Marie-Caroline de Habsbourg-Lorraine, Reine de Naples

Marie-Caroline par E lisabeth Vigée Le Brun (détail)

Le 13 août 1752

Naissance à la Hofburg, à Vienne de Marie-Charlotte Louise Jeanne Josèphe Antoinette (1752-1814), treizième des seize enfants qu’auront  François Ier (1708-1765), Empereur du Saint-Empire et  Marie-Thérèse d’Autriche (1717-1780), Reine de Hongrie et de Bohême.

L'empereur François Ier par Pompeo Batoni, en 1771, qui entoure l'Empereur des figures emblématiques de la Justice, de la Clémence, de la Force et de la Vérité, qu'il lui fait désigner d'un geste auguste.
L'Empereur François Ier par Pompeo Batoni
Marie-Thérèse par Martin van Meytens

L’enfant est baptisée le jour même de sa naissance, recevant pour parrain et marraine les souverains français Louis XV (1710-1774) et Marie Leszczyńska (1703-1768). Marie-Caroline est la troisième Archiduchesse à porter ce prénom de Caroline, après la deuxième fille du couple (1740-1741) et la dixième (1748). L’une n’a vécu qu’un an, l’autre est morte-née, ce prénom est donc un hommage à ces soeurs aînées.

Marie-Thérèse aurait préféré s’arrêter au dixième enfant, mort-né.

 Lettre sans date mais sûrement de septembre 1748 de l’Impératrice à son amie Antonia de Saxe :

« Je serais assez contente de finir avec dix enfants, car je sens que cela m’affaiblit et me vieillit beaucoup. Ce dont je ne me soucierais pas si cela ne me rendait moins capable pour le travail de la tête.»

Correspondance entre l’impératrice Marie-Thérèse et l’électrice Maria-Antonia de Saxe

Mais les moyens de contraception étant alors inexistants, Marie-Thérèse ne compte pas encore sacrifier sa vie amoureuse avec son mari tendrement chéri. Les enfants nés par la suite sont donc peu désirés par la mère. Il n’empêche :  si Marie-Caroline fait peu l’objet d’attentions de la part de sa mère durant son enfance, adulte elle deviendra sa fille en qui elle se reconnaitra le plus. Les enfants du couple impérial reçoivent une éducation conforme à leur rang qui se doit d’être avant tout religieuse. Celle-ci commence à leurs trois ans. De par le peu d’années qui les séparent, Marie-Caroline aurait pu rejoindre Jeanne-Gabrielle et Marie-Josèphe. Mais il a été préféré de la laisser avec les suivants. De par la multiplicité des langues au sein des vastes territoires des Habsbourg, elles doivent apprendre l’allemand, en plus du dialecte viennois, le français, la langue maternelle de leur père, l’italien, mais aussi le latin, le hongrois et le tchèque. Des rapports quotidiens, sur chacun de ses enfants sont donnés à la souveraine qui répond point par point. Ceci permettant de compenser les absences de la mère, trop occupée par les affaires d’Etat. Très vite, les petits Archiducs et Archiduchesses se doivent d’accompagner leur mère à l’église, aux processions et aux pèlerinages dont Marie-Thérèse est très férue. Les tout-petits, nés à peu d’intervalle sont logés dans ce qu’on appelle la «Kindskammer» («la chambre d’enfant») où ils sont généralement confiés aux soins d’une demoiselle de chambre et de ses assistantes.

Marie-Thérèse tenant Marie-Caroline dans ses bras par Giuseppe Bonito
Portrait de la famille impériale par Martin Van Meytens, 1752
Portrait de la famille impériale par Martin Van Meytens, 1754, même pose.

Le 1er juin 1754

Naissance de son frère Ferdinand (1754-1806).

Le 2 novembre 1755

Naissance de sa sœur Marie-Antoinette (1755-1793).

C’est avec Elle que Marie-Caroline, de trois ans plus âgée, sera élevée.

https://www.marie-antoinette-antoinetthologie.com/wp-content/uploads/2018/10/1755.jpg

Le 10 février 1756

Lors de festivités à la Hofburg de Vienne, toutes les archiduchesses sont habillées en fleurs, y compris la plus jeune d’entre elles, âgée seulement de trois mois.

Le 1er mai 1756

Signature à Versailles du traité d’alliance entre la France et l’Autriche, mettant fin à plus de deux cent cinquante ans de rivalité entre les deux puissances.

Le 25 mai 1756

Ratification du traité à Vienne.

Début de la guerre de Sept ans.

Portrait de la famille impériale par Martin Van Meytens, 1756, même pose.

Le 8 décembre 1756

Naissance à la Hofburg à Vienne de l’Archiduc Maximilien François d’Autriche (1756-1801), futur évêque de Münster et archevêque-électeur de Cologne.

Les derniers enfants du couple impérial, beaucoup plus solidaires entre eux que les aînés, craignent tous cette sœur aînée peu agréable et ne la fréquentent guère.

La petite Madame Antoine et Sa grande sœur, qui est aussi Sa préférée, Charlotte

Le 19 janvier 1757

L’Archiduc Joseph, héritier du trône des Habsbourg est atteint de petite vérole. On craint pour sa vie et on craint aussi que l’épidémie se répande au sein de la famille impériale.

Marie-Caroline enfant par Liotard

Dès l’âge de cinq ans, chaque enfant se voit attribuer un appartement, composé de plusieurs pièces. En plus de l’Aja (l’Ajo pour les Archiducs), qui est la personne responsable, plusieurs professeurs et un confesseur particulier assument l’éducation des enfants. Une éducation générale leur est donnée, mais ensuite chacun des petits princes et princesses développe avec des professeurs particuliers des spécificités propres, en fonction de ses talents, mais aussi de son avenir envisagé. Outre les langues, on y trouve la lecture et l’écriture, l’histoire, la géographie, la géométrie, les mathématiques, la musique et la danse. Marie-Thérèse et François-Etienne veulent développer le plus possible chez chacun de leurs enfants des talents artistiques. Des rapports quotidiens, sur chacun de ses enfants sont donnés à la souveraine qui répond point par point. Ceci permettant de compenser les absences de la mère, trop occupée par les affaires d’Etat. Si Marie-Thérèse s’occupe de chaque détail de l’éducation de ses enfants, elle n’en est pas moins une mère terrible. Une miniature qui représente le régime disciplinaire de Marie-Thérèse :

Artiste inconnu (1750) - Musée National de Varsovie

Les enfants sont soumis à un strict emploi du temps, rédigé de la main de l’Impératrice :

Huit heures du matin, réveil et prière «élévation à Dieu» et se lever du lit.
Neuf heures, prière du matin, toilettes et petit déjeuner.
Neuf heures et demie : la kammerfrau (la femme de chambre) fait répéter et apprendre par cœur le catéchisme
De neuf heures et demie à dix heures, permission de jouer.
Onze heures : une demi-heure d’écriture et de nouveau récréation
De onze heures à onze heures et demie: confession
Midi : heure du déjeuner et de la liberté
A deux heures après midi :  de nouveau récréation
A quatre heures après midi : cours de français
A cinq heures du soir : amusement avec les jeux de cartes, livres et enseignement des mots français par des images ou danse.
A six heures du soir : réciter le Noster Pater pour rappeler toujours la présence de Dieu.
A sept heures et demie du soir : dîner
A huit heures et demie du soir : nettoyage du soir et lit.
Quand le temps le permettra, «nous modifierons les horaires afin qu’on puisse sortir en calèche en hiver et se promener dans le jardin
en été.»

Les heures d’études sont complétées par les professeurs de musique, de dessin et de langues. Chaque matin, l’impératrice recevait le rapport médical du Docteur Van Swieten, qui lui rapportait l’état de santé de ses enfants. L’Impératrice voit les enfants tous les huit ou dix jours. La femme de chambre était autorisée à punir et à fouetter les jeunes princesses.

Les Archiduchesses Marie-Josèphe, Marie-Caroline et Marie-Antoinette et le petit Archiduc Maximilien (1760) par Liotard

En octobre 1760

Mariage de son frère l’Archiduc héritier Joseph avec Isabelle de Bourbon-Parme (1741-1763), petite-fille du Roi de France Louis XV et premier mariage scellant l’alliance de 1756 entre les Bourbons et les Habsbourgs.

Réunion de la famille impériale à l'occasion des fêtes du mariage de l'Archiduc héritier Joseph et d'Isabelle de Parme ; le couple impérial est au centre, entouré par les nouveaux mariés, le marié près de son père, la mariée près de sa belle-mère. Les quatre autres Archiducs se répartissent ensuite, deux par deux, puis les Archiduchesses se divisent en deux groupes de quatre, chaque série commençant par une des aînées, soit Marie-Anne, soit Marie-Christine, suivies ensuite de leurs cadettes par ordre décroissant. Marie-Antoinette est donc une des deux petites Archiduchesses aux extrémités, l'autre étant Marie-Caroline.

Pour cette dernière composition, Marie-Thérèse demande à l’artiste de rajouter ses derniers enfants qui n’avaient pu assister aux cérémonies car alors trop jeunes : les Archiducs Ferdinand, Maximilien et leurs sœurs Marie-Caroline et Marie-Antoinette. Il place aussi le jeune prodige Wolgang Gottlieb Mozart que l’on peut repérer dans la foule. Il n’était au moment des faits qu’un simple bambin de quatre ans parfaitement inconnu mais qui était depuis devenu une célébrité internationale.

