtre par Monsieur Despréaux ( pensionnaire du Roi, ordinaire de l’Académie royale de musique
On représente devant leurs Majestés, Le Roi et le Fermier et La Gageure imprévue. de Michel-Jean Sedaine (1719-1797)
PERSONNAGES:
Monsieur Machine, machiniste (Le sieur Dugazon)
l’Opéra, époux de la Tragédie (Le sieur Despréaux)
La Tragédie, femme de l’Opéra (la Demoiselle Raucour
L’Opéra-comique, fils de la Tragédie et de l’Opéra (Le sieur Trial.
Bazin (Le sieur Desessart), Niquet (Le sieur Candeille) : garçons de théâtre.
Troupe d’ouvriers (Trupti, Abraham, Simonet, Le Bel, Duchaine, Guillet.
La scène se passe sur le théâtre de Trianon :
Prologue
Le théâtre représente le chaos, on voit les rouleaux de gazes qui servent à représenter la mer suspendus dans les airs, avec des arbres, des maisons et des nuages, la lune et le soleil sont à terre, des masses de décorations sens dessus dessous forment le fond du théâtre, enfin tout est bouleversé. Le théâtre n’est éclairé que par quelques bougies.


Cette petite salle de comédie est pour la Reine un lieu secret, loin de la Cour de Versailles et de ses tourments. Elle vient jouer Elle-même la comédie, au sein d’une troupe réduite à son entourage intime, en souvenir de son goût, depuis l’enfance, pour le théâtre et la déclamation. La scène, deux fois plus vaste que la salle, ainsi que la machinerie, complexe et des plus modernes, sont l’œuvre du machiniste Boullet, de l’Opéra de Paris.
Le 10 août 1780
Spectacle à Trianon : On ne s’avise jamais de tout de Sedaine et Monsigny et les Fausses Infidélités de Barthe.
Septembre-octobre 1780
Construction du corridor de tentes reliant le Jeu de Bague à la salle de comédie. Il sert pour la première fois pour le spectacle du 12 octobre 1780.



















Le 6 septembre 1780
Spectacle à Trianon : L’Anglais à Bordeaux de Farvart et Le Sorcier de Poinsinet et Philidor.
Le 19 septembre 1780
Marie-Antoinette est sur la scène en costume et joue ainsi avec la Troupe de Seigneurs pour un public d’intimes qu’elle a elle-même invités. Elle est ce soir-là l’héroïne du Devin du Village de Jean-Jacques Rousseau pour une poignée d’intimes sélectionnés avec soin.

La Reine en profite pour imposer Ses choix ; si la coutume voulait qu’on n’applaudît pas en Sa présence, Elle le permet et l’encourage même, confortant un peu plus Son désir de s’éloigner du protocole rigide de la Cour. Mais ces spectacles auxquels assiste assidûment le Roi se veulent avant tout un divertissement et se poursuivent après neuf heures du soir par un souper de la famille royale.


Le 30 septembre 1780
La Reine continue les représentations de Trianon. Pour faire diversion au rôle pénible qu’Elle joue dans le monde, Elle a adopté celui de soubrette sur le théâtre. Le Roi assiste par complaisance à ces jeux ; mais ils ne sont pas analogues avec son humeur sérieuse et sévère ; aussi siffle-t-il habituellement les acteurs. Le comte d’Artois, qui dansait déjà passablement sur la corde, commence à jouer la comédie d’une manière supportable.








« À l’intérieur, un vestibule en hémicycle donne accès, d’une part, à deux salons, de l’autre, à la salle de spectacle, et par un escalier à l’étage supérieur. La reine et sa suite entraient par la porte principale ; d’autres ouvertures étaient ménagées pour les invités de seconde catégorie. Des bas-reliefs représentant des Muses ornent le dessus des portes. La salle n’a que deux rangs de loges avec un parterre en contre-bas.»
Le Petit Trianon, histoire et description de Gustave Desjardins






La Reine, qui aime aussi chanter sur scène, d’une voix qu’on dit juste et fraîche, vient parfois écouter ses compositeurs préférés, comme André Grétry (1741-1813), qui a été Son directeur de la musique particulière, ou François-Joseph Gossec (1734-1829). Le régisseur du théâtre était Pierre-Dominique Bertholet, beau-père de madame Campan.


