Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour

Jeanne-Antoinette de Pompadour par Benjamin Warlop

Le 29 décembre 1721

Naissance, à Paris, de Jeanne-Antoinette Poisson, fille de François Poisson, fils de tisserands, et Madeleine de La Motte qui appartient à une famille plus élevée. 

Le 30 décembre 1721

Baptême de Jeanne-Antoinette célébré à l’église Saint-Eustache :

« Du mercredi 30 décembre 1721, fut baptisée Jeanne-Antoinette Poisson, née d’hier, fille de François Poisson, écuyer de Son Altesse royale Monseigneur le duc d’Orléans, et de Louise-Madeleine de La Motte, son épouse, demeurant rue de Cléry… »

Elle a pour parrain, Jean Pâris de Montmartel (1690-1766), et à la nièce de ce dernier, Antoinette Justine Pâris, pour marraine.

Le 15 mai 1724

Naissance de sa sœur, Françoise Louise Poisson, à Paris, rue Thévenot.

Son père, François Poisson, débute comme conducteur dans le service des vivres. Remarqué par les frères Pâris, des financiers liés à la famille de La Motte, il rend de grands services en Provence, au moment de la peste.

Pendant la disette de 1725

Chargé comme commissaire aux vivres du ravitaillement de Paris, François Poisson est accusé de trafics et ventes frauduleuses. Il est contraint de quitter le pays, et s’exile en Allemagne.

Jean Pâris de Montmartel

Le 18 février 1727

Naissance de son frère, Abel-François Poisson (1727-1781), à Paris. Il s’agit du futur marquis de Marigny.

Le 23 avril 1727

Une commission du Conseil déclare François Poisson débiteur pour la somme de 232 430 livres.

Le 12 août 1727

 Une sentence du Châtelet de Paris décide la séparation de biens avec son épouse, mais leur maison rue Saint-Marc est saisie.

Avant son départ, en 1727

François Poisson confie sa fille Jeanne-Antoinette au couvent des Ursulines à Poissy. Ce couvent est connu pour l’éducation des jeunes filles issues notamment de la bourgeoisie.

La santé de Jeanne-Antoinette est fragile. Mais elle souffre aussi moralement d’une double absence : celle de son père exilé, et celle de sa mère qui mène une vie pour le moins mouvementée. 

Claudine Guérin de Tencin

 

En janvier 1730

Madame Poisson reprend sa fille à Paris, rue Neuve des Bons-Enfants. Jeanne-Antoinette reçoit alors une éducation soignée et l’enseignement des arts d’agrément, tels que le dessin, la musique, la peinture, la gravure, la danse, les cours de chant et de déclamation. Dans ce cadre, elle découvre le salon littéraire de madame de Tencin (1682-1749) , une amie de sa mère. C’est dans ce cercle que la jeune fille va apprendre l’art de la conversation et les valeurs de l’esprit.

Pendant l’éloignement de François Poisson

Sa femme Madeleine de La Motte, qu’on dit « belle à miracle », a entre autres amants le riche fermier général Charles François Paul Le Normant de Tournehem (1684-1751), célibataire et amateur d’art. L’infidélité notoire de Madeleine a fait naître l’hypothèse d’une liaison plus précoce avec Le Normant, d’où la suspicion que Jeanne-Antoinette soit leur fille naturelle.

Image de Jeanne Poisson, marquise de Pompadour (2006) de Robin Davis
Charles François Paul Le Normant de Tournehem
Lecture de Voltaire dans le salon de madame Geoffrin

 

La beauté de Jeanne-Antoinette et son esprit la font connaître et elle devient l’hôtesse des salons cultivés et mondains de Paris. Madame de Tencin la présente à Madame Geoffrin (1699-1777) et à sa fille la marquise de La Ferté-Imbault.

Le Normant de Tournehem est le tuteur légal des deux enfants de sa maîtresse, Jeanne-Antoinette et Abel-François. Il rapproche la première dès qu’elle a vingt ans à son neveu et héritier Charles-Guillaume Le Normant d’Étiolles (1717-1799), âgé de vingt-quatre ans.

Le 9 mars 1741

Jeanne-Antoinette Poisson épouse, à Saint-Eustache à Paris, Charles-Guillaume Le Normant d’Étiolles.

La jeune Madame d’Etiolles donne des représentations intimes dans le petit théâtre qu’elle a fait construire dans son château d’Etiolles, à côté de Sénart où le couple s’installe.

En décembre 1741

Jeanne-Antoinette donne naissance à un garçon qui ne vit pas, qu’on prénomme comme son père, Charles Guillaume Louis Le Normant d’Étiolles.

Charles-Guillaume Le Normant d'Étiolles
Jeanne-Antoinette par Van Loo

Durant l’été 1743

Le château d’Étiolles se situe dans la forêt royale et le Roi vient fréquemment chasser aux abords. Madame d’Étiolles a le droit statutairement d’assister à ces chasses en calèche et se fait accompagner par un des lieutenants de la vénerie royale qui l’informent précisément sur les passages du Roi pour qu’elle puisse attirer son attention. C’est au cours de l’une d’elles que Louis XV la remarque.

Le château d’Étiolles
Le château d’Étiolles
Jeanne-Antoinette en tenue de chasse sous les traits de Geneviève Page dans Fanfan la Tulipe (1952) de Christian-Jaque

 

Le 10 août 1744

Naissance de sa fille, Alexandrine Le Normant d’Étiolles (1744-1754), au grand ravissement de son père persuadé que cette enfant sauvera son couple. Il fait dès lors fi des menaces proférées par sa femme en tête-à-tête : 

«Je ne te trahirai jamais, sauf avec le Roi

Jeanne-Antoinette d’Étiolles

Ces avertissements déclenchent malgré tout, pernicieusement, de fortes angoisses qu’il masque par son mécanisme de défense préféré, le rire. Jeanne-Antoinette plus déterminée que jamais, désire rencontrer Louis XV, accepte l’aide de son cousin, valet de chambre au service du Roi, qui l’informe des journées de chasse programmées en forêt de Sénart.

Ainsi donc croise-t-elle de plus en plus souvent le carrosse royal, se fait signaler à sa Majesté qui est subjuguée par la vision de la belle jeune femme.

Hélène de Fougerolles, Vincent Perez dans Jeanne Poisson, marquise de Pompadour de Robin Davis
Louis XV par Maurice Quentin de La Tour

Le Roi est, quant à lui, un homme séduisant, de stature imposante, de onze ans l’aîné de Reinette.

Le 7 février 1745

Le Roi impose un bal masqué chez ses filles. Le Dauphin et Madame Henriette n’aiment pas danser mais Louis XV estime «que cela ne faisait rien, qu’à leur âge, on aimait toujours à danser.»
Quelques jours auparavant, le Roi est parti à un bal masqué  dans Versailles où la rumeur raconte qu’il y retrouva une dame qu’il ne quitta pas. 

C’est sûrement la raison pour laquelle il veut ce bal.

Le Roi aime être costumé afin de pouvoir passer une soirée incognito. Son épouse vient aussi au bal de leurs enfants, jusqu’à quatre heures du matin mais estime qu’elle ne doit plus porter de masque à son âge.  Louis XV fait réellement preuve de maladresse quand il s’agit de ses maîtresses vis-à-vis de sa famille. 

Bal masqué où se rencontrent Louis XV et madame Lenormant d'Etiolles, dans la ville de Versailles, image du film Jeanne Poisson, marquise de Pompadour, avec Hélène de Fougerolles et Vincent Perez
Fête au château de Versailles à l'occasion du mariage du Dauphin en 1745 par Eugène-Louis Lami (1800-1890)

Le 14 février 1744

Nouveau bal masqué chez Mesdames. Le Roi est costumé en paysan mais celui à genoux auprès de la Reine toute la nuit fait certainement diversion pour laisser Sa Majesté incognito. 

Le 23  février 1745

Le Dauphin Louis-Ferdinand épouse au château de Versailles  sa cousine l’infante Marie-Thérèse de Bourbon (1726-1746), deuxième fille de Philippe V et sœur de l’infant Philippe qui avait épousé, en 1739, Louise-Élisabeth (1727-1759), sa sœur aînée.

Voici comment est alors aménagée la galerie des Glaces :

La galerie des Glaces en 1745,
Restitution lors du mariage du Dauphin de France
( Texte de Christophe Duarte, Versailles Passion ; Les restitutions de Philippe Le Pareux de la Galerie des Glaces en 1745 lors du mariage du Dauphin permettent d’en considérer le faste )

Il s’agit de l’ameublement ordinaire : les torchères de 1695 (qui ne seront remplacées qu’en 1770), les huit tables couvertes de vases de porphyre, les tabourets recouverts de leur housse cramoisie, les rideaux verts, les bustes des douze Césars, auxquels s’ajoutent les cascades de lumière installées en plus dans les angles, telles que la gravure de Cochin permet de les voir.

Restitution de Philippe Le Pareux
Restitution de la Galerie des Glaces en 1745 lors du mariage du Dauphin Louis-Ferdinand, par Philippe Le Pareux
Restitution de Philippe Le Pareux

Les tapis dans le style de la galerie du Louvre et la cloison qui fermait l’arcade donnant sur le salon de la Paix terminent cette évocation.

Restitution de Philippe Le Pareux

Dans les deux vues du salon de la Guerre, la différence d’intensité d’éclairage est liée à l’éclairage surnuméraire dans la galerie.

Cette modélisation rend compte de manière d’un aménagement «extraordinaire» de la galerie lors de fêtes.

Restitution de Philippe Le Pareux

Tel est le décor de l’entrée en scène dans l’Histoire de Jeanne-Antoinette de Pompadour…

Le 25 février 1745

La Galerie des Glaces en 1745,
Restitution lors du mariage du Dauphin de France
( texte et illustrations de Christophe Duarte – Versailles Passion) 

A sept heures du soir

Comme à l’accoutumé, il y a «soirée d’appartement» chez le Roi. Exceptionnellement, elle a lieu dans la Grande Galerie, où l’on a disposé, outre une grande quantité de table de jeux diverses et variées, une grande table rectangulaire destinée à la partie de lansquenet du Roi dans le centre de la Galerie et une autre table, ronde plus petite, devant la porte du Salon de la Paix, réservée au cavagnole de la Reine.

A neuf heures du soir

Le Grand Couvert a lieu comme les autres soirs. Puis chacun se retire chez soi afin de se préparer pour un bal masqué qui doit se dérouler toute la nuit.

Le Bal des Ifs

Durant cet intermède, les services des Menus Plaisirs et du Garde meuble font disparaître les tables de jeux de la galerie afin de la préparer pour le bal. Aucune invitation n’a été lancée : «On y entre, nous dit Barbier, sans distinction, en habit de masque à la main». Néanmoins, il a été prévu des filtrages aux deux entrées de ce bal : une à l’escalier de Marbre et l’autre à celui de l’Escalier du salon d’Hercule. Des huissiers demandent qu’une personne des groupes qui rentrent se démasque, se nomma et nommait les autres personnes. La foule devient telle et la bousculade si forte que les huissiers abandonnent et laissent tout le monde entrer.

Reconstitution du bal des ifs :lors des fêtes galantes à Versailles en mai 2023
Reconstitution du costume du Roi

Il y a quatre grands buffets garnis de rafraîchissements de toutes sortes de vins, du saumon frais, des pâtés de truites, des poissons au bleu, des filets de sole et tout ce que l’on pouvait souhaiter la nuit d’un vendredi maigre. Les quantités sont si abondantes qu’on prétend que certains en fourrent plein leurs poches pour les revendre le lendemain au marché.
Peu avant minuit, la Reine apparaît, sans masque revêtue d’une robe constellée de bouquets de perles avec sur sa tête, le Sancy et le Régent, les deux plus beaux diamants de la Couronne. Elle accompagne le couple de mariés, le Dauphin costumé en jardinier et la Dauphine en marchande de fleurs.
Un quadrille débute le bal avec le Dauphin, non masqué menant la Dauphine, le duc et la duchesse de Chartres, Madame d’Andlau et Monsieur de Ségur, tous costumés en bergers et bergères, en robes à paniers enguirlandées de fleurs, une corbeille fleurie à la main, puis on va s’asseoir sur une estrade préparée à leur intention afin de s’amuser à regarder les masques. Mais Louis XV n’est toujours pas là.

Reconstitution du Bal des Ifs

La Dauphine, surprise par la liberté et l’aisance des manières de la Cour, accepte de danser avec un bel inconnu masqué, qui se déclare espagnol. Visiblement, il a l’allure d’un Grand d’Espagne et est au fait de tous les secrets de la Cour. Intriguée, elle veut savoir qui est le personnage, mais son danseur ne laisse rien paraître et disparaît brusquement. On apprend le lendemain qu’il ne s’agit que du simple cuisinier espagnol de Monsieur de Tessé. Tout Versailles fait les gorges chaudes et la Dauphine, qui ne sut pas tenir sa langue, est assez mortifiée.
Un autre incident intervient au souper quand la princesse de Conti, fatiguée d’être restée debout, voulue s’asseoir sans trouver de sièges libres. Discrètement, elle se démasque, persuadée qu’en dévoilant son identité, elle trouvera aussitôt un siège mais personne ne se lève, feignant de ne pas reconnaître une princesse du sang. Furieuse, elle quitte le salon en déclarant haut et fort que de «sa vie qui est longue, elle n’avait vu des gens si malhonnêtes, il faut qu’on soit ici de bien mauvaise compagnie».
C’est au moment où la Princesse quitte l’Œil-de-Bœuf que l’on peut assister à un surprenant spectacle : sept ifs exactement identiques, taillés en topiaires, s’avancent à la queue leu leu, tandis que la foule s’écarte pour les laisser passer. On a immédiatement deviné que le Roi se trouve parmi ces ifs.

C’est Louis XV qui, semble-t-il, a eu cette idée originale de déguisement, persuadé que personne ne pourrait le reconnaître.

Le Bal des Ifs, sous Louis XV par François Nicolas Martinet

 

Beaucoup d’indiscrétions ont couru sur les liaisons du Roi avec une mystérieuse inconnue et l’on sait que «le mouchoir» va être jeté ce soir-là. Beaucoup de dames meurent d’envie d’être la maîtresse du Roi et ce bal est une chance inespérée pour toutes les prétendantes à la succession de la duchesse de Châteauroux décédée le 8 décembre précédent.

Madame d’Etiole, costumée en Diane chasseresse, parle à un if : le règne de madame de Pompadour (1721-1764)  débute.

Ce fameux bal ne devait s’achever que le lendemain vers les huit heures du matin.

Le 28 février 1745

Au cours du bal offert à l’Hôtel de ville de Paris par le corps municipal, une nouvelle rencontre entre madame d’Étiolles et Louis XV confirme l’intérêt que lui porte le Roi.

Louis XV, huile sur toile, 1745 par Jean-Marc Nattier, musée de l'Ermitage

Jeanne-Antoinette devient une visiteuse régulière à Versailles.

Micheline Presle est Madame de Pompadour dans Si Versailles m'était conté (1954) de Sacha Guitry

En mars 1745

Jeanne-Antoinette est faite marquise de Pompadour par le Roi.

En 1745

Madame de Pompadour apporte son soutien indéfectible à Voltaire (1694-1778)et réconcilie l’écrivain et Louis XV. Ce retour en grâce auprès du Roi, permet à Voltaire d’obtenir une charge d’historiographe.

Elle elle fait venir à la Cour « Monsieur de Vandières », le jeune provincial, sans titre, sans terre et sans soutien qui s’y attire rapidement les bonnes grâces du Roi. Il s’agit de son frère Abel-François Poisson.
Charles-Antoine Coypel (1694-1752),premier peintre du Roi, est chargé de former le goût du jeune Poisson de Vandières. Avec son aide, celui-ci a notamment à sélectionner des tableaux des collections royales afin de les exposer au palais du Luxembourg, créant ainsi le premier musée de France.

François-Marie Arouet dit Voltaire
Le cercle des philosophes que soutient rapidement madame de Pompadour...
Abel Francois Poisson (1727-1781), marquis de Vandières

L’appartement de François Quesnay,
médecin de Madame de Pompadour

 

Issu d’une famille modeste, son père est un petit propriétaire terrien. François Quesnay (1694-1774) a onze frères et sœurs. A onze ans, il ne sait toujours pas lire. Il va alors apprendre avec son jardinier, ce qui va développer chez lui un goût pour la médecine et l’administration rurale. Dès 1711, il apprend le latin et le grec avec le curé de son village.

A treize ans, il se retrouve orphelin de père et décide de se consacrer à la chirurgie. Il étudie la médecine et devient, en 1718, Maître dans la communauté des chirurgiens de Paris. Il commence sa carrière à Mantes et devient chirurgien royal en 1723. En 1744, il obtient le titre de Docteur en médecine et devient médecin de Madame de Pompadour en 1749. Louis XV l’anoblit en 1752 à la suite de la guérison du Dauphin de la petite vérole.

François Quesnay par Heinz Rieter
Plan des entresols. L'Appartement est accolé aux entresols de madame de Pompadour
Rez-de-chaussée de l'Escalier d'Epernon. L'entrée de l'Appartement se situe au premier palier.

En 1745, il obtient un appartement sur la Cour du Roi donnant sur l’Escalier d’Epernon. Il s’agit de deux petites pièces en enfilade et basses de plafonds. Cet appartement, fortement modifié, existe toujours.

En 1764, il s’installe au Grand Commun dans un appartement plus confortable.