En octobre 1760

Mariage de son frère l’Archiduc héritier Joseph avec Isabelle de Bourbon-Parme (1741-1763), petite-fille du Roi de France Louis XV et premier mariage scellant l’alliance de 1756 entre les Bourbons et les Habsbourgs.

Détail montrant le jeune Mozart devenu en quelques années une véritable «star».

Le 26 décembre 1760

Nouvelle épidémie de variole au sein de la famille impériale.

L’Archiduc Charles-Joseph tombe malade.


Le 18 janvier 1761

Mort de son frère Charles-Joseph, héritier en second et fils préféré de Marie-Thérèse.

 

 

 

Le 20 mars 1762

Naissance de Marie-Thérèse, fille de l’Archiduc Joseph, héritier du trône des Habsbourg et d’Isabelle de Bourbon-Parme. Elle est la petite-fille aînée de l’Impératrice.

Marie-Thérèse, fille de Joseph II
Miniature de Reisperger en 1760, où la petite Antonia est entourée de ses sœurs Charlotte (Caroline) et Josèphe
Antoine et Charlotte , Archiduchesses d'Autriche

De juin à novembre 1762

Le peintre suisse Liotard dessine au pastel tous les membres de la famille impériale.

Marie-Thérèse d'Autriche par Liotard (1762)
Madame Charlotte par Liotard
Madame Antoine par Liotard

 

Le 22 décembre 1762

Mort de sa sœur Marie-Jeanne-Gabrielle.

Nuit du 26-27 novembre 1763

Mort d’Isabelle de Bourbon-Parme. Chagrin immense de la famille impériale. On ignore quels furent les sentiments de la jeune Antonia à ce sujet. Isabelle n’évoque jamais la plus jeune des archiduchesses dans sa correspondance avec Marie-Christine.

Les trois filles les plus jeunes de Marie-Thérèse: Marie-Josèphe, Marie-Caroline et Marie-Antoinette par Martin Van Meytens

Le 25 janvier 1765

Le mariage de Joseph II avec Maria Josepha de Bavière.

Lors de cette cérémonie, les Archiducs et Archiduchesses avaient donné un spectacle…

Le 5 août 1765

Mariage de l’Archiduc Léopold avec Marie-Louise d’Espagne à Innsbruck.

Le 18 août 1765

Mort de son père, l’Empereur François Ier, lors des festivités du mariage de Léopold à Innsbruck.

Portrait posthume de l'Empereur François Ier par Johann Zoffany en 1777

 

Marie-Antoinette racontera, en 1790, à  Mesdames de Tourzel, de Fitz-James et de Tarenteaux que l’Empereur François Ier, partant pour l’Italie, d’où il ne devait jamais revenir , rassemble ses enfants pour leur dire adieu :

« J’étais la plus jeune de mes sœursmon père me prit sur ses genoux, m’embrassa à plusieurs reprises, et, toujours les larmes aux yeux, paraissant avoir une peine extrême à me quitter. Cela parut singulier à tous ceux qui étaient présents, et moi-même je ne m’en serais peut-être pas souvenue si ma position actuelle , en me rappelant cette circonstance, ne me faisait voir pour le reste de ma vie une suite de malheurs qu’il n’est que trop facile de prévoir.»

Avènement de Joseph II qui partage le pouvoir avec Marie-Thérèse.

Joseph II par Anton von Maron

Janvier 1766

Mariage de l’archiduchesse Marie-Christine (1742-1798) avec  Albert de Saxe-Teschen (1738-1822), frère de la Dauphine Marie-Josèphe de Saxe, mère du duc de Berry.

Le 1er février 1766

Marie-Caroline assiste à la cérémonie faisant de sa sœur Marie-Anne l’abbesse du chapitre des Nobles Dames de Prague.

Le 3  février 1766

Visite de la famille impériale de la fabrique de laiton à Wiener-Neusdadt.

Le 6 février 1766

Course de traîneaux et carrousel à Schoënbrunn.

Le 5 mai 1766

Marie-Antoinette, Marie-Caroline, Ferdinand et Maximilien ont la «petite vérole volante», c’est-à-dire la varicelle, « sans danger pourtant» d’après Marie-Thérèse à son amie la comtesse d’Enzenberg.

Miniature sur ivoire. Marie-Christine est à l'extrême gauche, en compagnie de son époux Albert de Saxe, duc de Teschen... Maximilien, Marie-Elisabeth, Marie-Anne et Joseph II  autour de Marie-Thérèse... L'œuvre est de Heinrich Füger.
L'Empereur Joseph II et ses sœurs Marie-Anne et Marie-Elisabeth

 

En 1767

L’Archiduchesse Marie-Elisabeth (1743-1808) est atteint de petite vérole. Elle s’en sort mais enlaidie, elle ne peut plus prétendre au mariage.

 

Le 28 mai 1767

Mort de Marie-Josepha de Bavière, seconde épouse de l’Empereur Joseph II.

 

Le 15 octobre 1767

Mort de l’Archiduchesse Marie-Josèphe (1751-1767), sœur de Marie-Caroline.

Marie-Caroline par le maître des portraits des Archiduchesses, vers 1765-67

 

 

En 1768

C’est à la mort prématurée de deux de ses sœurs, Marie-Jeanne (1750-1762) et Marie-Josèphe (1751-1767) que Charlotte doit son mariage avec Ferdinand IV de Naples (1751-1825), le souverain est très grand, fort laid et de plus doté d’un caractère brutal.

L'Archiduchesse Marie-Josèphe
Image de Ferdinando and Carolina (1999) de Lina Wertmüller
Le jeune Ferdinand IV de Naples par Giusepe Bonito

Comme ce sera plus tard le cas pour Marie-Antoinette, le mariage de celle qui devient Marie-Caroline a lieu à Vienne par procuration.

Au moment de quitter Vienne, en avril 1768, Marie-Caroline saute de la voiture au dernier moment pour donner à son Antoine adorée une série d’étreintes passionnées et larmoyantes.

Image de Marie-Antoinette (2006) de Sofia Coppola

Le 12 mai 1768

Mariage de l’Archiduchesse Marie-Caroline avec Ferdinand Ier des Deux-Siciles.

Bella gerant alii, tu felix Austria nube… voici donc la petite Caroline, à seize ans à peine, embarquée pour un pays qu’elle ne connaît pas, mais dont la culture est bien loin de la douceur de vivre de Vienne.

Ferdinand IV
Marie-Caroline d'Autriche par un artiste inconnu
Image du film Ferdinando and Carolina (1999) de Lina Wertmüller

D’emblée, son mari la déçoit. Il lui paraît rude et peu doué pour l’art de la conversation. De son côté, il ne semble pas plus intéressé par sa jeune épouse, si bien que Caroline écrira à madame de Lerchenfeld, la nouvelle gouvernante, qu’elle est désespérée et qu’elle nourrit les pires craintes pour l’avenir de sa chère Antoine.

« C’est un véritable désespoir ; on souffre le pire des martyres et on doit faire semblant d’être heureuse.»

Portrait de  Ferdinand IV par Angelika Kauffmann

 

Elle n’oubliera pas de demander que soient transmises ses pensées à sa sœur, qu’elle aime  extraordinairement  (le mot est d’elle). Malgré la distance, elle continue de s’intéresser à Elle et de veiller sur Elle.

Peu encourageant endroit que cette cour de Naples… Ferdinand se conduit comme un ours, « un pauvre diable, dira Acton, la nature ne l’ayant pas doté des facultés nécessaires pour devenir mauvais homme.»

Marie-Caroline

Jusqu’à ce que le jeune Roi atteigne ses seize ans, les rênes du royaume étaient restées entre les mains de Bernardo Tanucci et de Domenico Cattaneo, et, à l’arrivée de Caroline, le pouvoir du premier est toujours énorme.

Image de Ferdinando and Carolina (1999) de Lina Wertmüller

On est bien loin du raffinement de Vienne. Une grande partie de la population napolitaine est très pauvre, et la cour elle-même offre de surprenants aspects, comme le constatera Joseph II :

« Le palais de Naples contient cinq ou six salles ornées de fresques et de marbre, emplies de volailles, de pigeons, de canards, d’oies, de perdrix, de cailles, d’oiseaux de toutes sortes, de canaris, de chiens et même de cages contenant des rats et des souris, ouvertes, de temps en temps, par le roi, pour le plaisir de la chasse.»

Sergio Assisi et Gabriella Pession sont Ferdinando and Carolina (1999) de Lina Wertmüller
Marie-Caroline d'Autriche, Reine de Naples et de Sicile (1768) par Eusebius Johann Alphen
Ferdinand Ier et Marie-Caroline
Marie-Caroline

« Mon mari est répugnant »

L’histoire conjugale entre Ferdinand de Bourbon et Marie-Caroline d’Autriche ne commence pas bien.

 Marie-Caroline d’Autriche est une femme cultivée et royale, Ferdinand un homme grossier et vulgaire élevé parmi les lazzari.

