Le 24 septembre 1717
Naissance de Horatio Walpole ou Horace Walpole, quatrième comte d’Orford, fils de Robert Walpole (1676-1745), premier ministre britannique et de Robert Walpole. Il sera un homme politique écrivain et esthète britannique.
Sans lien avec la politique de son père, il est très dévoué envers le Roi George II (1683-1727-1760) et la Reine Caroline (1683-1737). Il prend leur parti contre leur fils, Frederick, prince de Galles, qu’il évoquera plus tard avec rancune dans ses mémoires.


Il écrit Le château d’Otrante, qui lance la vogue du roman noir (gothic tale en anglais). On lui doit également le concept de sérendipité (serendipity en anglais, qu’on peut traduire par deux périphrases : découverte heureuse ou inattendue ou don de faire des trouvailles).
Horace Walpole est le plus jeune fils du premier Premier ministre britannique, Robert Walpole.

Horace étudie au collège d’Eton, puis à King’s College de Cambridge.

Le 10 juillet 1736
Naissance de Maria Walpole (1736-1807), sa nièce, fille illégitime de son frère aîné, Edward Walpole (1706-1784). Sa mère est une simple couturière du nom de Dorothy Clements. Maria, future duchesse de Gloucester, sera fort proche de son oncle.

Le 20 novembre 1737
Décès de la Reine Caroline d’Ansbach (1683-1737)

Horace prend conscience de son homosexualité assez tôt.
Horace Walpole par Laetitia Hawkins
Il aurait une liaison avec le poète Thomas Gray (1716-1771) et Henry Fiennes Clinton (1720-1794), neuvième comte de Lincoln (futur second duc de Newcastle). Gray l’accompagne lors de son Grand Tour, mais ils se querellent et Walpole retourne en 1741 en Angleterre, où il entre au Parlement jusque 1768.

C’est ainsi qu’il vient pour la première fois à Paris. C’est un homme cultivé, fin, maniéré, imbu de sa naissance, plein de fantaisie , orgueilleux en diable, avec un sens aigu des convenances, craignant plus que tout le ridicule. Il est, dit-on, assez bel homme et nous savons par un de ses amis, qu’il a une très belle voix.

Il parle parfaitement le français mais avec un léger accent, tout à fait charmant. Il est tout naturellement un homme du monde.
Par respect pour son père, il est membre du Parlement de 1741 à 1768, mais son plus vif intérêt ne va pas à la politique.
Sans lien avec la politique de son père, il est très dévoué envers le Roi George II (1683-1727-1760) et la Reine Caroline (1683-1737). Il prend leur parti contre leur fils, Frederick, prince de Galles, que Walpole évoquera plus tard avec rancune dans ses mémoires.
Le 18 mars 1745
Décès de son père Robert Walpole (1676-1745), le premier véritable Premier Ministre de Grande-Bretagne de 1721 à 1742.

En 1747
Lassé des bruits de la capitale, fatigué des intrigues politiques, il acheta une petite ferme sur les bords de la Tamise, Strawberry hills. C’est un ensemble fantaisiste de style néogothique qui crée une nouvelle tendance architecturale. On ne sait s’il prévoyait que les aménagements successifs l’occuperont pendant près d’un quart de siècle.
Le 15 mai 1759
Maria épouse James Waldegrave, deuxième comte Waldegrave, seigneur de la chambre à coucher de George II et gouverneur du futur George III, dans la maison de son père à Pall Mall.

d’après Sir Joshua Reynolds (1762)
Horace Walpole écrit: «Pour le caractère et le crédit, il est le premier match en Angleterre – pour la beauté, je pense qu’elle l’est.»
« Maria est vêtue d’une robe blanche en argent, avec un chapeau très replié sur son visage; ce que l’on pouvait en voir était plus beau que jamais; un rougissement de jeune fille froide lui a donné la délicatesse la plus douce du monde.»
Le comte a plus de vingt ans de plus que Maria, mais le mariage est considéré comme un succès. Ils auront trois belles filles: Elizabeth Laura (1760), Charlotte Maria (1761) et Anna Horatia (1762).
Le 25 octobre 1760
Décès du Roi George II (1683-1760).

Le 8 avril 1763
Le comte Waldegrave meurt subitement de la variole dans Albemarle Street, à Londres. Maria est désemparée. Pendant un certain temps, elle pensera porter son enfant, mais elle doit finalement admettre que ce n’est pas le cas et les domaines sont allés au frère du comte, laissant à Maria une allocation comparativement maigre de 1000 £ par an.
Horace Walpole a de grands espoirs que Maria fasse un deuxième mariage avantageux:
« Elle est la plus belle femme d’Angleterre; comme elle est si jeune, elle peut trouver un aussi bon partenaire et un plus jeune amant – mais elle ne pourra jamais trouver un autre Lord Waldegrave!»
En 1764
Il publie son roman gothique Le Château d’Otrante (The Castle of Otranto), créant un style littéraire allant de pair avec l’architecture.
Strawberry Hill