Le 11 mai 1745

Louis XV gagne la bataille de Fontenoy (1745) aux Pays-Bas autrichiens et Madame de Pompadour compose, à sa gloire, ce poème :

«Il sait vaincre, il sait plaire
Et ce héros charmant
En amour, à la guerre
Triomphe également
En quittant son tonnerre
Il redevient amant
»

Poème autographe de madame de Pompadour, à la gloire de Louis XV, vainqueur de Fontenoy (musée des lettres et manuscrits, Paris)

Le 24 juin 1745

Le Roi fait don à Madame d’Étiolles du domaine de Pompadour, acquis le 15 juin par la Couronne auprès du prince de Conti, le Roi relevant le titre tombé en déshérence faute d’héritier mâle la créant ainsi marquise, tandis que Jeanne-Antoinette obtient de son mari une séparation légale.

Le 10 septembre 1745

Louis XV installe Madame d’Étiolles au château de Versailles dans un appartement situé juste au-dessus du sien, relié par un escalier secret.

L’appartement de madame de Pompadour (1745 – 1750),
L’Appartement officiel des maîtresses de Louis XV
(texte et illustrations de Christophe Duarte – Versailles passion

Cet appartement se trouve dans l’attique surplombant le grand appartement du Roi, au second étage du corps central du château. Il se situe précisément au-dessus des salons de Mercure et d’Apollon. On peut y accéder par l’escalier d’Épernon ou l’escalier semi-circulaire.

« Madame de Luynes, […] croyant que la présentation de Madame d’Étioles serait faite dimanche ou lundi dernier, fut obligée de rester à Versailles jusqu’à sept heures ; elle voulut se trouver chez la Reine dans le moment de la présentation.

Madame de Pompadour fut donc présentée au Roi sur les six heures. Il y avait un monde prodigieux dans l’antichambre et la chambre du Roi, mais assez peu dans le cabinet. La conversation fut fort courte et l’embarras très grand de part et d’autre. Madame la princesse de Conty avait avec elle sa dame d’honneur ; d’ailleurs il n’y avait avec elle que Madame de Lachau-Montauban et Madame d’Estrades. Il n’y avait pas moins de monde à la présentation chez la Reine ; et tout Paris était fort occupé de savoir ce que la Reine dirait à Madame de Pompadour.

On avait conclu qu’elle ne pourrait lui parler que de son habit, ce qui est un sujet de conversation fort ordinaire aux dames quand elles n’ont rien à dire. La Reine instruite que Paris avait déjà arrangé sa conversation, crut, par cette raison là même, devoir lui parler d’autre chose. Elle savait qu’elle connaissait beaucoup Madame de Saissac. La Reine lui dit qu’elle avait vu Madame de Saissac à Paris et qu’elle avait été fort aise de faire connaissance avec elle. Je ne sais si Madame de Pompadour entendit ce qu’elle lui disait, car la Reine parle assez bas ; mais elle profita de ce moment pour assurer la Reine de son respect et du désir qu’elle avait de lui plaire. La Reine parut assez contente du discours de Madame de Pompadour, et le public, attentif jusqu’aux moindres circonstances de cet entretien, a prétendu qu’il avait été fort long et qu’il avait été de douze phrases.»

Le duc de Luynes

Madame de Pompadour s’efforce d’être pour le Roi une amie et une thérapeute, une présence aimante, toujours enjouée (en apparence) et consolatrice qui lui offre le délassement, l’oubli de ses problèmes.

Hélène de Fougerolles avait déjà incarné Jeanne-Antoinette, dans Fanfan la Tulipe (2003) de par Gérard Krawczyk, Vincent Pérez y occupait le rôle titre avant d'être le Louis XV de la série dédiée à la Marquise...

Mais la marquise de Pompadour est détestée par le jeune Dauphin qui, avec ses sœurs, l’appelle par ironie et irrévérence Maman Putain.

Romane Portail est Jeanne-Antoinette de Pompadour dans Louis XV, le Soleil noir (2009) de Thierry Binisti

Le 25 décembre 1745

Madeleine Poisson (1705-1745), sa mère, âgée de quarante ans, atteinte d’un cancer depuis plusieurs années, s’éteint.

Le 2 mai 1746

Voltaire est élu à l’Académie française.

Le 21 mai 1746

Louis XV, espérant réconforter sa maîtresse, lui offre sa première résidence personnelle. Il achète pour la somme de 750,000 livres à Louis-Alexandre Verjus, marquis de Crécy, son château pour l’offrir à madame de Pompadour.

Madeleine Poisson
Le château de Crécy

Dès son installation à la Cour, Jeanne-Antoinette devient mécène des artistes, disposant à volonté de crédits illimités octroyés par le Roi, engloutissant des montants astronomiques et sa fortune personnelle dans l’achat d’œuvres d’art, de pièces uniques, réalisées sur commande par des Maîtres – Pigalle, Adam, Van Loo, Boucher, Verberckt… –, ces joyaux étant répartis dans des demeures acquises, transformées et revendues aussitôt !

Pleine de projets, elle agrandit considérablement le château et le décore magnifiquement, redessine les jardins et finit d’aménager la vallée de la Blaise. Elle fait creuser en face du château un long bassin nommé « Le Miroir ». Elle pourra ainsi accueillir dignement, dans sa première demeure, Louis XV qui y viendra vingt-trois fois de 1746 à 1755.

Les deux extrémités du domaine sont fermées par deux édifices : au nord, le petit château d’Aunay acheté par Louis XV en 1747, et au sud, par le moulin existant, complété d’une façade aveugle classique, nommé « La Bellassière », qui sert de buanderie et d’orangerie l’hiver. L’ancien potager dit d’ »en-haut », et le nouveau, créé au pied du château, dit d’ »en-bas », alimentent la seigneurie de Crécy et le village de Couvé.

L’alimentation en eau et sa distribution, tant du château que du village, est assurée par une machine hydraulique, très novatrice pour l’époque, réalisée par l’ingénieur Antoine Deparcieux en 1751, qui écrit dans ses mémoires :

« Mme la Marquise de Pompadour désirant avoir de l’eau à son château de Créci, beaucoup moins pour y faire des embellissemens que pour prévenir ou pour parer les accidens qui pouvoient arriver pendant les ſéjours que le Roi y fait, plusieurs perſonnes présentèrent des projets à cet effet, qui exigeant de trop grandes dépenses, ou ne pouvant pas fournir une quantité d’eau suffisante, furent rejetées. »

Grâce à ce dispositif, les bassins et citernes sont généreusement remplis.

Le château de Crécy
Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour, en diane chasseresse par Jean-Marc Nattier, 1746
Doris Kenyon est Jeanne-Antoinette dans Voltaire (1933) de John G. Adolfi

L’Ermitage de madame de Pompadour à Versailles

La Maison de l’Ermitage, située au cœur de la ville de Versailles, a été construite en 1746. Le Roi Louis XV demande à détacher six hectares du parc du château de Versailles pour y faire construire un pavillon de chasse qu’il offre à madame de Pompadour. Ravie de se retirer de la vie de la cour, elle le surnomme «son petit bijou » ou encore son « Ermitage ».

L’Orangerie de l’Ermitage à Versailles

Le 22 juillet 1746

La Dauphine, née infante, Marie-Thérèse de Bourbon (1726-1746) meurt, à Versailles. Son époux en éprouve un chagrin extrême.

L’influence politique de madame de Pompadour croît au point qu’elle favorise le mariage hautement diplomatique entre Marie-Josèphe de Saxe (1731-1767) et le Dauphin Louis-Ferdinand (1729-1765).

Le 9 février 1747

Le Dauphin Louis-Ferdinand de France épouse contre son gré à Versailles Marie-Josèphe de Saxe, qui lui est imposée par une femme qu’il déteste.

L'infante Marie-Thérèse de Bourbon (1726-1746)
Le Dauphin Louis-Ferdinand 
et  Marie-Josèphe de Saxe
Charlotte de Turckheim incarne Marie Leszczyńska dans Jeanne Poisson, Marquise de Pompadour (2006), de Robin Davis

 

Très proche de leur mère, la Reine Marie Leszczyńska (1703-1768), le Dauphin Louis-Ferdinand et ses sœurs souffrent avec elle des adultères du Roi, de la rigidité du protocole, de la bassesse des courtisans.

 

Quant à la nouvelle Dauphine, intelligente, elle a rapidement compris que son intérêt est de soutenir son époux dans sa lutte contre la favorite, à qui elle doit pourtant son mariage.

 

L’ascension sociale de la marquise de Pompadour lui vaut d’être critiquée par des pamphlets injurieux, appelés « poissonnades ».

Louis XV (1748) par Louis-Michel van Loo
Chambre de la marquise de Pompadour au rez-de-chaussé qui sera celle de Madame Adélaïde
Louis XV, pendant la campagne de Flandres, huile sur toile de Carle Van Loo, 1747

En 1748

Le Théâtre des Cabinets (1748 – 1749),
Quand l’Escalier des Ambassadeurs se donne en spectacle… ( Texte de Christophe Duarte – Versailles passion ; Source photos : «Architecture de théâtre à Versailles» )

L’escalier des Ambassadeurs, conçu en 1674, pour conduite au grand appartement de Louis XIV, on décide d’utiliser ce volume pour y établir un théâtre.

L'escalier des Ambassadeurs

Afin qu’il soit démontable, une utilise une construction légère faite de bois et garnie de toiles.

Maquette du théâtre des cabinets

Il se compose de quatre espaces : le vestibule pour l’accueil du Roi et du public, la salle avec l’amphithéâtre, la scène et les loges pour les acteurs. La salle, en forme de trapèze, est enveloppée d’une haute cloison structurée par seize pilastres ioniques à chapiteaux dorés et une balustrade surmontée de huit groupes d’enfants. Six larges panneaux tendus de damas bleu enrichi de grands cartels.

Sur le devant de la salle, s’étend l’amphithéâtre royal et les balcons, bordés d’un garde-corps. Par effet de contracte, les parquets sont revêtus d’une moquette à fleurs rouges.

A la fin de l’année 1749, la salle est augmentée d’un second niveau des balcons.

Au début de l’année 1750, le théâtre ayant déjà été démonté à deux reprises afin de restituer l’intégralité du Grand Escalier à l’occasion de cérémonies, on commence à craindre pour la préservation des peintures murales de Louis XIV.

La marquise de Pompadour dans une scène d'Acis et Galatée. Charles Nicolas Cochin (1749)

A l’automne 1750, le théâtre est définitivement supprimé.

En février 1748

La marquise acquiert le château de Celle, à quelques kilomètres de Versailles, pour la somme de 260 000 livres. Elle donne au lieu le nom de « petit château de La Celle-Saint-Cloud ». Les sommes payées pour l’embellissement du château, pendant les années de 1749 à 1751, s’élèvent à 68 114 livres.

Le « petit château de La Celle-Saint-Cloud »

À l’origine, se trouve une vieille ferme, les moines y ajoutent un bâtiment de plusieurs étages. La construction est vendue en 1616. Un corps de logis est construit pour former le milieu du château actuel. La maison passe de mains en mains jusqu’à ce que, sous Louis XIV, le duc de La Rochefoucauld la fasse achever. La marquise de Pompadour l’acquiert en 1748, l’appelle « le petit château », ajoute de nouveaux embellissements, et y accueille Louis XV.

Celle-Saint-Cloud
Dessin de François Guérin, où Jean-Antoinette pose avec sa fille

En 1749

Maurepas (1701-1781), secrétaire d’Etat à la Marine, est disgracié et exilé à quarante lieues (environ 160 km) de Paris pour avoir répété les libelles répandus contre la marquise de Pompadour.

La Reine et le Dauphin, appuyés par les milieux dévots, pressent le Roi de faire cesser cette relation adultérine notoire et finissent par le faire céder après de nombreuses années de résistance. Cependant, bien que la marquise de Pompadour cesse de partager l’intimité du roi, sa carrière connaît une nouvelle promotion : elle obtient le privilège royal de loger dans l’appartement du duc et de la duchesse de Penthièvre au rez-de-chaussée du corps central du château de Versailles alors que Mesdames les filles du Roi le convoitent.

En 1749, Alexandrine est mise au couvent des Dames de l’Assomption, rue Saint-Honoré à Paris, où sont élevées les filles de la plus haute noblesse. Elle montre des dispositions précoces et fait de bonnes études. Toujours ambitieuse, sa mère la fait régulièrement venir auprès d’elle pour la montrer à la Cour. 

Alexandrine Le Normant d'Étiolles jouant avec un Chardonneret, attribué à François Boucher

Le château de Bellevue
( texte et photographies de Christophe Duarte – Versailles-passion )

Madame de Pompadour revend le château à Louis XV le 22 juin 1757 pour la somme de 325 000 livres. Ce dernier fait remanier la distribution et le décor intérieur sous la direction d’Ange-Jacques Gabriel. Celui-ci construit en 1767 deux ailes en retour en rez-de-chaussée, absorbées en 1773 dans une extension qui les relie au bâtiment principal.

Le château de Bellevue

Au décès de Louis XV, en 1774, le château est attribué par Louis XVI et Marie-Antoinette aux filles du Roi défunt, et tantes du nouveau monarque, Mesdames Adélaïde, Sophie et Victoire. Bien que logeant principalement au Château de Versailles, eu égard à leur obligations à la Cour, Mesdames viennent à Bellevue se délasser des rigueurs de l’étiquette. Celles-ci font transformer le décor intérieur par Richard Mique et font agrandir les jardins vers le Sud.

Reconstitution 3D du château de Bellevue en 1757
Porte de Bellevue ( aujourd'hui au Louvre )
Porte feinte de Bellevue ( aujourd'hui au Louvre )
Quatre candélabres en bronze doré pour le grand salon de Bellevue
Fauteuil à la Reine provenant de Bellevue

Madame de Pompadour revend le château à Louis XV le 22 juin 1757 pour la somme de 325 000 livres. Ce dernier fait remanier la distribution et le décor intérieur sous la direction d’Ange-Jacques Gabriel. Celui-ci construit en 1767 deux ailes en retour en rez-de-chaussée, absorbées en 1773 dans une extension qui les relie au bâtiment principal.

Au décès de Louis XV, en 1774, le château est attribué par Louis XVI et Marie-Antoinette aux filles du Roi défunt, et tantes du nouveau monarque, Mesdames Adélaïde, Sophie et Victoire. Bien que logeant principalement au Château de Versailles, eu égard à leur obligations à la Cour, Mesdames viennent à Bellevue se délasser des rigueurs de l’étiquette. Celles-ci font transformer le décor intérieur par Richard Mique et font agrandir les jardins vers le Sud.

Le château sera vendu à Monsieur Testu-Brissy, qui le fera abattre.

Madame de Pompadour, la main sur le clavier du clavecin (1750 ?) par François Boucher
L'Ermitage de Fontainebleau Le domaine est construit à l’extrémité ouest du jardin du château de Fontainebleau de janvier à septembre 1749, à la demande de la marquise de Pompadour, sur ordre de Louis XV.

Les colombes de madame de Pompadour

« Pour la marquise de Pompadour, Louis XV fait construire en 1749 l’ermitage de Fontainebleau, appelé depuis hôtel de Pompadour. Quand la cour réside à Fontainebleau, le Roi s’échappe volontiers pour rendre visite à la marquise. Dans ce charmant petit domaine, la Pompadour élève des pigeons et poules, ce qui lui permet à l’occasion d’offrir à son royal amant des œufs à la coque tous frais !
Très attirée par les oiseaux, madame de Pompadour a obtenu d’élever des pigeons, ces volatiles étaient très prisés à Versailles. On les laissait souvent s’ébattre en liberté sous les combles. La marquise aime jouer avec, les caresser et leur parler pour se distraire, comme elle raconte dans ses lettres.
En 1751, François Boucher peint pour elle un tableau intitulé « La toilette de Vénus » empli de sensualité, conservé au MET de New York. La déesse dénudée, entourée d’angelots et alanguie sur des tissus de satin, tient une colombe à laquelle elle s’ apprête a attacher un ruban bleu. A ses pieds est représentée une autre colombe tout aussi blanche. Cette Vénus n’est autre que madame de Pompadour. Les oiseaux exotiques ont aussi les faveurs de la marquise.
Faisans dorés de Chine, passereaux d’Amérique, chardonnerets blancs et autres volatiles charment tellement madame de Pompadour.
(…)
La marquise possède aussi un perroquet dont les mélodies enchantent la Cour. Il connaît par cœur les couplets de « Que ne suis-je la fougère !« , sonnet écrit par le cardinal de Bernis.
Le musée d’Art de Sacramento en Californie conserve un tableau montrant Madame de Pompadour et Alexandrine, qui là encore joue avec une cage à oiseaux, une scène qui témoigne de l’intérêt que la marquise et sa fille vouaient à ces animaux.»

Les animaux choyés de l’histoire, Renée Grimaud

« La marquise n’était pas la seule à aimer les oiseaux. Madame du Barry, qui gagnera plus tard les faveurs de Louis XV, les appréciait beaucoup. Elle possédera une spectaculaire cage à oiseaux en bronze ciselé et en cuivre. Haute de près d’un mètre, ornée de fleurs de porcelaine, elle portait les armoiries créées tout spécialement quand Jeanne Bécu deviendra par la grâce du Roi, comtesse du Barry. La cage est conservée au château de Versailles dans les appartements de madame du Barry.»

           Les animaux choyés de l’histoire, Renée Grimaud

Cage à oiseaux, bibliothèque de madame du Barry au château de Versailles
La Toilette de Vénus par François Boucher

Entre décembre 1749 et septembre 1751

Grâce aux lettres de recommandation fournies par sa sœur, Abel-François Poisson séjourne ensuite en Italie pendant vingt-cinq mois, d’abord à l’Académie de France à Rome, au palais Mancini, via del Corso, avant de parfaire sa formation en faisant le voyage en Italie, avec le graveur Charles-Nicolas Cochin (1715-1790), l’architecte Jacques-Germain Soufflot (1713-1780) et le critique d’art l’abbé Leblanc (1707-1781). Ce voyage a d’importantes répercussions sur l’évolution des arts et du goût en France.