Marie-Caroline par Martin van Meytens
Sergio Assisi et Gabriella Pession sont Ferdinando and Carolina (1999) de Lina Wertmüller

Marie-Caroline est sensible au théâtre, Ferdinand déclenche les rires du public en mangeant d’énormes quantités de nourriture avec les mains.     Au dîner Marie-Caroline divertit les invités en chantant et en jouant du clavecin. Ferdinand veut les spectateurs alors qu’il est sur sa chaise percée. Pourtant, le vulgaire et sympathique Ferdinand et Marie-Caroline auront une histoire tumultueuse et brûlante : dix-huit enfants, différents amants attribués à tous les deux, un lien inconditionnel et des disputes homériques et violentes…

Marie-Caroline, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, entreprend alors la conquête de son mari  :

« Elle a le teint ravissant, les cheveux châtain clair et soyeux et les sourcils plus foncés, de grands yeux brillants d’un bleu profond, un nez plutôt aquilin, une bouche petite aux dents blanches et régulières, avec des lèvres très rouges qui n’ont pas la lourdeur de celles des Autrichiennes, un sourire creusant d’agréables fossettes. Elle est juste assez bien en chair pour ne pas paraître maigre ; son cou est long, son maintien plein d’aisance, sa démarche majestueuse et ses gestes gracieux.»

            Lady Anne Miller

Son allure a l’heur de satisfaire son frère Joseph lors de sa visite, il ne la trouvera ni coquette, ni frivole. Tout au plus déplorera-t-il les expressions napolitaines qu’elle emploie à présent, et qui rendent son italien moins pur. On peut aussi y voir le souci de la Reine de s’intégrer à son nouvel environnement.

Le 16 mai 1770

Le Dauphin Louis-Auguste, épouse sa sœur Marie-Antoinette d’Autriche.

Louis-Auguste, Dauphin de France par Louis-Michel Van Loo
Gravure du mariage de Marie-Antoinette avec le Dauphin, le 16 mai 1770
Marie-Antoinette Dauphine, huile sur toile de Joseph Ducreux, 1770

Marie-Caroline s’intègre, certes, mais elle réforme surtout à sa manière l’austère cour encore marquée par l’influence de Bernardo Tanucci (1698-1783). Pour ce faire, la Reine assouplit l’Étiquette. Elle introduit aussi des usages autrichiens, comme cette habitude de servir le café sur des petites tables agréablement disséminées.

Marie-Caroline, en 1772, par Anton Raphael Mengs

 

 

 

Comme à ses autres filles, Marie-Thérèse avait recommandé à Charlotte de rester autrichienne de cœur. Une promesse que celle-ci n’oubliera jamais, se plaisant à favoriser ses compatriotes parmi les artistes et à parler allemand dans ses antichambres.

 

Silvana De Santis est la grande Marie-Thérèse  dans Ferdinando and Carolina (1999) de Lina Wertmüller
Le premier ministre Bernardo Tanucci
L'Impératrice Marie-Thérèse

«(…) la reine de Naples, est encore plus généreuse qu’elle n’était et a peut-être plus d’élévation qu’elle n’en avait. Elle tient cela de leur mère («C’est le seul enfant de Marie-Thérèse qui lui ressemble»), mais imprudente et confiante elle dit à plusieurs personnes ce qu’elle devrait dire à personne et qui se trouve public sans qu’on sache de quelle part. Elle est par là embarrassante et elle en soupçonne le plus discret.»

           Description de Marie-Caroline par le Prince de Ligne

Ferdinand IV par Anton Raphael Mengs
Marie-Caroline par Martin Van Meytens

 

Le 6 juin 1772

Elle accouche d’une petite fille, nommée comme il se doit Marie Thérèse (1772-1807). Un garçon eût toutefois comblé ses vœux : elle aurait pu alors assister au conseil d’Etat car, à la différence de sa sœur Antoinette, son contrat de mariage prévoit cette clause. Et Caroline est très ambitieuse…

Marie-Thérèse de Naples , portrait anonyme
Marie-Caroline, en 1772, par Anton Raphael Mengs

 

Le 27 juillet 1773

Marie-Caroline accouche de Louise de Bourbon-Siciles (1773-1802), future épouse de Ferdinand IV de Toscane.

Marie-Caroline d'Autriche
Louis XV par Armand-Vincent de Montpetit

En 1775

Marie-Caroline fait son entrée officielle en politique. Son grand écueil est de contrer l’influence de son beau-père, qui prétend gouverner Naples depuis l’Espagne.

Le 10 mai 1774

Louis XV meurt de la petite vérole à Versailles vers quatre heures de l’après-midi. Il avait soixante-quatre ans.

Le Dauphin Louis-Auguste devient Roi sous le nom de Louis XVI.

Et sa soeur, Marie-Antoinette, devient Reine de France !

Marie-Thérèse de Naples , miniature

Sous son patronage, la vie culturelle de Naples se développe, partout s’ouvrent des salons où l’on cause. La Reine elle-même, très érudite et intelligente, s’entoure de beaux esprits et, sensible aux Lumières, fréquente des francs-maçons. Elle entre ainsi dans la confrérie.

Le peuple est heureux et chante les louanges du gouvernement paternel de Ferdinand, alors qu’en fait, il est de plus en plus dirigé par sa femme. C’est la période faste du carnaval autrichien après le carême espagnol…

Marie-Antoinette au Globe (1775) par Jean-Baptiste Gautier-Dagoty

Le 4 janvier 1775

Naissance de son fils Charles de Naples et Sicile (1775-1778).

Portrait de famille par Franz Linder
Marie-Caroline
Marie-Caroline
Le château de Caserte

Désireux de construire un palais qui pourrait rivaliser en magnificence avec le château de Versailles, modèle palatial de toute l’Europe régnante, Charles III de Bourbon (1716-1788), alors Roi de Naples et de Sicile, se tourne en 1751 vers Caserte, lieu où il possède déjà un pavillon de chasse et qui lui rappelle le paysage de San Ildefonso en Espagne. La tradition veut que son choix se soit porté sur la ville parce que, loin du Vésuve et de la mer, elle garantit une protection en cas d’éruption du volcan et contre les incursions ennemies.

Le palais de Caserte

Le palais se veut le symbole du nouveau régime bourbonien : il doit matérialiser la puissance et la magnificence, tout en incarnant l’efficacité et la rationalité. Charles envisage également un plan politique plus vaste : à l’image de Versailles, il s’agirait de déplacer à Caserte non seulement la cour, mais aussi les principales structures administratives de l’État, tout en reliant le palais à la capitale, Naples, par une avenue monumentale de plus de vingt kilomètres. Ce plan ne fut cependant jamais réalisé.

Plan du palais de Caserte

 

Charles supervise lui-même l’élaboration des plans par son architecte Luigi Vanvitelli et se montre très ému par les premières propositions qui lui sont montrées. La pose de la première pierre, le 20 janvier 1752, se déroule le jour de son trente-sixième anniversaire et les travaux avancent dans un premier temps rapidement. Cependant, le souverain ne verra cependant jamais la réalisation de son rêve, puisqu’il abdique en 1759 pour ceindre la couronne espagnole.

 

En 1767, après la majorité de Ferdinand et à la suite de l’éruption du Vésuve qui avait menacé le palais royal de Portici, les travaux de Caserte prennent un nouvel élan, avec une augmentation du budget alloué.

 

Deux ans plus tard, lors du carnaval de 1769, Ferdinand et sa nouvelle épouse, Marie-Caroline d’Autriche, inaugurent le premier espace intérieur du palais : le théâtre royal. C’est le seul projet achevé que verra Luigi Vanvitelli, qui s’éteint quelques années plus tard, en 1773. Son fils, Carlo Vanviletti, reprend la direction du chantier et, tout en demeurant fidèle aux plans initiaux, revoit à la baisse les ambitions architecturales de son père.

Le château de Caserte

Les jardins du Palais de Caserta sont très impressionnants. La fontaine, qui traverse le milieu du jardin, mesure près de trois kilomètres de long. De gros poissons nagent dans la fontaine. Le palais de Caserte est situé près de Naples, ce qui vous offre également une vue sur le volcan voisin, le Vésuve. Ce palais n’est pas le seul en Europe à posséder un jardin impressionnant.

La fontaine cascade dans l'axe du château de Caserte

Pour l’approvisionnement de l’eau nécessaire au fonctionnement de tous les éléments du parc, Vanvitelli a dû spécialement construire un aqueduc qui parcourt la campagne sur de nombreux kilomètres :

L’escalier d’honneur, est l’entrée du palais. Ce bel espace se compose d’impressionnants travaux de marbre, agrémentés de fresques et de statues de grands lions.

Quelques années plus tard, le 7 octobre 1780, près de trente ans après le début du chantier, la famille royale et la cour peuvent enfin s’installer dans un palais qui est encore loin d’être achevé. Cependant, ne voulant pas attendre que les chambres du Roi et de la Reine soient prêtes, Ferdinand IV et Marie-Caroline décident d’habiter aussitôt les appartements initialement destinés aux princes. La Reine entreprend de décorer Caserte, réunissant notamment une importante galerie d’art et un grande collection de porcelaine.

Plan original par Vivantelli de l'une des façades :  le vestibule au centre et enfin la chapelle, à l'étage, sur la gauche.
La salle-du-trône du palais de Caserte

Le chantier se poursuit tout au long de la décennie : les décors des appartements royaux sont achevés en 1784, la chapelle palatine est inaugurée pour les fêtes de Noël de la même année et, cinq ans plus tard, en 1789, l’économiste Guiseppe Maria Galanti estime que les travaux ont déjà coûté sept millions de ducats et que plus de deux mille personnes y sont employées.