Le décor de la chambre rustique :
La chambre rustique est un tableau aujourd’hui incomplet. Trois paires de châssis, trois frises de plafond, deux châssis obliques avec porte et deux petits châssis de découverte en deux parties nous sont parvenus. Il faut constater la disparition d’un grand rideau de fond à bâtir décrit dans les inventaires. Un rideau à bâtir est une sorte de toile de fond percée d’ouvertures praticables. Pour occulter en arrière-plan ces ouvertures, on plaçait des châssis, dits de découverte, généralement empruntés à un autre tableau.




Le 12 octobre 1780
Spectacle à Trianon : Le Devin du village et Le Roi et le Fermier.


« Toutes ces sculptures sont en pâte de carton. A chaque angle, du côté de la scène, un panneau en bois, couvert de fines arabesques, est surmonté d’une loge grillée.»
Le Petit Trianon, histoire et description de Gustave Desjardins
Le 29 novembre 1780
Mort de l’Impératrice Marie-Thérèse après une courte maladie.

C’est pour sa fille, « le plus affreux malheur« .
Les comédies sont alors suspendues. Si la Reine laisse le jeu, en raison de ce deuil puis d’une nouvelle grossesse, Elle assiste comme spectatrice aux pièces données par les acteurs professionnels des Comédies française et italienne.
Le 27 juin 1781
Spectacle à Trianon : La Fête d’amour de Favart et Chevalier et Jérôme et Fanchonnette de Vadé.


« Les figures et les ornements en saillie étaient en or jaune et vert. On peignit les balustres, piédestaux, boiseries de l’orchestre et du parterre en brèche violette, et l’ébrasement de la scène, avec les panneaux d’angle, en marbre blanc veiné. Le reste de la salle fut tendu de moire bleue ; les appuis des balcons et des loges ainsi que les sièges, de velours de même couleur. La voussure, de ce côté, est divisée en trois compartiments : celui du milieu est plein, les deux autres sont troués par un œil-de-bœuf. Dans la partie centrale, sur un fond de rayons, deux Muses couchées tiennent le chiffre de la reine. L’agencement du rideau fut plus laborieux. Des pentes de soie bleue, à franges d’or, relevées par des cordelières d’or, tombent de la fesse; de chaque côté de la scène, une femme, dont le torse sort d’une gaine, les soutient. Il ne restait plus qu’à placer, aux coins de l’avant-scène, des candélabres pour éclairer la salle. On se fixa à deux groupes en plâtre, de deux femmes chacun, remarquablement gracieux. Elles portent d’un geste élégant un grand cornet garni de soleils, de roses, de lys, étages en girandole, parmi lesquels brillaient quatre-vingt-onze flammes de bougies. Un grand réverbère mobile, en cuivre argenté, de vingt-et-un pieds de long sur dix pouces de haut, fut placé le long de la rampe de l’orchestre qui était éclairé lui-même par seize chandeliers. Sur la scène, Boullet, machiniste et inspecteur des théâtres du roi, construisit un appareil de machines aussi complètement outillé que possible.»
Le Petit Trianon, histoire et description de Gustave Desjardins
Le 29 juin 1781
Spectacle à Trianon

En 1835, Louis-Philippe fera des travaux pour la mise en état de la salle de théâtre du petit Trianon. Ces travaux se poursuivent en 1836, avec notamment, la commande à Ciceri d’un plafond pour la salle représentant Apollon et les Muses, dans le style de Louis XVI, en réalité la copie de la composition d’origine de Lagrenée le jeune. Dans le même temps, Ciceri reçoit la commande des décors de scène.
Le décor de la forêt :