En 1750

Fondation de l’École militaire, institution d’enseignement supérieur militaire fondée par Louis XV. C’est également l’ensemble de bâtiments construits pour la recevoir à Paris. Construit au XVIIIe siècle par l’architecte du Roi Ange-Jacques Gabriel (1698-1782).

L'Ecole Militaire

En 1750

Le Pavillon Français
( texte et illustrations de Christophe Duarte ; Versailles – passion )

Le pavillon est dit «français» en raison de son implantation au centre du jardin à la française. Il est un modèle d’architecture rocaille.

Son plan est centré, en forme de croix de saint André. En fait, ce motif est rendu par le tracé d’un octogone flanqué de quatre cabinets rectangulaires hors d’œuvre, le tout étant inscrit dans une représentation circulaire marquée par les emmarchements extérieurs.

Plan du pavillon français

La corniche du salon central est supportée par huit colonnes corinthiennes. La frise, décorée d’animaux de basse-cour, rappelle la ménagerie voisine : on y trouve des poules, des coqs, des pigeons, des canards et même quelques cygnes, ainsi que des Amours, en dessus-de-porte, jouant avec des cages et des corbeilles, et représentant, en harmonie avec la décoration extérieure, les quatre éléments.

Cette ornementation est directement inspirée du goût du Roi et de madame de Pompadour pour les animaux domestiques et permet de donner l’impression que la nature fait irruption dans ce pavillon. Les lambris de menuiserie, exécutés par Jean-Antoine Guesnon et Christophe Clicot, sont sculptés par Jacques Verbeckt dans le style rocaille. Lors d’une restauration réalisée au XIXème siècle, de nombreuses dorures sont ajoutées au décor des boiseries remplaçant ainsi les couleurs champêtres assorties au mobilier, dans des tons de jaune, de vert et de bleu, réalisées par le peintre ordinaire du Roi, Médard Brancourt. Ce caractère luxueux est cependant contraire à l’esprit originel d’une atmosphère bucolique.

Deux immenses miroirs des cabinets opposés se font face et, avec les hautes portes et fenêtres, ajoutent légèreté et élégance.
Le sol est couvert de marbre dessinant des motifs divers grâce à différentes couleurs : bleu turquin et vert campan, rouge de Languedoc et griotte d’Italie, et blanc veiné. Sous l’Ancien Régime, il est recouvert en hiver d’un tapis de la Manufacture de la Savonnerie s’accordant parfaitement à la forme circulaire et réalisé par Jean-Baptiste Chevillion. Il est livré en 1751 mais disparaît à la Révolution.

Au plafond, une lanterne à huit pans et huit bobèches de cuivre doré est garnie de guirlandes de fleurs en porcelaine de Vincennes. Les quatre petites lanternes équivalentes mais à cinq pans et cinq bobèches sont aujourd’hui disparues. Les rideaux en gros de Tours vert céladon à galons dorés remplacent les originaux, en toile de coton chamarrée encadrée de toile peinte fond vert et bordée d’une tresse d’or. Le mobilier, dispersé à la Révolution et non retrouvé, est composé de dix-huit chaises en bois peint en jaune avec des moulures dorées et recouvertes de toile de perse vert et blanc bordée d’une tresse d’or.

Les quatre cabinets sont disposés sur un axe diagonal par rapport aux lignes de composition du jardin et aux perspectives du salon central vers les édifices qui entourent le pavillon.

Le boudoir, situé à gauche, face au château, possède un plafond et des lambris ornés d’arabesques. A l’origine pourvu d’un sol de marbre blanc et noir, il dispose désormais d’un parquet à panneaux restitué en 2008. Sous Louis XV se trouve alors une petite table en bois de palissandre, comportant une tablette à coulisse et un pupitre à crémaillère et utilisée par le Roi pour son herbier. Un canapé en ottomane jaune est recouvert d’un pékin blanc. A l’opposé se trouve une antichambre à boiseries simples mais agrémentée d’une cheminée en marbre du Languedoc.

Le troisième cabinet est un réchauffoir, petite cuisine où l’on tient les plats au chaud, accessible seulement par l’extérieur et muni d’un fourneau ainsi que d’une hotte adossée à la cheminée du salon central. Il est en pierre peinte et la dalle est en simple pierre. La dernière pièce est à l’origine partagée en deux : la partie donnant sur le salon dispose d’un lieu à l’anglaise, pourvu d’un équipement moderne à soupape et en bois de palissandre, dans un souci de confort et d’intimité. La seconde partie est réservée à la préparation du café auquel Louis XV tient un goût particulier. Aujourd’hui, la cloison a disparu et un escalier a été créé pour mener aux installations souterraines.

Le Pavillon Français

Après 1750

Cependant, après les merveilleuses années passées dans l’attique au dessus de chez le Roi, apparaît la pierre d’achoppement de leur relation affective : Jeanne- Antoinette, qui a connu une trêve provenant de son état amoureux, voit réapparaître sa frigidité. Cette résurgence névrotique la plonge dans une réelle inquiétude :

«Je suis troublée de la crainte de perdre le cœur du Roi en cessant de lui être agréable. Les hommes mettent, comme vous le pouvez savoir, beaucoup de prix à certaines choses et j’ai le malheur d’être de tempérament très froid…»

Cette reviviscence est provoquée, en fait, par l’instabilité amoureuse de Louis XV. Il apparaît au grand jour qu’il commence à se lasser de la favorite, attiré par de toutes jeunes demoiselles à qui il ne révèle que rarement sa véritable identité.
Si les relations entre le Roi et sa favorite prennent un tour platonique, voire simplement amical, Jeanne-Antoinette ne quitte pas la Cour pour autant et reste dans l’entourage immédiat de la famille royale, alignant sa conduite sur celle qu’avait eue en son temps la marquise de Maintenon (1635-1719). Madame de Pompadour excelle en effet à distraire Louis XV, lui fait découvrir les arts, organise des fêtes, des représentations théâtrales, entretient le goût du souverain pour les bâtiments et les jardins, multiplie ses résidences hors de Versailles. Ce qui explique qu’après avoir été pendant cinq ans sa maîtresse, elle reste la favorite en titre.

Jeanne-Antoinette de Pompadour ne contente plus la sensualité du Roi et elle craint d’être supplantée par une dame de la Cour. Ce rôle dont elle ne peut s’acquitter, Madame de Pompadour le délègue obscurément à des subordonnées. Des jeunes femmes ou jeunes filles, sont donc présentées au souverain et logées dans la maison du Parc-aux-cerfs, l’actuel quartier Saint-Louis, à Versailles

Estampe gravée par Madame de Pompadour d’après Guay, graveur du Roi
Buste de Madame de Pompadour (1751) par J-B Pigalle

Le Parc-aux-Cerfs

 «Le Roi se fait livrer des petites filles», notamment par madame de Pompadour, qui trouve ce moyen pour garder les faveurs du souverain. Il les installe dans le Parc-aux-Cerfs, un pavillon un peu éloigné du château de Versailles.

On désigne par le terme de « petite maîtresse » ses maîtresses qui ne sont pas présentées à la Cour et qui, contrairement aux maîtresses officielles, ne disposent pas d’un appartement au château. Généralement recrutées par les valets de chambre du Roi dans les milieux de la galanterie ou de la petite bourgeoisie parisienne, elles sont, quand leur liaison avec le souverain ne se limite pas à une nuit, logées dans des maisons acquises par des prête-noms pour le compte du Roi dans le quartier du Parc-aux-cerfs à Versailles.
Il s’agit de jeunes filles de petite noblesse, voire des ouvrières âgées d’une quinzaine d’années, dit-on aujourd’hui, qui y vivent et sont entretenues pour être à disposition du Roi. Aucun des enfants n’est reconnu, et les filles sont vite envoyées se marier en province.
Louis XV ne semble pas effarouché par la jeunesse de ses «maîtresses», comme Marie Louise O’Murphy (1737-1814), qui est sa maîtresse entre ses quatorze et ses dix-sept ans, de 1752 à 1755 : elle a un enfant de lui à seize ans : Adélaïde de Saint-André (1754-1774).

Le Parc-aux-cerfs dans les années 1780
Marie-Louise O'Murphy (1752) par François Boucher

Cela vaudra à madame de Pompadour cette épitaphe :

« Ci-gît qui fut vingt ans pucelle,
Quinze ans catin, et sept ans maquerelle. »

                                                                                                                      Les Mémoires secrets 

Si Jeanne-Antoinette de Pompadour donne l’impression de ne pas souffrir de ces trahisons, il n’empêche qu’elle se ronge intérieurement, malade de jalousie, désirant être et rester la seule et unique détentrice d’un certain pouvoir de séduction.

En juin 1750

Giacomo Casanova (1725-1798) arrive à Paris. Ce sont ses parents qui ont réussi à les intégrer dans le cercle très fermé des comédiens italiens alors en tournée à Paris.

Giacomo Casanova
Casanova sous les traits de Stefano Accorsi dans Le Jeune Casanova (2002) , téléfilm de Giacomo Battiato
Stefano Accorsi et Katja Flint (Madame de Pompadour)

En mai 1751

«Pourtant, en aucun cas, Madame de Pompadour ne perd de sa superbe, intervenant comme auparavant dans les affaires ministérielles, allouant privilèges et avancements selon son bon gré et continuant à conseiller le Roi sur l’oreiller de sa couche, tout en s’en défendant âprement, persuadant son amant que lui seul est maître à bord. Hors de sa présence, elle développe une attitude de plus en plus mégalomaniaque, complotant contre ses opposants qu’elle s’arrange pour faire ensuite renvoyer de la Cour et exiler. Les rendez-vous ministériels se déroulent dès lors dans la chambre de la marquise, pièce qu’elle ne quitte pratiquement plus, rejetant la moindre nourriture.
Puis, faisant suite aux problèmes financiers de l’État, Madame de Pompadour doit vendre presque l’ensemble de ses propriétés et bijoux afin de mener à terme son projet d’école militaire.»

Alain Laudet

Jeanne-Antoinette par Boucher

Quand Madame de Pompadour habitait le rez-de-chaussée du Corps Central
(1751 – 1764)
( texte et illustrations de Christophe Duarte ; Versailles-passion )

Cet appartement qu’elle occupera pendant quatorze ans est largement éclairé par neuf fenêtres sur le Parterre du Nord. Les travaux de réaménagement débutent en mai 1750. Les plans sont donnés par Jacques Ange Gabriel, la décoration est confiée au marbrier Trouard, au menuisier Guesnon et au sculpteur Verberckt. Les livraisons de mobilier et d’objets d’art par Lazare Duvaux s’échelonneront entre 1751 à 1758.

Plan de l'appartement du rez-de-chaussée de madame de Pompadour en 1750
Plan des entresols de l'appartement du rez-de-chaussée de madame de Pompadour en 1750
Plan de l'appartement de madame de Pompadour en 1751

Cet appartement sera occupé pendant quatorze ans par la marquise et est largement éclairé par neuf fenêtres sur le parterre du Nord.

 

En tournant à droite au pied de l’escalier dit «de Madame Adélaïde», on accède à une première antichambre. S’ensuit une belle enfilade de quatre pièces s’étendant sous les salons de Vénus, de Diane et de Mars, et comprenant une Seconde antichambre, un grand cabinet, une chambre et un cabinet intérieur. Au revers de cette dernière petite pièce se trouve un petit boudoir, tandis qu’un appartement des bains prend jour sur la Cour du Roi, juste derrière la chambre.

Comportant un entresol qui permet de loger le service, la première antichambre est chauffée par un poêle placé contre le mur est. La pièce est entresolée pour créer au dessus une chambre à alcôve, un cabinet de chaise et une chambre de domestique réservé à François Quesnay, médecin personnel de la marquise.

La seconde antichambre est intégralement boisée et comprend une cheminée sur le mur ouest en marbre du Languedoc. Longeant le revers des pièces de l’enfilade, un corridor de service est aménagé depuis la première antichambre. On apporte un peu clarté à l’entresol de ce couloir en perçant deux petites fenêtres donnant sur la seconde antichambre.

Le décor du grand cabinet est réalisé entre 1750 et 1751 par Verberckt.

Le lieu du pouvoir : l’appartement de madame de Pompadour
(texte et illustrations de Christophe Duarte – Versailles passion

En mai 1751, la faveur éclatante de la marquise de Pompadour se mesure à son installation dans l’appartement princier du rez-de-chaussée, sous les salons du grand appartement du Roi, occupé jusqu’alors par le duc de Penthièvre, fils illégitime de Louis XIV.

Cet appartement sera occupé pendant quatorze ans par la marquise et est largement éclairé par neuf fenêtres sur le parterre du Nord.

Etat actuel de la salle des Hoquetons. Cette salle était divisée en deux pour comporter la première antichambre et la salle-à-manger de la marquise de Pompadour

C’est madame de Pompadour qui donne au grand cabinet sa forme actuelle, et la cheminée de marbre sérancolin est posée pour elle.

Les riches boiseries qui l’ornaient ont entièrement disparu, mais les corniches faites pour Madame Adélaïde, qui récupérera ce cabinet, ont pu être rétablies.

Le grand cabinet
Pendule à orgues au concert de singes, Le thème exotique de la «singerie» a d'abord été élaboré pour les lambris de décors intérieurs. Les premiers orchestres de singes en porcelaine apparaissent peut-être en France à Mennecy après 1740, mais c'est en Allemagne qu'il connaissent leur plus brillant développement. 
Paire de grandes girandoles à trois branches de madame de Pompadour, fournis le 14 février 1752 par le marchand mercier Lazare Duvaux facturés 1 320 livres.

Au revers de cette dernière pièce se trouve un petit boudoir, tandis qu’un appartement des bains prend jour sur la cour du Roi, juste derrière la chambre. Le décor de la chambre est assez mal connu. L’alcôve est encadrée d’un cabinet de toilette dont les portes d’accès sont agrémentées d’une glace pour donner du jour.

La chambre de madame de Pompadour

Dernière pièce de l’enfilade, le cabinet Intérieur entresolé est chauffé par une cheminée en marbre. Au revers de ce cabinet, un arrière-cabinet est appelé boudoir. Sans lumière directe, il est chauffé par une petite cheminée.

Le cabinet intérieur
Actuel cabinet intérieur de Madame Adélaïde, ancien cabinet de madame de Pompadour

Le reste des cabinets et des pièces de service donnent sur la cour du Roi où l’on retrouve un appartement des bains de deux petites pièces exiguës et sombres. La salle-de-bain et la pièce des chaudières sont accompagnées d’un petit cabinet de chaise. L’entresol de ces trois pièces comprend un seul cabinet dont l’accès se fait par un petit escalier.

Console du grand cabinet de madame de Pompadour

Le 27 novembre 1751

Charles-François Le Normant de Tournehem (1684-1751), directeur général des bâtiments du Roi, académies et manufactures depuis, décède. Il est probablement le père biologique de Jeanne-Antoinette et Abel François.

Abel-François Poisson est alors rappelé d’Italie et prend ses fonctions de directeur général des Bâtiments du Roi. Il reste à ce poste jusqu’à sa démission en 1773, établissant un record de longévité dans ces fonctions au XVIIIe siècle. Il encourage la peinture d’histoire et, dans l’architecture, le mouvement de retour à l’Antiquité qui devait engendrer le néoclassicisme.

Le 7 février 1752

Un arrêté du Conseil du Roi Louis XV interdit l’impression et la diffusion des deux premiers volumes de l’Encyclopédie

Le 10 février 1752

Décès de Madame Henriette, la fille préférée du Roi, à l’âge de vingt-quatre ans. Le Roi est anéanti comme toute la famille royale. Le peuple maugrée que le décès de la jeune princesse est une punition divine.

Madame Henriette (1727-1752) par Jean-Marc Nattier
Image de Jeanne Poisson, marquise de Pompadour (2006) de Robin Davis

Dès le mois de mai 1752

Le Conseil du Roi reconnaît « l’utilité de l’Encyclopédie pour les Sciences et les Arts », madame de Pompadour et quelques ministres peuvent ainsi solliciter d’Alembert et Diderot de se redonner au travail de l’Encyclopédie.

Madame de Pompadour par Maurice-Quentin De La Tour La marquise ne porte pas de bijoux, sa coiffure est très simple mais la robe est magnifique. Tous les objets représentés ont une signification : les livres avec l’Encyclopédie (elle fréquente les philosophes et les nouveaux penseurs, Diderot est un critique dur, admirateur de La Tour), la référence au théâtre, aux sciences naturelles et politiques , la partition (elle chante), une guitare sur le canapé (elle joue de la musique), un recueil de gravures (elle grave), le carton à dessin etc… Pas d’allusion à l’architecture ou aux arts décoratifs à cause des critiques pour ses dépenses dans ces domaines.
Dessin préparatoire: La Tour a trouvé la bonne position de tête, il éclaire bien le menton qui mange la moitié du cou, remarquable intelligence du regard. Le traitement des disgrâces est spécialement intéressant : - pour les seins, la marquise utilise un truc de femme : un gros nœud ( le parfait contentement!) devant. - A la différence de presque tous ses portraits, La Tour ne lui laisse porter ni faveur, ni ruban de chapeau qui cache son cou. Il lui tourne la tête. Le menton occupe la moitié du cou, avec le grand trucage classique de La Tour : le reflet lumineux sous le menton. - La robe est une merveille et en même temps dissimule bien une cuisse lourde qui au contraire devient un vaste espace ou joue sensuellement la soie, le motif d'acanthe chamois qui passe en deux volutes sur le galbe de la cuisse, tout en l'affinant, comme une caresse, est superbissime. - à l'opposé les grâces sont mises en lumière : les mains superbes, les doigts déliés, les pieds, la peau.
Estampes gravées par madame de Pompadour d’après Guay, graveur du Roi

En août 1752

La marquise de Pompadour songe à marier sa fille Alexandrine dès qu’elle atteint l’âge de huit ans. Elle envisage tout d’abord un mariage avec le marquis du Luc (1741-1814) , fils naturel de Louis XV et de la comtesse de Vintimille (1712-1741), mais le Roi montre peu d’intérêt pour ce projet.