Toutefois, le couple royal ne profitera que relativement peu de temps de Caserte, la Cour ne s’y installera jamais de façon permanente et le palais ne sera jamais occupé à plus de son quart au XVIIIe siècle.

La chapelle du palais de Caserte
L'opéra du palais de Caserte

Ce qui rend le Palais de Caserta si spécial, c’est qu’il possède un théâtre. Cette belle salle contient des peintures détaillées et colorées et un endroit spécial où le Roi peut s’asseoir. La loge royale est juste en face de la scène, pour qu’il puisse voir clairement le spectacle.

L'opéra du palais de Caserte
Le salon des Hallebardiers
Le salon d'Alexandre
La salle du Conseil Des décisions importantes ont été prises dans cette salle. La pièce dorée contient des meubles à l'ancienne, de grands miroirs et des tableaux. Les lustres rendent cette pièce vraiment royale.
Ferdinand IV et Marie-Caroline
La bibliothèque, contrairement aux autres pièces, contient beaucoup de bois. Les armoires sont faites de ce matériau. Il y a de grands bougeoirs sur le placard, de sorte qu'il était plus facile de lire quand il faisait sombre. Les tableaux au-dessus des bibliothèques et au plafond complètent la bibliothèque.
Cette chapelle privée appartenait au pape Pie VII. Sur les murs, vous trouverez des peintures de personnages importants de la Bible.

Fin 1775

Naissance de sa fille Marie-Anne (1775-1780).

Ferdinand et Marie-Caroline en famille par Carlo Marsigli

En 1777

Le triomphe de Marie-Caroline est complet , lorsqu’elle parvient à soustraire son mari à l’étau de Bernardo Tanucci. Alors, Ferdinand, de naturel plutôt faible, s’en remet entièrement à son épouse.

« La reine de Naples est imprudente et confond et compromet par sa trop grande mobilité dans l’esprit; mais quel roi, bon Dieu, que son mari, par la nullité et son courage qu’un marcassin mit en déroute.»

            Le prince de Ligne

Maîtresse femme, Marie-Caroline parvient tout ensemble à favoriser les arts, la culture, les découvertes archéologiques tout en enrichissant sa propre érudition, à résister aux intrigues de la cour avec subtilité, à pratiquer la politique d’une main de maître, développer ses palais avec un goût exquis, s’occuper attentivement de ses enfants… et en faire !

Marie-Caroline et ses enfants

Le 14 août 1777

Naissance de son fils François Janvier Joseph de Bourbon (1777-1830), qui deviendra Roi des Deux-Siciles le 4 janvier 1825.

Entre 1772 et 1793, Caroline mettra en effet au monde dix-huit enfants. Ils feront à la fois son bonheur et son malheur… Sa joie, parce qu’elle veille sur leur éducation avec beaucoup d’intérêt. Mais sa souffrance, aussi, parce que, sur dix-huit, sept seulement survivront. Les autres seront arrachés à son affection, parfois dans des circonstances affreuses.

C’est cependant un couple vraiment étrangement assorti, du reste se répugnent-ils réciproquement.

« Elle sue comme un porc et elle sent mauvais», dit-il de sa tendre moitié …

La Famille royale de Naples par Angelica Kauffman, 1783
La loge royale du théâtre San Carlo de Naples

Maintenant débarrassée du joug espagnol, Marie-Caroline peut mettre en avant les intérêts de la maison d’Autriche. Pour réorganiser sa marine, elle se tourne vers son frère Léopold (1747-1792), qui lui envoie Lord John Acton (1736-1811). Bien vite, les prérogatives d’Acton débordent sur le domaine intime et il devient le confident et le favori de la Reine. Pendant une vingtaine d’années, Marie-Caroline  régnera donc sur Naples avec une sagesse et une efficacité que lui reconnaissent même ses ennemis. Mais son naturel impulsif lui fera commettre des erreurs, sa générosité aussi… on a pu lui reprocher d’avoir ruiné le pays en œuvres charitables.

Sa fille aînée Marie-Thérèse
Lord Acton
Sa fille Louise-Marie

Le 17 décembre 1778

Décès de son fils Charles de Naples et Sicile (1775-1778), de la variole.

Il est enterré à la Basilique Santa Chiara de Naples.

  Il est le premier de sept de leurs enfants à mourir de la maladie.

Marie-Caroline
Carlo de Naples et de Sicile, duc de Calabre, troisième enfant et fils aîné de Marie-Caroline d'Autriche et de Ferdinand IV

Le 19 décembre 1778

Naissance du premier enfant de sa sœur Marie-Antoinette, Marie-Thérèse Charlotte, future duchesse d’Angoulême (1778-1851).

Le 17 janvier 1779

Naissance de ses jumelles Marie-Christine de Bourbon-Siciles, parfois appelée « de Naples-Sicile » (1779-1849), future Reine de Sardaigne et  Marie Christine Amélie de Naples-Sicile (1779-1783), à Caserte.

Marie-Christine, une de ses deux jumelles
Marie-Caroline par Heinrich Friedrich Füger (Louvre)

Le 12 avril 1780

Naissance de son fils Gennaro de Naples et Sicile (1780-1789).

 Le 29 novembre 1780

Mort de l’Impératrice Marie-Thérèse après une courte maladie.

L'Impératrice Marie-Thérèse

Joseph II est désormais seul à la tête de l’Empire.

Le 18 juin 1781

Naissance de son fils Joseph de Naples et Sicile (1781-1783).

Le 22 octobre 1781

Naissance du Dauphin, Louis-Joseph-Xavier-François.

Marie-Antoinette et le Dauphin Louis-Joseph par Benjamin Warlop
Marie-Caroline par Johann Heinrich Wilhelm Tischbein
Marie-Caroline, Reine de Naples et de Sicile, par Francesco Saverio Candido

Le Boudoir de Marie-Caroline

Elle y conserve la pendule à automate, offerte par Marie-Antoinette.

Cette pendule exposée dans le Palais de Caserte a été offerte par Marie-Antoinette à Sa sœur préférée Marie-Caroline

 La salle-de-bain de Marie-Caroline à Caserte

Sa fille Marie-Amélie, future Reine des Français

Le 22 avril 1782

Naissance de sa fille Marie-Amélie de Bourbon, princesse de Naples et de Sicile (1782-1866), future Reine des Français de 1830 à 1848.


Le 19 février 1783

Décès de son fils Joseph de Naples et Sicile (1781-1783), de la variole. Il est enterré à la Basilique Santa Chiara de Naples.

 

Le 26 février 1783

Décès de sa fille Maria de Naples-Sicile (1779-1783), sœur jumelle de Marie-Christine (1779-1849), future Reine de Sardaigne, de la variole.

Elle est enterrée à la Basilique Santa Chiara de Naples.

Marie-Amélie de Naples-Sicile

 

Le 14 décembre 1784

Naissance de sa fille Marie-Antoinette de Naples et de Sicile (1784-1806) au palais de Caserte.

Hommage aux enfants morts de Marie-Caroline
CASINO VANVITELLIEN. C'est un pavillon qui s'élève sur un îlot du lac Fusaro et qui a été construit en 1782 par l'architecte Carlo Vanvitelli pour Ferdinando IV de Bourbon : l'emplacement était en fait une réserve de chasse/pêche et le dirigeant voulait lui construire une oasis de loisirs, aidé par le rigide tribunaux cérémoniels. Au rez-de-chaussée, vous pouvez trouver la salle circulaire (habituée aux réceptions mondaines), la chapelle royale et les salles de service ; l'étage supérieur dispose d'une petite chambre, d'un bureau et de la salle des merveilles (rafraîchi par le peintre paysagiste Filippo Hackert et était à l'origine recouverte des soi Leucio). Considérée comme l'un des plus beaux exemples d'architecture du XVIIIe siècle, cette villa possède une plante polygonale hautement articulée, qui se développe sur deux niveaux en terrasses et se rétrécit graduellement (en invoquant des suggestions exotiques) ; le ciel opaque caractéristique (la couleur de l'air) et les grandes fenêtres aident à dématérialiser l'espace tandis que les façades extérieures sont du thé doux Des lanternes en fer forgé et des décorations marines au stuc (crabes et coquillages). Le projet initial prévoyait l'accès au Casino exclusivement par mer, cependant, au début du XXe siècle, un pont en bois (construit au milieu) d'environ 50 mètres a été construit ; au fil du temps, le bâtiment a accueilli des personnages importants (tels que Mozart, Gioachino Rossini, Klemens von Metternich, Francesco II d'Autriche, le Nicola I, Umberto I et Victorio Emanuele III) mais a également été pillé deux fois (pendant la Révolution jacobite et la Seconde Guerre mondiale) et systématiquement endommagé par des phénomènes sismiques (en plus des agents atmosphériques) : depuis 1991, une importante opération de restauration a cependant été lancée. Ça a duré jusqu'au début du nouveau millénaire (rénovation des plantes technologiques, nettoyage des murs de briques, consolidation des lignes capriates, refloration du banc, reconstruction du plancher de maïs au deuxième étage... ); aujourd'hui le bâtiment, ouvert au public grâce à l'association PHLEGRAEUS, est devenu le musée d'art de la commune de Bacoli. (texte de Fabrizio Casu)

En 1785

Les souverains de Naples font un grand voyage en Italie du Nord en 1785. C’est l’occasion pour eux de rendre visite à la famille royale de Savoie à Turin. La Reine Marie-Caroline décrit ainsi la princesse de Piémont, Marie-Clotilde :

« … la princesse de Piémont qui est extrêmement aimable, la douceur complaisante même… »

 

Le 27 mars 1785

A sept heures et demi du matin,  naissance de Louis-Charles, duc de Normandie, surnommé «Chou d’Amour» par Marie-Antoinette, Dauphin en 1789 et déclaré Roi de France en 1793 par les princes émigrés sous le nom de Louis XVII. Marie-Caroline est sa marraine, le comte de Provence (1755-1824), futur Louis XVIII, son parrain.

