Le Pavillon français est une fabrique de jardin construite pour Louis XV et Madame de Pompadour par Ange-Jacques Gabriel (1698-1782) au sein du jardin français du Petit Trianon qu’il a précédé.

Construit en 1750, ce pavillon s’intègre au cœur du jardin à la française et les hautes portes-fenêtres ouvrent sur ses perspectives. À la fois centre et prolongement naturel du « nouveau jardin du roi » créé pour le divertir de sa mélancolie, il sert de salon de musique, de jeu et de conversation. Il est considéré comme un chef-d’œuvre d’équilibre entre noblesse et fantaisie. L’originalité de son plan repose sur un salon octogonal accosté de quatre petits cabinets carrés disposés en croix.

Les croisées, sur des façades en pierres de refend, sont surmontées de mascarons représentant les saisons, exécutés par Jules-Antoune Rousseau . La balustrade est animée de huit groupes d’enfants, allégories des quatre saisons et des quatre saisons, et huit vases de fleurs, du même sculpteur. Le salon circulaire est décoré de lambris sculptés par Jacques Verbeckt (1704-1771), autrefois couverts de couleurs pastels assorties à l’atmosphère champêtre et désormais en dorures.

Huit colonnes corinthiennes soutiennent une corniche ornée de divers gallinacés, en évocation de la ménagerie domestique toute proche.



Les quatre éléments et les quatre saisons :
Les Chérubins du Pavillon Français
( texte et photographies de Christophe Duarte – Versailles passion )
Sur la balustrade du Pavillon Français, des statuettes d’enfants alternant avec des vases de fleurs sont l’œuvre de Jules-Antoine Rousseau, sculpteur des bâtiments du Roi.
Ces huit groupes sont disposés à l’aplomb de chacun des angles rentrants de la façade. Ils représentent les quatre saisons et les quatre éléments, mesurent environ un mètre et demi et sont composés en ronde-bosse de pierre de Saint-Leu.


Exécutées en 1749 pour un coût de 38 301 livres, les seize statuettes d’enfants sont déposées en réserve après la Révolution française.

Les onze moins endommagées sont restaurées en 1893 mais les cinq autres sont reproduites par le sculpteur Alphonse Guilloux. Considérées comme de piètre qualité, ces copies sont retirées et, de 1960 à 1964, l’ensemble des huit groupes est entièrement refait par Georges Chauvel et Eugène Joachim.


Alors que l’on installe ces statuettes en 1967, il est décidé de restituer les seize corbeilles de fleurs disparues. Aucun modèle n’ayant été conservé, le sculpteur Pascal Soullard s’inspire des dessins de « l’album de Modène ». Les fleurs des vases, à l’origine formées de plomb, sont réalisées en pierre.



Bien que n’étant pas un Roi bâtisseur, Louis XV est passionné d’architecture et de plans. En 1754, il donne volontiers en exemple le Pavillon français, indiquant au prince de Croÿ, venu lui demander conseil sur la construction du château de l’Hermitage, que c’est « dans ce goût-là qu’il faut bâtir ».


Ce pavillon de jeu et de conversation rassemble les proches et les intimes de Louis XV et de la marquise de Pompadour, qui goûtent aussi, à la belle saison, aux produits des jardins potagers et fruitiers et de la laiterie. Le Roi aime à s’y arrêter au retour de ses promenades dans le jardin botanique pour classer ses herbiers.

Gouache attribuée à Jacques-André Portail

Deux immenses miroirs des cabinets opposés se font face et, avec les hautes portes et fenêtres, ajoutent légèreté et élégance.
Les petits cabinets
Les quatre cabinets sont disposés sur un axe diagonal par rapport aux lignes de composition du jardin et aux perspectives du salon central vers les édifices qui entourent le pavillon.

Le boudoir, situé à gauche, face au château, possède un plafond et des lambris ornés d’arabesques.

À l’origine pourvu d’un sol de marbre blanc et noir, il dispose désormais d’un parquet à panneaux restitué en 2008. Sous Louis XV se trouve alors une petite table en bois de palissandre, comportant une tablette à coulisse et un pupitre à crémaillère et utilisée par le Roi pour son herbier. Un canapé en ottomane jaune est recouvert d’un pékin blanc.
À l’opposé se trouve une antichambre à boiseries simples mais agrémentée d’une cheminée en marbre du Languedoc.


Le troisième cabinet est un réchauffoir, petite cuisine où l’on tient les plats au chaud, accessible seulement par l’extérieur et muni d’un fourneau ainsi que d’une hotte adossée à la cheminée du salon central. Il est en pierre peinte et la dalle est en simple pierre.


La dernière pièce est à l’origine partagée en deux : la partie donnant sur le salon dispose d’un « lieu à l’anglaise », pourvu d’un équipement moderne à soupape et en bois de palissandre, dans un souci de confort et d’intimité ; la seconde partie est réservée à la préparation du café auquel le Roi Louis XV tient un goût particulier.