Elle songe alors à se rabattre sur le duc de Fronsac (1736-1791), fils du maréchal de Richelieu (1715-1788), mais ce dernier se récuse, excipant de la nécessité d’obtenir l’accord de la famille de Lorraine-Harcourt, à laquelle appartient son épouse et à travers elle du chef de la maison de Lorraine, à savoir l’Empereur François Ier du Saint-Empire (1708-1765).

Madame de Pompadour finit par obtenir du duc de Chaulnes (1714-1769) la promesse que son fils, le duc de Picquigny (1741-1792), épousera Alexandrine lorsqu’elle aura treize ans ; en échange, le duc de Chaulnes sera nommé gouverneur du duc de Bourgogne, fils aîné du Dauphin Louis-Ferdinand, et la duchesse deviendra gouvernante des enfants de France.

Jeanne Boitel est Madame de Pompadour dans Remontons les Champs-Élysées (1938) de Sacha Guitry

En janvier 1753

La marquise de Pompadour chasse de chez elle la comtesse de Choiseul-Beaupré, comme une petite p…, qui avait une mauvaise conduite et lorgnait le Roi. La comtesse de Choiseul-Beaupré était enceinte.

On lui a interdit de souper dans les cabinets ; on a défendu à sa tante, la comtesse d’Estrades, de la recevoir. Celle-ci, avec son amant le marquis d’Argenson, ancien secrétaire d’état aux affaires étrangères, avait favorisé sa nièce dans son ascension dans le lit de Louis XV, et de chasser la marquise de Pompadour. La comtesse de Choiseul-Beaupré est réduite à venir faire sa semaine chez Mesdames Henriette et Adélaïde, comme dame pour accompagner, et à retourner chez son mari, en son hôtel Guénégaud des Brosses, dans le Marais, à Paris. Le comte de Choiseul-Beaupré a pris son parti, et dit qu’il est très content d’elle.

Le Dauphin et ses sœurs font le meilleur accueil au couple Choiseul-Beaupré, depuis qu’ils les savent brouillés avec la marquise de Pompadour.

En 1753

Louis XV achète l’hôtel d’Évreux (aujourd’hui, Palais présidentiel de l’Élysée) et l’offre à madame de Pompadour pour en faire sa résidence parisienne.

L'hôtel d'Évreux
Le palais de l’Elysée, côté jardin L’Hôtel d’Evreux En 1753, Louis XV achète l’hôtel d’Evreux pour madame de Pompadour. Celle-ci s’empresse de le faire remanier par son architecte favori, Jean Cailleteau. Passionnée par les Arts, madame de Pompadour le fait redécorer par les plus grands artistes tels les peintres Van Loo et Boucher. Les boiseries dorées qui habillent les murs sont l’œuvre du sculpteur ornemaniste Jacques Verberckt; elles sont caractéristiques du « style Pompadour».

Le 25 juin 1754

Sa fille Alexandrine meurt à l’âge de neuf ans, d’une foudroyante crise d’appendicite et probablement d’une péritonite aiguë au couvent des Dames de l’Assomption, rue Saint-Honoré à Paris, où elle recevait son éducation. Madame de Pompadour, retenue à Versailles, n’est pas présente. Lorsque la nouvelle lui parvient, Louis XV dépêche en urgence deux de ses médecins personnels au chevet de l’enfant, mais ils arrivent trop tard. La jeune Alexandrine, âgée de neuf ans, a déjà succombé.

La disparition de sa fille finit d’anéantir la marquise. Ses somatisations s’accentuent : pertes de mémoire, maux de tête, sensations d’étouffement, palpitations, crises d’asthme, difficulté à se mouvoir, maux de gorge doublés de grandes fièvres et insomnies constituent désormais son quotidien. Absolument désespérée, elle prétend attendre la vieillesse et la mort entourée d’animaux de compagnie, qui doivent l’aider à surmonter son manque affectif et l’accompagner jusqu’au bout de sa phase mélancolique.

La sultane buvant du café, (vers 1754) par Carle Van Loo ; Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage

Susceptible, orgueilleux, ombrageux, sans cesse occupé de ses origines roturières qu’il craint de se voir reprocher, Abel-François Poisson est un administrateur intelligent et actif, pénétré de l’importance de sa mission. Ayant hérité de son père, François Poisson, le château de Marigny-en-Orxois, près de Château-Thierry, il est créé marquis de Marigny.

Abel-François Poisson, marquis de Marigny
Le marquis de Marigny et sa jeune épouse, Julie Filleul, en 1769, par Louis-Michel Van Loo
Louis-Auguste par Frédou

Le 23 août 1754

Naissance de Louis-Auguste, duc de Berry,  futur Louis XVI.

L’oratoire de madame de Pompadour
( Texte et illustrations de Christophe Duarte- Versailles passion )

La marquise fait la demande au Roi d’un oratoire qui lui permette de prier sans être vue. Au mois d’octobre 1754, les travaux débutent dans un petit local donnant sur le palier d’un entresol à l’angle nord-est de la cour basse de la chapelle. Cette petite pièce est éclairée par une fenêtre sur cette cour et donne sur le bas coté de la chapelle par une ouverture percée dans un vitrail existant au dessus d’un confessionnal qui a disparu à la Révolution. Cette ouverture permet à la marquise de voir la chapelle et de suivre les offices sans être aperçue.

L'oratoire de madame de Pompadour
Accès à l'oratoire de madame de Pompadour

Cet oratoire est meublé par le Garde-Meuble de la Couronne : il y a des rideaux de mousseline, du velours d’Utrecht, une genouillère de velours, un tapis d’ours doublé de toile, un poêle pour chauffer la pièce, des stores de taffetas et un prie-Dieu de velours ciselé cramoisi. Ses murs sont alors simplement peints.

Micheline Presle incarne madame de Pompadour dans Si Versailles m'était conté (1954) de Sacha Guitry
Madame de Pompadour en belle jardinière (vers 1755) par Charles André Van Loo

Madame de Ppmpadour appuie la carrière du cardinal de Bernis, du duc de Choiseul et soutient le renversement des alliances de la Prusse vers l’Autriche qui se concrétise par la guerre de Sept Ans et la perte de la Nouvelle-France. La légende veut que la marquise, pour consoler le Roi très affecté par la déroute de Rossbach, l’aurait exhorté à ne pas s’affliger outre mesure, concluant par ces mots :

«Il ne faut point s’affliger : vous tomberiez malade. Après nous, le déluge !».

Le 17 mars 1755

Madame de Pompadour écrit à Choiseul la présente lettre :

« Je ne puis m’empecher de vous faire part de la très grande passion qui vient de me prendre pour S.S. [Sa Sainteté] Elle a ecrit au roy une lettre digne du prince de l’Eglise, du chef de la religion, d’un bon français et d’un père tendre, je l’aime à la folie. [il s’agit de la bulle Unigenitus et des billets de confession]. Je voudrais bien que nous fussions aussy bon sujets icy, dans tous les genres, il s’en faut malheureusement beaucoup, nous sommes aux fanatiques, pour toute nouriture, et de tous les cotés. Plaignés nous et loués le St Père. Je suis fort aise que sa lettre, et la réponse passe par vous, c’est un moyen de plus d’estre utile, vous scaves touttes les raisons qui me le fonts désirer, M. Vouillé sy prête de tres bonne grace ».

Le 23 août 1755

Naissance de Louis-Marie (1755-1813), futur comte de Narbonne, fils d’une dame d’honneur de la duchesse de Parme, Elisabeth de France (1727-1759), fille aînée du Roi…. et de Louis XV qui le reconnaît publiquement.

« Cela en est trop pour Jeanne-Antoinette qui, craignant de perdre sa place, décide dans un ultime délire de se réfugier du côté d’une intemporalité pathologique jusqu’à être prise d’un profond malaise qui la laisse inanimée. Inquiet, Louis XV, malgré l’interdiction faite à toute personne étrangère à la famille royale de mourir à Versailles, permet qu’elle demeure à la Cour.»

Alain Laudet

Madame de Pompadour (1756) par François Boucher
Evocation de madame de Pompadour (Clémence Troesch-Varlet) et Louis XV

Le samedi 7 février 1756

Le Roi annonce la nomination de madame de Pompadour, dame du palais de la Reine.

Bojana Novakovic est la marquise de Pompadour dans Casanova (2015) de Stu Zicherman
La marquise de Pompadour par Boucher (1756) Le portrait de 1756 n’a pas la présence de celui de La Tour et encore moins la ressemblance. La manière est toute autre les rubans, la faveur qui cache le cou, les bijoux, la débauche de fleurs, dans le fond les livres évocateurs, un fouillis de gravures près de son chien. Boucher lui allonge la jambe, mais la position de la tête est la même que celle choisie par La Tour (elle n’a pas oublié). Boucher comme La Tour lui donne une présence, ce qui n’est pas facile avec la robe qu’elle porte. La marquise écrit dans son carnet, le regard vague. L'horloge (bien en évidence) est vue dans le miroir et indique donc les heures à l'envers, un écoulement du temps va vers comme vers le passé... Il est huit heures moins vingt, (sans doute pas par hasard), elle va passer la soirée seule. A ses pieds deux roses nouées : sa fidélité à Louis XV. Émouvante constance, délicatesse de la peine.
Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour
Glenn Close est la marquise de Merteuil dans Les Liaisons Dangereuses (1989) de Stephen Frears Elle revêt une reconstitution de la robe de la marquise de Pompadour ...
Portrait de Mimi, le King Charles de madame de Pompadour par Christophe Huet
Inès, chien de madame de Pompadour (1762) par Jean-Jacques Bachelier
Madame de Pompadour (1927) interprétée par Dorothy Gish
Agnes Esterhazy est madame de Pompadour dans Marquis d’Eon, der Spion der Pompadour (1928) de Karl Grune

En 1756

Abel-François de Marigny est nommé greffier de l’ordre du Saint-Esprit, ce qui lui permet d’avoir un « cordon bleu » qu’il n’aurait pu avoir autrement. Parmi les nombreuses plaisanteries, on dit qu’il était « un bien petit Poisson pour être mis au bleu ».

Abel-François de Marigny par Alexander Roslin

Le 5 janvier 1757

Attentat de Damiens contre le Roi.

En ce 5 janvier 1757, un carrosse attend le Roi dans le passage couvert qui va de la cour royale au parterre nord. Vers six heures du soir, le souverain descend son escalier intérieur et traverse la salle des gardes du corps. Il est accompagné du Dauphin, du capitaine des Gardes du roi, des Grand et Petit écuyers et du colonel des Gardes suisses. Il fait nuit. Au sortir de la pièce, éclairée par des torches, le Roi est assailli par un individu qui le frappe violemment. Ayant conservé son chapeau, le forcené est maîtrisé, car il aurait dû se découvrir devant le Roi.

Portant la main au côté droit, le Roi pense qu’on lui a donné un coup de coude ou de poing, selon les sources. Mais sa main est ensanglantée. Le couteau a pénétré entre la quatrième et la cinquième côte, causant une blessure longue, mais superficielle. On transporte Louis XV dans sa chambre. Il saigne abondamment. Choqué, il finit par s’évanouir. Revenu à lui, il croit qu’il va mourir. Il réclame un prêtre, confie le royaume au Dauphin et demande pardon à la Reine des peines qu’il lui a infligées.

Depuis le début, le Roi sait qu’il s’agit d’un acte isolé. Quoique remis de sa blessure au bout de huit jours, il est toujours commotionné. L’attentat a laissé des séquelles. Devant l’émoi général, Louis XV entend changer d’attitude. Il veut regagner la confiance de ses sujets, renoncer à ses maîtresses et préparer le Dauphin à sa succession. Sages décisions… qui ne dureront qu’un temps : madame de Pompadour, un temps inquiétée, reprend bien vite sa place et régnera sur l’esprit du Roi jusqu’à sa mort…

Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour
Myriam Colombi est Madame de Pompadour dans L'Attentat de Damiens (1975) de Pierre Cavalissas

Du 12 février au 26 mars 1757

Procès de Robert-François Damiens(1715-1757). Il a quarante-deux ans et a servi plusieurs conseillers au Parlement, très critiques envers le Roi et la marquise de Pompadour. Ces critiques régulières sont montées à la tête de Damiens, au caractère influençable et exalté.

Le 28 mars 1757

Damiens est exécuté Place de Grève. Son supplice, à l’instar de celui de Ravaillac, compte de nombreuses tortures, avant qu’il soit écartelé et brûlé. Damiens s’est rendu coupable du crime suprême : celui de « parricide commis sur la personne du Roi » et donc de lèse-majesté.

Robert-François Damiens
Supplice de Damiens
Estampe gravée par madame de Pompadour d’après Guay, graveur du Roi
Katja Flint est madame de Pompadour dans Le jeune Casanova  de Giacomo Battiato (2002)
Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour

Le château de Champs-sur-Marne :
madame de Pompadour, une locataire éphémère (1757-1759)
( texte et illustrations de Christophe Duarte ; Versailles – passion )

Depuis 1752, la passion entre la marquise et Louis XV s’est muée en une solide amitié. Conquis par le raffinement du château de Bellevue, il fait part à son ex-maîtresse le désir de lui racheter. La marquise se trouve ainsi à chercher un nouveau château aux environs de Paris. Le choix de la marquise se porte sur le château de Champs-sur-Marne. Le bail de location est de neuf années et de 6000 livres par an.

Entée du château de Champs-sur-Marne

Bien que locataire, elle souhaite se sentir chez elle. Elle apporte notamment une touche personnelle à l’ameublement.

Salle-à-manger de madame de Pompadour. Les rafraîchissions et les tables de marbre datent de cette époque. Les murs sont alors peints en vert. Le gris Trianon date du XIXe siècle.
Raffraîchission de la salle-à-manger

Comme l’ameublement, les décors offrent peu d’opportunité aux goûts personnels de la marquise.

Ancienne salle-de-bain de la marquise. La baignoire était disposée face à la cheminée. Elle sera transformée en salle-à-manger pour enfants au XIXe siècle.
Marbres de la salle-de-bain de madame de Pompadour

Elle confie à Ange-Jacques Gabriel le décoration. Il conçoit un ensemble composé d’une antichambre, une garde-robe et une salle-de-bain.

Cabinet de toilette. Les peintures sur les lambris datent du XVIIIe siècle et sont de Christophe Huet.
Le cabinet de toilette

Pour la salle-de-bain, Gabriel dessine un décor de panneaux compartimentés destinés à être réalisés en stuc imitant le marbre. Cette technique, à base de chaux mêlée de poudre de marbre.

Salle-de-bain de la marquise de Pompadour

Fortement modifié au XIXe siècle, seules quelques rares pièces ont conservées ce décor du XVIIIe siècle.

Le salon chinois de Champs-sur-Marne. Les peintures sur les lambris datent du XVIIIe siècle et sont de Christophe Huet.
Peintures sur les lambris du salon chinois de Champs-sur-Marne
Façade côté jardin du château de Champs-sur-Marne
Portrait de madame de Pompadour (1758) par François Boucher

Dans Les Liaisons Dangereuses (1989) de Stephen Frears, la marquise de Merteuil qu’incarne Glenn Close revêt les atours de la marquise de Pompadour. Voyons donc comment on devient Marquise grâce au superbe travail du costumier du film, James Acheson :

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Madame de Pompadour (1759) par François Boucher, The Wallace Collection, Londres

Pendant son « règne » de vingt ans, elle maintient des rapports cordiaux avec la Reine :

«Puisqu’il en faut une ; J’aime autant celle-ci qu’une autre».

Marie Leszczyńska

Le 22 juin 1757

La favorite revend le château de Bellevue à Louis XV pour la somme de 325 000 livres. 

 Ce dernier fait remanier la distribution et le décor intérieur sous la direction d’Ange-Jacques Gabriel. Celui-ci construit en 1767 deux ailes en retour en rez-de-chaussée, absorbées en 1773 dans une extension qui les relie au bâtiment principal. Il y fait travailler Jacques Verberckt, Jules-Antoine Rousseau, Jacques Caffieri, Jean Restout, Chardin et Fragonard.

Charlotte de Turckheim est Marie Leszczyńska dans Jeanne Poisson, marquise de Pompadour (2006) de Robin Davis
Le château de Bellevue

En 1759

Plateau et service à thé de Madame de Pompadour
( texte et photographies de Christophe Duarte ; Versailles – passion )

Un «déjeuner» est un petit service à thé qui comprend des tasses et des soucoupes et parfois d’autres articles utilisés pour le petit déjeuner sur un plateau.

Plateau à thé de madame de Pompadour

Ici deux tasses et soucoupes «gobelets et soucoupes Hébert» et un sucrier «pot à sucre bouret» sont associés à un plateau «plateau de Courteille». Le modèle du plateau porte le nom du marquis de Courteille, représentant du Roi chargé de la Sèvres – Manufacture et Musée, à qui le premier exemplaire de ce plateau est présenté en décembre 1753.

Toutes les pièces sont décorées d’un bleu sous glaçure et d’un fond vert sur glaçure, une combinaison qui a été principalement utilisée entre 1758 et 1760 et techniquement très difficile à réaliser. Le bleu est recouvert d’un motif doré élaboré appelé «œil de perdrix». Encadrées de fleurs, les charmantes scènes figuratives montrent des enfants engagés dans des activités rustiques telles que la pêche, la collecte de fleurs et le barattage du beurre. Peint par André-Vincent Vielliard, ils sont basés sur des estampes d’après François Boucher dont les compositions furent fréquemment reprises à la Manufacture de Sèvres.