En 1786

Naissance de sa fille Marie-Clotilde (1786-1792).

Portrait présumé de Marie-Caroline de Naples
Portrait anonyme de Marie-Caroline de Naples

Le 31 juillet 1787

Naissance de sa fille Marie-Henriette de Bourbon-Sicile (1786-1792) au palais de Naples.

 

En 1788

Naissance et mort de son fils Charles (1788-1788), qui est enterré à la Basilique Santa Chiara de Naples.

Le 1er janvier 1789

Décès de son fils Gennaro de Naples et Sicile (1780-1789) de la variole. Il est enterré à la Basilique Santa Chiara de Naples.

 

Gennaro de Naples et Sicile
Marie-Caroline, Reine de Naples

En France

Le 5 mai 1789

En France : ouverture des États-Généraux à l’hôtel des Menus Plaisirs à Versailles.

Ouverture des Etats Généraux
Marie-Caroline

Le 4 juin 1789

Mort du Dauphin, Louis-Joseph-Xavier-François, à Meudon.

Louis-Charles, son neveu et filleul devient le Dauphin.

Mort du Dauphin dans Les Années Lumière de Robert Enrico (1989)

Le 14 juillet 1789

A Paris : prise de la Bastille.

La prise de la Bastille dans Les Années Lumière (1989) de Robert Enrico

Le 4 août 1789

Abolition des privilèges, en France.

Le 26 août 1789

Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen.

Le 5 octobre 1789

Des milliers de parisiennes marchent sur Versailles pour réclamer du pain.

Le 6 octobre 1789

Vers cinq heures du matin, les appartements privés sont envahis. La Reine s’échappe en jupon par une porte dérobée. Plus tard, Sa présence est réclamée par la foule. Elle va au-devant du peuple, courageuse, au mépris de Sa vie.

Le matin du 6 octobre 1789 par Benjamin Warlop

Marie-Caroline dira que sa sœur aurait dû être assassinée ce jour-là pour n’avoir pas à connaître les horreurs de la révolution….

La famille royale est ramenée de force à Paris.

 

 

Le 19 novembre 1789

Mort de sa sœur, l’Archiduchesse Marie-Anne à Klagenfurt. 

L'Archiduchesse Marie-Anne
Joseph II

 

Le 20 février 1790

La mort à Vienne de son frère Joseph II constitue une perte affective et politique pour Marie-Antoinette. Léopold II (1747-1792), leur frère, devient Empereur des Romains.

Portrait de Léopold II, vers 1790

Le 2 juillet 1790

Naissance de son fils Léopold Jean Joseph Michel de Bourbon, prince de Naples et de Sicile puis des Deux-Siciles, futur prince de Salerne (1790-1851).

Portrait des princesses Marie-Thérèse et Louise-Amélie des deux Siciles devant le buste de leur mère, Marie-Caroline d'Autriche par Johann Heinrich Wilhelm Tischbein, 1790
Marie-Caroline (1790) par Johann Heinrich Tischbein

Le 14 juillet 1790

 Fête de la Fédération à Paris.

En 1790

Après l’avènement de Léopold II (le 11 novembre 1790), un triple mariage unit les maisons d’Autriche et de Naples. Marie-Caroline vit alors le bonheur nostalgique de retourner à Vienne et de passer huit mois sur les lieux de son enfance.

Marie-Caroline demande, en 1790, à Augeard, le secrétaire des Commandements de la Reine de France, à qui  :

« Mais d’où vient ce déchaînement effroyable de votre pays contre ma malheureuse sœur?
-Marie-Antoinette, par malheur, consentit à laisser la dignité de son rang suprême dans son palais pour aller dans l’appartement de madame de Polignac y jouer le second rôle.»

Le 15 août 1790

Sa fille aînée, Marie-Thérèse (1772-1806) épouse son double cousin, l’Archiduc François d’Autriche (1768-1835), futur François Ier d’Autriche ( 11 août 1804). Ce sera leur fille aînée, Marie-Louise d’Autriche (1791-1847) qui épousera Napoléon Ier (1769-1821) et deviendra Impératrice des Français.

Marie-Thérèse de Bourbon-Naples, par Elisabeth Vigée Le Brun (1790)
Une estampe célébrant le mariage entre deux des filles de Marie-Caroline d'Autriche et deux des fils de Léopold II

À gauche, Marie-Caroline escorte ses filles, Marie-Thérèse et Louise, jusqu’à l’autel des noces. A droite, Léopold escorte ses fils François (le futur François II) et Ferdinand III, grand-duc de Toscane. À l’extrême droite se trouvent le mari de Caroline, Ferdinand IV, et la femme de Léopold, Marie-Louise d’Espagne. Ferdinand et Marie-Louise sont également frères et sœurs. Marie-Thérèse et François se sont mariés en premier, le 15 septembre 1790. C’était son deuxième mariage, sa première femme étant décédée en couches en février de la même année. Louise et Ferdinand se marient le 19 septembre 1790.

Marie-Caroline de Naples par Elisabeth Vigée Le Brun (1790)
Marie-Caroline, Reine de Naples par Nicolas-François Dun

Le 19 septembre 1790

La fille cadette, Louise de Bourbon-Siciles (1773-1802) épouse Ferdinand III de Toscane (1769-1824).

En décembre 1790

Le marquis de Bombelles démissionne de son rôle d’ambassadeur à Venise, pour ne pas prêter le serment nommé civique exigé par l’Assemblée Constituante qu’il regarde comme illégale et inconstitutionnelle.

Il continue alors à faire office d’émissaire officieux de Louis XVI et de son frère le comte d’Artois auprès des différentes cours d’Europe, en lien avec la Reine de Naples.

La Reine Marie-Caroline insiste pour que les enfants de monsieur de Bombelles lui soient présentés. Quand Monsieur et Madame de Bombelles se retirent, en entrant dans la gondole, ils trouvent une lettre avec cette adresse :

« Aux enfants de l’estimable marquis de Bombelles, ambassadeur du roi de France.
Vous avez des parents si respectables que je ne puis vous désirer, mes chers enfants, que le bonheur de leur ressembler, et de montrer dans le cours de votre vie toute l’énergie, le désintéressement et les sentiments qu’ils ont témoignés, et qui leur ont valu l’estime publique, la mienne et tout mon attachement. Comme votre éducation n’est pas encore achevée, et qu’elle exigera quelques frais, j’oserai vous faire toucher, à vous, quatre frères, 12,000 fr par an, à l’endroit où vous résiderez, et jusqu’au moment où vos respectables parents seront de nouveau rentrés dans toutes les charges et emplois dont ils sont si dignes. Ceci est bien éloigné de ce que j’aurais désiré pouvoir faire, mais, ne voulant pas importuner le roi, mon époux, et mes facultés étant restreintes,  j’ai dû me restreindre. Recevez cela avec le sentiment qui me porte à vous l’offrir ; c’est celui de la plus sincère estime et attachement qu’à pour vos respectables parents, et du plus véritable intérêt qu’à pour vous votre éternelle amie.»

Quand Monsieur de Bombelles dit à la Reine, en la remerciant, qu’il n’a pas mérité tant de bontés puisqu’il n’a pas servi sa couronne, elle lui répond d’un air majestueux :

« …Monsieur, vous avez servi la cause de tous les rois. »

Depuis le mois d’avril 1791

Le marquis de Bombelles vivait des bienfaits de la Reine de Naples, qui s’est empressée de venir au secours d’une famille qui a préféré l’indigence à l’oubli de ses devoirs.

Le 20 février 1791

Départ de Mesdames Adélaïde et Victoire qui partent pour Rome Leur fuite est incités par les lois de France contre l’Église.

Elles se réfugient de plus en plus loin en Italie.

Mesdames Adélaïde et Victoire de France
Marie-Caroline

Le 20 juin 1791

Évasion de la famille royale française.

Le 21 juin 1791

Le Roi et la Reine de France sont arrêtés à Varennes.

Le 25 juin 1791

La famille royale rentre à Paris sous escorte.

Le Roi de France est suspendu.

 

De retour en Italie, Marie-Caroline apprend l’arrestation de la famille royale de France à Varennes. Les émigrés affluent de France, elle leur ouvre grand les portes, ne ménageant pas les moyens pour les bien recevoir. Avec eux arrivent des rumeurs chaque jour plus alarmantes.

Chez l'épicier Sauce à Varennes, par Prieur

En juin 1791 elle apprend l’arrestation de la famille royale française, qui va pleurer avec ces mots :

« Je connais bien l’arrestation fatale et l’entrée execrable à Paris de ma chère et si malheureuse sœur. Je ne pourrai plus être heureux. Les blessures, et oserais-je dire même la mort, étaient préférables à ce retour dégradant et douloureux. »

Lettre à madame de Polignac

L'amiral Nelson, par Lemuel Francis Abbott

Son ami l’ambassadeur Hamilton épouse la ravissante Emma Hart. Les deux femmes ne tardent pas à devenir inséparables et Emma rend d’immenses services à la Reine : elle devient agent de liaison entre Naples et Paris.