Le tableau de Forêt est le premier décor commandé à Ciceri pour le théâtre de la Reine, et date de 1835. A l’origine, il était composé de sept paires de châssis, sept frises et une toile de fond. Dans les inventaires, le rideau de fond est accompagné de cette précision «représentant la porte Saint-Antoine près Trianon». L’ensemble du décor nous est parvenu, hormis deux châssis dont la vente par les domaines, en 1880, nous est signalée sur le dernier inventaire.

Un beau jour, Marie-Antoinette étant Elle-même sur scène, remarque que Sa belle-sœur, la comtesse de Provence se refuse d’aller La rejoindre. Elle l’interpelle alors :
« Il me semble Madame, que vous pouvez sans scrupule vous livrer à un délassement royal, auquel une Reine de France ne dédaigne pas de prendre part.»
et l’autre de Lui répondre…
« Mais je ne suis pas Reine, mais du bois dont on les fait.»



Le décor de la place publique :
Malheureusement mutilé, le décor de la Place publique présentait à l’origine cinq paires de châssis de coulisse, cinq frises de ciel et une toile de fond. Sur le dernier inventaire, celui de 1855, est signalée la sortie de quatre des châssis par vente des domaines en 1880 mais la disparition de la toile de fond demeure inexpliquée. Il ne nous reste aujourd’hui de ce décor que les premier, quatrième et cinquième plans de châssis. De plus, la peinture bleue des frises de ciel est très pulvérulente et, en l’absence de toile de fond, la plantation de ce tableau ne présente pas d’intérêt esthétique. En revanche, l’observation de chaque châssis ravit l’œil par le talent du peintre à suggérer le volume et la matière avec une grande économie de moyens.
Le décor de salon fermé :

Toujours en 1836, Ciceri exécute un Salon fermé pour le théâtre de la Reine. Ce décor a entièrement disparu.

A la différence des trois tableaux précédents, il ne se présentait pas sous la forme de plans successifs parallèles au cadre de scène, mais il devait, si l’on en croit la description qui en est faite dans les inventaires, former une boîte pourvue de multiples portes et fenêtres articulées.

De même, le plafond du salon n’était pas suggéré par des frises successives un grand châssis de la taille de la pièce, articulé en deux parties afin de pouvoir être rangé, en tenait lieu.


Dans ce type de décor, un trou est pratiqué dans le milieu du plafond il permettait l’utilisation d’un vrai lustre qui éclairait la scène, la structure d’un décor fermé empêchant la dissimulation des éclairages en coulisse.

Le décor de fond de salon :
Par ailleurs, le théâtre de la Reine conserve un fond de salon composé de quatre châssis articulés, qui n’est pas de Ciceri. Son origine remonte au lot entré à l’inventaire par bonification et affecté, pour certaines pièces, au théâtre de la Reine en 184617. Antérieurement, l’histoire de ce décor nous est inconnue, mais il doit s’agir d’éléments vraisemblablement très anciens. Leur style et leur facture permettent de les faire remonter à l’Ancien Régime.

Le décor de la chambre rustique :
La Chambre rustique est un tableau aujourd’hui incomplet.

Trois paires de châssis, trois frises de plafond, deux châssis obliques avec porte et deux petits châssis de découverte en deux parties nous sont parvenus. Il faut constater la disparition d’un grand rideau de fond à bâtir décrit dans les inventaires.

Un rideau à bâtir est une sorte de toile de fond percée d’ouvertures praticables. Pour occulter en arrière-plan ces ouvertures, on plaçait des châssis, dits de découverte, généralement empruntés à un autre tableau.
Le décor du temple de Minerve :
Le décor le plus mythique parmi ceux conservés au théâtre de la Reine est un tableau représentant le Temple de Minerve, pour le premier acte de Thésée, tragédie lyrique de Quinault et Lully.