Plateau et service à thé de madame de Pompadour

Une théière et un pot à lait pourraient manquer à ce service.

Le service a été acheté par madame de Pompadour lors de la grande vente annuelle de décembre 1759.

Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour
Jeanne-Antoinette de Pompadour et Abel-François de Marigny

 

La marquise de Pompadour fait l’acquisition du château et du marquisat de Menars
( texte et illustration de Christophe Duarte – Versailles passion )

En 1760, la Marquise charge Ange-Jacques Gabriel de construire deux nouvelles ailes de part et d’autre des pavillons, pour remplacer celles éditées au XVIIe siècle.

De chaque côté de la cour d’honneur, il bâtit deux pavillons : le pavillon de l’Horloge à droite, qui renferme les cuisines, reliées au château par un souterrain, et le pavillon du Méridien à gauche, où se trouve la conciergerie.

Il dirige également d’importants travaux d’aménagement intérieur.

Le château de Ménars

En 1764, à la mort de la marquise, le domaine passe à son frère, Abel-François Poisson de Vandière, marquis de Marigny, directeur général des Bâtiments du Roi. De nouveaux travaux sont réalisés sous la direction de Jacques-Germain Soufflot (1713-1780), qui fait creuser une longue pièce d’eau en bas du parc, surnommée les bains Pompadour, ainsi qu’une grotte et une orangerie et une rotonde qui abrite une statue de déesse en marbre, en plus des dizaines de statues qui jalonnent les jardins. Côté cour, le corps de logis est doublé par un corps en rez-de-chaussée couvert «à l’italienne», tandis que les ailes édifiées par Gabriel sont dotées de combles dits «à la française».

Abel-François Poisson de Vandières, marquis de Marigny et de Menars (1727-1781) Directeur général des Bâtiments, Arts et Manufactures de France (1742-1775), frère de madame de Pompadour par Alexandre Roslin

Le Roi érige le marquisat de Ménars en duché, ce qui permet à madame de Pompadour d’accéder au titre de duchesse et donc de pouvoir s’asseoir auprès des membres de la famille royale.

En 1762

Sous l’impulsion de la marquise, Louis XV ordonne la construction d’un nouveau Trianon dans le parc de Versailles. Madame de Pompadour supervise elle-même les plans et la construction de ce qui allait devenir « le Petit Trianon » et devait être sa future résidence à la Cour.

Le Petit Trianon

Connaissant encore de grandes contrariétés causées, entre autres, par les revers et les défaites de l’armée, qui finit par perdre la « Guerre de Sept Ans» (1756-1763), madame de Pompadour reçoit cette capitulation comme un échec personnel.

Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour

En 1764

« Sa respiration lui interdisant la position couchée, Jeanne-Antoinette s’installe dans un ravissant fauteuil rappelant un trône, fait entériner son testament, présente ses adieux au Roi et meurt en compagnie du prêtre qui l’a confessée.»

Alain Laudet

Images de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux

Épuisée par vingt années de vie, de travail et d’intrigues à la cour, sa santé chancelle, madame de Pompadour contracte la tuberculose. À Versailles, elle se plaint constamment de l’air froid et humide de ses grands appartements, regrettant le petit appartement de l’attique nord, plus facile à chauffer, qu’elle a occupé les cinq premières années de son installation.

« Elle meurt avec un courage rare à tout sexe. Son mal est la poitrine qui se remplit d’eau ou de pus et le cœur engorgé ou dilaté. C’est une de ces fins les plus douloureuses et les plus cruelles qu’on puisse imaginer. Que vous dirais-je de son âme? Elle désirait, dès Choisy, de s’en aller mourir à Paris… Le roi ne l’a pas vue depuis hier : elle a été administrée cette nuit. Le curé de la Magdeleine de La-Ville-l’Evesque ne la quitte pas. Voilà des sujets d’espérer de la miséricorde pour elle.»

            Le Dauphin à Mgr Nicolay, évêque de Verdun

Madame de Pompadour à son métier à broder (vers 1763-64) par François-Hubert Drouais

Le 15 avril 1764

La marquise de Pompadour meurt d’une congestion pulmonaire, à l’âge de quarante-deux ans, à Versailles, ultime privilège, puisqu’il est interdit à un courtisan de mourir dans le lieu où résident le Roi et sa Cour.

« Nous avons perdu la pauvre marquise. Les miséricordes de Dieu sont infinies et il faut espérer qu’elle les a éprouvées, puisqu’Il lui a fait la grâce de communier et de recevoir l’extrême-onction. Il ne nous reste plus qu’à prier pour elle. Le roi est fort affligé… Il se contraint avec tout le monde et avec nous. Notre plus grand désir est qu’il puisse se plaire avec nous. Le moment exige un redoublement de prières. Adieu ; ne me répondez pas ; ne me parlez même pas de la marquise que par des voies sûres.»

Marie-Josèphe à Mgr Nicolay, évêque de Verdun

Madame de Pompadour est emmenée sur une civière à son Hôtel des Réservoirs, où elle est veillée deux jours et deux nuits dans sa chambre, transformée en chapelle ardente du voisinage, pour être deux jours plus tard enterré dans une petite église de la place Vendôme, aujourd’hui disparue, aux côtés d’Alexandrine.

L'Hôtel des Réservoirs à l'extrémité de l'Aile du Nord à Versailles Le bâtiment sera surélevé de deux étages aux débuts du XXe siècle
Madame de Pompadour par Drouais

En prévision de son repos éternel, madame de Pompadour avait acheté l’ex-cave sépulcrale de la famille de La Trémoille; ce qui fera dire aimablement à la princesse de Talmont que « les gros os des La Trémoille devaient être bien étonnés de sentir près d’eux les arêtes de Poisson »…

Le mardi 17 avril 1764 en fin d’après-midi

Le premier service funèbre de la marquise de Pompadour se déroule à l’église Notre-Dame de Versailles.

« L’an mil sept cent soixante et quatre le dix sept d’avril,très haute et très puissante dame Madame Jeanne Antoinette Poisson, duchesse marquise de Pompadour et de Menar, dame de St Oüen près Paris et autres lieux, l’une des dames du palais de la Reyne, décédée d’avant hier, âgée de quarante trois ans, a été transportée par nous soussigné curé aux Capucines de Paris lieu de sa sépulture, en présence de pierre Benoist prêtre et de Sébastien Lefebvre qui ont signé. Allart curé, Benoist prêtre, S. Lefebvre  »

On raconte que, considérant le mauvais temps alors que le convoi funéraire de Jeanne-Antoinette quittait Versailles pour Paris, Louis XV aurait fait cette remarque :

« La marquise n’aura pas beau temps pour son voyage »

et voyant le cortège s’éloigner sans avoir pu rendre officiellement hommage à c elle qui avait été si longtemps sa confidente :

« Voilà les seuls devoirs que j’aie pu lui rendre ! »

Dans ses dispositions testamentaires et faute de descendance ,   Madame de Pompadour offre une partie de ses résidences au Roi.

Images de Louis XV, le Soleil Noir (2009) de Thierry Binisti 

« On doit bien s’attendre que le tombeau de madame de Pompadour sera un objet d’hommages et de satires. L’épitaphe suivante remplit l’un et l’autre objet. On la suppose écrite au bas de son buste ; à côté sont l’Hymen et l’Amour en larmes, avec leurs flambeaux renversés.

 Ci-gît Poisson de Pompadour,
Qui charmait la ville et la cour :
Femme infidèle, et maîtresse accomplie.
L’Hymen et l’Amour n’ont pas tort,
Le premier de pleurer sa vie,
Le second de pleurer sa mort.
   »

Mémoires secrets

Sources :

  • ANTOINE, Michel, Louis XV, Fayard, Paris, 1989, 1 058 p.
  • BERTIERE, Simone, Les Reines de France au temps des Bourbons, tome 3 : La Reine et la favorite, éditions de Fallois, Paris, 2000, 559 p. + 32 p. de planches illustrées
  • CORTEQUISSE, Bruno, Mesdames de France , Perrin, Paris, 1989, 315 p.
  • DUARTE, Christophe, Versailles passion, groupe FB https://www.facebook.com/groups/345409295656055
  • GROUCHY, Emmanuel-Henri, vicomte de, Les châteaux de Meudon et le château de Bellevue : Album de quarante-cinq photographies, Meudon, 1865, 32 p. et 45 pl. de photographies
  • HOURS Bernard, Louis XV et sa cour, (2002) Presses Universitaires de France
  • LAUDET, Alain, «Jeanne-Antoinette Poisson, une hystérique nommée Marquise de Pompadour», Signes et Sens, le portait du bien-être, https://www.signesetsens.com/psychobiographie-marquise-de-pompadour-jeanne-antoinette-poisson-hysterique.html
  • LEVER, Evelyne, Madame de Pompadour, Perrin, Paris, 2006, 407 p.
  • LEVRON, Jacques, Louis XV, Perrin, Paris, 1977, 480 p.
  • LEVRON, Jacques, Trois Sœurs pour un Roi ou la Cour de Versailles au début du règne de Louis XV, Perrin, Paris, 1982, 282 p.
  • LEVRON, Jacques, Madame de Pompadour, Perrin, Paris, 1985, 353 p.
  • LEVRON, Jacques, Madame Louis XV ,Marie Leszczynska, Perrin, Paris, 1987, 264 p.
  • NICOLLE, Jean, Madame de Pompadour et la société de son temps, Albatros, Aix-en-Provence, 1980, 367 p.
  • NOLHAC, Pierre, Louis XV et Madame de Pompadour, Flammarion, Paris, 1903
  • NOLHAC, Pierre, Madame de Pompadour et la politique,  coll. « Versailles et la cour de France », L. Conard, Paris, 1930, 341 p.
  • PETITFILS, Jean-Christian, Louis XV, Perrin, Paris, 900 p.
  • SALMON, Xavier, (sous la direction de), Madame de Pompadour et les arts, catalogue d’exposition, Réunion des Musées Nationaux, Paris, 2002, 543 p.
  • SEGUR, Pierre de, Le royaume de la rue Saint-Honoré : Madame Geoffrin et sa fille, Calmann Lévy, Paris, 1897, 503 p.
  • TINAYRE, Marcelle, La vie amoureuse de madame de Pompadour, Flammarion, Paris, 1908
  • Pleasure for treasure, Marie-Antoinette et plus, Vive la Reine, https://vivelareine.tumblr.com/

Plan actuel de l'appartement de madame de Pompadour
Première antichambre (1)

Les quatre pièces principales donnent directement sur le parterre du Nord.
L’appartement a d’abord été habité, en 1743 et 1744, par la duchesse de Châteauroux, Marie-Anne de Mailly-Nesle, ainsi que par sa sœur, la duchesse de Lauraguais.

Madame de Pompadour va l’occuper de 1745 à 1750. A cette date, elle cesse peu à peu d’être sa maîtresse, tout en restant son amie, et quitte donc son appartement dédié aux amours pour s’installer au rez-de-chaussée du château, réservé normalement aux membres de la famille royale ou princes du sang.

Deuxième antichambre (2)

On entre dans l’appartement par une garde-robe depuis laquelle on peut accéder à une chambre entresolée où dort madame du Hausset, la femme de chambre de la marquise.

Le grand cabinet (3)

On passe ensuite dans le grand cabinet qui est jusqu’en 1745 la chambre de madame de Pompadour. Ce n’est que vers 1747-1748 qu’il devient un grand cabinet. Ce dernier donne accès au petit cabinet (au-dessus du salon d’Apollon), mais mène également à l’antichambre. L’antichambre et la chambre qui suit ne sont créées qu’en 1748, à l’emplacement d’une unique grande pièce qui était probablement le grand cabinet de madame de Châteauroux.

Le boudoir de Madame de Pompadour…
Dans l’intimité de la Marquise
( texte et photographies de Christophe Duarte ; Versailles – passion )

On accède à cette pièce après avoir traversé tout l’appartement de la marquise, situé au nord, au-dessus du grand éppartement du Roi. Cette pièce, d’une superficie de 13m², aux lambris droit à grands panneaux, accompagnent une petite cheminée à tablette droite, simple modénature, en marbre de Campan. Elle fut installée en mars 1743 lorsque madame de Châteauroux, maitresse de Louis XV, occupait cet appartement.

Petit cabinet (4)

Lors de la restauration et la réouverture de cet appartement en 2002, y ont trouvé place trois fauteuils en cabriolet, dont une paire (l’un estampillé Tilliard) a été rechampie en gris vert pour s’harmoniser aux couleurs dominantes du troisième, probablement méridional, relevé de couleurs naturelles et conçu pour être couvert à lacet.

 

Sur la cheminée, on peut voir une pendule à l’éléphant au mouvement de Jean-Baptiste Baillon, dont le cadran est signé et daté au revers par l’émailleur Martinière en 1742.

 

Un rouet, dont les bronzes sont marqués au C couronné, a pu trouver place sur une petite table plaquée de bois de violette également acquise par l’État en 1992 : elle avait été livrée par Antoine Gaudreau pour l’Appartement de Mesdames Adélaïde et Henriette en 1746.

 

Le meuble le plus Pompadour du cabinet intérieur reste assurément le secrétaire en pente estampillé de Carel et qui avait été livré par le Garde-Meuble de la Couronne en aout 1748 pour la chambre à coucher de la marquise au château de La Muette.

Le boudoir de madame de Pompadour

Des deux tableaux que l’on peut voir dans cette pièce, l’un est le portrait du frère de la marquise, le jeune Abel François Poisson de Vandière, futur marquis de Marigny peint par Jean-François De Troy en 1750. L’autre est une allégorie représentant Diane et Callisto peinte par Noël Halle en 1754 pour les appartements de Louis XV et de la favorite au Grand Trianon.

Abel François Poisson de Vandière, futur marquis de Marigny par Jean-François De Troy

Le secrétaire en pente de Madame de Pompadour, de Jacques-Philippe Carel, 1748

Ce secrétaire est livré pour la chambre de madame de Pompadour au château de La Muette en 1748. Il a la caisse légèrement galbée en élévation sur les quatre faces et ouvre à deux tiroirs en façade. La ceinture festonnée offre deux lobes latéraux assurant la liaison avec les pieds cambrés. Il est composé d’une tablette basse, une tablette haute, deux corps latéraux de deux tiroirs et le coffre central.

Le secrétaire en pente de madame de Pompadour

Le tiroir inférieur droit, contenant l’écritoire, doit être retiré pour actionner une languette qui permet de débloquer la trappe du casier secret. A l’intérieur, les façades des tiroirs offrent des guirlandes de feuilles d’amarante sur fond de bois satiné. Livré en août 1748 au château de La Muette, il est envoyé en 1786 au château de Saint-Cloud. Acheté en vente publique le 26 juin 1992, lot 167,il est aujourd’hui placé dans le boudoir de l’appartement de madame de Pompadour.

Le Boudoir de madame de Pompadour

La chambre à coucher a été installée en 1748 par Gabriel. Le lit est placé dans une alcôve, entourée de deux petits cabinets permettant un accès au lit par derrière.

La chambre (5)

La chambre de madame de Pompadour possède un décor lambrissé comportant quatre grands panneaux et onze parcloses, dont six importantes flanquant les grands panneaux et les glaces. Un balcon disposé au-dessus de l’entablement de l’un des avant-corps de la façade permet d’admirer le jardin. La cheminée en Campan mélangé à piédroit cannelés et à console à arc chantourné et tablette droite constitue la plus belle cheminée livrée pour madame de Châteauroux. En vis-à-vis de la cheminée, sous un trumeau de glace, se trouve la commode en laque rouge.

La chambre de madame de Pompadour
La chambre de madame de Pompadour

Il y a également eu deux antichambres qui ont aujourd’hui disparu : l’une des deux constituait alors une salle-à-manger.

Garde-robe aux habits (9)
Couloir (6)
La chambre de Madame du Hausset (10)

L’appartement possède enfin un cabinet des bains et une chaise percée.

Ancien cabinet des bains (11)
Le cabinet de la chaise (7)
Pièce de service (8)

La chambre de madame du Hausset,
Les «nids à rats» du château de Versailles
(texte et illustrations de Christophe Duarte – Versailles passion )

En 1748, alors que madame de Pompadour est en pleine gloire, elle se fait réaménager son appartement à l’attique, au-dessus du grand appartement du Roi.

Situation de la chambre de madame du Hausset

Comme tous les grands personnages de la Cour, madame de Pompadour a à son service des domestiques et des femmes de chambre.

Escalier menant à la chambre de madame du Hausset

Seul vestige de ce dédale d’entresol dans le Versailles d’aujourd’hui, la chambre de madame du Hausset, célèbre femme de chambre de madame de Pompadour pour ses mémoires, présente ce qu’était ces petites pièces au XVIIIe siècle.

Paillasse de la domestique de madame du Hausset

Le mobilier est une reconstitution de ce qu’était cette pièce au siècle des lumières et la paillasse provient de Fontainebleau du règne de Napoléon III.

 Le 14 septembre 1745

La présentation officielle de la nouvelle favorite a lieu à Versailles. Cela nécessite une princesse de sang. Pour cette cérémonie très protocolaire, la princesse de Conti accepte d’être la marraine de Jeanne-Antoinette, en échange de l’extinction de ses dettes.

Jessica Atkins est Madame de Pompadour dans Doctor Who (2006)

« Madame de Pompadour fut donc présentée au roi sur les six heures. Il y avait un monde prodigieux dans l’antichambre et la chambre du roi, mais assez peu dans le cabinet. La conversation fut courte et l’embarras très grand de part et d’autre.»

          Le duc de Luynes

Louis XV par Maurice Quentin de La Tour

Le mercredi 15 septembre 1745

« Madame de Luynes, […] croyant que la présentation de Madame d’Étioles serait faite dimanche ou lundi dernier, fut obligée de rester à Versailles jusqu’à sept heures ; elle voulut se trouver chez la Reine dans le moment de la présentation.