« De cet infernal Paris, j’apprends d’horribles détails, dira ainsi la Reine, à tout instant, quelque bruit ou cri qu’elle entende, et chaque fois qu’ils entrent dans sa chambre, ma pauvre sœur s’agenouille, prie et se prépare à mourir. Les brutes inhumaines (…) nuit et jour (…) hurlent afin de l’épouvanter et de lui faire craindre mille fois la mort. C’est la seule chose que l’on puisse souhaiter à cette malheureuse âme, et je prie Dieu de la lui envoyer afin de mettre un terme à ses souffrances.»

Contre toute attente, ce mariage est très bien accueilli par le milieu diplomatique napolitain, puis par l’aristocratie anglaise. Sir William, ambassadeur, doit demander l’agrément de la Reine pour ce mariage, et c’est l’occasion d’un voyage en Angleterre. Emma est accueillie en vraie lady, ce qui est pour elle un triomphe. Sur le chemin du retour vers Naples, le couple fait halte à Paris où il rencontre le Roi Louis XVI et la Reine Marie-Antoinette, qui sont alors en résidence surveillée aux Tuileries. La Reine aurait confié à lady Hamilton une lettre destinée à la Reine de Naples, Sa sœur. Et cette lettre fut les derniers mots de Marie-Antoinette à Sa sœur. C’est ainsi qu’Emma devient une amie proche de Marie-Caroline d’Autriche, épouse de Ferdinand IV de Naples. Elle mène alors la vie mondaine et luxueuse de l’épouse d’un ambassadeur, et fréquente assidûment la Cour de Naples.

«Elle se sera vantée sans doute d’avoir reçu une lettre de Marie-Antoinette pour sa sœur. C’est possible mais rien n’est moins sûr.»

Evelyne Lever

La complicité entre Marie-Caroline et Emma fera beaucoup jaser. Certains allant même jusqu’à parler d’une relation saphique. Ou d’une initiation de l’épouse du Roi Ferdinand Ier à certaines pratiques érotiques par Emma, experte en la matière. Cependant, rien ne le prouve. L’amour de sa vie est pourtant bien celui d’un homme – et quel homme ! – l’amiral Nelson, ennemi juré de Napoléon. Le héros brave les pires tempêtes sur son navire mais c’est pour Emma que son cœur chavire.

Image du Secret d'Histoire consacré à Lady Hamilton

En 1792

Naissance de son fils Albert-Louis (1792-1798).

Décès de ses filles, Marie-Clotilde (1786-1792) et Marie-Henriette (1787-1792)

Le 1er mars 1792

Léopold II, le frère de Marie-Caroline, meurt.

Avènement de son neveu François II, qui sera couronné empereur le 19 juillet.

Albert-Louis de Naples

Le 3 avril 1792

Lettre dédicacée, sans indication de lieu [probablement Naples], datée du 3 avril 1792, adressée à « ma chère comtesse ».

Rare lettre de Maria Caroline de Habsourg-Lorraine, Reine de Naples, qui déplore le triste sort de sa sœur Marie-Antoinette, prisonnière des Tuileries, ainsi que la mort soudaine du frère Léopold II, Empereur du Saint-Empire romain (allié important contre les révolutionnaires français).

 

« J’ai été très ému par le fait que vous vous souveniez de moi à un moment si terrible et cruel, comme celui que j’ai vécu avec la perte d’un frère et d’un ami [Leopoldo II], à qui tous les sentiments de gratitude et de tendresse me liaient de tout cœur. J’avoue que ce coup a été extrêmement douloureux pour moi, et que je ne pourrai jamais me consoler pour ça. Le sort de la reine de France est d’être pathétique. Je ne sais pas si elle a déjà apprécié et appris quel genre de frère elle avait.
Si tel était le cas, je suis sincèrement désolé pour elle, car cela ne pourrait qu’augmenter sa souffrance. J’aimerais la connaître d’une autre position.
Au revoir ma chère Comtesse,
Sache que je m’intéresse profondément à tout ce qui te concerne,
Ton ami sincère,
Charlotte

À partir de ce moment, Marie-Caroline ouvre les portes de son royaume aux nombreux émigrants qui se précipitent hors de France. Elle accueille avec joie l’ascension de son frère bien-aimé Léopold sur le trône du Saint-Empire romain, après la mort de son frère Joseph II. Elle comptera sur lui pour libérer sa sœur du joug des révolutionnaires français. Malheureusement, la disparition inattendue de Leopold le jette dans une inquiétude qui grandit de mois en mois avec l’arrivée de mauvaises nouvelles de France. L’annonce de l’exécution de la sœur bien-aimée Marie-Antoinette la comble de tristesse et de colère : à partir de cette date elle sera toujours défiante envers les Français, contre lesquels elle se battra toute sa vie jusqu’à l’ère Napoléonienne.

Le 10 août 1792

Sac des Tuileries.

La prise des Tuileries le 10 août 1792

Le Roi de France est suspendu de ses fonctions.

Le 13 août 1792

La famille royale de France est incarcérée au Temple.

La Tour du Temple

Le 20 septembre 1792

Décès de sa fille Marie-Henriette de Bourbon-Sicile (1786-1792), de la variole. Elle fut inhumée dans la nécropole royale des Bourbon-Siciles dans la Basilique Santa Chiara à Naples.

Ce même jour, victoire de Valmy, considérée comme l’acte de naissance de la République.

Le 21 septembre 1792

Abolition de la royauté française.

Le 21 janvier 1793

Louis XVI est guillotiné.

En 1793

Naissance de sa dernière fille, Marie-Isabelle (1793-1801).

Le 16 octobre 1793

Marie Antoinette est exécutée.

Désespérée, Caroline ne trouve le repos que dans la prière… et dans les espoirs de revanche. Elle réunit ses enfants autour du portrait de la chère disparue et prononce devant eux ce serment :

« Je jure de poursuivre ma vengeance jusqu’à ma mort.»

Voici une lettre que Marie-Caroline écrit à Calonne après la mort de sa chère Antoinette :

« J'ai reçu des mains de M. Christine votre obligeante lettre, il m'a aussi parlé de votre périlleuse situation et je lui ai fait sentir toute la peine de la mienne . Le moment est si malheureux et les circonstances sont telles que je ne puis rien changer aux déterminations du Roi qu'il fonde sur les différents pays et parents, sur les malheureux événements et sur l'opinion générale . Tout ceci m'est bien dur de vous le devoir articuler mais ma vérité et sincérité m'en fait une loi .  J'espère et fais des vœux pour que le voyage que vous allez entreprendre (?) au gré de vos souhaits, et je désirerais y pouvoir contribuer . En tout temps et occasions comptez sur mon sincère intérêt et estime. Je ne vous parle point de tout ce qui est arrivé et continue à s'opérer, mon âme en est navrée et ma santé en souffre beaucoup.  Je dois dans le moment par un devoir sacré penser à me soutenir en vie, ainsi je me tais mais ai le cœur déchiré. Notre honnête ministre a mes sentiments pour vous, mais peut encore moins que moi contrarier des volontés si prononcées ...»

« Marie-Caroline avait déjà l’imprimé du procès de sa sœur, mais les détails de sa prison ne lui étaient pas connus. Elle m’a chargé de mille choses pour vous, mon cher comte, reconnaissant avec sensibilité les expressions de l’attachement que vous avez voué à son infortunée sœur. Ce sont ses propres mots. »

            (passage cité par Charles Kunstler in Fersen et son secret, Hachette, 1947, p. 298)

La Reine ne tarde pas à se heurter aux Français. Avec les émigrés, une vague a apporté des jacobins fuyant la Terreur. Ce groupuscule s’allie rapidement aux réformateurs italiens. Parmi eux se trouvent des francs-maçons, ceux pour la liberté desquels Marie-Caroline a tant bataillé, et qui œuvrent maintenant contre leur ancienne bienfaitrice.

Biscuit de porcelaine napolitaine figurant Ferdinand IV et Marie-Caroline entourés de leurs enfants, sous la protection du Roi Charles III d'Espagne (père de Ferdinand) par Filippo Tagliolini

 

 

Le 8 juin 1795

Mort de Louis XVII, son neveu et filleul,  à l’âge de dix ans. Il était atteint de tuberculose osseuse.

Louis XVII agonisant
Cecilia Roth est Marie-Caroline, Emilio Solfrizzi le Roi Ferdinanddans La Santafelice de Vittorio et Paolo Taviani (2004)
Signature de Marie-Caroline

 

Le 18 décembre 1795

Sa nièce, Marie-Thérèse, Madame Royale quitte la prison du Temple, après trois ans et demi d’enfermement,  pour être remise  à sa famille autrichienne… en échange des commissaires français livrés aux Autrichiens par Dumouriez, dont fait partie Jean-Baptiste Drouet (1763-1824), le sinistre responsable de l’arrestation de la famille royale à Varennes… Marie-Caroline ne la rencontrera pourtant jamais… 

Départ de Marie-Thérèse du Temple
Profil de Marie-Caroline en cire, vers 1795

 

 

La Reine, paniquée, signe un traité d’alliance avec l’Angleterre. Bientôt, la présence de la flotte de l’amiral Nelson la rassure. L’insurrection est matée à Naples, mais, dans le reste de l’Italie, Napoléon remporte de sérieuses victoires contre les Autrichiens.