Il a été construit par les frères Slodtz, en 1754, pour le théâtre de Fontainebleau. Ce décor fut modifié en 1764 pour être utilisé dans Olympie de Voltaire.



Le 16 juillet 1781
Spectacle à Trianon : L’aveugle de Palmyre de Desfontaines et Rodolphe et La Matinée et la veillée villageoises, ou le Sabot perdu de Piis et Barré.



Marie-Antoinette est davantage spectatrice qu’actrice dans Son théâtre…
Le 20 juillet 1781
Spectacle à Trianon : La Petite Iphigénie de Favart et Voisenon.
Le 26 juillet 1781
Spectacle à Trianon : Les Deux Porteurs de chaise de Piis, Barré et Chardin et illumination en l’honneur de Monsieur, frère du Roi.




Au printemps 1782
Marie-Antoinette revient à Son goût de la comédie et donne une grande fête en l’honneur du tsarévitch de Russie pour qui l’on joue un opéra-comique et un ballet. Mais le rythme soutenu de la première année s’est étiolé et la troupe des seigneurs ne donnera guère qu’une seule représentation par an.

En avril 1782
Madame Campan, dans ses Mémoires, raconte qu’elle a lu à Louis XVI et Marie-Antoinette Le Mariage de Figaro, de Beaumarchais … Catastrophe ! Elle rapporte les paroles du couple royal :
« C’est détestable, ce ne sera jamais joué, il faudrait détruire la Bastille pour que la représentation de cette pièce ne soit pas une inconvenance dangereuse. Cet homme se joue de tout ce qu’il faut respecter dans un gouvernement.
– On ne la jouera donc point ? dit la Reine.
– Non, certainement, répondit Louis XVI, vous pouvez en être sûre. »

Le 11 avril 1782
Spectacle à Trianon : La Matinée et la veillée villageoises, ou le Sabot perdu de Piis et Barré et Le Sage étourdi de Boissy.



Le 6 juin 1782
Fête à Trianon en l’honneur du comte et de la comtesse du Nord, souper, spectacle, Les Sabots de Cazotte et Duni, Isabelle et Gertrude de Favart et Les Deux Chasseurs et la Laitière d’Anseaume et Duni, et illumination.

La Reine donne une représentation à Trianon pour la comtesse du Nord. Elle y chante Zémire et Azor de Grétry, la Jeune Française au sérail de Gardel.
Le Grand Duc Paul de Russie (1754-1796-1801) et son épouse, Maria Féodorovna,
née Sophie-Dorothée de Wurtemberg-Montbéliard (1759-1828), alias le comte et la comtesse du Nord.
Après le dîner de trois cents couvert, Trianon est illuminé.
Le 29 mai 1783
« La Reine qui se proposait de représenter aujourd’hui sur le théâtre du Petit Trianon l’opéra-comique du » Tonnelier « , dans lequel Elle tient le rôle de Fanchette, n’a pu se procurer cet amusement parce que hier à la répétition Elle s’est foulé le pied et que pendant la nuit l’enflure est augmentée .
Journal du marquis de Bombelles
Quelques personnes croient que cet accident n’a pas été assez considérable pour empêcher la Reine de donner son spectacle, mais qu’on L’a avertie que ce genre d’amusement, le jour de l’Ascension, serait un nouvel objet de critique, surtout dans le moment où les chansons satiriques paraissent en grand nombre malgré les soins que se donne la police pur en découvrir les auteurs .»

Le 6 juin 1783
Louis XVI chasse et ne prend rien. Il dîne et soupe à Trianon où il y a petite comédie.

La machinerie historique est remise en état et peut aujourd’hui fonctionner, faisant du théâtre de Trianon le seul théâtre français du XVIIIe siècle intact et encore en ordre de marche.