Madame de Pompadour fut donc présentée au Roi sur les six heures. Il y avait un monde prodigieux dans l’antichambre et la chambre du Roi, mais assez peu dans le cabinet. La conversation fut fort courte et l’embarras très grand de part et d’autre. Madame la princesse de Conty avait avec elle sa dame d’honneur ; d’ailleurs il n’y avait avec elle que Madame de Lachau-Montauban et Madame d’Estrades. Il n’y avait pas moins de monde à la présentation chez la Reine ; et tout Paris était fort occupé de savoir ce que la Reine dirait à Madame de Pompadour.

On avait conclu qu’elle ne pourrait lui parler que de son habit, ce qui est un sujet de conversation fort ordinaire aux dames quand elles n’ont rien à dire. La Reine instruite que Paris avait déjà arrangé sa conversation, crut, par cette raison là même, devoir lui parler d’autre chose. Elle savait qu’elle connaissait beaucoup Madame de Saissac. La Reine lui dit qu’elle avait vu Madame de Saissac à Paris et qu’elle avait été fort aise de faire connaissance avec elle. Je ne sais si Madame de Pompadour entendit ce qu’elle lui disait, car la Reine parle assez bas ; mais elle profita de ce moment pour assurer la Reine de son respect et du désir qu’elle avait de lui plaire. La Reine parut assez contente du discours de Madame de Pompadour, et le public, attentif jusqu’aux moindres circonstances de cet entretien, a prétendu qu’il avait été fort long et qu’il avait été de douze phrases.»

Le duc de Luynes

Madame de Pompadour s’efforce d’être pour le Roi une amie et une thérapeute, une présence aimante, toujours enjouée (en apparence) et consolatrice qui lui offre le délassement, l’oubli de ses problèmes.

Hélène de Fougerolles avait déjà incarné Jeanne-Antoinette, dans Fanfan la Tulipe (2003) de par Gérard Krawczyk, Vincent Pérez y occupait le rôle titre avant d'être le Louis XV de la série dédiée à la Marquise...

Mais la marquise de Pompadour est détestée par le jeune Dauphin qui, avec ses sœurs, l’appelle par ironie et irrévérence Maman Putain.

Romane Portail est Jeanne-Antoinette de Pompadour dans Louis XV, le Soleil noir (2009) de Thierry Binisti

Le 25 décembre 1745

Madeleine Poisson (1705-1745), sa mère, âgée de quarante ans, atteinte d’un cancer depuis plusieurs années, s’éteint.

Le 2 mai 1746

Voltaire est élu à l’Académie française.

Le 21 mai 1746

Louis XV, espérant réconforter sa maîtresse, lui offre sa première résidence personnelle. Il achète pour la somme de 750,000 livres à Louis-Alexandre Verjus, marquis de Crécy, son château pour l’offrir à madame de Pompadour.

Madeleine Poisson
Le château de Crécy

Dès son installation à la Cour, Jeanne-Antoinette devient mécène des artistes, disposant à volonté de crédits illimités octroyés par le Roi, engloutissant des montants astronomiques et sa fortune personnelle dans l’achat d’œuvres d’art, de pièces uniques, réalisées sur commande par des Maîtres – Pigalle, Adam, Van Loo, Boucher, Verberckt… –, ces joyaux étant répartis dans des demeures acquises, transformées et revendues aussitôt !

Pleine de projets, elle agrandit considérablement le château et le décore magnifiquement, redessine les jardins et finit d’aménager la vallée de la Blaise. Elle fait creuser en face du château un long bassin nommé « Le Miroir ». Elle pourra ainsi accueillir dignement, dans sa première demeure, Louis XV qui y viendra vingt-trois fois de 1746 à 1755.

Les deux extrémités du domaine sont fermées par deux édifices : au nord, le petit château d’Aunay acheté par Louis XV en 1747, et au sud, par le moulin existant, complété d’une façade aveugle classique, nommé « La Bellassière », qui sert de buanderie et d’orangerie l’hiver. L’ancien potager dit d’ »en-haut », et le nouveau, créé au pied du château, dit d’ »en-bas », alimentent la seigneurie de Crécy et le village de Couvé.

L’alimentation en eau et sa distribution, tant du château que du village, est assurée par une machine hydraulique, très novatrice pour l’époque, réalisée par l’ingénieur Antoine Deparcieux en 1751, qui écrit dans ses mémoires :

« Mme la Marquise de Pompadour désirant avoir de l’eau à son château de Créci, beaucoup moins pour y faire des embellissemens que pour prévenir ou pour parer les accidens qui pouvoient arriver pendant les ſéjours que le Roi y fait, plusieurs perſonnes présentèrent des projets à cet effet, qui exigeant de trop grandes dépenses, ou ne pouvant pas fournir une quantité d’eau suffisante, furent rejetées. »

Grâce à ce dispositif, les bassins et citernes sont généreusement remplis.

Le château de Crécy
Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour, en diane chasseresse par Jean-Marc Nattier, 1746
Doris Kenyon est Jeanne-Antoinette dans Voltaire (1933) de John G. Adolfi

L’Ermitage de madame de Pompadour à Versailles

La Maison de l’Ermitage, située au cœur de la ville de Versailles, a été construite en 1746. Le Roi Louis XV demande à détacher six hectares du parc du château de Versailles pour y faire construire un pavillon de chasse qu’il offre à madame de Pompadour. Ravie de se retirer de la vie de la cour, elle le surnomme «son petit bijou » ou encore son « Ermitage ».

L’Orangerie de l’Ermitage à Versailles

Le 22 juillet 1746

La Dauphine, née infante, Marie-Thérèse de Bourbon (1726-1746) meurt, à Versailles. Son époux en éprouve un chagrin extrême.

L’influence politique de madame de Pompadour croît au point qu’elle favorise le mariage hautement diplomatique entre Marie-Josèphe de Saxe (1731-1767) et le Dauphin Louis-Ferdinand (1729-1765).

Le 9 février 1747

Le Dauphin Louis-Ferdinand de France épouse contre son gré à Versailles Marie-Josèphe de Saxe, qui lui est imposée par une femme qu’il déteste.

L'infante Marie-Thérèse de Bourbon (1726-1746)
Le Dauphin Louis-Ferdinand 
et  Marie-Josèphe de Saxe
Charlotte de Turckheim incarne Marie Leszczyńska dans Jeanne Poisson, Marquise de Pompadour (2006), de Robin Davis

 

Très proche de leur mère, la Reine Marie Leszczyńska (1703-1768), le Dauphin Louis-Ferdinand et ses sœurs souffrent avec elle des adultères du Roi, de la rigidité du protocole, de la bassesse des courtisans.

 

Quant à la nouvelle Dauphine, intelligente, elle a rapidement compris que son intérêt est de soutenir son époux dans sa lutte contre la favorite, à qui elle doit pourtant son mariage.

 

L’ascension sociale de la marquise de Pompadour lui vaut d’être critiquée par des pamphlets injurieux, appelés « poissonnades ».

Louis XV (1748) par Louis-Michel van Loo
Chambre de la marquise de Pompadour au rez-de-chaussé qui sera celle de Madame Adélaïde
Louis XV, pendant la campagne de Flandres, huile sur toile de Carle Van Loo, 1747

En 1748

Le Théâtre des Cabinets (1748 – 1749),
Quand l’Escalier des Ambassadeurs se donne en spectacle… ( Texte de Christophe Duarte – Versailles passion ; Source photos : «Architecture de théâtre à Versailles» )

L’escalier des Ambassadeurs, conçu en 1674, pour conduite au grand appartement de Louis XIV, on décide d’utiliser ce volume pour y établir un théâtre.

L'escalier des Ambassadeurs

Afin qu’il soit démontable, une utilise une construction légère faite de bois et garnie de toiles.

Maquette du théâtre des cabinets

Il se compose de quatre espaces : le vestibule pour l’accueil du Roi et du public, la salle avec l’amphithéâtre, la scène et les loges pour les acteurs. La salle, en forme de trapèze, est enveloppée d’une haute cloison structurée par seize pilastres ioniques à chapiteaux dorés et une balustrade surmontée de huit groupes d’enfants. Six larges panneaux tendus de damas bleu enrichi de grands cartels.

Sur le devant de la salle, s’étend l’amphithéâtre royal et les balcons, bordés d’un garde-corps. Par effet de contracte, les parquets sont revêtus d’une moquette à fleurs rouges.

A la fin de l’année 1749, la salle est augmentée d’un second niveau des balcons.

Au début de l’année 1750, le théâtre ayant déjà été démonté à deux reprises afin de restituer l’intégralité du Grand Escalier à l’occasion de cérémonies, on commence à craindre pour la préservation des peintures murales de Louis XIV.

La marquise de Pompadour dans une scène d'Acis et Galatée. Charles Nicolas Cochin (1749)

A l’automne 1750, le théâtre est définitivement supprimé.

En février 1748

La marquise acquiert le château de Celle, à quelques kilomètres de Versailles, pour la somme de 260 000 livres. Elle donne au lieu le nom de « petit château de La Celle-Saint-Cloud ». Les sommes payées pour l’embellissement du château, pendant les années de 1749 à 1751, s’élèvent à 68 114 livres.

Le « petit château de La Celle-Saint-Cloud »

À l’origine, se trouve une vieille ferme, les moines y ajoutent un bâtiment de plusieurs étages. La construction est vendue en 1616. Un corps de logis est construit pour former le milieu du château actuel. La maison passe de mains en mains jusqu’à ce que, sous Louis XIV, le duc de La Rochefoucauld la fasse achever. La marquise de Pompadour l’acquiert en 1748, l’appelle « le petit château », ajoute de nouveaux embellissements, et y accueille Louis XV.

Celle-Saint-Cloud
Dessin de François Guérin, où Jean-Antoinette pose avec sa fille

En 1749

Maurepas (1701-1781), secrétaire d’Etat à la Marine, est disgracié et exilé à quarante lieues (environ 160 km) de Paris pour avoir répété les libelles répandus contre la marquise de Pompadour.

La Reine et le Dauphin, appuyés par les milieux dévots, pressent le Roi de faire cesser cette relation adultérine notoire et finissent par le faire céder après de nombreuses années de résistance. Cependant, bien que la marquise de Pompadour cesse de partager l’intimité du roi, sa carrière connaît une nouvelle promotion : elle obtient le privilège royal de loger dans l’appartement du duc et de la duchesse de Penthièvre au rez-de-chaussée du corps central du château de Versailles alors que Mesdames les filles du Roi le convoitent.

En 1749, Alexandrine est mise au couvent des Dames de l’Assomption, rue Saint-Honoré à Paris, où sont élevées les filles de la plus haute noblesse. Elle montre des dispositions précoces et fait de bonnes études. Toujours ambitieuse, sa mère la fait régulièrement venir auprès d’elle pour la montrer à la Cour. 

Alexandrine Le Normant d'Étiolles jouant avec un Chardonneret, attribué à François Boucher

Le château de Bellevue
( texte et photographies de Christophe Duarte – Versailles-passion )

Madame de Pompadour revend le château à Louis XV le 22 juin 1757 pour la somme de 325 000 livres. Ce dernier fait remanier la distribution et le décor intérieur sous la direction d’Ange-Jacques Gabriel. Celui-ci construit en 1767 deux ailes en retour en rez-de-chaussée, absorbées en 1773 dans une extension qui les relie au bâtiment principal.

Le château de Bellevue

Au décès de Louis XV, en 1774, le château est attribué par Louis XVI et Marie-Antoinette aux filles du Roi défunt, et tantes du nouveau monarque, Mesdames Adélaïde, Sophie et Victoire. Bien que logeant principalement au Château de Versailles, eu égard à leur obligations à la Cour, Mesdames viennent à Bellevue se délasser des rigueurs de l’étiquette. Celles-ci font transformer le décor intérieur par Richard Mique et font agrandir les jardins vers le Sud.

Reconstitution 3D du château de Bellevue en 1757
Porte de Bellevue ( aujourd'hui au Louvre )
Porte feinte de Bellevue ( aujourd'hui au Louvre )
Quatre candélabres en bronze doré pour le grand salon de Bellevue
Fauteuil à la Reine provenant de Bellevue

Madame de Pompadour revend le château à Louis XV le 22 juin 1757 pour la somme de 325 000 livres. Ce dernier fait remanier la distribution et le décor intérieur sous la direction d’Ange-Jacques Gabriel. Celui-ci construit en 1767 deux ailes en retour en rez-de-chaussée, absorbées en 1773 dans une extension qui les relie au bâtiment principal.

Au décès de Louis XV, en 1774, le château est attribué par Louis XVI et Marie-Antoinette aux filles du Roi défunt, et tantes du nouveau monarque, Mesdames Adélaïde, Sophie et Victoire. Bien que logeant principalement au Château de Versailles, eu égard à leur obligations à la Cour, Mesdames viennent à Bellevue se délasser des rigueurs de l’étiquette. Celles-ci font transformer le décor intérieur par Richard Mique et font agrandir les jardins vers le Sud.

Le château sera vendu à Monsieur Testu-Brissy, qui le fera abattre.

Madame de Pompadour, la main sur le clavier du clavecin (1750 ?) par François Boucher
L'Ermitage de Fontainebleau Le domaine est construit à l’extrémité ouest du jardin du château de Fontainebleau de janvier à septembre 1749, à la demande de la marquise de Pompadour, sur ordre de Louis XV.

Les colombes de madame de Pompadour

« Pour la marquise de Pompadour, Louis XV fait construire en 1749 l’ermitage de Fontainebleau, appelé depuis hôtel de Pompadour. Quand la cour réside à Fontainebleau, le Roi s’échappe volontiers pour rendre visite à la marquise. Dans ce charmant petit domaine, la Pompadour élève des pigeons et poules, ce qui lui permet à l’occasion d’offrir à son royal amant des œufs à la coque tous frais !
Très attirée par les oiseaux, madame de Pompadour a obtenu d’élever des pigeons, ces volatiles étaient très prisés à Versailles. On les laissait souvent s’ébattre en liberté sous les combles. La marquise aime jouer avec, les caresser et leur parler pour se distraire, comme elle raconte dans ses lettres.
En 1751, François Boucher peint pour elle un tableau intitulé « La toilette de Vénus » empli de sensualité, conservé au MET de New York. La déesse dénudée, entourée d’angelots et alanguie sur des tissus de satin, tient une colombe à laquelle elle s’ apprête a attacher un ruban bleu. A ses pieds est représentée une autre colombe tout aussi blanche. Cette Vénus n’est autre que madame de Pompadour. Les oiseaux exotiques ont aussi les faveurs de la marquise.
Faisans dorés de Chine, passereaux d’Amérique, chardonnerets blancs et autres volatiles charment tellement madame de Pompadour.
(…)
La marquise possède aussi un perroquet dont les mélodies enchantent la Cour. Il connaît par cœur les couplets de « Que ne suis-je la fougère !« , sonnet écrit par le cardinal de Bernis.
Le musée d’Art de Sacramento en Californie conserve un tableau montrant Madame de Pompadour et Alexandrine, qui là encore joue avec une cage à oiseaux, une scène qui témoigne de l’intérêt que la marquise et sa fille vouaient à ces animaux.»

Les animaux choyés de l’histoire, Renée Grimaud

« La marquise n’était pas la seule à aimer les oiseaux. Madame du Barry, qui gagnera plus tard les faveurs de Louis XV, les appréciait beaucoup. Elle possédera une spectaculaire cage à oiseaux en bronze ciselé et en cuivre. Haute de près d’un mètre, ornée de fleurs de porcelaine, elle portait les armoiries créées tout spécialement quand Jeanne Bécu deviendra par la grâce du Roi, comtesse du Barry. La cage est conservée au château de Versailles dans les appartements de madame du Barry.»

           Les animaux choyés de l’histoire, Renée Grimaud

Cage à oiseaux, bibliothèque de madame du Barry au château de Versailles
La Toilette de Vénus par François Boucher

Entre décembre 1749 et septembre 1751

Grâce aux lettres de recommandation fournies par sa sœur, Abel-François Poisson séjourne ensuite en Italie pendant vingt-cinq mois, d’abord à l’Académie de France à Rome, au palais Mancini, via del Corso, avant de parfaire sa formation en faisant le voyage en Italie, avec le graveur Charles-Nicolas Cochin (1715-1790), l’architecte Jacques-Germain Soufflot (1713-1780) et le critique d’art l’abbé Leblanc (1707-1781). Ce voyage a d’importantes répercussions sur l’évolution des arts et du goût en France.

En 1750

Fondation de l’École militaire, institution d’enseignement supérieur militaire fondée par Louis XV. C’est également l’ensemble de bâtiments construits pour la recevoir à Paris. Construit au XVIIIe siècle par l’architecte du Roi Ange-Jacques Gabriel (1698-1782).

L'Ecole Militaire

En 1750

Le Pavillon Français
( texte et illustrations de Christophe Duarte ; Versailles – passion )

Le pavillon est dit «français» en raison de son implantation au centre du jardin à la française. Il est un modèle d’architecture rocaille.

Son plan est centré, en forme de croix de saint André. En fait, ce motif est rendu par le tracé d’un octogone flanqué de quatre cabinets rectangulaires hors d’œuvre, le tout étant inscrit dans une représentation circulaire marquée par les emmarchements extérieurs.

Plan du pavillon français

La corniche du salon central est supportée par huit colonnes corinthiennes. La frise, décorée d’animaux de basse-cour, rappelle la ménagerie voisine : on y trouve des poules, des coqs, des pigeons, des canards et même quelques cygnes, ainsi que des Amours, en dessus-de-porte, jouant avec des cages et des corbeilles, et représentant, en harmonie avec la décoration extérieure, les quatre éléments.