Ferdinand Ier, Roi de Naples, par Domenico di Costanzo. Vers 1795

Naples, le 28 mai 1796


« Je vous écris encore ces lignes pour vous annoncer la situation de nos troupes, qui est une chose qui peut vous intéresser, et comme ces coquins se trouvent sur le chemin, je n’ose l’envoyer ouverte. La recrutation avance infiniment et avec succès : il y a un bien bon esprit pour cela; mais on tâche de le détruire et de dégoûter les gens ; mais j’espère que grâce à Dieu cela ne leur réussira point et que de cette fatale abominable crise nous en sortirons avec honneur. Après je ne désire que trois grâces du Roi, dont une je suis sûre, car je l’y ai persuadé : c’est le testament pour ses enfants qu’il doit faire.
L’autre est pour moi : quelques avantages pécuniaires pour ne lui ni à personne être jamais plus à charge et vivre tranquillement  le reste de mes jours.
Rempli cela, je donne adieu aux affaires à jamais. J’y ai passé dix-neuf années et y ai eu une abominable, scélérate intrigue espagnole pour détruire tout mon bonheur domestique et qui m’a causé des chagrins inouïs ; un tremblement de terre qui a mis à la misère deux provinces des plus florissantes et tué près de 50.000 personnes ; deux éruptions affreuses du Vésuve, dont une a ruiné un des plus riches pays; deux fois la famine, les banques à la faillite près et très près ; une conspiration de principes non encore ni éteinte ni toute connue, une attaque de mer menacée au moment du bombardement, mèche en main ; une opération sur la monnaie très dangereuse, mais de toute nécessité; actuellement une invasion de terre menacée qui n’est point encore évanouie, et avec tout cela aucune énergie, amour de la Patrie; un révoltant égoïsme, commodité : voilà mon cas.
Pour ne dire pire, je laisse à part chagrins de famille, perte de mes enfants, la santé ruinée, une contradiction continuelle pour laquelle il paraît que le Ciel m’a destinée. Vous conviendrez qu’il y en a assez et que j’ai éprouvé plus de maux, chagrins qu’un siècle peut procurer. Aussi suis-je ruinée, perdue et il ne me faut plus calculer entre les êtres vivants.
Quand le soir arrive, je ne résiste plus à ma fatigue et je ne suis plus bonne à rien.
Ce moment-ci est une crise telle que par devoir, obligation, j’y tiendrai, ferai ce que je pourrai ou en mourrai, mais ne m’éloignerai de rien, même du plus dangereux; mais à paix faite, aucune considération, égards, ni puissance me retiendront. Je veux vivre, respirer un peu pour moi-même et mettre un intervalle, si Dieu veut, entre la vie et la mort.»

 Marie-Caroline, Reine des Deux-Siciles au marquis de Grallo

Arrivée à Naples dans Le Fabuleux Destin d'Elisabeth Vigée Le Brun d'Arnaud Xainte

 

Le 24 février 1797

Lors de l’arrivée des troupes françaises, Mesdames Adélaïde et Victoire rejoignent Naples, où Marie-Caroline est fort peu ravie de les voir.

, car ses éléments structurels reproduisent les ordres architectoniques: les petites colonnes supportant la grande roue centrale sont de style dorique, tandis que les chapiteaux sont rigoureusement classiques. Sur un côté de la table, une poignée en métal, également façonnée dans le style classique, est attachée à un mécanisme automatique et utilisée pour déplacer un «moulin» à deux ailettes relié à huit pupitres au moyen de moraillons réglables en laiton. Les roues dentées ont été laissées visibles et, lors de leur utilisation, le mécanisme fait un spectacle fascinant. Les huit pupitres, qui peuvent être utilisés pour soutenir toutes sortes de matériel de lecture, peuvent ainsi être consultés simultanément. La qualité de l'artisanat et des matériaux fait de ce spécimen de technologie du XVIIIe siècle un objet de grande valeur artistique.

Le 17 octobre 1797

L’Autriche signe un traité avec la jeune république française. Marie-Caroline est outrée :

« Je ne suis pas, et jamais je ne serai en bon termes avec les Français. Je les regarderai toujours comme les assassins de ma sœur et de la famille royale.»

Marie-Caroline par Francesco Liani
Marie-Caroline, Reine de Naples et de Sicile, par Francesco Saverio Candido

En 1798

Les Etats Pontificaux sont envahis par les Français, une république romaine jacobine est instaurée. Bientôt, c’est toute l’Italie qui est occupée, hormis Naples. Caroline tremble de subir le même sort que sa sœur. Malgré l’appel à la résistance que lance Ferdinand, la famille royale doit se résigner à l’exil. Une trentaine de vaisseaux, portant deux mille personnes, cingle vers la Sicile. Pendant la traversée, une tornade se déclare, semant la panique. Un des enfants de Caroline, Albert, âgé de sept ans, meurt dans d’atroces convulsions.

Marie-Caroline de Naples, vers 1800

En décembre 1798

Alors que l’armée française d’Italie marche sur Naples, et peu avant que ne soit proclamée la république parthénopéenne, la famille royale, expropriée de Caserte, s’embarque sur le HMS Vanguard de l’amiral Nelson et se réfugie à Palerme.

Pendant que la famille royale s’installe dans l’hostile palais Colli de Palerme, à Naples règnent le chaos et la confusion. Marie-Caroline rêve de retourner et de prendre les armes, mais elle est trop affaiblie.

Le cardinal Fabrice Ruffo parvient à reconquérir Naples à la cause royale.

En 1798

Décès de son fils Albert-Louis (1792-1798).

Cecilia Roth est Marie-Caroline dans le téléfilm La Santafelice de Vittorio et Paolo Taviani (2004)
Ferdinand et Marie Caroline fuyant Naples pour Palerme
Le Roi et la Reine de Naples par Francesco Liani

Le 24 juin 1798

L’éphémère république parthénopéenne ou napolitaine est vite écrasée et Ferdinand regagne Naples.

En 1799

Ferdinand et Marie-Caroline font l’acquisition du Palais chinois de Palerme.

Le palais de Palerme

Elle est construite par Giuseppe Venanzio Marvuglia à partir de 1799 à la demande de Ferdinand III de Sicile qui avait acheté une maison de style chinois au baron Benedetto Lombardo, ainsi qu’un terrain bordant certaines pièces. Marvuglia, qui était l’auteur du bâtiment précédent, a construit l’œuvre en gardant le style oriental : le corps central se termine en haut avec un toit de pagode. Le rez-de-chaussée est scandé d’arcs en plein cintre et les deux côtés sont flanqués de tourelles comportant des escaliers hélicoïdaux ouverts, dont la réalisation est dirigée par le maître d’œuvre Giuseppe Patricolo. Le bâtiment présente des éléments curieux : les cloches de la grille d’entrée, les poutres en bois sculpté des terrasses et les coquilles Saint-Jacques. A l’extérieur, sur les premiers toits pagodes étaient accrochés des dizaines de carillons chinois qui sonnaient, aux grès des vents. Raison pour laquelle le pavillon était initialement surnommé la villa aux mille clochettes.

Au deuxième étage se trouvait l’appartement de la reine Marie-Caroline avec deux pièces de réception et la chambre. Au niveau supérieur se trouve une grande terrasse octogonale couverte d’une pagode au plafond décoré par Silvestri. En 1800, le jardin arrière est aménagé et Giuseppe Patricolo s’occupe du «temple chinois». G. Durante a fait la «flore à l’italienne», des réservoirs en marbre blanc avec des grottes chinoises naturelles.

Dans la salle à manger, il y a une table qui permet de soulever la vaisselle de l’étage inférieur et d’être immédiatement servi. Cette table est appelée la table mathématique.

Cela reprend un projet abandonné des tables volantes du Petit Trianon de Loriot

L’hommage à Marie-Antoinette semble évident ! 

Le 13 juin 1799

La ville est libérée. Ferdinand fera preuve envers ses ennemis vaincus d’un inflexible manque de pitié tandis que de nouveaux deuils et départs accablent Caroline. Alors que toute la ville est à reconstruire, elle perd les Hamilton, rappelés en Angleterre.

En 1801

Décès de sa dernière fille, Marie-Isabelle (1793-1801).

Le 19 septembre 1802

Décès en couches de sa fille Louise de Bourbon-Siciles,  à l’âge de vingt-neuf ans, elle est enterrée avec son fils mort-né dans ses bras.

Emma Hamilton
Ferdinand et Marie-Caroline

Le 2 décembre 1804

Bonaparte est sacré Empereur. Marie-Caroline le craint comme la peste. N’a-t-il pas juré de déloger les Habsbourgs et les Bourbons d’Italie ? Aveuglée par sa haine, elle délaisse les négociations avec le petit Corse et préfère risquer sa couronne en entrant avec l’Angleterre, l’Autriche et la Russie dans la coalition formée contre l’empereur des Français.

Sacre de Napoléon Ier par Jacques-Louis David

Hélas, ces pays, trop éloignés géographiquement, abandonnent Naples à son sort.

« Nous tomberons glorieusement, réplique Caroline.»