Le 19 mars 1784
Spectacle à Trianon : L’Amitié sur le trône de Linières et Les On-dit (du chevalier de Boufflers.
Le 27 avril 1784
La première officielle du Mariage de Figaro a lieu à la Comédie-Italienne.


« Enfin, au mois de juillet 1779, le peintre Lagrenée termina le plafond de la salle qui représente Apollon dans les nuages, accompagné des Grâces et des Muses, autour desquels voltigent des Amours tenant des fleurs et des flambeaux, et le théâtre fut prêt à être livré aux acteurs.»
Le Petit Trianon, histoire et description de Gustave Desjardins






Le 21 juin 1784
Des festivités et illuminations sont organisées pour accueillir le comte de Haga, alias Gustave III. On joue Le Dormeur éveillé de Marmontel et Piccini.

Commanditaire de spectacles, la Reine demande des œuvres qui témoignent de Son goût pour la musique de son temps : elle fait jouer Gluck, Grétry, Sacchini et Paisiello.


Le 27 juin 1784
Marie-Antoinette joue sur la scène de Trianon le rôle de Rosine du Barbier de Séville de Beaumarchais devant un public choisi comprenant le Roi de Suède.




Le 31 juillet 1784
Spectacle à Trianon : Le Comédien bourgeois de Carmontelle, Les Amours d’été de Piis et Barré et Berlingue de Despréaux.


Le 15 septembre 1784
Spectacle à Trianon : Le Barbier de Séville de Paisiello.
Le 18 septembre 1784
Spectacle à Trianon : Dardanus de Sacchini.





Le 19 août 1785
Spectacle à Trianon. Le Barbier de Séville de Beaumarchais (joué à la Comédie-Française dès 1775) est donné à Trianon dans le théâtre privé de Marie-Antoinette : le comte d’Artois joue encore Figaro, le comte de Vaudreuil (amant de Madame de Polignac) interprète Almaviva et… Marie-Antoinette Rosine.


Le rôle de Rosine est le dernier connu de Marie-Antoinette. L’auteur, Beaumarchais (1732-1799), pourtant jugé sulfureux et dont la comédie Le Mariage de Figaro a d’ailleurs été interdite jusqu’en 1784, assiste à cette représentation

C’est le dernier spectacle représenté dans le théâtre de la Reine sous l’Ancien Régime ( on y rejouera sous Louis-Philippe).

Le 19 septembre 1780
Marie-Antoinette est sur la scène en costume et joue ainsi avec la Troupe de Seigneurs pour un public d’intimes qu’elle a elle-même invités. Elle est ce soir-là l’héroïne du Devin du Village.
La saison 2018-2019 accueille ce spectacle pour la deuxième année consécutive, pour une soirée d’exception autour de cet opéra en un acte écrit par Jean-Jacques Rousseau.






Les appartements de Richard Mique au dernier étage du théâtre:

( texte de Christophe Duarte – photographies de Sarah Baach ; Versailles-passion )
Richard Mique obtient l’autorisation d’assister aux spectacles dans le petit théâtre mais également un logement situé juste au-dessus.

On y accède par un petit escalier circulaire.



Cet appartement permet à l’architecte d’être à pied d’œuvre pour surveiller les travaux qui se poursuivent à Trianon et aussi de se présenter promptement aux ordres de la Reine lorsqu’Elle désire avoir des explications pour fixer le détail de quelque décor ou, ce qui est fréquent, faire changer un motif à peine terminé mais qui a cessé de plaire.






L’appartement se compose de deux pièces donnant sur le jardin, dont une chambre-à-coucher, une autre petite chambre sur la cour, un petit cabinet et deux garde-robes.




Deschamps fournit «une devanture d’alcôve» pour la chambre-à-coucher, «une devanture de buffet en bois de chêne», pour la seconde pièce servant probablement de salle-à-manger, «deux trumeaux de glaces moulurés au-dessus des cheminées et cinq double croisées». Dutems exécute les peintures «en blanc ou gros de détrempe à l’exception de la rampe d’escalier peinte en noir et du chiffre peint en gris de détrempe».