Passionné par les souvenirs historiques, Walpole constitue une très importante collection de tableaux, dont des primitifs (fort peu prisés à cette époque) des portraits de famille par Reynolds, des médailles, miniatures, émaux et quantité d’objets d’art, dont des bronzes de la Renaissance, des porcelaines de Sèvres, des sculptures antiques, etc. où se glissent de nombreux faux ; il en assure la renommée par une description qui est publiée. Il ouvre sa galerie au public (qui compte quatre visiteurs par jour).
Strawberry Hill
On le voit presque aussi souvent à Paris qu’à Londres, fréquentant les encyclopédistes et se liant d’amitié avec eux, prenant sans effort le ton et l’esprit des salons parisiens. Son ample Correspondance, dont l’édition complète ne comporte pas moins de dix-neuf volumes, témoigne de ses curiosités, de ses goûts, de sa vive intelligence de son temps, comme du talent et de l’aisance avec lesquels il adopte le tempo voltairien.
Strawberry Hill

Une sorte de rêve intérieur s’empara de lui et il essaya de lui donner forme. Peu à peu, il se prit au jeu et l’accessoire devint l’essentiel.
Ses mémoires de la scène sociale et politique géorgienne, bien que partisans, sont une source de première main pour les historiens. Il est avant tout considéré comme le père fondateur du roman « gothique » ou de « terreur », conçu après un rêve dans le décor pseudo-médiéval que cet amateur éclectique s’était fait construire. Certaines de ces pièces de valeur appartiennent aux collections royales.
Strawberry Hill
Il est aussi l’auteur de l’épigramme souvent cité : « La vie est une comédie pour ceux qui pensent et une tragédie pour ceux qui ressentent. »
Strawberry Hill
Le 6 septembre 1766
Maria épouse William, premier duc de Gloucester, dans sa maison de Pall Mall. La cérémonie est célébrée en secret par son aumônier, le docteur Morton, et il n’y a aucun témoin.

d’après Hugh Douglas Hamilton
Marie du Deffand (1697-1780), son amie, fait d’Horace ce portrait:
« Non, non, je ne peux pas faire votre portrait, personne ne vous connaît moins que moi ; vous me paraissez tantôt tel que je voudrais que vous fussiez, tel que je crains que vous ne soyez, et peut-être jamais tel que vous êtes.
Je sais bien que vous avez beaucoup d’esprit ; vous en avez de tous les genres, de toutes les sortes, tout le monde sait cela aussi bien que moi, et vous devez le savoir mieux que personne. C’est votre caractère qu’il faudrait peindre, et voilà pourquoi je ne peux pas être bon juge ; il faudrait de l’indifférence, ou du moins de l’impartialité.
Cependant, je peux vous dire que vous êtes un fort honnête homme, que vous avez des principes, que vous êtes courageux, que vous vous piquez de fermeté, que lorsque vous avez pris un parti, bon ou mauvais, rien ne vous le fait changer, ce qui fait que votre fermeté ressemble à de l’opiniâtreté.
Votre cœur est bon, et votre amitié solide, mais elle n’est ni tendre ni facile.
La peur d’être faible vous rend dur, vous êtes en garde contre toute sensibilité ; vous ne pouvez pas vous refuser à rendre à vos amis des faveurs essentielles, vous leur sacrifiez vos propres intérêts, mais vous leur refusez les plus petites complaisances.
(…)
La connaissance que vous avez du monde et votre expérience vous ont donné un grand mépris pour tous les hommes, et vous ont appris à vivre avec eux ; vous savez que toutes leurs démonstrations ne sont que faussetés, vous leur donnez en échange des égards et de la politesse en tout.
Aussi, ceux qui ne se soucient point d’être aimés sont contents de vous.
(…)
Vous êtes philosophe ; vous n’avez point de vanité, quoique vous avez beaucoup d’amour-propre ; mais votre amour-propre ne vous aveugle point, il vous exagère vos défauts plutôt que de vous les cacher.
(…)
Vous avez du discernement, le tact très fin, le goût très juste, le ton excellent ; vous auriez été de la meilleure compagnie du monde dans les siècles passés ; vous l’êtes dans celui-ci, et vous le seriez dans ceux à venir.
(…)
Vous avez une faiblesse qui n’est pas pardonnable, vous y sacrifiez vos sentiments, vous y soumettez votre conduite : c’est la crainte du ridicule.
Elle vous rend dépendant de l’opinion des sots, et vos amis ne sont point à l’abri des impressions que les sots veulent vous donner contre eux.
Votre tête se trouble facilement, c’est un inconvénient que vous connaissez, et auquel vous remédiez par la fermeté avec laquelle vous suivez vos résolutions ; votre résistance à ne vous en jamais écarter est quelquefois poussée trop loin, et sur des choses qui n’en valent pas la peine.
Vos sentiments sont nobles et généreux, vous faites le bien pour le plaisir de le faire, sans ostentation, sans prétendre à la reconnaissance ; enfin votre âme et belle et bonne.»
Marie du Deffand par Jean-Marc Nattier
Grand défenseur du style gothique à l’époque préromantique, Walpole fait édifier, décorer et meubler sa villa de 1748 à 1753, où il installe ses très importantes collections d’objets d’art; il en assure la renommée par une description qui est publiée, et cette demeure devient une source d’inspiration pour Byron et Walter Scott.