Aujourd’hui, la cloison a disparu et un escalier a été créé pour mener aux installations souterraines.
En 1774
Marie-Antoinette, qui prend possession du domaine du Petit Trianon, ne réalise aucune modification au pavillon, le seul apport substantiel au Jardin français étant la construction de son petit théâtre. Conquise par le charme de cet édifice délicat, Elle y donne même des fêtes …

Le 18 juillet 1781
Le pavillon est complété de tentes de toile afin d’y donner des concerts éclairés aux lanternes, à l’occasion de la venue de son frère, l’Empereur Joseph II. Lorsque la famille royale est à Trianon, le salon accueille les jeux de cartes, on y joue des pièces de musique ou l’on converse comme dans toute demeure aristocratique du XVIIIe siècle ; l’endroit est idéal pour les soupers des chaudes soirées d’été. La Reine y donne aussi des bals, lui adjoignant une tente démontable



Les 24, 26 et 29 juin 1785
Bals à Trianon , dans une tente dressée dans le jardin français.

À la Révolution française
Le Pavillon français, comme l’ensemble du domaine du Petit Trianon, est laissé à l’abandon, puis dépouillé de son mobilier lors des ventes aux enchères qui débutent au mois d’août 1793.
Sous le Directoire (1795-1799)
Le Pavillon français est aménagé en café, à destination des occupants du château du Petit Trianon transformé en hôtel, et le jardin français est le lieu de bals populaires mêlant à l’occasion illuminations et feux d’artifice.
Lors du Premier Empire
Le Pavillon français redevient un lieu de fête comme sous l’Ancien Régime. Une restauration est entreprise en 1806, ces modifications n’ont cependant pas perduré : les colonnes corinthiennes sont reprises et l’on crée en carton-pâte de nouveaux chapiteaux à femmes ailées ou à volutes ; un aigle est peint sur la coupole, prenant son essor vers l’Empyrée; les lambris sont recouverts de tons gris et bleus, les cheminées retirées.
En 1810
Un cirque est installé à proximité afin d’y donner une représentation des frères Franconi. À l’apogée de la vie impériale à Trianon, l’année suivante, Marie-Louise (1791-1847) utilise le Pavillon français dans le cadre de la « fête de l’Impératrice » ; à cette occasion, on dresse, comme au siècle précédent, deux grandes tentes de coutil rayé bleu et blanc avec une frange de laine rouge.
avant de se dégrader lentement.
A la fin du XIXe siècle
Le Pavillon français bénéficie d’une première campagne de restauration, peu fidèle à l’état initial. De nombreuses dorures sont ajoutées au décor des boiseries remplaçant ainsi les couleurs champêtres assorties au mobilier, dans des tons de jaune, de vert et de bleu, réalisées par le peintre ordinaire du Roi, Médard Brancourt. Ce caractère luxueux est cependant contraire à l’esprit originel d’une atmosphère bucolique
En 2008
Le Pavillon français est entièrement restauré. L’ensemble des décors, largement dégradés par le temps, est restauré : les lambris, les sculptures et parures, les plafonds, les sols de marbre et les parquets. Les deux cheminées de marbre ainsi que la hotte du réchauffoir sont rétablies. Les volets intérieurs sont recréés.
Certaines parties des reliefs étaient en fait peints en blanc et d’autres en différents tons de verts , mais des sondages n’ont pas permis de retrouver ces tons et ou ils étaient employés , ce qui explique que l’on ait préféré garder cette dorure du XIXe mais authentique plutôt que restituer un état hypothétique hasardeux.
Il est probable que les panneaux de boiseries rocailles non figuratifs des murs aient été blancs sur fond vert comme les colonnes et les trumeaux de glace , et que les reliefs historiés en dessus-de-porte et de la corniche aient été eux en plusieurs tons de verts sur fond blanc.
C’est pourquoi il a été choisi de restituer seulement les deux sortes de fonds (blancs et vert ) , dont des traces ont été découvertes avant la restauration , mais pas les couleurs des reliefs , car ceux-ci furent décapés sous le
Second Empire avant de recevoir la dorure actuelle et donc aucune trace de leurs subtiles et différents verts n’a été conservée sous celle-ci.

Sources :
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- BERTIERE, Simone, Les Reines de France au temps des Bourbons, tome 4 : Marie-Antoinette L’insoumise, éditions de Fallois, Paris, 2002, 735 p. + 32 p. de planches illustrées
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- CHAPMAN, Martin, Marie-Antoinette and the Petit Trianon at Versailles, Fine Arts Museum of, Etats-Unis, 2007
- DELALEX, Hélène, MARAL, Alexandre, MILAVANOVIC, Nicolas, Marie-Antoinette, Château de Versailles, 2013, 240 p.
- DUARTE, Christophe, Versailles passion , groupe Facebook
- https://www.facebook.com/groups/345409295656055
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