Mais, devant l’indifférence de ses sujets, elle se voit obligée de s’embarquer pour Palerme une nouvelle fois. Tandis que la tempête ravage ses navires, les troupes de Joseph Bonaparte pénètrent dans sa ville dans l’apathie générale.

Au début de l’année 1806

Face à l’avancée des armées françaises, Ferdinand doit à nouveau fuir pour la Sicile.

Le 21 mai 1806

Décès de sa fille Marie-Antoinette de Bourbon-Naples (1784-1806), princesse des Asturies.

Marie-Antoinette, princesse des Asturies

Le 6 août 1806

Décès en couches de sa fille Marie-Thérèse de Bourbon-Naples, à trente-cinq ans… elle accouchait pour la dix-septième fois !

Marie-Caroline âgée, à l'Antique. Portrait non attribué
La famille royale de Naples. Au milieu Ferdinand et Marie-Caroline

Le 25 novembre 1809

Mariage de sa fille Marie-Amélie de Bourbon-Sicile (1782-1866) et de Louis-Philippe d’Orléans, duc de Chartres (1773-1850), futur Roi des Français, à Palerme.

Déjà ébranlée par la perte de sa sœur, qui lui avait donné le premier coup, Marie-Caroline s’abîme dans l’obsession. Obnubilée par la volonté de recouvrer son trône, elle inonde l’Europe de lettres suppliantes et revendicatrices. Une blessure fatale lui est infligée lorsque sa petite fille Marie-Louise épouse l’empereur des Français. Le sang de la grande Marie-Thérèse uni à celui d’un tyran issu de nulle part ? C’est plus qu’elle n’en peut supporter !

Le 11 mars 1810

Mariage par procuration à Vienne de sa petite-fille Marie-Louise (1791-1847) avec Napoléon Ier (1769-1821). 

Depuis la décapitation de sa sœur Marie-Antoinette, Marie-Caroline s’en va vers la paranoïa et le suspect et la haine des Français l’obséderont jusqu’à sa mort. 

Marie-Caroline (vers 1810) , Ecole napolitaine

À la nouvelle du mariage imminent de sa petite-fille Marie-Louise de Habsbourg avec Napoléon, son commentaire est «Je suis devenue la grand-mère du diable».

C’est drôle l’anecdote selon laquelle lors d’une partie de chasse en Sicile, faisant semblant de vouloir frapper un sanglier, elle a explosé «par erreur» un coup de fusil contre le gendre Louis-Philippe (devenu par la suite Roi de France, mais à l’époque en exil sur l’île et à la suite ainsi qu’à la charge des beaux-parents). Il va avouer aux dames de sa suite :

« Je voulais le faire sec le fils de Philippe Égalité».

Le 2 avril 1810

Mariage officiel de Napoléon Ier avec Marie-Louise, sa petite-fille. Marie-Louise ne se sent pas à l’aise dans ce pays et, comme l’indiquera Napoléon dans ses mémoires,

 « elle avait toujours peur d’être parmi des Français qui avaient tué sa tante »

Brisée par ces échecs politiques et les deuils répétés, sa santé se dégrade et elle cherche l’apaisement dans l’opium.

Mariage de Marie-Louise et Napoléon Ier par Georges Rouget

Le 20 mars 1811

Naissance de son premier arrière-petit-fils, Napoléon François Joseph Charles Bonaparte, Roi de Rome (1811-1832), l’Aiglon…

 

En 1812

En dépit de sa santé chancelante, son mari décide de se séparer d’elle et l’embarque de force. Harrassée par un interminable voyage, elle aboutit à Vienne, où on lui fait grise mine.

L'Impératrice Marie-Louise veillant sur le sommeil du roi de Rome  par Franque Joseph (1811

« Je verrai bien si l’on ose chasser de Schönbrunn la dernière fille de Marie Thérèse, riposte-t-elle.»

Marie-Caroline vers 1814 par Adalbert Suchy

Après vingt ans d’angoisse, elle voit enfin la chute de l’empire napoléonien. Les usurpateurs sont chassés de Naples, et les Bourbons peuvent reprendre leur place. Mais la pauvre Marie Caroline ne goûtera pas cette ultime joie.

C’est une vieille femme. Elle est à Vienne à la veille du Congrès entre les pays vainqueurs de Napoléon Ier (qui commence le 18 septembre 1814). Elle représente l’Ancien Régime et l’ancienne diplomatie. Elle gêne. Elle trouve un peu de réconfort auprès de Marie-Louise et de son fils l’Aiglon, dont la naissance l’avait tant indignée.

« Plus rien au monde ne m’émeut ; mon sort s’est joué et s’est décidé le jour où j’ai été chassée comme une comédienne et chassée de Sicile…. Ma vie est finie dans ce monde…. Je n’intéresse plus que quelques vieilles femmes qui ne sortent jamais de chez elles, mais qui viennent voir les derniers enfants de la grande Marie-Thérèse. Le Prater est dans son beau vert et plein de fleurs ; mais rien ne me paraît plus beau.»

Marie-Caroline d'Autriche par Filippo Marsigli, 1814

Marie-Caroline tance sévèrement l’indolence de sa petite-fille Marie-Louise rechignant à rejoindre son mari, Napoléon,  en exil, précisant qu’en semblable cas, elle aurait personnellement déchiré ses draps pour les transformer en moyens d’évasion, révélant un romantisme insoupçonnable et sans impact sur une jeune Impératrice ne rêvant que d’un confort somme toute très bourgeois et certainement pas de bien rocambolesques aventures.

Buste en cire de Marie-Caroline, réalisé par Joseph von Deym
Buste de Marie-Caroline en albâtre, réalisé en 1815 par Konrad Heinrich Schweickle

Le 7 septembre 1814

Elle se couche épuisée. Peu après minuit, son domestique est réveillé en catastrophe : la vieille Reine s’est endormie à jamais, la main crispée sur la sonnette du dernier secours. Elle est sans doute morte d’une crise d’apoplexie. Ainsi s’achève la vie de la dernière enfant vivante de Marie-Thérèse d’Autriche.

Le corps de la Reine Marie-Caroline de Naples et de Sicile, vêtue d’une robe en taffetas noir, d’un voile, d’un bonnet en dentelle et de chaussures en tissu argenté, a été emmené en état avant les funérailles.

Le 10 septembre 1814

La baronne du Montet a décrit sa visite au mémorial de la Reine :

« Dans le dernier sommeil de la reine, il y a une trace de tristesse, d’infinie lassitude. Marie-Caroline, qui croyait mourir à Naples, fit dresser son portrait sur une tombe du couvent des Capucins de Vienne, accompagné d’une inscription tendre et émouvante, doux témoignage du désir de la pauvre dame d’être enterrée près de ses augustes parents. Précaution sensible mais vaine, puisque la dépouille mortelle de la reine a été inhumée sur place.»

Marie-Caroline est en effet enterrée dans la Crypte Impériale avec ses ancêtres, dans la Tombe 107. Elle y repose aux côtés de sa mère, Marie-Thérèse.

Après sa mort, Napoléon écrira à son frère Joseph disant

« Cette femme savait penser et agir comme une reine, tout en préservant ses droits et sa dignité…. »

Elle meurt avant de voir le retour des Bourbons à Naples. Neuf mois seulement après sa mort, son mari a été rétabli sur le trône. Personne ne regrette la pauvre femme qui avait perdu la raison. Et elle emporte avec elle une triste réputation qui ne rend pas justice à tous les progrès qu’elle a fait faire à son royaume.

Son époux se remarie avant la fin de la même année et règne encore dix ans.

Le 6 janvier 1825

Ferdinand IV de Bourbon meurt  seul dans sa chambre, suite à un coup d’apoplexie. Paradoxalement de la même mort et dans la solitude la plus complète.

À ce propos, la fantaisiste Lady Blessington écrit dans son journal :

« Ils le regrettent énormément et si, en fait, il n’était pas un souverain de hautes qualités intellectuelles, il s’est toujours montré un homme bon. Les pleurs des gens ordinaires, des masses qui puisent dans les instincts collectifs, et parfois dans l’avenir de l’histoire, ont averti que la ville restait orpheline».

Bien sûr, Naples dans les décennies et le siècle suivant aura encore eu des figures lumineuses et des chefs charismatiques ; mais un autre Ferdinand, vrai Roi et vrai père, si proche et semblable au dernier de ses sujets, ne l’aura jamais plus.

D ‘ après «Le Roi Lazzarone» de Giuseppe Campolieti

Je termine ce portrait par une image uchronique… j’aurais souhaité que Marie-Antoinette reçoive ainsi Sa chère Charlotte à Trianon :

Marie-Antoinette et Marie-Caroline dans le salon de musique de Trianon, par Benjamin Warlop

Sources :

_Antoinetthologie

_BADINTER, Elisabeth, Le pouvoir au féminin, Marie-Thérèse d’Autriche (1717-1780), Paris, Flammarion, 2016, 800 p.

_BADINTER, Elisabeth, Les conflits d’une mère, Marie-Thérèse d’Autriche et ses enfants, Paris, Flammarion, 2020, 270 p.

_BLED, Jean-Paul, Marie-Thérèse d’Autriche, Paris, Fayard, 2001, 448 p.

_BOURBON-PARME, Isabelle, Je meurs d’amour pour toi, lettres à l’archiduchesse Marie-Christine 1760-1763, édition établie par Elisabeth Badinter, Paris, Tallandier, 2008, 206 p.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

error: Content is protected !!
Retour en haut