Cette ornementation est directement inspirée du goût du Roi et de madame de Pompadour pour les animaux domestiques et permet de donner l’impression que la nature fait irruption dans ce pavillon. Les lambris de menuiserie, exécutés par Jean-Antoine Guesnon et Christophe Clicot, sont sculptés par Jacques Verbeckt dans le style rocaille. Lors d’une restauration réalisée au XIXème siècle, de nombreuses dorures sont ajoutées au décor des boiseries remplaçant ainsi les couleurs champêtres assorties au mobilier, dans des tons de jaune, de vert et de bleu, réalisées par le peintre ordinaire du Roi, Médard Brancourt. Ce caractère luxueux est cependant contraire à l’esprit originel d’une atmosphère bucolique.

Deux immenses miroirs des cabinets opposés se font face et, avec les hautes portes et fenêtres, ajoutent légèreté et élégance.
Le sol est couvert de marbre dessinant des motifs divers grâce à différentes couleurs : bleu turquin et vert campan, rouge de Languedoc et griotte d’Italie, et blanc veiné. Sous l’Ancien Régime, il est recouvert en hiver d’un tapis de la Manufacture de la Savonnerie s’accordant parfaitement à la forme circulaire et réalisé par Jean-Baptiste Chevillion. Il est livré en 1751 mais disparaît à la Révolution.

Au plafond, une lanterne à huit pans et huit bobèches de cuivre doré est garnie de guirlandes de fleurs en porcelaine de Vincennes. Les quatre petites lanternes équivalentes mais à cinq pans et cinq bobèches sont aujourd’hui disparues. Les rideaux en gros de Tours vert céladon à galons dorés remplacent les originaux, en toile de coton chamarrée encadrée de toile peinte fond vert et bordée d’une tresse d’or. Le mobilier, dispersé à la Révolution et non retrouvé, est composé de dix-huit chaises en bois peint en jaune avec des moulures dorées et recouvertes de toile de perse vert et blanc bordée d’une tresse d’or.

Les quatre cabinets sont disposés sur un axe diagonal par rapport aux lignes de composition du jardin et aux perspectives du salon central vers les édifices qui entourent le pavillon.

Le boudoir, situé à gauche, face au château, possède un plafond et des lambris ornés d’arabesques. A l’origine pourvu d’un sol de marbre blanc et noir, il dispose désormais d’un parquet à panneaux restitué en 2008. Sous Louis XV se trouve alors une petite table en bois de palissandre, comportant une tablette à coulisse et un pupitre à crémaillère et utilisée par le Roi pour son herbier. Un canapé en ottomane jaune est recouvert d’un pékin blanc. A l’opposé se trouve une antichambre à boiseries simples mais agrémentée d’une cheminée en marbre du Languedoc.

Le troisième cabinet est un réchauffoir, petite cuisine où l’on tient les plats au chaud, accessible seulement par l’extérieur et muni d’un fourneau ainsi que d’une hotte adossée à la cheminée du salon central. Il est en pierre peinte et la dalle est en simple pierre. La dernière pièce est à l’origine partagée en deux : la partie donnant sur le salon dispose d’un lieu à l’anglaise, pourvu d’un équipement moderne à soupape et en bois de palissandre, dans un souci de confort et d’intimité. La seconde partie est réservée à la préparation du café auquel Louis XV tient un goût particulier. Aujourd’hui, la cloison a disparu et un escalier a été créé pour mener aux installations souterraines.

Le Pavillon Français

Après 1750

Cependant, après les merveilleuses années passées dans l’attique au dessus de chez le Roi, apparaît la pierre d’achoppement de leur relation affective : Jeanne- Antoinette, qui a connu une trêve provenant de son état amoureux, voit réapparaître sa frigidité. Cette résurgence névrotique la plonge dans une réelle inquiétude :

«Je suis troublée de la crainte de perdre le cœur du Roi en cessant de lui être agréable. Les hommes mettent, comme vous le pouvez savoir, beaucoup de prix à certaines choses et j’ai le malheur d’être de tempérament très froid…»

Cette reviviscence est provoquée, en fait, par l’instabilité amoureuse de Louis XV. Il apparaît au grand jour qu’il commence à se lasser de la favorite, attiré par de toutes jeunes demoiselles à qui il ne révèle que rarement sa véritable identité.
Si les relations entre le Roi et sa favorite prennent un tour platonique, voire simplement amical, Jeanne-Antoinette ne quitte pas la Cour pour autant et reste dans l’entourage immédiat de la famille royale, alignant sa conduite sur celle qu’avait eue en son temps la marquise de Maintenon (1635-1719). Madame de Pompadour excelle en effet à distraire Louis XV, lui fait découvrir les arts, organise des fêtes, des représentations théâtrales, entretient le goût du souverain pour les bâtiments et les jardins, multiplie ses résidences hors de Versailles. Ce qui explique qu’après avoir été pendant cinq ans sa maîtresse, elle reste la favorite en titre.

Jeanne-Antoinette de Pompadour ne contente plus la sensualité du Roi et elle craint d’être supplantée par une dame de la Cour. Ce rôle dont elle ne peut s’acquitter, Madame de Pompadour le délègue obscurément à des subordonnées. Des jeunes femmes ou jeunes filles, sont donc présentées au souverain et logées dans la maison du Parc-aux-cerfs, l’actuel quartier Saint-Louis, à Versailles

Estampe gravée par Madame de Pompadour d’après Guay, graveur du Roi
Buste de Madame de Pompadour (1751) par J-B Pigalle

Le Parc-aux-Cerfs

 «Le Roi se fait livrer des petites filles», notamment par madame de Pompadour, qui trouve ce moyen pour garder les faveurs du souverain. Il les installe dans le Parc-aux-Cerfs, un pavillon un peu éloigné du château de Versailles.

On désigne par le terme de « petite maîtresse » ses maîtresses qui ne sont pas présentées à la Cour et qui, contrairement aux maîtresses officielles, ne disposent pas d’un appartement au château. Généralement recrutées par les valets de chambre du Roi dans les milieux de la galanterie ou de la petite bourgeoisie parisienne, elles sont, quand leur liaison avec le souverain ne se limite pas à une nuit, logées dans des maisons acquises par des prête-noms pour le compte du Roi dans le quartier du Parc-aux-cerfs à Versailles.
Il s’agit de jeunes filles de petite noblesse, voire des ouvrières âgées d’une quinzaine d’années, dit-on aujourd’hui, qui y vivent et sont entretenues pour être à disposition du Roi. Aucun des enfants n’est reconnu, et les filles sont vite envoyées se marier en province.
Louis XV ne semble pas effarouché par la jeunesse de ses «maîtresses», comme Marie Louise O’Murphy (1737-1814), qui est sa maîtresse entre ses quatorze et ses dix-sept ans, de 1752 à 1755 : elle a un enfant de lui à seize ans : Adélaïde de Saint-André (1754-1774).

Le Parc-aux-cerfs dans les années 1780
Marie-Louise O'Murphy (1752) par François Boucher

Cela vaudra à madame de Pompadour cette épitaphe :

« Ci-gît qui fut vingt ans pucelle,
Quinze ans catin, et sept ans maquerelle. »

                                                                                                                      Les Mémoires secrets 

Si Jeanne-Antoinette de Pompadour donne l’impression de ne pas souffrir de ces trahisons, il n’empêche qu’elle se ronge intérieurement, malade de jalousie, désirant être et rester la seule et unique détentrice d’un certain pouvoir de séduction.

En juin 1750

Giacomo Casanova (1725-1798) arrive à Paris. Ce sont ses parents qui ont réussi à les intégrer dans le cercle très fermé des comédiens italiens alors en tournée à Paris.

Giacomo Casanova
Casanova sous les traits de Stefano Accorsi dans Le Jeune Casanova (2002) , téléfilm de Giacomo Battiato
Stefano Accorsi et Katja Flint (Madame de Pompadour)

En mai 1751

«Pourtant, en aucun cas, Madame de Pompadour ne perd de sa superbe, intervenant comme auparavant dans les affaires ministérielles, allouant privilèges et avancements selon son bon gré et continuant à conseiller le Roi sur l’oreiller de sa couche, tout en s’en défendant âprement, persuadant son amant que lui seul est maître à bord. Hors de sa présence, elle développe une attitude de plus en plus mégalomaniaque, complotant contre ses opposants qu’elle s’arrange pour faire ensuite renvoyer de la Cour et exiler. Les rendez-vous ministériels se déroulent dès lors dans la chambre de la marquise, pièce qu’elle ne quitte pratiquement plus, rejetant la moindre nourriture.
Puis, faisant suite aux problèmes financiers de l’État, Madame de Pompadour doit vendre presque l’ensemble de ses propriétés et bijoux afin de mener à terme son projet d’école militaire.»

Alain Laudet

Jeanne-Antoinette par Boucher

Quand Madame de Pompadour habitait le rez-de-chaussée du Corps Central
(1751 – 1764)
( texte et illustrations de Christophe Duarte ; Versailles-passion )

Cet appartement qu’elle occupera pendant quatorze ans est largement éclairé par neuf fenêtres sur le Parterre du Nord. Les travaux de réaménagement débutent en mai 1750. Les plans sont donnés par Jacques Ange Gabriel, la décoration est confiée au marbrier Trouard, au menuisier Guesnon et au sculpteur Verberckt. Les livraisons de mobilier et d’objets d’art par Lazare Duvaux s’échelonneront entre 1751 à 1758.

Plan de l'appartement du rez-de-chaussée de madame de Pompadour en 1750
Plan des entresols de l'appartement du rez-de-chaussée de madame de Pompadour en 1750
Plan de l'appartement de madame de Pompadour en 1751

Cet appartement sera occupé pendant quatorze ans par la marquise et est largement éclairé par neuf fenêtres sur le parterre du Nord.

 

En tournant à droite au pied de l’escalier dit «de Madame Adélaïde», on accède à une première antichambre. S’ensuit une belle enfilade de quatre pièces s’étendant sous les salons de Vénus, de Diane et de Mars, et comprenant une Seconde antichambre, un grand cabinet, une chambre et un cabinet intérieur. Au revers de cette dernière petite pièce se trouve un petit boudoir, tandis qu’un appartement des bains prend jour sur la Cour du Roi, juste derrière la chambre.

Comportant un entresol qui permet de loger le service, la première antichambre est chauffée par un poêle placé contre le mur est. La pièce est entresolée pour créer au dessus une chambre à alcôve, un cabinet de chaise et une chambre de domestique réservé à François Quesnay, médecin personnel de la marquise.

La seconde antichambre est intégralement boisée et comprend une cheminée sur le mur ouest en marbre du Languedoc. Longeant le revers des pièces de l’enfilade, un corridor de service est aménagé depuis la première antichambre. On apporte un peu clarté à l’entresol de ce couloir en perçant deux petites fenêtres donnant sur la seconde antichambre.

Le décor du grand cabinet est réalisé entre 1750 et 1751 par Verberckt.

Le lieu du pouvoir : l’appartement de madame de Pompadour
(texte et illustrations de Christophe Duarte – Versailles passion

En mai 1751, la faveur éclatante de la marquise de Pompadour se mesure à son installation dans l’appartement princier du rez-de-chaussée, sous les salons du grand appartement du Roi, occupé jusqu’alors par le duc de Penthièvre, fils illégitime de Louis XIV.

Cet appartement sera occupé pendant quatorze ans par la marquise et est largement éclairé par neuf fenêtres sur le parterre du Nord.

Etat actuel de la salle des Hoquetons. Cette salle était divisée en deux pour comporter la première antichambre et la salle-à-manger de la marquise de Pompadour

C’est madame de Pompadour qui donne au grand cabinet sa forme actuelle, et la cheminée de marbre sérancolin est posée pour elle.

Les riches boiseries qui l’ornaient ont entièrement disparu, mais les corniches faites pour Madame Adélaïde, qui récupérera ce cabinet, ont pu être rétablies.

Le grand cabinet
Pendule à orgues au concert de singes, Le thème exotique de la «singerie» a d'abord été élaboré pour les lambris de décors intérieurs. Les premiers orchestres de singes en porcelaine apparaissent peut-être en France à Mennecy après 1740, mais c'est en Allemagne qu'il connaissent leur plus brillant développement. 
Paire de grandes girandoles à trois branches de madame de Pompadour, fournis le 14 février 1752 par le marchand mercier Lazare Duvaux facturés 1 320 livres.

Au revers de cette dernière pièce se trouve un petit boudoir, tandis qu’un appartement des bains prend jour sur la cour du Roi, juste derrière la chambre. Le décor de la chambre est assez mal connu. L’alcôve est encadrée d’un cabinet de toilette dont les portes d’accès sont agrémentées d’une glace pour donner du jour.

La chambre de madame de Pompadour

Dernière pièce de l’enfilade, le cabinet Intérieur entresolé est chauffé par une cheminée en marbre. Au revers de ce cabinet, un arrière-cabinet est appelé boudoir. Sans lumière directe, il est chauffé par une petite cheminée.

Le cabinet intérieur
Actuel cabinet intérieur de Madame Adélaïde, ancien cabinet de madame de Pompadour

Le reste des cabinets et des pièces de service donnent sur la cour du Roi où l’on retrouve un appartement des bains de deux petites pièces exiguës et sombres. La salle-de-bain et la pièce des chaudières sont accompagnées d’un petit cabinet de chaise. L’entresol de ces trois pièces comprend un seul cabinet dont l’accès se fait par un petit escalier.

Console du grand cabinet de madame de Pompadour

Le 27 novembre 1751

Charles-François Le Normant de Tournehem (1684-1751), directeur général des bâtiments du Roi, académies et manufactures depuis, décède. Il est probablement le père biologique de Jeanne-Antoinette et Abel François.

Abel-François Poisson est alors rappelé d’Italie et prend ses fonctions de directeur général des Bâtiments du Roi. Il reste à ce poste jusqu’à sa démission en 1773, établissant un record de longévité dans ces fonctions au XVIIIe siècle. Il encourage la peinture d’histoire et, dans l’architecture, le mouvement de retour à l’Antiquité qui devait engendrer le néoclassicisme.

Le 7 février 1752

Un arrêté du Conseil du Roi Louis XV interdit l’impression et la diffusion des deux premiers volumes de l’Encyclopédie

Le 10 février 1752

Décès de Madame Henriette, la fille préférée du Roi, à l’âge de vingt-quatre ans. Le Roi est anéanti comme toute la famille royale. Le peuple maugrée que le décès de la jeune princesse est une punition divine.

Madame Henriette (1727-1752) par Jean-Marc Nattier
Image de Jeanne Poisson, marquise de Pompadour (2006) de Robin Davis

Dès le mois de mai 1752

Le Conseil du Roi reconnaît « l’utilité de l’Encyclopédie pour les Sciences et les Arts », madame de Pompadour et quelques ministres peuvent ainsi solliciter d’Alembert et Diderot de se redonner au travail de l’Encyclopédie.

Madame de Pompadour par Maurice-Quentin De La Tour La marquise ne porte pas de bijoux, sa coiffure est très simple mais la robe est magnifique. Tous les objets représentés ont une signification : les livres avec l’Encyclopédie (elle fréquente les philosophes et les nouveaux penseurs, Diderot est un critique dur, admirateur de La Tour), la référence au théâtre, aux sciences naturelles et politiques , la partition (elle chante), une guitare sur le canapé (elle joue de la musique), un recueil de gravures (elle grave), le carton à dessin etc… Pas d’allusion à l’architecture ou aux arts décoratifs à cause des critiques pour ses dépenses dans ces domaines.
Dessin préparatoire: La Tour a trouvé la bonne position de tête, il éclaire bien le menton qui mange la moitié du cou, remarquable intelligence du regard. Le traitement des disgrâces est spécialement intéressant : - pour les seins, la marquise utilise un truc de femme : un gros nœud ( le parfait contentement!) devant. - A la différence de presque tous ses portraits, La Tour ne lui laisse porter ni faveur, ni ruban de chapeau qui cache son cou. Il lui tourne la tête. Le menton occupe la moitié du cou, avec le grand trucage classique de La Tour : le reflet lumineux sous le menton. - La robe est une merveille et en même temps dissimule bien une cuisse lourde qui au contraire devient un vaste espace ou joue sensuellement la soie, le motif d'acanthe chamois qui passe en deux volutes sur le galbe de la cuisse, tout en l'affinant, comme une caresse, est superbissime. - à l'opposé les grâces sont mises en lumière : les mains superbes, les doigts déliés, les pieds, la peau.
Estampes gravées par madame de Pompadour d’après Guay, graveur du Roi

En août 1752

La marquise de Pompadour songe à marier sa fille Alexandrine dès qu’elle atteint l’âge de huit ans. Elle envisage tout d’abord un mariage avec le marquis du Luc (1741-1814) , fils naturel de Louis XV et de la comtesse de Vintimille (1712-1741), mais le Roi montre peu d’intérêt pour ce projet.

Elle songe alors à se rabattre sur le duc de Fronsac (1736-1791), fils du maréchal de Richelieu (1715-1788), mais ce dernier se récuse, excipant de la nécessité d’obtenir l’accord de la famille de Lorraine-Harcourt, à laquelle appartient son épouse et à travers elle du chef de la maison de Lorraine, à savoir l’Empereur François Ier du Saint-Empire (1708-1765).

Madame de Pompadour finit par obtenir du duc de Chaulnes (1714-1769) la promesse que son fils, le duc de Picquigny (1741-1792), épousera Alexandrine lorsqu’elle aura treize ans ; en échange, le duc de Chaulnes sera nommé gouverneur du duc de Bourgogne, fils aîné du Dauphin Louis-Ferdinand, et la duchesse deviendra gouvernante des enfants de France.