Horace Walpole par John Giles Eccardt, vers 1755
Quand son neveu George meurt célibataire, Horace devient le quatrième comte d’Orford.
Portrait d’Horace Walpole (1757) par Joshua Reynolds


C’est donc un sexagénaire qui admire avec les formules que l’on connaît bien les premiers pas de Marie-Antoinette en tant que Reine de France…
La bibliothèque de Strawberry Hill

Le 21 août 1775
Il assiste au mariage de Madame Clotilde (1759-1802), sœur de Louis XVI, et du prince de Piémont, futur Charles-Emmanuel IV de Sardaigne (1751-1819), frère des comtesses de Provence et d’Artois.

Il laisse un témoignage sur cette grande fête versaillaise, on devine à travers ses mots l’éblouissement de la soirée :
« La nuit dernière, je me suis glissé au bal paré et comme j’ai une foule d’amis, on m’a placé sur le banc des ambassadeurs, juste derrière la famille royale. Le bal avait lieu dans la salle de spectacles la plus brillante de l’univers et où le goût l’emporte encore sur la richesse… Quant à la nouvelle princesse de Piémont, son visage est éclatant de fraîcheur et le reste à peu près de la dimension de lord Holland, ce qui ne fait pas bien dans une robe à corsage raide…»
Mais manifestement, c’est Marie-Antoinette, souveraine parmi les souveraines qui retient tous les regards :
«On ne pouvait avoir des yeux que pour la Reine. Les Hébé et les Flores, les Hélène et les Grâces ne sont que des coureuses de rue à coté d’elle. ( … )
Quand elle est debout ou assise, c’est la statue de la beauté ; quand elle se meut, c’est la grâce en personne. (… ) Elle avait une robe d’argent semée de lauriers-roses, peu de diamants et de grandes plumes.
On dit qu’elle ne danse pas en mesure, mais alors, c’est la mesure qui a tort ( …. )»

En fait de beautés, je n’en ai vu aucune, ou bien la Reine les éclipsait toutes …


Walpole n’est pas seulement un des conteurs les plus originaux de sa génération, mais aussi un précurseur du surréalisme et le véritable inventeur de l’écriture automatique.

Ses petites-nièces: Lady Maria Waldegrave, Laura vicomtesse Chewton and Lady Horatia Waldegrave, par Sir Joshua Reynolds (1780)
Il l’a pressenti. A madame du Deffand, il confie :
« Je n’ai pas écrit mon roman pour ce siècle-ci, qui ne veut que de la raison froide (…) il ne sera goûté que plus tard.»
La galerie de Strawberry Hill 
Horace Walpole n’est ni châtelain, ni moine, mais ses caprices de grand seigneur cachent une aspiration plus profonde, comme en témoignent ses ouvrages d’érudition. Il fait des recherches sur l’origine du gothique et ses travaux sont salués comme une contribution importante à l’étude de ce sujet.
« C’est toute leur connaissance du cœur humain et de ses passions, qu’architectes et prêtres médiévaux firent passer dans ces édifices. Il faut du goût pour apprécier une architecture classique, il suffit d’être capable de passion pour aimer le gothique.»
Cette interprétation émotionnelle du gothique rejoint les thèses de Warton.
« Dans son remarquable ouvrage Le roman gothique anglais, il écrit : pour qu’un roman puisse être qualifié de gothique, il doit nécessairement réunir trois caractéristiques dominantes : l’usage d’une architecture médiévale, la présence de l’Au-Delà (réel ou non), et une atmosphère d’angoisse et de mystère.»
En lui s’associaient l’engouement populaire pour le style médiéval et l’érudition la plus vraie.

La voûte de la galerie de Strawberry Hill
Le 2 mars 1797
Horace Walpole meurt à Londres dans sa quatre-vingtième année.

Célibataire, Horace n’a pas d’enfant, mais on peut considérer sa nièce, Maria Walpole (1736-1807), comtesse Waldegrave puis duchesse de Gloucester et d’Édimbourg, comme son héritière.

Ses descendants transformeront l’aile des écuries en chambres d’hôtes reliées au château de Strawberry Hill par une salle à manger, une salle de bal et un billard.
La chapelle de Strawberry Hill dans les bois
Dès 1861, Strawberry Hill recevra des personnalités politiques et diplomatiques d’Angleterre et d’Europe.

par Thomas Gainsborough
Sources :
- Les photographies de Strawberry hill sont de Rachel Knowles, auteure du site Histoire de la Régence, https://www.regencyhistory.net/