Il s’agit d’un logement fort simple, aux cheminées à chambranle peint, au sol couvert de carrelage rouge, plus un logement de service que d’agrément, mais d’où la vue sur les frondaisons des jardins est si belle qu’elle doit faire oublier l’inconfort de l’installation.

Et celui de Pierre-Charles Bonnefoy du Plan (1732-1824) au premier étage :



Le 1er juillet 1787
La Reine préside un bal donné à Trianon.

Quiconque sera «vêtu honnêtement» pourra entrer à Trianon a décidé Marie-Antoinette en annonçant les portes ouvertes de Son domaine le dimanche.

En mai 1789
Le décor du théâtre, tout en faux-semblant, occasionne force déception auprès des représentants des bailliages lointains venus à Versailles pour la tenue des Etats généraux, convaincus de pouvoir dénoncer une débauche de luxe : ils avaient en effet entendu parler de murs tapissés de diamants… il s’agissaient évidemment d’éléments de décors du théâtre.
Lors de la Révolution française
Le théâtre de Trianon est épargné, jugé sans valeur. Le mobilier est néanmoins vendu en 1794, de même que les tentures murales et le rideau bleu et or d’avant-scène. Les grandes torchères latérales échappent à ces ventes révolutionnaires.
Sous le Premier Empire
Lorsque Napoléon (1769-1821) prend possession du Petit Trianon, il ordonne des rénovations du théâtre de la Reine, abandonné depuis la Révolution et très dégradé. Sous la direction de l’architecte Trepsat (1743-1813), on réalise un entoilage en papier peint bleu impérial, un aigle impérial, rehaussé d’or sur une toile de fond azur, est installé au-dessus de la scène à la place du chiffre de Marie-Antoinette et l’on aménage la loge impériale sous une grande toile en forme de tente militaire. Quelques retouches sont réalisées sur l’ancien décor mais la mise en place d’un nouvel éclairage, un lustre en cuivre doré et cristal de Bohème comportant vingt-huit lampes, oblige à percer la toile de Lagrenée qui orne le plafond.

Après cette restauration, réalisée en deux campagnes, on remeuble le parterre avec dix-huit banquettes et douze tabourets et les loges avec une centaine de chaises de hêtre imitant l’acajou ; l’ensemble, de même que les appuis des loges et des baignoires, est couvert d’un velours d’Utrecht de couleur bleue.
Plusieurs Reines et Impératrices, Marie-Louise, Marie-Amélie et Eugénie, se sont, au cours du XIXe siècle, approprié le lieu, devenu en quelque sorte l’apanage des femmes. Affecté au musée, il est très peu visité et, après quelques campagnes de restauration, est resté intact jusqu’à aujourd’hui, y compris sa machinerie, exemplaire quasi unique du XVIIIe siècle.
A la Restauration
Ni le théâtre ni le Petit Trianon ne sont utilisés par la duchesse d’Angoulême, qui hérite pourtant du domaine.
Sous Louis-Philippe Ier
« Le Théâtre de la Reine à Trianon, utilisé par Louis-Philippe pour quelques représentations à caractère privé, accueillera le magnifique et inédit « Palais gothique ». Le château de Fontainebleau a très généreusement accepté de prêter ce décor, dû lui aussi au pinceau de Ciceri, dont l’histoire a pu être retracée au prix d’une longue enquête dans les registres des Archives nationales. Créé vers 1845, il était destiné au théâtre provisoire installé sous une tente dans le parc du château d’Eu. Cependant, les circonstances firent qu’il n’y fut jamais envoyé. Il fut conservé, à Paris, au Garde- Meuble, puis au théâtre du château de Saint-Cloud. La destruction de ce dernier sur ordre de Napoléon III, en 1863, entraîna son transport au château de Fontainebleau. Jamais utilisé, conservé dans d’excellentes conditions, le « Palais gothique » se trouve aujourd’hui dans un état de fraîcheur incomparable. L’ œuvre pour laquelle il avait été conçu, reste inconnue. On pense aujourd’hui à La Dame blanche, mais, selon les usages du temps, il aurait fort bien pu servir à plusieurs ouvrages du répertoire. Toujours est-il que l’on demeure surpris de la vivacité de ses coloris et de l’inventivité de son dessin. Ces trois décors témoignent de la richesse du patrimoine théâtral du XIXe siècle encore conservé dans les collections des palais nationaux et permettent de comprendre les goûts de la monarchie de Juillet dans ce domaine.»
Jean-Paul Gousset, directeur technique de l’Opéra royal