Jeanne Boitel est Madame de Pompadour dans Remontons les Champs-Élysées (1938) de Sacha Guitry

En janvier 1753

La marquise de Pompadour chasse de chez elle la comtesse de Choiseul-Beaupré, comme une petite p…, qui avait une mauvaise conduite et lorgnait le Roi. La comtesse de Choiseul-Beaupré était enceinte.

On lui a interdit de souper dans les cabinets ; on a défendu à sa tante, la comtesse d’Estrades, de la recevoir. Celle-ci, avec son amant le marquis d’Argenson, ancien secrétaire d’état aux affaires étrangères, avait favorisé sa nièce dans son ascension dans le lit de Louis XV, et de chasser la marquise de Pompadour. La comtesse de Choiseul-Beaupré est réduite à venir faire sa semaine chez Mesdames Henriette et Adélaïde, comme dame pour accompagner, et à retourner chez son mari, en son hôtel Guénégaud des Brosses, dans le Marais, à Paris. Le comte de Choiseul-Beaupré a pris son parti, et dit qu’il est très content d’elle.

Le Dauphin et ses sœurs font le meilleur accueil au couple Choiseul-Beaupré, depuis qu’ils les savent brouillés avec la marquise de Pompadour.

En 1753

Louis XV achète l’hôtel d’Évreux (aujourd’hui, Palais présidentiel de l’Élysée) et l’offre à madame de Pompadour pour en faire sa résidence parisienne.

L'hôtel d'Évreux
Le palais de l’Elysée, côté jardin L’Hôtel d’Evreux En 1753, Louis XV achète l’hôtel d’Evreux pour madame de Pompadour. Celle-ci s’empresse de le faire remanier par son architecte favori, Jean Cailleteau. Passionnée par les Arts, madame de Pompadour le fait redécorer par les plus grands artistes tels les peintres Van Loo et Boucher. Les boiseries dorées qui habillent les murs sont l’œuvre du sculpteur ornemaniste Jacques Verberckt; elles sont caractéristiques du « style Pompadour».

Le 25 juin 1754

Sa fille Alexandrine meurt à l’âge de neuf ans, d’une foudroyante crise d’appendicite et probablement d’une péritonite aiguë au couvent des Dames de l’Assomption, rue Saint-Honoré à Paris, où elle recevait son éducation. Madame de Pompadour, retenue à Versailles, n’est pas présente. Lorsque la nouvelle lui parvient, Louis XV dépêche en urgence deux de ses médecins personnels au chevet de l’enfant, mais ils arrivent trop tard. La jeune Alexandrine, âgée de neuf ans, a déjà succombé.

La disparition de sa fille finit d’anéantir la marquise. Ses somatisations s’accentuent : pertes de mémoire, maux de tête, sensations d’étouffement, palpitations, crises d’asthme, difficulté à se mouvoir, maux de gorge doublés de grandes fièvres et insomnies constituent désormais son quotidien. Absolument désespérée, elle prétend attendre la vieillesse et la mort entourée d’animaux de compagnie, qui doivent l’aider à surmonter son manque affectif et l’accompagner jusqu’au bout de sa phase mélancolique.

La sultane buvant du café, (vers 1754) par Carle Van Loo ; Saint-Pétersbourg, musée de l’Ermitage

Susceptible, orgueilleux, ombrageux, sans cesse occupé de ses origines roturières qu’il craint de se voir reprocher, Abel-François Poisson est un administrateur intelligent et actif, pénétré de l’importance de sa mission. Ayant hérité de son père, François Poisson, le château de Marigny-en-Orxois, près de Château-Thierry, il est créé marquis de Marigny.

Abel-François Poisson, marquis de Marigny
Le marquis de Marigny et sa jeune épouse, Julie Filleul, en 1769, par Louis-Michel Van Loo
Louis-Auguste par Frédou

Le 23 août 1754

Naissance de Louis-Auguste, duc de Berry,  futur Louis XVI.

L’oratoire de madame de Pompadour
( Texte et illustrations de Christophe Duarte- Versailles passion )

La marquise fait la demande au Roi d’un oratoire qui lui permette de prier sans être vue. Au mois d’octobre 1754, les travaux débutent dans un petit local donnant sur le palier d’un entresol à l’angle nord-est de la cour basse de la chapelle. Cette petite pièce est éclairée par une fenêtre sur cette cour et donne sur le bas coté de la chapelle par une ouverture percée dans un vitrail existant au dessus d’un confessionnal qui a disparu à la Révolution. Cette ouverture permet à la marquise de voir la chapelle et de suivre les offices sans être aperçue.

L'oratoire de madame de Pompadour
Accès à l'oratoire de madame de Pompadour

Cet oratoire est meublé par le Garde-Meuble de la Couronne : il y a des rideaux de mousseline, du velours d’Utrecht, une genouillère de velours, un tapis d’ours doublé de toile, un poêle pour chauffer la pièce, des stores de taffetas et un prie-Dieu de velours ciselé cramoisi. Ses murs sont alors simplement peints.

Micheline Presle incarne madame de Pompadour dans Si Versailles m'était conté (1954) de Sacha Guitry
Madame de Pompadour en belle jardinière (vers 1755) par Charles André Van Loo

Madame de Ppmpadour appuie la carrière du cardinal de Bernis, du duc de Choiseul et soutient le renversement des alliances de la Prusse vers l’Autriche qui se concrétise par la guerre de Sept Ans et la perte de la Nouvelle-France. La légende veut que la marquise, pour consoler le Roi très affecté par la déroute de Rossbach, l’aurait exhorté à ne pas s’affliger outre mesure, concluant par ces mots :

«Il ne faut point s’affliger : vous tomberiez malade. Après nous, le déluge !».

Le 17 mars 1755

Madame de Pompadour écrit à Choiseul la présente lettre :

« Je ne puis m’empecher de vous faire part de la très grande passion qui vient de me prendre pour S.S. [Sa Sainteté] Elle a ecrit au roy une lettre digne du prince de l’Eglise, du chef de la religion, d’un bon français et d’un père tendre, je l’aime à la folie. [il s’agit de la bulle Unigenitus et des billets de confession]. Je voudrais bien que nous fussions aussy bon sujets icy, dans tous les genres, il s’en faut malheureusement beaucoup, nous sommes aux fanatiques, pour toute nouriture, et de tous les cotés. Plaignés nous et loués le St Père. Je suis fort aise que sa lettre, et la réponse passe par vous, c’est un moyen de plus d’estre utile, vous scaves touttes les raisons qui me le fonts désirer, M. Vouillé sy prête de tres bonne grace ».

Le 23 août 1755

Naissance de Louis-Marie (1755-1813), futur comte de Narbonne, fils d’une dame d’honneur de la duchesse de Parme, Elisabeth de France (1727-1759), fille aînée du Roi…. et de Louis XV qui le reconnaît publiquement.

« Cela en est trop pour Jeanne-Antoinette qui, craignant de perdre sa place, décide dans un ultime délire de se réfugier du côté d’une intemporalité pathologique jusqu’à être prise d’un profond malaise qui la laisse inanimée. Inquiet, Louis XV, malgré l’interdiction faite à toute personne étrangère à la famille royale de mourir à Versailles, permet qu’elle demeure à la Cour.»

Alain Laudet

Madame de Pompadour (1756) par François Boucher
Evocation de madame de Pompadour (Clémence Troesch-Varlet) et Louis XV

Le samedi 7 février 1756

Le Roi annonce la nomination de madame de Pompadour, dame du palais de la Reine.

Bojana Novakovic est la marquise de Pompadour dans Casanova (2015) de Stu Zicherman
La marquise de Pompadour par Boucher (1756) Le portrait de 1756 n’a pas la présence de celui de La Tour et encore moins la ressemblance. La manière est toute autre les rubans, la faveur qui cache le cou, les bijoux, la débauche de fleurs, dans le fond les livres évocateurs, un fouillis de gravures près de son chien. Boucher lui allonge la jambe, mais la position de la tête est la même que celle choisie par La Tour (elle n’a pas oublié). Boucher comme La Tour lui donne une présence, ce qui n’est pas facile avec la robe qu’elle porte. La marquise écrit dans son carnet, le regard vague. L'horloge (bien en évidence) est vue dans le miroir et indique donc les heures à l'envers, un écoulement du temps va vers comme vers le passé... Il est huit heures moins vingt, (sans doute pas par hasard), elle va passer la soirée seule. A ses pieds deux roses nouées : sa fidélité à Louis XV. Émouvante constance, délicatesse de la peine.
Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour
Glenn Close est la marquise de Merteuil dans Les Liaisons Dangereuses (1989) de Stephen Frears Elle revêt une reconstitution de la robe de la marquise de Pompadour ...
Portrait de Mimi, le King Charles de madame de Pompadour par Christophe Huet
Inès, chien de madame de Pompadour (1762) par Jean-Jacques Bachelier
Madame de Pompadour (1927) interprétée par Dorothy Gish
Agnes Esterhazy est madame de Pompadour dans Marquis d’Eon, der Spion der Pompadour (1928) de Karl Grune

En 1756

Abel-François de Marigny est nommé greffier de l’ordre du Saint-Esprit, ce qui lui permet d’avoir un « cordon bleu » qu’il n’aurait pu avoir autrement. Parmi les nombreuses plaisanteries, on dit qu’il était « un bien petit Poisson pour être mis au bleu ».

Abel-François de Marigny par Alexander Roslin

Le 5 janvier 1757

Attentat de Damiens contre le Roi.

En ce 5 janvier 1757, un carrosse attend le Roi dans le passage couvert qui va de la cour royale au parterre nord. Vers six heures du soir, le souverain descend son escalier intérieur et traverse la salle des gardes du corps. Il est accompagné du Dauphin, du capitaine des Gardes du roi, des Grand et Petit écuyers et du colonel des Gardes suisses. Il fait nuit. Au sortir de la pièce, éclairée par des torches, le Roi est assailli par un individu qui le frappe violemment. Ayant conservé son chapeau, le forcené est maîtrisé, car il aurait dû se découvrir devant le Roi.

Portant la main au côté droit, le Roi pense qu’on lui a donné un coup de coude ou de poing, selon les sources. Mais sa main est ensanglantée. Le couteau a pénétré entre la quatrième et la cinquième côte, causant une blessure longue, mais superficielle. On transporte Louis XV dans sa chambre. Il saigne abondamment. Choqué, il finit par s’évanouir. Revenu à lui, il croit qu’il va mourir. Il réclame un prêtre, confie le royaume au Dauphin et demande pardon à la Reine des peines qu’il lui a infligées.

Depuis le début, le Roi sait qu’il s’agit d’un acte isolé. Quoique remis de sa blessure au bout de huit jours, il est toujours commotionné. L’attentat a laissé des séquelles. Devant l’émoi général, Louis XV entend changer d’attitude. Il veut regagner la confiance de ses sujets, renoncer à ses maîtresses et préparer le Dauphin à sa succession. Sages décisions… qui ne dureront qu’un temps : madame de Pompadour, un temps inquiétée, reprend bien vite sa place et régnera sur l’esprit du Roi jusqu’à sa mort…

Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour
Myriam Colombi est Madame de Pompadour dans L'Attentat de Damiens (1975) de Pierre Cavalissas

Du 12 février au 26 mars 1757

Procès de Robert-François Damiens(1715-1757). Il a quarante-deux ans et a servi plusieurs conseillers au Parlement, très critiques envers le Roi et la marquise de Pompadour. Ces critiques régulières sont montées à la tête de Damiens, au caractère influençable et exalté.

Le 28 mars 1757

Damiens est exécuté Place de Grève. Son supplice, à l’instar de celui de Ravaillac, compte de nombreuses tortures, avant qu’il soit écartelé et brûlé. Damiens s’est rendu coupable du crime suprême : celui de « parricide commis sur la personne du Roi » et donc de lèse-majesté.

Robert-François Damiens
Supplice de Damiens
Estampe gravée par madame de Pompadour d’après Guay, graveur du Roi
Katja Flint est madame de Pompadour dans Le jeune Casanova  de Giacomo Battiato (2002)
Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour

Le château de Champs-sur-Marne :
madame de Pompadour, une locataire éphémère (1757-1759)
( texte et illustrations de Christophe Duarte ; Versailles – passion )

Depuis 1752, la passion entre la marquise et Louis XV s’est muée en une solide amitié. Conquis par le raffinement du château de Bellevue, il fait part à son ex-maîtresse le désir de lui racheter. La marquise se trouve ainsi à chercher un nouveau château aux environs de Paris. Le choix de la marquise se porte sur le château de Champs-sur-Marne. Le bail de location est de neuf années et de 6000 livres par an.

Entée du château de Champs-sur-Marne

Bien que locataire, elle souhaite se sentir chez elle. Elle apporte notamment une touche personnelle à l’ameublement.

Salle-à-manger de madame de Pompadour. Les rafraîchissions et les tables de marbre datent de cette époque. Les murs sont alors peints en vert. Le gris Trianon date du XIXe siècle.
Raffraîchission de la salle-à-manger

Comme l’ameublement, les décors offrent peu d’opportunité aux goûts personnels de la marquise.

Ancienne salle-de-bain de la marquise. La baignoire était disposée face à la cheminée. Elle sera transformée en salle-à-manger pour enfants au XIXe siècle.
Marbres de la salle-de-bain de madame de Pompadour

Elle confie à Ange-Jacques Gabriel le décoration. Il conçoit un ensemble composé d’une antichambre, une garde-robe et une salle-de-bain.

Cabinet de toilette. Les peintures sur les lambris datent du XVIIIe siècle et sont de Christophe Huet.
Le cabinet de toilette

Pour la salle-de-bain, Gabriel dessine un décor de panneaux compartimentés destinés à être réalisés en stuc imitant le marbre. Cette technique, à base de chaux mêlée de poudre de marbre.

Salle-de-bain de la marquise de Pompadour

Fortement modifié au XIXe siècle, seules quelques rares pièces ont conservées ce décor du XVIIIe siècle.

Le salon chinois de Champs-sur-Marne. Les peintures sur les lambris datent du XVIIIe siècle et sont de Christophe Huet.
Peintures sur les lambris du salon chinois de Champs-sur-Marne
Façade côté jardin du château de Champs-sur-Marne
Portrait de madame de Pompadour (1758) par François Boucher

Dans Les Liaisons Dangereuses (1989) de Stephen Frears, la marquise de Merteuil qu’incarne Glenn Close revêt les atours de la marquise de Pompadour. Voyons donc comment on devient Marquise grâce au superbe travail du costumier du film, James Acheson :

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Madame de Pompadour (1759) par François Boucher, The Wallace Collection, Londres

Pendant son « règne » de vingt ans, elle maintient des rapports cordiaux avec la Reine :

«Puisqu’il en faut une ; J’aime autant celle-ci qu’une autre».

Marie Leszczyńska

Le 22 juin 1757

La favorite revend le château de Bellevue à Louis XV pour la somme de 325 000 livres. 

 Ce dernier fait remanier la distribution et le décor intérieur sous la direction d’Ange-Jacques Gabriel. Celui-ci construit en 1767 deux ailes en retour en rez-de-chaussée, absorbées en 1773 dans une extension qui les relie au bâtiment principal. Il y fait travailler Jacques Verberckt, Jules-Antoine Rousseau, Jacques Caffieri, Jean Restout, Chardin et Fragonard.

Charlotte de Turckheim est Marie Leszczyńska dans Jeanne Poisson, marquise de Pompadour (2006) de Robin Davis
Le château de Bellevue

En 1759

Plateau et service à thé de Madame de Pompadour
( texte et photographies de Christophe Duarte ; Versailles – passion )

Un «déjeuner» est un petit service à thé qui comprend des tasses et des soucoupes et parfois d’autres articles utilisés pour le petit déjeuner sur un plateau.

Plateau à thé de madame de Pompadour

Ici deux tasses et soucoupes «gobelets et soucoupes Hébert» et un sucrier «pot à sucre bouret» sont associés à un plateau «plateau de Courteille». Le modèle du plateau porte le nom du marquis de Courteille, représentant du Roi chargé de la Sèvres – Manufacture et Musée, à qui le premier exemplaire de ce plateau est présenté en décembre 1753.

Toutes les pièces sont décorées d’un bleu sous glaçure et d’un fond vert sur glaçure, une combinaison qui a été principalement utilisée entre 1758 et 1760 et techniquement très difficile à réaliser. Le bleu est recouvert d’un motif doré élaboré appelé «œil de perdrix». Encadrées de fleurs, les charmantes scènes figuratives montrent des enfants engagés dans des activités rustiques telles que la pêche, la collecte de fleurs et le barattage du beurre. Peint par André-Vincent Vielliard, ils sont basés sur des estampes d’après François Boucher dont les compositions furent fréquemment reprises à la Manufacture de Sèvres.

Plateau et service à thé de madame de Pompadour

Une théière et un pot à lait pourraient manquer à ce service.

Le service a été acheté par madame de Pompadour lors de la grande vente annuelle de décembre 1759.

Image de La Guerre des Trônes (2022) de Vanessa Pontet et Eric Le Roux : Laura Malvarosa est madame de Pompadour
Jeanne-Antoinette de Pompadour et Abel-François de Marigny

 

La marquise de Pompadour fait l’acquisition du château et du marquisat de Menars
( texte et illustration de Christophe Duarte – Versailles passion )



En 1760, la Marquise charge Ange-Jacques Gabriel de construire deux nouvelles ailes de part et d’autre des pavillons, pour remplacer celles éditées au XVIIe siècle.

Pour briser l’uniformité de la façade, Gabriel couvre ces deux ailes de toits plats à l’italienne.

De chaque côté de la cour d’honneur, il bâtit deux pavillons : le pavillon de l’Horloge à droite, qui renferme les cuisines, reliées au château par un souterrain, et le pavillon du Méridien à gauche, où se trouve la conciergerie.

Il dirige également d’importants travaux d’aménagement intérieur.

Le château de Ménars