Le Petit Théâtre de la Reine au XIXe siècle,
Les éléments de décor
( texte et illustration de Christophe Duarte ; Versailles – passion )
En 1835, Louis-Philippe ordonne une campagne de restauration du Petit Théâtre de la Reine, inchangé depuis le Premier Empire. Il fait, à cette occasion, rétablir le chiffre Marie-Antoinette sur la voussure et l’on recouvre les murs de papier cramoisi à motifs de palmettes. Le peintre et décorateur de théâtre Ciceri réalise une copie de la toile endommagée du plafond.


Afin de rétablir une véritable hiérarchie de cour, le sol est abaissé et des entrées sont ouvertes de chaque côté de la balustrade. La loge royale, créée sous l’Empire, trône au milieu de l’entrée.


Deux nouveaux rideaux sont tissées à cette occasion : le rideau de scène dans les tons rouges de la salle et un rideau de manœuvre dans les bleus.







Au début du XXe siècle
La salle était très délabrée en raison d’infiltrations dans la toiture. Elle est restaurée grâce à la donation Rockefeller entre 1925 et 1936, pour un budget de 700 000 francs. Le plancher est alors refait et le papier de tapisserie bleue est rétabli d’après un fragment que l’on avait conservé. Le rideau de manœuvre bleu est déplacé vers l’avant-scène pour remplacer le rouge qui avait été installé au début du XIXe siècle.

Le plancher est alors refait et le papier de tapisserie bleue est rétabli d’après un fragment que l’on a conservé.

Ancien rideau de manœuvre, le rideau original est devenu, en 1936, celui d’avant-scène lorsque l’état Louis-Philippe du théâtre de la Reine a disparu au profit de la restitution XVIIIe.


Le rideau a subi les outrages du temps et de la manipulation. Après avoir fait l’objet d’une refixation de sa couche picturale et de quelques renforcements, il a été soigneusement roulé et conservé dans les dessous du théâtre.


Sources :
- ARIZZOLI-CLEMENTEL, Pierre, L’Album de Marie-Antoinette: vues et plans du Petit Trianon à Versailles, Editions d’Art Gourcuff Gradenigo, 1999, réédition en 2008, Montreuil, 99 p.
- BERLY, Cécile, Le Versailles de Marie-Antoinette, éditions Artlys, Paris, 2013, 110 p.
- BERTIERE, Simone, Les Reines de France au temps des Bourbons, tome 4 : Marie-Antoinette L’insoumise, éditions de Fallois, Paris, 2002, 735 p. + 32 p. de planches illustrées
- BONCOMPAIN, Jacques, Quand Marie-Antoinette jouait la Comédie, Historama N°310 , septembre 1977, 129 p. (dernier article)
- BOYER, Marie-France, Les Lieux de la Reine, Thames & Hudson, Paris, 1995, 112 p.
- CAMPAN, Henriette, Mémoires sur la vie privée de Marie-Antoinette, reine de France et de Navarre, suivis de souvenirs et anecdotes historiques sur les règnes de Louis XIV, de Louis XV et de Louis XVI, 3 volumes, deuxième édition, Bauduin frères, Paris, 1823, 402 p. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2050396.texteImage
- CASTELOT, André, Marie-Antoinette, Perrin, Paris, 1953, 588 p.
- CHANTERANNE, David, Marie-Antoinette – Reine des Arts, Château de Versailles (magazine) Hors série N°25 ; avril 2017, 82 p.
- CHAPMAN, Martin, Marie-Antoinette and the Petit Trianon at Versailles, Fine Arts Museum of, Etats-Unis, 2007
- DELALEX, Hélène, MARAL, Alexandre, MILAVANOVIC, Nicolas, Marie-Antoinette, Château de Versailles, 2013, 240 p.
- DESJARDINS, Gustave, Le Petit Trianon, histoire et description, L. Bernard, Versailles, 1885, 550 p.
- DUARTE, Christophe, Versailles passion , groupe Facebook
- https://www.facebook.com/groups/345409295656055
- HERMARY-VIEILLE, Catherine, Les années Trianon, Albin Michel, Paris, 2009, 432 p.
- IMBERT DE SAINT-AMAND, Arthur-Léon-Georges, Les beaux jours de Marie-Antoinette, Edouard Dentu, Paris, 1879, 358 p.
- LENOTRE GOSSELIN, Louis Léon Théodore, Versailles au temps des rois, Grasset, Paris, 1934, trois nouvelles éditions depuis 2006, 308 p.
- LEVER, Evelyne, Marie-Antoinette, Fayard, Paris, 1991, 746 p.
- MASSON, Raphaël, Marie-Antoinette – Dans l’intimité d’une Reine, Château de Versailles (magazine) Hors série N°1, novembre 2013, 100 p.
- MAZE, Jules, Les coulisses de Versailles – Marie-Antoinette fait ses débuts de Reine de France, éditions L.E.P. Monaco, 1958,
- NOLHAC, Pierre, Le Trianon de Marie-Antoinette , Hachette Livre BNF, Paris, 1914, 426 p.
- NOLHAC, Pierre, Le Château de Versailles au temps de Marie-Antoinette, imprimerie de E. Aubert, Versailles, 1889, 108 p.
- https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6543008r.texteImage
- NOLHAC, Pierre, Les Consignes de Marie-Antoinette au Petit Trianon 1890
- NOLHAC, Pierre, Marie-Antoinette à Trianon, 1893,
- NOLHAC, Pierre, Le Trianon de Marie-Antoinette Manzi, Joyant et Cie, Paris, 1914, 426 p.
- https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6523077f.texteImage
- PEROUSE DE MONCLOS, Jean-Marie (texte), POLIDARI, Robert (photographies), Versailles, Menges, Paris, 1991, 422 p.
- RAVELLE, Françoise, Marie-Antoinette Reine de la Mode et du Goût, Parigramme – Carnet de Style, Paris, 2018, 128 p.
- REY, Léon, Le Petit Trianon et le Hameau de Marie-Antoinette, Librairie Ernest Leroux, Paris, 1936, 84 p.
- SAINT-CHARLES, Les Belles Années de Marie-Antoinette , oeuvre et librairie Saint-Charles, Belgique, 1920, 327 p.
- SAVINE, Albert, BOURNAND, François, Les Jours de Trianon, Louis-Michaud éditeur, Paris, 1908, 188 p.
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- ZWEIG, Stefan, (traduction : HELLA, Alzir ), Marie-Antoinette, Grasset, Paris, 1933, 506 p.
- Redécouvrez Versailles, Détours en France Hors-série Collection, 2008
- Versailles – Parc, Jardins, Trianon ; Le Figaro collection N° 6, mai 2006
- Les Derniers Secrets de Versailles dans Le Point Historia Hors Série, 2012, 108 p.
- Marie-Antoinette et le Petit Trianon, La Revue de l’Au-Delà N°158, Numéro spécial, , juin 2011